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Lettre ouverte à Bernard Thibault Secrétaire Général de la CGT

Publie le vendredi 18 mars 2011 par Open-Publishing

Cher Camarade Secrétaire Général,

Nous te sollicitons dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 4 du 49ème Congrès portant sur notre organisation et sa nécessaire évolution.
Notre souhait est que notre nouveau Syndicat National des Personnels de la Formation (SNPF-CGT) puisse être affilié à une fédération. Grand est le besoin d’une CGT forte dans notre secteur d’activité.
Notre démarche se nourrit des convictions exposées dans ta déclaration d’ouverture lors du 49e congrès confédéral, à Nantes, lundi 7 décembre 2009 : « Nous devons en convenir, nous ne pourrons pas progresser sur la syndicalisation sans faire bouger les lignes au niveau de nos structures. (…). Il faut que le syndicat, base de la CGT, soit le premier niveau de ’confédéralisation’, c’est-à-dire de mise en commun des moyens humains et financiers, celui où se créent les convergences revendicatives ». Le Comité Confédéral, à l’unanimité, a confirmé cette résolution lors de sa réunion des 3 et 4 février 2011.
Le parcours du SNPF CGT peut se résumer à 3 étapes : Dénonciation - Emancipation – Construction. Hélas, la riposte a été : Diabolisation - Rétorsion - Répression.
Ces attaques ne cessent pas depuis notre création en avril 2010 ; elles se sont intensifiées au plus fort des mobilisations contre la réforme sur les retraites.
Notre syndicat est dans une attente qui le fragilise. Nos militants sont en danger.
Cher camarade secrétaire général, j’interviens auprès de toi en tant que délégué au 49ème congrès dans le cadre de ma mission, comme pour tous les autres délégués, d’assurer un suivi de l’après Congrès. J’interviens aussi en tant que secrétaire général du SNPF CGT.

Historique du SNPEFP
Notre ancien syndicat regroupe les personnels de nombreux secteurs : enseignement initial et supérieur sous contrat et hors contrat, CFA, Alliances Françaises, Chambres des Métiers et de l’Artisanat, formation associative et privée, enseignement agricole…. Le secteur de l’enseignement initial y assure le fonctionnement et y exerce le pouvoir à tous les niveaux.

Depuis 1998, les directions successives du secteur Formation réclament un espace d’expression spécifique. Au gré des congrès, ont été octroyés un secrétaire général par secteur, un trésorier par secteur, des instances spécifiques (Bureau et CEN), toujours dans le cadre de l’hégémonie exercée par le secteur de l’enseignement initial. Dès son élection au Congrès de Batz en 2006, la direction du secteur formation conteste cette entrave : afin de répondre aux besoins des syndiqués, des moyens financiers propres existent mais sont ‘confisqués’, utilisés à d’autres fins que pour le secteur formation. Ces freins font l’objet d’un rapport du secteur formation, élaboré en 2008 qui aboutit à l’autonomie totale de gestion du secteur. Par ricochet, les autres secteurs en bénéficient.
Pour les dirigeants du secteur formation, notre branche professionnelle de 170 000 salariés mérite mieux qu’un secteur sous tutorat. Une amélioration significative de la vie syndicale dans notre organisation était nécessaire ainsi qu’une autonomie politique du fait de l’hégémonie néfaste d’un secteur sur les autres.
Mais surtout, elle devient nécessaire du fait de l’importance de notre champ professionnel, des problématiques récentes qui laminent le métier de formateur (portage salarial, auto entrepreneur…) du démantèlement de l’AFPA, de la création du SYNOFDES syndicat patronal de la formation associative membre de l’USGERES qui revendique sa place dans la négociation, de l’aspect multi professionnel de nos métiers, du déplacement du cœur du métier vers des missions de conseil, d’accompagnement, d’orientation, de la problématique des SSIG, de nos relations avec l’éducation populaire….

Les missions, contextes et conditions de travail des personnels de la formation ne sont pas ceux des personnels de l’éducation nationale ni de l’enseignement privé.

Notre constat motive le rassemblement de nos personnels. Il y a des attentes des syndiqués, des instances CGT, des institutions du monde du travail. Nous voulons offrir à toutes et à tous ces nouveaux salariés d’aujourd’hui ou assimilés le cadre de syndicalisation nécessaire afin qu’ils s’expriment, prennent des décisions sans demander l’autorisation préalable à d’autres secteurs.
(Exemple : nos communiqués sont refusés à la parution dans ‘Le Lien’, journal de la FERC au prétexte que nous ne sommes qu’un secteur ; pourtant, ils sont appréciés par les journalistes et publiés par la presse !)

Dès novembre 2008, nous signifions notre volonté ferme de nous émanciper, de structurer notre secteur en un véritable syndicat. La FERC est informée ; ses membres ont participé à toutes les réunions des instances du SNPEFP, y compris celles, nombreuses, de la préparation du congrès. Notre secteur est le seul à présenter 3 documents de travail : bilan d’activité, orientations, structuration envisagée. Nos orientations figurent dans le journal "Trait d’Union" envoyé à tous les syndiqués.

