Les quatre jours « Guy Môquet » du PC

de Hacquemand Eric

Les communistes veulent eux aussi célébrer la mémoire du jeune résistant exécuté en 1941 et refusent de se laisser déposséder de cette figure historique par Nicolas Sarkozy.

TOUCHE PAS à Guy Môquet ! Jusqu’à lundi, les communistes célèbrent la mémoire du jeune résistant fusillé le 22 octobre 1941 par l’occupant nazi. En organisant les commémorations sur quatre jours, rien de moins, le PC entend donner à cet hommage une résonance particulière.

Depuis quelques semaines, le jeune Môquet est partout : à la télévision, dans les journaux et même dans les vestiaires de l’équipe de France de rugby... Une remise au goût du jour assez inattendue dont le PC, en pleine crise, espère tirer parti. En exigeant des enseignants qu’ils lisent la lettre d’adieu de Môquet à tous les lycéens de France lundi, Nicolas Sarkozy a mis le PC dans l’embarras : comment partager cette décision consensuelle tout en évitant de s’aligner sur la proposition du président de la République ? La secrétaire nationale, Marie-George Buffet, n’a pu qu’approuver la volonté du chef de l’Etat estimant que « la lecture de la dernière lettre de Môquet est un message fort (...) parce que son message pour l’émancipation humaine avait un but, celui de construire une République des droits et des libertés ».

Lundi, comme d’autres parlementaires (Robert Hue, Alain Bocquet, Maxime Gremetz...), la numéro 1 communiste ira dans un lycée du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) débattre avec les élèves. « Le combat pour lequel il est mort est en opposition complète avec la politique de Sarkozy » Mais point trop n’en faut : lorsque, la semaine dernière, Xavier Darcos, le ministre de l’Education nationale, a appelé Marie-George Buffet pour envisager une lecture commune, il s’est vu opposer une fin de non-recevoir. Ce serait oublier que les « camarades » sont très chatouilleux quand il s’agit de mémoire : à l’heure où le chef de l’Etat s’ingénie à brouiller les cartes en citant Léon Blum, Jean Jaurès, pas question de se laisser dépouiller d’un nouveau symbole historique.

Cet été, la direction a donc lancé une campagne d’affichage utilisant le portrait du militant des Jeunesses communistes souligné d’un « Rejoignez les communistes ». Son visage est incontournable lors de la dernière Fête de l’Humanité. Suite logique, Marie-George Buffet participera dimanche à la traditionnelle cérémonie d’anniversaire de Châteaubriant (Loire-Atlantique) où Môquet fut emprisonné. Enfin, le numéro de l’hebdomaire « l’Huma Dimanche » paru hier propose un cahier spécial Môquet. Outre « une tentative politique d’instrumentaliser la mémoire », Patrice Cohen-Seat, l’un des principaux dirigants du PC, observe : « Le combat pour lequel est mort Môquet est en opposition complète avec la politique de Sarkozy. »

Bref, à l’heure de « la résistance aux projets du gouvernement », le PC entend dépoussiérer le message du jeune résistant tombé, il y a peu, en désuétude. « Au nom de la mutation et d’un parti new-look, il était de bon ton de ne plus insister sur cette image », relève un membre du conseil national. Pour l’historien Stéphane Courtois*, l’opération Môquet constitue « une bouée de sauvetage ». « Après la défaite de l’élection présidentielle, faire appel aux héros permet de ressouder le dernier carré », conclut-il. * Sous la direction de Stéphane Courtois, le « Dictionnaire du communisme », Larousse, octobre 2007.

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Le Parisien du 19 octobre 2007