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Le Monde libertaire # 1463 du 1er au 7 février 2007

Publie le vendredi 2 février 2007 par Open-Publishing

Le Monde libertaire # 1463 du 1er au 7 février 2007

« Ne faites jamais rien contre votre conscience, même si l’État vous le demande. »

Albert Einstein

Sommaire du Monde libertaire # 1463 du 1er au 7 février 2007 :

Les bons apôtres ! par Maurice Rajsfus, page 3

Devoir de mémoire, le détail de l’abbé Pierre, par P. Schindler, page 4

Coup de sang !, par É. Gava, page 5

L’autruche, fidèle à la trinité, par F. Ladrisse, page 5

Brèves de combat, page 6

La face cachée de la loi anti-tabac, par G. Molinier, page 7

Fouchtri fouchtra, par J.-P. Germain, page 8

La grippe aviaire et ses vrais dangers, par F. Roux, page 9

L’ Allemagne et le nazisme, par Olynx, page 11

Le G8, drôle de rencontre, par le Forum anarchiste allemand, page 14

Travail et alternatives, par Espé, page 15

L’Étrangère, par H. Hurst, page 17

La Vie des autres, par H. Hurst, page 18

« La peur de poche », par J.-M. Traimond, page 19

La presse anarchiste sur Internet, par V. Dubuc, page 20

Solidarité avec Rolland Veuillet, par P. Corcuff, page 21

Radio libertaire, page 22

Agenda, page 23

L’éditorial :

L’Abbé est mort, vive l’abbé peut-on entendre partout. Il ne manquait plus que ça, après les enfants de Don Quichotte, pour nous faire l’éloge de la charité dans tous les médias. Il faut aider les malheureux, disent-ils, leur donner des couvertures car ils ont froid, les pauvres, et de la soupe car ils ont faim. Après ça, tout le monde est rassuré, nous vivons dans une bien belle société qui prend soin de ses miséreux.

Et là où nous passons de la charité au miracle, c’est lorsque tout cela se fait sans que personne ne trouve à redire sur le fait que lesdits miséreux sont le produit de cette société. Que ceux qui font « oeuvre de charité » sont ceux qui ont les moyens de le faire, et il est bien facile de donner quelques miettes, pour la forme, lorsque, dans le fond, on possède tout le pain !

Ainsi il ne faudrait pas trouver à y redire, c’est mieux que rien… C’est vrai, c’est peut-être mieux que rien, mais c’est sûrement bien insuffisant.

Les magasins sont remplis de nourriture, les villes regorgent de logements spacieux où règne le luxe ; parfois ceux-ci restent inoccupés pendant de longs mois pour que ces charmants messieurs, qui nous aident par leurs dons, puissent quand même se remplir les poches.

Les politiciens de tout bord profitent de l’événement pour nous montrer qu’ils s’intéressent à nos problèmes, qu’ils peuvent les résoudre grâce à leur grand coeur. On revoit le fabuleux destin de m’sieu l’Abbé, aidant les plus pauvres, voyageant dans toute la France en hélicoptère, et nous n’osons imaginer le prix du voyage…

Il ne s’agit pas de se satisfaire de l’action de l’Abbé ou de râler parce qu’on aime bien ça, râler. Mais de trouver inacceptable que l’on puisse avoir faim, ou dormir dehors, en ces temps où on ne manque ni de nourriture ni de moyens pour construire des logements.

C’est de trouver inacceptable que ceux qui possèdent tout se permettent de nous donner des leçons sur notre refus de prendre les miettes qu’ils nous donnent en les remerciant et en la fermant. Tant que chacun de nous ne pourra subvenir à ses besoins, nous ne cesserons d’exiger le partage des richesses.

Nous avons besoin de nous loger, des logements sont libres. Nous avons faim, la nourriture abonde dans les magasins et nos exploiteurs se remplissent la panse à n’en plus pouvoir. Mais les pauvres se révoltent ; combien de squats, d’affaires de vols qui se retrouvent devant les tribunaux ? Nos âmes charitables veillent à ce que l’on respecte la propriété privée, il ne faudrait pas que le goût du travail nous passe et que nous décidions de vivre en s’affranchissant des rapports de domination.

Les bons apôtres !

À vomir !

Par Maurice Rajsfus

SI L’AUTEUR DE CES LIGNES n’avait pas reçu une bonne éducation à l’école de la République, il serait bien plus vulgaire et dirait : à dégueuler !

À deux reprises, en quelques jours, les hommes (et les femmes) qui nous gouvernent ont fait montre d’un cynisme moralisateur qui n’a d’égal que leur volonté de nous imposer un contrôle social de plus en plus pesant.

