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Les banques françaises s’étaient bien moquées de nous.

Publie le mardi 21 octobre 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

Il y a une semaine, les banques françaises annonçaient qu’elles n’avaient pas besoin de l’argent de l’Etat, malgré la mise en place d’un double guichet (l’un à 340 milliards d’euros pour des prêts, l’autre pour des injections en capital à 40 milliards d’euros).

Et, ô surprise, hier soir, les banques françaises ont accepté 10,5 milliards d’euros piochés dans le guichet de 40 milliards. Dans le détail, le Crédit agricole prendra 3 milliards d’euros, BNP Paribas 2,55 milliards d’euros, Société générale 1,7 milliards, Crédit Mutuel 1,2 milliards, Caisses d’Epargne 1,1 milliards et les Banques Populaires 0,95 milliard. Que s’est-il passé ?

Tout simplement parce que, comme je l’écrivais dans cette précédente note, les banques ont un léger problème avec la vérité. Et les déclarations d’aujourd’hui vont dans le même sens. C’est de l’enfumage à tous les étages.

D’abord, le dispositif est complexe à souhait. Il ne s’agit pas d’une prise de participation en capital usuelle, mais de l’émission de titres hybrides. Ce ne sont pas des actions, c’est de la " dette subordonnée "qui doit être remboursée, mais qui, magie de comptabilité, est comptée comme des fonds propres dans le bilan d’une banque. Et cela va renforcer les ratios de solvabilité des établissements.

Ensuite, la justification de cet apport est franchement paradoxale. Christine Lagarde parle du financement de l’économie : "Cet investissement permettrait d’augmenter les fonds propres des banques afin qu’elles soutiennent pleinement le développement du crédit aux ménages, aux professionnels, aux entreprises notamment PME et aux collectivités locales tout en maintenant leur haut niveau de stabilité". Bref, on donne de l’argent aux banques pour qu’elles le prêtent à leurs clients. Ne serait-ce pas justement leur métier ?

Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, explique, lui, que les banques n’ont pas besoin de cet argent qu’on leur donne maintenant car elles sont très solides. Mais qu’elles pourraient en avoir besoin dans le futur... Sa déclaration est aussi un modèle de paradoxe : "Pour nos banques, et contrairement à d’autres pays, la recapitalisation publique n’a pas pour objet de pallier un quelconque défaut ou une quelconque faiblesse. En effet, même si elles ne sont pas à l’abri de la crise, nos banques sont solides et profitables. Cependant, il faut anticiper. Même les banques françaises ne sont pas assurées de trouver sur le marché les ressources nécessaires. Or, tant que persiste cette incertitude, nous devons mettre notre système de crédit à l’abri des aléas et préserver son rôle dans le financement de l’économie".
Quant aux banques elles-mêmes, leur communication est franchement comique.

BNP Paribas, dont le directeur général est Baudoin Prot, expliquait ainsi la semaine dernière, par la voix d’un porte-parole, n’avoir "aucun besoin de lever du capital". Ce matin, au contraire, elle annonçait dans un communiqué que, "dans l’intérêt de ses clients et de ses actionnaires, BNP Paribas a décidé de participer à ce plan à hauteur de 2,55 milliards d’euros. Avec cette opération, BNP Paribas accède à des ressources complémentaires dans des conditions de coût satisfaisantes, tenant compte de sa solidité financière, à un moment où le marché de ce type d’instruments est inactif". En clair, BNP Paribas a besoin de cet argent car il est impossible d’en emprunter sur les marchés en ce moment. Ce n’était pas déjà le cas la semaine dernière ? Puis, très faux cul : "Cette opération n’a pas pour objectif d’augmenter le niveau minimum de ratio Tier 1". C’est-à-dire le ratio de fonds propres. Et plus loin : les titres émis "sont éligibles aux fonds propres durs (Tier 1)". En clair, cette opération n’a pas pour objectif de faire quelque chose, mais elle va néanmoins le faire...

De son côté, le Crédit agricole s’est senti obligé de justifier le fait qu’il allait recevoir le maximum d’argent : "L’enveloppe d’emprunt de chaque banque est définie en fonction de son niveau dans l’économie. Compte tenu de sa taille, l’enveloppe consacrée au Crédit agricole est la plus élevée : 3 milliards d’euros". Un argument qu’on ne trouve pas dans le communiqué de Bercy...

Quant à la Société générale, elle a préféré faire profil bas. Son directeur général, Frédéric Oudéa, qui expliquait la semaine dernière qu’il n’avait "pas besoin d’utiliser ce « guichet » public", a juste dit, en marge d’une manifestation : "C’est une démarche collective des banques pour financer l’économie".

Quand on ajoute à cela cette remarque de BNP Paribas - "cette émission ne diluera pas les actionnaires et n’aura aucune conséquence sur la gouvernance de BNP Paribas et sa politique de dividende" -, on comprend que l’Etat a fait un gros cadeau aux banques, sans contrepartie contraignante (ce que remarque Didier Migaud, le député PS président de la Commission des Finances).

Et cela, les marchés financiers, eux, l’ont bien saisi. Résultat, les actions des établissements s’envolent à la Bourse de Paris : BNP Paribas fait + 7,47 %, Société générale + 10,23 %, Crédit agricole + 15,74 %.

Une réalité très tangible...

Nicolas Cori.

http://cordonsbourse.blogs.liberation.fr/

Messages

  • protestez activement contre ces "cadeaux" aux banques alors que la population souffre toujours plus, retirez votre argent des banques, c’est l’unique moyen de créer une opposition et de montrer notre force et notre refus, nous aurons tous à y gagner !!
    il faut impérativement installer un rapport de force et retirer l’argent est une méthode totalement pacifique mais aura une grande portée.

    nous avons vu la crise financière qui est la crise du crédit "toxique" et que font les dirigeants et les banquiers ? ils vont vous proposer encore plus d’endettements et de crédits, la preuve le crédit agricole qui fait déjà une pub pour une nouvelle carte bancaire où vous pouvez choisir entre payer de votre compte ou à crédit !!!
    l’état le dit ouvertement, l’argent donné aux banques va permettre de donner plus de crédits aussi bien aux entreprises qu’aux particuliers, mais comment vont-ils payer alors que les salaires n’augmentent pas, que les services publics sont détruits ?

    ils veulent nous entrainer encore plus loin dans leur déchéance et nous le faire payer !!
    les français sont loins d’être aussi endettés que les américains, leur rêve américain est déjà le cauchemar de la population américaine, ne les laissons pas faire ici et pour une fois ne soyons pas l’imitateur et à la traine des usa dans ce qu’ils ont fait de pire !!!
    là-bas, ils se battent de plus en plus, agissons ici.