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Les intermittents tentent de lancer un débat national...
Publie le samedi 18 octobre 2003 par Open-PublishingLes intermittents tentent de lancer un débat national sur la culture
Une "semaine morte pour une culture vivante" dans plusieurs régions, des contre-propositions sur la réforme de l’assurance-chômage et des manifestations jeudi 18 octobre.
Le Mans de notre envoyée spéciale
Malgré le refus du gouvernement de revoir leur dossier, les intermittents restent mobilisés pour dénoncer le protocole d’accord signé le 27 juin, qui réforme le régime d’assurance-chômage des artistes et des techniciens.
Après la rencontre nationale des coordinations, à Marseille, samedi 11 et dimanche 12 octobre, les militants multiplient cette semaine les actions destinées à obtenir la renégociation de ce texte qui entrera en vigueur le 1er janvier 2004. Dans ce cadre, l’initiative "une semaine morte pour une culture vivante" proposée par les Pays de la Loire a été reprise par plusieurs régions. Près de 200 compagnies et lieux culturels, du Mans à Nantes, organisent cette semaine des "états des lieux de la culture".
Dans le département de la Sarthe, de mardi à samedi, un programme quotidien de débats traite des pratiques en milieu scolaire, des réseaux de diffusion ou des contre-propositions sur le régime d’assurance-chômage. Les artistes et les structures culturelles ont décidé de suspendre les spectacles pour se consacrer à ces réflexions. Mardi, une centaine d’entre eux ont abordé des thèmes qui dépassent les questions matérielles et sociales. "Depuis trois mois, les discussions deviennent de plus en plus pertinentes, estime François Tanguy, metteur en scène du Théâtre du Radeau, au Mans, dont les créations poétiques sont régulièrement invitées au Festival d’automne. Des gens extrêmement divers réclament un effort de construction d’une parole à la fois singulière et collective. Bien que les artistes soient de plus en plus fragilisés sur le plan social - tout comme les infirmières ou les enseignants -, les débats ne portent plus sur "combien je gagne" mais sur le sens de notre présence."
Quels types de lieux de travail faudrait-il inventer pour qu’émergent de nouvelles formes de création et de nouvelles solidarités ? s’interrogent les participants. Plusieurs d’entre eux imaginent des lieux pluridisciplinaires, croisant arts plastiques et théâtre, danse et vidéo, gérés par des collectifs. "La question des lieux de création me semble plus importante encore que celle de l’intermittence, explique Jacky Boiron, du Théâtre du Passeur. Un lieu, c’est un point d’ancrage, une force pour créer." Au lieu de répondre aux grilles préétablies par les tutelles, les compagnies veulent redéfinir leurs besoins, leurs souhaits.
RECOURS EN ANNULATION
Les compagnies sarthoises ont invité à leurs débats la chorégraphe Maguy Marin, implantée dans la banlieue de Lyon, une ville où la mobilisation reste vive. Du 11 au 19 octobre, la coordination des intermittents et plusieurs théâtres proposent, à Lyon, avec la manifestation "Scènes en lutte et solidaires", une programmation "politique" : "Il s’agit, notent les organisateurs, de donner à des compagnies et à des intermittents aujourd’hui violemment touchés, économiquement mais aussi dans les fondements mêmes de leur engagement artistique, la possibilité de présenter leur travail et de débattre avec les publics."
A Paris, la coordination a dévoilé mardi 14 octobre ses contre-propositions pour la réforme de l’assurance-chômage, lors d’une réunion d’information au Théâtre du Rond-Point à laquelle ont participé 300 personnes, dont des metteurs en scène du théâtre privé, tel Robert Hossein. Dans une lettre de soutien lue lors de la réunion, Pierre Franck, directeur du Théâtre Hébertot à Paris, a proposé un audit de l’Unedic par la Cour des comptes "qui prouvera que ce n’est pas le spectacle qui ruine l’assurance-chômage". La coordination parisienne a par ailleurs déposé, le 6 octobre, un nouveau recours en annulation de l’arrêté d’agrément des accords du 27 juin.
De son côté, le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), qui regroupe les directeurs d’institutions publiques, se joint à la mobilisation cette semaine pour réclamer la renégociation de l’accord, un "vrai débat national" sur l’art et la culture et le vote par le Parlement d’une loi d’orientation pour la culture. La CGT et les coordinations appellent à des manifestations à Paris et dans les régions jeudi 18 octobre.
Catherine Bédarida
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3246,36-338178,0.html