En novembre 2008, nous produisons un 1er rapport dénonçant des dysfonctionnements graves au SNPEF. En janvier 2010, nous produisons un 2nd rapport dénonçant une connivence entre des dirigeants du SNPEFP et l’Ecole de Guerre Economique du député UMP Bernard Carayon de Lagaye, connu à l’Assemblée nationale pour ses interventions concernant le patriotisme économique et le renseignement. Ce député dirige la Fondation Prometheus, dont l’ancien secrétaire général du SNPEFP, est devenu directeur….. Ce rapport est remis à la FERC sous forme de saisine. La CEF de la FERC le rejette pour manque de clarté. Promesse est faite que toutes ces questions trouveront une réponse lors du prochain congrès du SNPEFP d’avril 2010.

Le congrès fondateur du SNPF-CGT
Connaissant les difficultés auxquelles nous aurions à faire face, nous demandons aux syndiqués de s’engager par la signature d’un mandat. Ces mandats sont remis à un huissier. Près de 180 syndiqués appuient, par leur mandat, la création de notre syndicat, le SNPF CGT. Ces 180 mandats constituent la majorité si l’on s’appuie sur le nombre total de syndiqués du secteur formation recensé pour la préparation du Congrès du SNPEFP.

La direction du SNPEFP et de la FERC soutiennent que nous sommes partis « avant l’ouverture du congrès ». Nous sommes partis bien après l’annonce de l’ouverture ; nous avons déclaré nos résolutions après le moment de concertation réservé à chaque secteur, moment prévu dans le programme.
Nous avons fait constater par huissier le vote des 9 délégués du secteur. 8 délégués sur 9 ont voté la transformation du secteur en un syndicat.

Nous ne sommes pas des dissidents.
Nous n’avons pas quitté un syndicat pour en créer un autre.
Nous avons quitté un espace « parcimonieusement octroyé » sous la forme d’un secteur. Cet espace ne nous satisfaisait plus.
Nous avons créé le SNPF CGT dans le droit fil de la résolution 4 du 49ème congrès de Nantes qui prévoit que chaque syndicat doit définir son périmètre d’action, sa représentativité et ses critères d’intervention.
Nous n‘avons pas démissionné.
Nous sommes pionniers dans l’objectif fixé : lors de nos assemblées générales avant le Congrès, nous avons examiné nos missions et notre périmètre de syndicalisation et traduits nos décisions et réflexions lors de notre Congrès fondateur.

L’après congrès
Dès le 7 avril 2010, pour la réunion du Bureau Fédéral, nous demandons l’affiliation à la FERC. Suite à son silence et à certaines des réactions hostiles du Bureau Fédéral, nous comprenons que la FERC rechigne à appliquer la résolution 4.
Nous formulons alors 2 demandes d’affiliation :
  l’une à la fédération du commerce et des services, dans la mesure où notre secteur est un service aux entreprises et aux particuliers
  l’autre à la fédération des cabinets d’études, dans la mesure où notre secteur fournit des ‘prestations intellectuelles’ et qu’une partie de nos patrons, à travers la FFP, est affiliée à SYNTEC.
Ces 2 fédérations sont les plus proches de nos champs d’activités.
A ce jour, pas de réponse.

Nous regrettons que le Bureau de la FERC ne joue pas son rôle de médiation dans le conflit qui nous oppose à la direction du SNPEFP. Nous l’avons sollicitée plusieurs fois à cette fin, en vain. Par contre, la FERC n’hésite pas à s’attribuer la gestion des fonds du paritarisme qui sont destinés aux salariés de la branche des organismes de formation. Elle a prévu d’en ponctionner 10 %.

Nous regrettons que le bureau de la FERC accompagne et appuie la démarche scandaleuse de la direction du SNPEFP (mensonges aux employeurs, mensonges aux syndiqués...). L’annonce que nous ne sommes plus à la CGT est un élément de leur harcèlement.

Cette mise en danger des militants et des syndiqués n’a pas fini de créer des dégâts. Plusieurs procès sont en cours ; nous en prévoyons d’autres. Cette initiative va à l’encontre de toute éthique syndicale. Pire, elle s’appuie sur la décision de la FERC de ne pas nous affilier.
Notre demande d’affiliation fédérale déposée en avril 2010 a tardé à venir à l’ordre du jour de la réunion CEF (commission exécutive fédérale) FERC des 23 et 24 septembre 2010 à Montreuil. Les intervenants ont veillé à l’unité, dans un climat d’échanges intéressants et rassurants.
La Commission Exécutive de la FERC rejette notre demande d’affiliation mais vote une motion (PJ 1) reconnaissant notre existence et notre pertinence.
« Pour permettre la construction la plus efficace de la CGT avec les salariés de ces secteurs, la CE de la FERC, réunie les 23 et 24 septembre 2010, demande aux camarades du SNPF de s’associer à cette discussion au sein du Snpefp »
Les membres de la CEF de la FERC nous invitent dans le processus de discussions relatives aux « questions de structuration du syndicalisme CGT, dans les différents secteurs de l’enseignement privé et de la formation ».
C’est une façon de considérer le SNPF comme un interlocuteur valable au sein de la CGT. C’est une avancée dont nous nous réjouissons.
Nous formulons une demande de rencontre auprès du SNPEFP, restée sans réponse.
Nous proposons un projet de sortie de crise.
La direction du SNPEFP est sourde à la motion, sourde à notre demande de rencontre, sourde à notre projet d’accord.