Le 18 janvier 2007, sans que cela corresponde vraiment à une quelconque date commémorative, Jacques Chirac se souvenait qu’aux temps de l’occupation nazie il s’était trouvé de nombreux « Justes » pour s’opposer à la répression conduite contre les Juifs dans la tourmente. Il convenait donc de les honorer. Bel effort de reconstruction d’une page de l’histoire peu glorieuse de ce pays.

Il s’agit d’ailleurs d’une fâcheuse habitude que de nous renvoyer à cette France profonde, toujours sur le chemin de la gloire et de l’héroïsme. C’est ainsi qu’après 1945, on a voulu convaincre des générations de collégiens et de lycéens que les Français avaient été globalement résistants, de 1940 à 1944. Ce qui n’était rien moins qu’une escroquerie historique. En 2007, le temps était venu d’expliquer à un pays ému que les Français avaient été majoritairement solidaires des Juifs pourchassés. Ce qui constitue un pieux mensonge.

En effet, durant les années noires de l’Occupation, il y a surtout eu des attentistes et des indifférents. Qu’importe ! Le 18 janvier 2007, au Panthéon, Jacques Chirac célébrait les « Justes » recensés ces dernières années. Lesquels se sont effectivement comportés courageusement, risquant leur vie... 2725 « Justes » pour une France alors peuplée de 40 millions d’habitants.

Il s’est donc trouvé 2725 Français pour sauver l’honneur des lâches qui résistaient en écoutant Radio-Londres et le chef d’une France libre – de Gaulle – qui ne trouvera jamais un mot pour dénoncer les rafles et la traque des Juifs étrangers. On ne songeait qu’à venger nos couleurs de la défaite déshonorante de juin 1940. Rien d’autre !

Le paradoxe, c’est que les hommes actuellement au pouvoir ne cessent de s’acharner, depuis de longues années, à expulser les étrangers sans papiers, tout en menaçant les « Justes » de 2007 qui se montreraient solidaires des nouveaux exclus, traités tels des criminels dans les centres de rétention administratifs. En attendant l’heure de l’expulsion.

Bien entendu, il ne peut être question de comparer les deux périodes. Pas d’amalgame, n’est-ce pas, car les étrangers expulsés – y compris les enfants scolarisés dans ce pays – ne prennent pas le train pour Auschwitz. C’est encore heureux ! Peu importe qu’ils soient menacés de la pire répression lors du retour à la case départ. Il n’en reste pas moins que ces pratiques d’exclusion perdurent alors que nous sommes censés vivre en démocratie.

Fin du premier acte.

Le 22 janvier 2007, nous apprenions le décès de l’abbé Pierre. Immédiatement, c’est un interminable concert de louanges pour célébrer celui qui avait passé son existence à se préoccuper des sans-logis. Pourtant, les mêmes qui admettaient tranquillement que des dizaines de milliers de SDF puissent grelotter dans la rue feignent de découvrir l’ampleur de la misère humaine. Ceux-là mêmes qui expliquaient, il y a quelques semaines, que le campement des Enfants de Don Quichotte, le long du canal Saint-Martin, à Paris, n’était que de la poudre aux yeux, entonnent aujourd’hui l’hymne de la solidarité et de la charité bien tempérée. Tout en oubliant les expulsions violentes des squatters par la police.

Le décès de l’abbé Pierre tombe à point nommé pour permettre au pouvoir de se donner cette touche sociale qui lui fait tant défaut.

On fait pleurer le bon peuple sans lui laisser le temps de réfléchir. Le vieillard de 94 ans, à qui l’on promettait tout sans jamais donner de suite, est devenu un héros national. Certains même proposent de lui donner une sépulture au Panthéon – on y a bien inscrit les noms des « Justes » le 18 janvier. Alors.

Les élections approchant, il ne faut pas être à court de démagogie. Qu’y a-t-il de plus affligeant que ces déclarations de Nicolas Sarkozy sur ce bon abbé qui vient de disparaître, alors qu’il envoie ses flics détruire les campements de Roms dans la banlieue parisienne ? Qu’y a-t-il de plus misérable que ces gesticulations de Jacques Chirac qui, dix ans après la campagne présidentielle de 1995, redécouvre la fracture sociale ? Le 14 janvier 2007, devant le congrès de l’UMP, Nicolas Sarkozy s’écriait, dans un grand élan :

« La France, c’est celle des travailleurs, celle deJaurès... »

À gerber !

Maurice Rajsfus

Et pour finir l’agenda du Monde libertaire :

Vendredi 2 février

Lyon 1er
Projection de Brazzil de Terry Gilliam, à 20h30, en ouverture d’une exposition artistique sur le sécuritaire, à la Plume noire, 19, rue Pierre-Blanc, organisée par les groupes lyonnais de la CGA.

Bordeaux
Projection du film de P. Carles et G. Minangoy Ni vieux ni traîtres en présence de Georges Minangoy, Jacques Garcin et Jean Halfen à 20h30, 5,50 euros, Cinéma Utopia, place Camille-Jullian.

