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Les intermittents battent le pavé en rangs dispersés et désorganisés
Publie le lundi 15 mars 2004 par Open-PublishingLes intermittents battent le pavé en rangs dispersés et désorganisés
Leur manifestation de samedi à Paris tentait de faire converger toutes les
luttes : antipub, antinucléaire, altermondialisme...
Par Bruno MASI
lundi 15 mars 2004
ls n’étaient que quelques milliers au départ de la manifestation, samedi,
place de la République. Le cortège, ouvert par la camionnette bleue de la
fédération CGT du spectacle, a pris la direction du Marais qu’il devait
traverser, avant de faire route vers l’hôtel Matignon. A l’appel de la
coordination des intermittents et des syndicats, et après le brouhaha
politico-syndical de ces derniers jours au sujet de la contre-proposition
d’indemnisation chômage rédigée par les intermittents, de la caisse
spécifique suggérée par François Chérèque dans Libération (le 5 mars) et du
rapport de l’Assemblée nationale sévère pour l’Unedic, cette manifestation
voulait marquer une nouvelle fois la présence de la culture dans le débat
social actuel et tenter de faire converger des luttes qui, a priori, n’ont
que peu de chose en commun.
Bricolage. Annoncée lors du KO social qui s’est tenu au Zénith de Paris au
début du mois, la manifestation a regroupé une dizaine de mouvements épars.
Alors que le cortège s’éloigne du IIIe arrondissement, les rangs grossissent
pour ressembler à un long serpentin orné de banderoles et de slogans
bricolés (10 000 participants selon les organisateurs, 4 000 selon la
police). Les pancartes des antipub (« A quand le procès de la pub ? »)
croisent celles des antinucléaires, les altermondialistes font front commun
avec les militants pour l’abolition des transports payants, et les
anticonsommation (« Tais-toi et consomme ») s’affichent aux côtés des membres
de l’association Droit au logement (lire aussi page 17). Ne manquent que les
indépendantistes bretons et les militants contre l’extermination des canards
à Noël pour que la manifestation constitue un florilège de la grogne version
2004.
Malgré un texte commun titré « Du possible sinon j’étouffe : convergence des
luttes, conjugaison des forces, puissance du nous », la manifestation
ressemble à une tour de Babel menacée d’effondrement par un gouvernement
emmuré dans son silence et son déni méprisant.
Sans mots fédérateurs. Qu’ont en commun une famille d’immigrés sénégalais
squattant un appartement, un chercheur en fin de thèse et un cameraman
pigeant pour France 3 ? Un ras-le-bol que les manifestants ont tenté de
faire comprendre aux badauds. L’absence de mots d’ordre fédérateurs et de
revendications communes risque de peser lourd dans le prolongement des
luttes.
Les intermittents, depuis huit mois, cherchent le soutien du public. Il est
peu probable qu’ils l’obtiennent avec ce genre de manifestation pépère,
quand ils nous avaient habitués à des actions inventives, voire
artistiquement élaborées. Les plus motivés, samedi, refusaient de le croire
et criaient : « Tous unis contre un gouvernement qui porte atteinte aux
droits de tous. »