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Le réveil de l’Afrique face aux puissances occidentales
Publie le mardi 6 mai 2008 par Open-Publishing2 commentaires
Je vous propose cet exposé introductif présenté lors d’un débat [1] organisé avec des camarades Africains vivant en Martinique. Nous souhaitons que vous nous fassiez par de vos remarques
En tout premier lieu, je voudrais préciser que parler du réveil de l’Afrique ne sous-entend absolument pas que le continent sortirait d’une quelconque léthargie. Le sens que nous donnons au mot « réveil », ici, c’est celui du « revival » anglo-saxon, autrement dit « renouvellement ». Car c’est bien à un renouvellement profond que nous assistons en ce qui concerne les rapports entre le continent africain et les puissances occidentales.
Tant sur le plan objectif que sur le plan subjectif, des modifications substantielles sont intervenues qui conduisent à l’amorce d’un renversement déterminant du rapport de ces forces en confrontations.
LES EFFETS DE LA GLOBALISATION NEOLIBERALE
Abordons pour commencer les bouleversements au plan objectif : Le phénomène des concentrations transnationales, le développement des délocalisations, les tribulations des capitaux spéculatifs ont modifié fortement le découpage qui prévalait en zones d’influences contrôlés par différentes puissances impérialistes. De nouveaux courants d’échange se sont établis ; Des pays du sud ont pu renforcer leur industrialisation et sont devenus des clients crédibles pour l’énergie et les matières premières. Les cartes se redistribuent : dragons du sud-est asiatique, NPI ou « pays émergents » comme on les désigne, exportent de plus en plus de produits finis ; mais, plus important, les échanges Sud- Sud deviennent une réalité significative.
L’ATOUT DES RELATIONS SUD – SUD
Parmi ces pays émergents, certains deviennent de véritables poids lourds et, sous l’impulsion de gouvernements nationalistes ou anti-impérialistes, se forge une convergence mettant à mal le pillage du tiers-monde par les puissances occidentales. Ainsi, le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud, trois pays qui jouent un rôle majeur au sein du groupe des pays émergents (le G20), ont soudé une alliance stratégique au sommet de Brasilia le 13 septembre 2006. A ce sommet, ils ont réaffirmé leur vision commune des grandes questions internationales. (Par exemple, la nécessité de réformer l’ONU et le FMI)
On connaît les incidences des accords bilatéraux signés entre la Chine et plusieurs pays Africains quant au coût des matières premières. Mais plus généralement, dessinées lors du Forum chine Afrique de 2006, les relations entre cette Chine qui compte 1,2 milliards d’habitants et qui est appelée à devenir la première puissance économique mondiale avec le continent Africain, vont incontestablement conforter le réveil de celui-ci. Quand on ajoute à cela la mise en chantier des partenariats entre l’Afrique et l’Inde, on comprend bien qu’une page des relations entre l’Afrique et les puissances occidentales est en train d’être tournée.
Rappelons que, lors du récent sommet des 8 et 9 avril 2008 à New Delhi, l’Inde s’est engagée à acheter les matières premières à des prix équitable et à investir pour le développement de ses partenaires africains.
LE CONTEXTE GLOBAL PERMET DES DYNAMIQUES INTERNES
Le contexte global dont nous avons parlé favorise des dynamiques de développement interne de certains pays sur le continent africain. Par exemple, les retombées financières liées à l’augmentation du prix des matières premières offrent aux gouvernements de ceux-ci de nouvelles latitudes. Rappelons que l’indice des cours des métaux du FMI a bondi à +180% depuis 2002. Evidemment, la question de la répartition des richesses et des choix de l’utilisation des revenus reste entière. Mais certains pays ont amorcé une réorientation de leur politique économique dans une direction autocentrée. Citons l’exemple de l’Angola qui a choisi de s’émanciper de la tutelle du FMI et de la Banque mondiale.