Samedi 3 février

Paris 18e
Maurice Rajsfus nous parle de ses Mémoires, à 15h30, à la bibliothèque La Rue, 10, rue Robert-Planquette. Métro Blanche ou Abbesses.

Rouen
Rencontre avec Jacques Lesage de La Haye, Histoire de la psychiatrie et de l’antipsychiatrie, autour de son livre La mort de l’asile, à 15 heures, à la librairie l’Insoumise, 128, rue Saint-Hilaire.

Lyon 7e
Réunion d’information avec Hellyette Besse et projection de la vidéo Joëlle Aubron : mon parcours militant de l’autonomie à Action directe, à 15 heures, à La Gryffe, 5, rue Sébastien-Gryffe.

Bordeaux
Débat féministe organisé par le collectif Ovaires et contre tout : Peut-on abolir le genre ? Quelle place pour la lutte féministe aujourd’hui ? Et quel féminisme ? À 16 heures : Athénée libertaire, 7, rue du Muguet.

Périgueux (24)
À partir de 16 heures, sur les ondes de radio 103 nous recevons Jacques Garcin, résistant anarchiste sous l’occupation de Franco. Vous pouvez suivre cette émission sur : www.radioperigueux103.org + à partir de 20h30, aux Thétards 3, rue Sully, le Collectif libertaire Marius Jacob et le groupe Emma Goldman de la Fédération anarchiste organisent une projection du film de Pierre Carles Ni vieux ni traîtres avec la présence de J. Garcin.

Vendredi 9 février

Bordeaux
Concert organisé dans le cadre de la campagne nationale pour la libération des militants d’Action Directe avec : le Cri du peuple (Bx – chorale révolutionnaire), la K-bine + Pisko mc (Paris – rap conscient), Khalifrat (Bx – Hip hop), Cartouche (Paris – Punk, ex membres de Kochise, Cria Cuervos, Raymonde et les blancs becs), Dj Sublime, Intermèdes Slam, Jonathan II, à 21 heures 7 euros, 22, rue du Commerce.

Périgueux (24)
À partir de 20h30 projection du film Juppé forcément, aux Thétards, 3, rue Sully, organisé par le collectif libertaire M. Jacob.

Samedi 10 février

Dijon (21)
Venez découvrir l’affiche politique et la caricature de 1870 à 1914 avec Michel Dixmier qui présentera en vidéoprojection, avec un commentaire détaillé, un éventail d’affiches et de dessins caractéristiques de l’art social et révolutionnaire de la Belle Époque, à 18 heures, au local libertaire, 61, rue Jeannin.

Bordeaux
Débat avec Jacques Lesage de La Haye, autour du thème de la question de l’enfermement et de la déviance en société libertaire. Jacques Lesage de La Haye a été condamné à 20 ans de réclusion en 1958 suite à des braquages. C’est en prison qu’il décide de reprendre ses études. Psychologue, psychanalyste reichien, il est aussi militant à la Fédération anarchiste et il a milité contre toutes les formes d’enfermement (luttes anti-carcérales, antipsychiatrique, etc.). Il participe à l’émission contre la prison de Radio Libertaire, « Ras les murs », à 17 heures, à l’Athénée libertaire, 7, rue du Muguet.

Dimanche 11 février

Bordeaux
Projection de Lola, une femme allemande, de Fassbinder. 1957. La projection sera suivie d’un repas végétarien à prix libre, à 18 heures, à l’Athénée libertaire, 7, rue du Muguet.

Lundi 12 février

Bordeaux
Apéro-tapas et présentation puis débat autour du livre « Du développement à la Pierre Tertrais. Soirée organisée par le Cercle Jean-Barrué (FA, 33) dans le cadre de la tournée de février 2007 organisée par l’Union départementale de Dordogne de la Fédération anarchiste, à 19 heures, à l’Athénée libertaire, 7, rue du Muguet.

Mardi 13 février

Ivry-sur-Seine (94)
Le groupe libertaire d’Ivry (FA) vous invite à une réunion publique d’information et de solidarité avec la Commune d’Oaxaca et les révoltes sociales au Mexique. Avec la participation d’un camarade de retour du Mexique. À 20 heures au Forum Léo-Ferré, 11, rue Barbès. Métro : Porte-d’Ivry. Dès 19h30, accueil, bar et petite restauration.

Mercredi 14 février

Paris 11e
Débat autour de livre « Les Coulisses du commerce équitable », en présence de l’auteur Christian Jacquiau et de Michel Besson, fondateur de Andines et Minga. Projection du film 0,01 Visages du commerce équitable, réalisé par Sandra Blondel et Pascal Hennequin, à 19h45, au CICP, 21ter, rue Voltaire.

Le Monde libertaire

hebdomadaire de la Fédération anarchiste