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Le crime organisé israélien

Publie le lundi 8 mars 2004 par Open-Publishing

Bien. Imaginez un peu la scène : un groupe d’hommes
masqués, armés de mitraillettes, font irruption dans une
banque. Ils enferment les employés dans une pièce,
bouchent les objectifs des caméras de surveillance avec
des sacs poubelles. Et volent des millions de dollars, en
liquide. En s’en allant, une fois dans la rue, ils sulfatent tout
ce qui bouge de balles, blessant quarante-sept passants.
Cinq d’entre eux sont dans un état critique. Sans doute ne
pourront-ils plus jamais marcher de leur vie, si toutefois ils
sortent du coma. Sur le théâtre de leur crime, les gangsters
laissent un manifeste, " justifiant " leur fric-frac, alléguant
sans le moindre début de preuve, que cette banque aurait
géré des comptes contrôlés par leurs ennemis. Quelle
réaction peuvent avoir les gens, face à ce genre
d’accusation ? Vous ne voyez vraiment pas ?

Mais il y a mieux. Figurez-vous que ces dévaliseurs de
banque, qui tomberaient immédiatement sous le coup
d’une condamnation à mort fédérale, aux Etats-Unis, si
l’une de leurs victimes venait à décéder, sont venus nous
expliquer qu’ils avaient l’intention de donner leur butin à des
ouvres charitables.

Mais qui sont donc ces Robins des Bois des temps
modernes ? S’agit-il de kidnappeurs d’un genre nouveau,
exigeant que William Randolph Hearst nourrisse les
pauvres, en guise de rançon pour récupérer sa fille ? Ou
encore, de la belle gueule Floyd, qui aurait renoncé au butin
de son dernier casse, afin de donner à manger aux
paysans américains affamés par l’avancée du désert, à
l’époque de la Grande Dépression économique ?

Non. Vous n’y êtes pas. Il s’agit des héros de l’armée
israélienne, qui ont fait une incursion à Ramallah, au matin
du 25 février dernier, et qui, en recourant à l’expertise
d’experts en informatique bancaire qu’ils avaient kidnappés
la veille, ont volé 37 millions de NIS [Nouveaux Shekels
israéliens], soit environ 8 millions de dollars.

Shaul Mofaz, le ministre israélien de la Défense, nous
demande de ne pas nous en faire. Cet argent, " libéré " de
400 comptes bancaires particuliers, institutionnels et
familiaux, seront utilisés, nous dit-il, " à des fins
humanitaires au profit de la société palestinienne ", et
notamment " à améliorer l’infrastructure des checkpoints ".
[Non. Ne vous pincez pas : vous êtes éveillé ! NdT] Il
s’agissait donc moins, en l’occurrence, de Robin des Bois,
que du Shérif de Nottingham, qui exigeait des condamnés à
mort qu’ils paient la corde qui allait servir à les pendre.

Après des années de gouffre financier et fiscal, peut-être
les Israéliens ont-ils fini par trouver une manière de rendre
l’occupation. lucrative ?

Le même jour, d’autres éléments de l’ " armée la plus
morale du monde " ont ajouté deux nouveaux cadavres et
cinq nouveaux blessés aux 40 000 corps de Palestiniens
sont devenus les écrins de balles et d’éclats d’obus
israéliens. Cela s’est passé juste au bout de la rue où se
trouve la banque dévalisée, dans la localité de Biddu, au
cours d’une manifestation de paysans (non armés) contre
le vol en plein jour de leurs terres, pour construire le mur
israélien. Mofaz et ses communicateurs furent très prompts
à rappeler à la presse que des soldats se sont contentés (
 !) de tirer en l’air ( !) contre ces manifestants. On le voit,
donc : le mensonge vient s’ajouter au gangstérisme.

Peut-être, à l’instar de leurs territoires, les comptes en
banque des Palestiniens, eux aussi, sont-ils " disputés ",
aux yeux des Israéliens ?

Alors, oublions les accusations d’atteinte aux droits de
l’homme soulevées devant la Cour Internationale de Justice
de La Haye. Il serait finalement, peut-être plus indiqué de
traîner devant une cour criminelle ordinaire cet Etat
hors-la-loi, qui organise des raids criminels de droit
commun en se drapant dans son autorité morale. Au
moins, devant un tel tribunal, les intentions nobles, en
guise d’excuses pour l’assassinat et la dévastation,
constitueraient une défense au moins aussi irrecevable
que la libération nationale.

[* Les deux cinéastes Juliana Fredman et James Davis
réalisent actuellement un documentaire dans les Territoires
palestiniens occupés.]

on CounterPunch.org, 02.03.2004
www.counterpunch.org