LES FACTEURS SUBJECTIFS ONT EVOLUE DE FACON SIGNIFICATIVE
Je vais aborder, maintenant, l’évolution des facteurs subjectifs. L’un des facteurs les plus déterminant, c’est l’impact du développement des technologies de la communication. Internet, téléphone portable et chaînes de télévision satellitaires ont permis une circulation de l’information dont on ne peut déjà mesurer toutes les conséquences. Mais, une chose est sure, c’est qu’un double phénomène, avec des conséquences contradictoires, modifie substantiellement la donne. La culture mondialisée occidentale fait des ravages (Je pense aux concours de sape, et à la mal nommée « télé réalité »). Mais, dans le même temps, les peuples africains, surtout dans les villes bien sûr, reçoivent les images de crise économique et sociale en occident, les images des mauvais traitement subis par les travailleurs immigrés, des informations sur le développement du racisme et de la xénophobie, entretenus par des gouvernements européens faisant d’eux les boucs émissaires de tous les maux.
Dans les opinions, le regard et les sentiments changent inévitablement. Pour illustrer la corrélation entre la circulation de l’information et les réactions dans la population, je vous rappelle cet incident lié à l’expulsion de ressortissants par la France. Les expulsés avaient été maltraités par des policiers dans l’avion qui les ramenaient dans leur pays. Informés par SMS des gens s’étaient regroupés à l’aéroport pour accueillir à leur manière les policiers en question. Il faut ajouter que le continent africain a un regard de mieux en mieux tourné sur lui-même grâce aux initiatives prises par ses artistes et par ses intellectuels. Le festival du cinéma du Burkina Faso (Fespaco) en est une illustration.
Au-delà de l’opinion publique, il faut noter que beaucoup de gouvernements africains pro occidentaux ont été contraints de changer leur fusil d’épaule. Parce qu’ils subissant la pression des luttes populaires, parce qu’ils ne pouvaient plus cacher leurs excès (circulation de l’information dont je parlais plus haut), ou parce qu’ils étaient de plus en plus inquiets du cynisme des parrains occidentaux qui n’hésitent pas à se débarrasser de leurs amis dictateurs quand ceux-ci deviennent trop gênants.
La conjonction des facteurs objectifs et subjectifs permet d’expliquer le réveil de l’Afrique face aux puissances occidentales.
COMMENT CELA SE TRADUIT-IL ?
En premier lieu, on constate la montée en puissance des luttes populaires.
Je cite, ici, un extrait d’un article paru dans la brochure « Manière de voir » N°84 édité par le Monde diplomatique sur « L’état des résistances dans le monde ».
« Les résistances africaines à l’application des politiques néo libérales sont passées sous silence dans les grands médias et par les campagnes internationales de charité qui leur préfèrent l’image misérabiliste d’une Afrique dépourvue de tout et dépendant de l’aide extérieure. Elles n’en existent pas moins et gagnent en vigueur, malgré les difficultés matérielles et politiques auxquelles elles se heurtent. Les luttes contre les licenciements, la précarisation du travail, la hausse des prix ont donné lieu à de vastes mobilisations populaires et à des grèves dans plusieurs pays, notamment au Niger, au Nigéria, au Sénégal et en Zambie. De même, le combat contre la privatisation des services publics comme l’eau et l’électricité s’est renforcé partout sur le continent, en particulier en Afrique du Sud, au Ghana, au Mali et au Sénégal. »
Evidemment, nous n’entendons pratiquement jamais parler de ces événements. Mais le « réveil » des luttes populaires est bien une réalité tangible sur le continent africain. Les mobilisations des ressortissants africains vivant en Europe, en liaison avec les organisations progressistes et humanitaires des pays concernés, éclairent de plus en plus l’opinion et le mythe de la générosité occidentale est mis à nu. (Lutte des sans papiers, lutte contre les APE, engagement pour le « commerce équitable », etc.). La pilule du paternalisme colonialiste ne passe plus. Les dignes réactions et le procès intenté contre Sarkozy à la suite du discours méprisable prononcé à Dakar par le président révisionniste illustre bien la direction prise.
On peut ajouter que, sur le plan militaire, les occidentaux sont confrontés à des situations qu’ils ne maîtrisent plus aussi facilement qu’auparavant. Les analystes n’hésitent plus à évoquer la conséquence des destructions d’oléoducs au Nigéria sur le prix du baril de pétrole.
DES MOUVEMENTS SOCIAUX QUI SE STRUCTURENT
Il est important de noter que les mouvements populaires se structurent au niveau continental. Le panafricanisme qui se cantonnait surtout dans les sphères intellectuelles prend de fait une autre envergure.