Ses dirigeants continuent sans relâche leur guerre d’usure, leurs intimidations auprès des syndiqués, qu’ils criminalisent. Cette direction, forte de moyens financiers qu’elle tire du paritarisme –destiné à un travail de défense, de syndicalisation et de réflexion sur la branche-, multiplie les attaques. Nos camarades, délégués syndicaux pour la plupart, sont assignés devant les tribunaux par la collusion des directions patronales et la direction du SNPEFP. Ces délégués-militants CGT d’entreprise, certains avec plus de 20 ans de syndicalisation, se voient démis de leurs mandats, puis victimes de tentative d’exclusion. Sans débat contradictoire.

Ces agissements mettent en danger, face à l’employeur, nos militants CGT. (PJ 2, procès AFT-IFTIM)
Ces agissements discréditent notre organisation.
Ces agissements nous font perdre des syndiqués indignés et des adhérents potentiels.

Un manquement grave alors que l’implantation de la CGT est estimée insuffisante par le CCN et que les causes des freins à la syndicalisation sont la répression syndicale et la précarité.

Des UL, UD, sections syndicales ont pris position pour légitimer l’existence et l’affiliation de notre syndicat à la CGT.
La récente réponse (PJ 3) du secrétaire général de la FERC à l’UL CGT de Rennes est une prise de position ambigüe et contradictoire : la FERC nous demande de participer aux travaux du SNPEFP dans la préparation de leur congrès, mais à la condition que nous soyons affiliés à une fédération, affiliation qu’elle nous refuse !

D’un refus, peu clair, d’affiliation, l’attaque se durcit : une tentative d’exclusion de la CGT, est suivie d’un constat de démission (PJ 4), avec remboursement rétroactif de nos cotisations !!!

Il n’est pas crédible pour la FERC de soutenir au SNPEFP un pseudo-secteur porté près d’un an artificiellement par 1 délégué. La FERC n’est pas honnête quand, après notre départ, elle tente de créer un espace de travail interfédéral sur la Formation Continue. Le compte rendu du congrès fédéral de novembre 2010 de la FERC constate l’absence totale d’allusion aux personnels de la formation privée. Le summum est atteint quand ce congrès désigne un responsable des CFA pour représenter le secteur Formation à la CEF.

Notre affiliation dans le respect des statuts de la CGT

Notre syndicat le SNPF CGT est affilié à l’UD 93 et à l’UL de Montreuil.
Nous sommes signataires de la convention collective des organismes de Formation sans aucune contestation des partenaires sociaux.
Nous militons, nous fonctionnons comme un syndicat : collectifs régionaux, site internet, permanences syndicales etc.…
Les responsables de la FERC, la direction du SNPEFP déclarent que le SNPF n’appartient pas à la CGT, puisqu’il lui manque l’affiliation fédérale.
Le SNPEFP, à qui il manque l’affiliation interprofessionnelle territoriale, n’est donc pas à la CGT ?

Nous sommes déterminés à faire vivre notre syndicat au sein de la CGT.

La Cour de Cassation est abondamment sollicitée sur ce type d’affaire.
« L’importance des enjeux liés à la loi du 20 août 2008 exacerbe cependant ces conflits internes et la Cour de cassation ne cesse d’être saisie de questions mettant en jeu des litiges au sein des organisations syndicales. Il lui faudra donc probablement rapidement préciser comment régler ces difficultés et, notamment, prendre position sur les conséquences de la désaffiliation et de la réaffiliation d’un syndicat ou d’un représentant syndical à une confédération syndicale. »

C’est pourquoi, cher camarade secrétaire général, pour conclure, nous nous permettons une fois de plus d’emprunter ces lignes porteuses d’espoir à ton discours de Nantes : « Il est essentiel, voire vital, de se défaire [des] réflexes patrimoniaux comme si une organisation était propriétaire des adhérents alors que ceux-ci sont d’abord syndiqués à la CGT (…). Si notre fonctionnement devait rester le théâtre de disputes ou de replis, notre syndicalisme se réduirait à une cohabitation de corporatismes, qu’ils soient d’entreprises ou de statuts. »
Ne laissons pas les magistrats décider pour nous. Ne laissons pas la Cgt se décrédibiliser devant les Tribunaux et la presse.

Fraternellement.

Smail Lamara

Secrétaire Général SNPF-CGT
Syndiqué à la CGT depuis 1970