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Les salariés d’Opel à Bochum continuent leur grève sauvage

Publie le mardi 19 octobre 2004 par Open-Publishing
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Le gouvernement allemand craint un dérapage social, tout comme le syndicat
IG Metal, qui n’avait pas appelé à l’arrêt de travail.


de Georges Marion

Officiellement, il ne s’agit pas d’une grève puisque les procédures de concertation
qui, habituellement, précèdent son déclenchement, n’ont pas été engagées. Et,
pourtant, depuis jeudi 14 octobre, les Opelaner, les 9 400 ouvriers d’Opel à Bochum
(Rhénanie du Nord-Westphalie), sont bien en grève. En grève sauvage. Lundi 18
octobre, à 7 heures, les grévistes ont décidé de poursuivre leur mouvement.

C’est quelques heures après l’annonce du plan d’économie de la maison mère General Motors (GM) que les chaînes se sont une à une arrêtées. L’entreprise américaine a annoncé qu’il lui fallait faire, d’ici à 2006, quelque 500 millions d’euros d’économie par an et, pour cela, supprimer 12 000 emplois en Europe, dont 10 000 dans les seuls établissements allemands d’Opel. Vendredi 15 octobre, quelques-uns des ateliers où sont fabriqués les modèles Astra et Zafira tournaient encore. Quelques heures plus tard, l’usine était silencieuse.

La direction du puissant syndicat IG Metall, qui avait vigoureusement dénoncé le plan patronal mais n’avait pas appelé à la grève, regarde avec inquiétude un mouvement susceptible d’échapper à tout contrôle et de réduire sa marge de manœuvre dans une négociation qui s’annonce serrée. D’intenses tractations ont eu lieu durant le week-end entre les syndicats et les patrons européens de General Motors. Mais rien n’a été officiellement annoncé. Le ministre de l’économie, Wolfgang Clement, a appelé à la reprise du travail. Lui aussi craint un dérapage social aux conséquences incertaines.

Dimanche soir, alors qu’une pluie froide tombe sur Bochum, ils sont deux bonnes centaines, devant la porte numéro 1, à interdire l’entrée à ceux de l’équipe de nuit à qui viendrait l’envie de prendre leur poste. Des piquets analogues sont déployés aux autres portes. En pure perte : personne n’est venu pour tenter de travailler.

Des banderoles de soutien apportées de toute la région ont été accrochées aux grilles : elles parlent du chômage des parents et de l’avenir sombre des enfants ; elles rappellent que la région a vu fermer ses puits de charbon, puis ses aciéries, et qu’elle craint aujourd’hui la disparition de l’automobile. Samedi, avant le match de football opposant le LVF Bochum au Hansa Rostock, un cortège portant une longue banderole de soutien aux Opelaner a traversé la pelouse, vigoureusement applaudi par 25 000 spectateurs. Quand Opel tousse, Bochum a la fièvre et son centre ville aux magasins désertés par la crise se recroqueville plus encore.

"DES BRUITS COURAIENT"

Un comité de soutien à la grève s’est constitué. Installées dans une partie du poste de garde, des femmes y distribuent café, soupe et sandwichs. Le service de sécurité de l’usine s’est, lui, enfermé dans l’autre partie du poste, là où se trouvent les écrans de vidéosurveillance. Fatigués et un peu méfiants, les grévistes évitent les journalistes qu’ils invitent à rester à distance, derrière la barrière qui marque l’entrée de l’usine.

Jusqu’où tenir et que concéder ? Steffen Reichelt, 29 ans, ouvrier du rang entré à l’usine en 1996, est sûr que la grève durera. "Jusqu’au succès, dit-il, sans formuler précisément ce qu’il entend par là. Cette affaire, on l’a vue venir. Des bruits couraient." Il n’est donc étonné ni des suppressions d’emplois annoncées, ni du silence des syndicats dont il critique les atermoiements.

Juché sur une tribune de fortune, un homme lit un communiqué de soutien, appelle ses camarades à rester combatifs, moque la direction de GM qui a passé son week-end à donner aux médias des entretiens apaisants. Frederick A. Henderson, président de GM Europe, et Carl Peter Forster, président du conseil de surveillance d’Opel, ont acheté une pleine page de publicité dans l’édition dominicale du Frankfurter Allgemeine Zeitung pour expliquer qu’une "série de conditions économiques défavorables comme, par exemple, un marché automobile atone en Allemagne et dans les autres pays européens", a contraint la maison mère, aux Etats-Unis, à prendre les mesures annoncées.

Mais le message ne passe pas. "En six ans, explique un gréviste, GM, en Amérique, a nommé cinq patrons pour diriger Opel." Sous-entendu : ce n’est pas le marché de l’automobile qui est en cause, mais un management incapable d’adapter la production aux nouvelles attentes de sa clientèle.

Lundi 18 octobre, les syndicats devaient une nouvelle fois rencontrer la direction de GM.

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3234,36-383456,0.html

Messages

  • "Le syndicat IG Metal qui avit vigoureusement dénoncé le plan patronal, mais n’avait pas appelé à la grève". C’est beau comme l’antique. Ou sans se lancer dans l’archéologie, comme ce qui s’est passé en France en 2003 au moment ou CGT et FSU n’ont pas fait le nécessaire pour qu’entre le 13 mai et le 25 mai 2003, les conditions soient réunies pour empêcher la destruction des retraites par répartition.

    DEUTSCHE ARBEITER ! WIR SIND MIT IHNEN !