Les luttes contre les conséquences des plans d’ajustement structurels imposés par le FMI et la Banque mondiale ont donné de plus en plus lieu à des stratégies coordonnées. Sur ce terrain ont pu se développer les Forums sociaux.
Depuis le FORUM SOCIAL MONDIAL DE BAMAKO EN JANVIER 2006 et le FORUM SOCIAL DE NAIROBI EN 2007, des forums régionaux se sont multipliés sur le continent africain et ont concerné quinze pays. Mais l’on sait que les Forums Sociaux Mondiaux sont en partie influencés par l’idéologie social-démocrate occidentale (Ecartement des partis politiques et thèse de la « disparition des idéologies »). On note qu’en marge de ces différents forums, les organisations populaires organisent de plus en plus des sommets alternatifs se donnant des objectifs plus radicaux.
En Afrique, également, comme sur les autres continents, sont organisés des contre- sommets chaque fois que les puissances dominantes tiennent des rencontres internationales pour tenter de conforter leur hégémonie sur le monde. Par exemple, au MALI, depuis 6 ans, est organisé le « sommet des peuples » en même temps que se déroulent les réunions du G8.
Toute cette dynamique que nous venons de rappeler, impulse la convergence entre les différents segments du mouvement social (Ouvriers, paysans, femmes, jeunes, droits humains, religieux ONG). Voila qui favorise le dépassement des déchirures que les occidentaux s’efforcent de présenter exclusivement comme des conflits inter- ethniques.
AU PLAN ECONOMIQUE
L’impact désastreux des politiques néo libérales imposées par les occidentaux n’a pas concerné que les couches inférieures sur le continent africain. Les producteurs, les entrepreneurs locaux et plus largement les classes moyennes ont été frappés de plein fouet. Les gouvernements eux-mêmes se sont retrouvés dans une impasse à cause des politiques monétaires menées par les puissances occidentales. (Conséquences des dévaluations ou de la mise en circulation de l’Euro).
Les organisations régionales ont vu leur importance s’accroître. Pour information, nous en citons les principales :
– UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE OUEST AFRICAINE (UMEOA)
– COMMUNAUTE ECONOMIQUE DES ETATS D’AFRIQUE DE L’OUEST (CEDEAO)
– COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L’AFRIQUE CENTRALE (CEMAC)
– UNION DOUANIERE D’AFRIQUE AUSTRALE (SADU)
– COMMUNAUTE DE DEVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE AUSTRALE (SADC)
– MARCHE COMMUN DE L’AFRIQUE ORIENTALE ET AUSTRALE (COMESA)
– COMMUNAUTE EST AFRICAINE
Malgré toutes les limites qu’on peut leur supposer, on doit noter que ces organisations ont enclenché de réelles dynamiques d’intégration régionale.
Il faut aussi considérer la mobilisation amorcée par les socio- professionnels pour défendre leurs intérêts face aux politiques occidentales. On pense aux initiatives prises par les producteurs de coton. On peut évoquer aussi la campagne lancée par le « Réseau Africain du commerce » contre les APE, et le rôle joué par ce même réseau dans la résistance pays africains lors de la conférence ministérielle de l’ OMC à Cancùn en septembre 2003.
LE VIRAGE EN MATIERE DE DIPLOMATIE
Faisant suite à la décision des chefs d’état africains prise en 1990, un Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits a été institué lors du sommet du Caire en 1993. On a pu constater que depuis, la diplomatie africaine a pris un virage évident.
La tendance au décrochage par rapport aux pressions des puissances occidentales est réelle. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cela. D’abord, les éléments que nous évoquions plus haut :
Les opinions publiques n’acceptent plus l’interventionnisme et l’arrogance des puissances occidentales. Les forces vives intègrent de plus en plus l’idée que les réponses aux problèmes africains ne pourront être portées que par les peuples africains eux-mêmes. Et les compétences se mobilisent pour construire les alternatives. Ainsi, l’ « Association des Juristes Africains » et l’ « Académie de diplomatie africaine » jouent un rôle d’appui conséquent dans l’action des diplomates africains.
