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M. Berlusconi devra affronter la réforme fédéraliste à la rentrée

Publie le jeudi 5 août 2004 par Open-Publishing

De son lit d’hôpital, le chef de la Ligue du Nord rappelle : "Nous ne plierons pas".

Rome : Salvatore Aloïse

Silvio Berlusconi est parti satisfait en vacances. Apparemment, il a réussi à conjurer la crise et à resserrer les rangs de sa majorité. Juste avant la clôture de l’été, le Parlement a donné son accord aux lignes générales de politique économique de son gouvernement et la réforme des retraites a été adoptée. Mais l’accalmie risque d’être de courte durée.

Dès le 2 septembre, une table de négociation dite "technique" sur les réformes constitutionnelles envisagées par la majorité doit se tenir à Rome. C’est la toute dernière tentative pour parvenir à une clarification définitive entre les partenaires de la coalition, profondément partagés sur les réformes envisagées, avant la reprise des discussions au Parlement, dès la mi-septembre.

La Ligue du Nord attend ses alliés de pied ferme sur la réforme fédéraliste de l’Etat, son cheval de bataille. La Ligue a ainsi lié sa permanence au gouvernement au transfert de compétences exclusives aux régions, dans des domaines comme l’enseignement, la santé et la police locale. A la fin du mois de juillet, elle a voté la confiance au gouvernement sur les retraites et soutenu les lignes de politique économique, mais à une condition : que sur le fédéralisme aussi la majorité soit unie.

HAUTE VOLTIGE

Dimanche 1er août, de son lit d’hôpital où il se trouve pour de graves problèmes cardiaques, le chef de la Ligue, Umberto Bossi, s’est adressé, par téléphone, à ses militants : "Nous ne plierons pas", a-t-il affirmé d’une voix faible mais qui a sonné comme un avertissement aux oreilles des alliés de l’Union des démocrates du centre (UDC), déterminés à s’opposer au projet de fédéralisme envisagé par la Ligue.

Les divergences de vues sont substantielles. Le petit parti héritier de la Démocratie chrétienne a mené la fronde cet été sur une clause de sauvegarde de l’intérêt national à insérer dans le projet de Constitution. L’Etat, selon les centristes, doit pouvoir continuer à intervenir avec ses propres lois dans des domaines de compétence régionale, si cela est nécessaire pour sauvegarder les intérêts unitaires du pays. Dans cette bataille, l’UDC a trouvé à ses côtés Alliance nationale, le parti de Gianfranco Fini, le vice-président du conseil. En revanche, les centristes sont seuls, dans la majorité, à s’ériger contre le renforcement des pouvoirs du premier ministre, comme le prévoit le projet de réforme.

Silvio Berlusconi devra donc se livrer à un exercice de haute voltige pour trouver la formule qui ne mécontente personne. D’autant qu’un autre sujet de divergence vient de se faire jour, à propos d’une nouvelle loi électorale proportionnelle qui favoriserait surtout les petits partis.

Autant dire que la longue "clarification" interne, malgré les déclarations optimistes de ces jours-ci, ne semble qu’un répit, avec, en toile de fond, la sensation que le projet de Constitution fédéraliste n’est qu’un gage accordé à la Ligue du Nord en échange de son soutien et non une priorité.

La preuve, selon l’opposition, vient d’être apportée ces jours-ci. Au moment même où la majorité discute d’un projet de fédéralisme audacieux, le conseil des ministres vient de traîner, devant la Cour constitutionnelle, deux collectivités locales.

Pourquoi ? Parce que se basant sur les éléments de fédéralisme et d’autonomie déjà admis dans la Constitution, le conseil régional de Toscane a adopté une norme reconnaissant les couples vivant en union libre, une sorte de pacs à l’italienne. Le conseil municipal de Gênes, lui, a décidé d’accorder le droit de vote aux élections locales aux étrangers résidant depuis cinq ans dans la commune. Pour le gouvernement, ces deux décisions vont à l’encontre de la loi. Un jugement paradoxal, estime le président de la région toscane, Claudio Martini : "Ce gouvernement n’est fédéraliste qu’en paroles, en réalité il est prêt à bloquer tous ceux qui tentent d’appliquer concrètement des mesures fédéralistes."

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