Mais, il faut aussi parler des nouvelles donnes dues aux changement de stratégie des puissances occidentales : A côté du désaveu croissant de leur politique par l’opinion, les difficultés budgétaires propres aux Etats occidentaux, les déconvenues sur le terrain (débâcles des Etats-Uniens en Somalie ou de la France au Rwanda), la priorité accordée par eux à d’autres fronts, les ont amenés à élaborer de nouvelles doctrines. Ils misent désormais sur une professionnalisation maximale de leurs forces armées et sur la capacité de réaction rapide et puissante pour perpétuer leur hégémonie. Dans ce cadre, ils accordent une importance essentielle au renseignement, à la désinformation de l’opinion et au contrôle des gouvernements nationaux au moyen du trucage de la démocratie.
Ce contexte a permis, contradictoirement, que les gouvernements africains disposent d’une marge de manœuvre plus large. Cela leur a permis d’intervenir plus librement dans la médiation des conflits. Il faut dire que ceux-ci se cantonnaient de moins en moins dans les limites des Etats et qu’ils débordaient sur les pays environnants. Pensons, par exemple, à la région des grands lacs (problème des réfugiés, bases arrière des rebelles, etc.)
Incontestablement, un autre état d’esprit prévaut. On peut citer des exemples significatifs :
– Le refus de la plupart des gouvernements africains de participer au lynchage du Président du Zimbabwé, Robert MUGABE, même quand ils ne partagent pas ses orientations,
– La relative cohésion dont les gouvernements ont fait preuve dans la bataille des APE, refusant le chantage des accords bilatéraux,
– Le procès, au Tchad, des pseudo -humanitaires de l’ « ARCHE DE ZOE »
que Sarkozy prétendait, dans un premier temps, venir récupérer superbement.
EN GUISE DE CONCLUSION
Beaucoup de commentateurs, plus ou moins bien intentionnés, se plaisent à répéter que « l’Afrique a été larguée », que « c’est le seul continent qui ne décolle pas ». Les préjugés racistes sont toujours sous-jacents quand on parle de l’Afrique. J’espère, avec ces éléments, avoir fait la démonstration que la réalité est autre et que, comme dans tout le reste du monde, les peuples de ce continent se mobilisent de plus en plus pour changer le monde. Là aussi, le rapport de force évolue en défaveur des puissances occidentales.
Bien sûr, il faut se garder de tout idéalisme et de tout angélisme. L’intervention française en Côte d’Ivoire et au Tchad, le rôle joué par la France dans l’élection du fils EYADEMA, les manœuvres de déstabilisation au Zimbabwe sont là pour nous rappeler au réalisme. Il s’agit donc pour nous de comprendre comment ce « réveil de l’Afrique » contribue à l’évolution du monde et comment nous pouvons nous le prendre en compte dans notre action pour amplifier le mouvement vers une transformation salutaire.
[1] RENCONTRE AUTOUR DU THEME :
« LE REVEIL DE L’AFRIQUE
FACE AUX PUISSANCES OCCIDENTALES »
SAMEDI 26 AVRIL 2008-04-24
Messages
1. LE REVEIL DE L’AFRIQUE, 6 mai 2008, 17:10
L’Afrique a tous les atouts pour relever tous les défits qui se présentent à elle, car elle est immensément riche de ses hommes, de ses richesses naturelles. En mettant l’accent sur l’éducation scolaire généralisée, qui est la base de l’émancipation, l’Afrique deviendra un partenaire incontournable des occidentaux.
L’Afrique en relevant la tête, malgré les coups bas, les tentatives de déstabilisation venant de l’Occident, nous montre à nous citoyens de France , qu’il est possible d’emprunter la même voie à notre petit niveau pour nous faire entendre de cette déplorable présidence et gouvernance qui sont en train de nous faire la peau comme qui rigole ! A l’instar de l’Afrique relevons la tête nous aussi par tous les moyens dont nous disposons.
2. Le réveil de l’Afrique face aux puissances occidentales, 25 mai 2008, 21:12, par le siniosme sino origines de lucy
ca fait plaisir de voir un peuple comprendre le vrai buisness, finit la dependance historique et un nouveau depart sur la vente de produits naturelles exentielles d ’aujourd’hui, les chinois en tant que client sont les meilleures ils achetent et ne donnent aucune lecon de morale, et une philosophie veridique pour faire fermer les mauvaix parleurs ce sont les afriquains qui vendent des produits aux chinois et non comme les francais qui sont venues piller l’afrique de son ivoire.