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Manifs : non, la police ne peut pas nous tirer comme des lapins (Hoax)

par rue89

Publie le mardi 19 juillet 2011 par rue89 - Open-Publishing
5 commentaires

Le 30 juin, le Premier ministre François Fillon, le ministre de la Défense, Gérard Longuet, et celui de l’Intérieur, Claude Guéant, ont signé un décret de loi relatif aux armes à feu. Depuis, Rue89 reçoit des e-mails inquiets.

Extrait :

« Aujourd’hui, une amie m’a fait part d’une info tellement énorme que je n’y croyais pas. Il s’agit d’un texte du Journal officiel. […] Il faut absolument que quelqu’un de votre équipe se charge de décortiquer ce décret, vous devez informer vos lecteurs. »

L’« info » a vite circulé avec, en gros titre, repris en chœur par de nombreux internautes s’indignant d’une telle mesure mortifère :

« Depuis le 1er juillet, la police peut tirer à balles réelles sur les manifestants en France »

La preuve, nous assurent plusieurs correspondants, Mediapart en a parlé. En réalité, un blog, militant, hébergé sur le site, et le titre de la note a de quoi faire frémir :

« Manifs : ils pourront nous tirer comme des lapins »

Une possibilité vieille de plus de soixante-dix ans

Pour l’avocat-blogueur Maître Eolas, rien de nouveau sous le soleil :

« La police ne peut pas tirer à balles réelles sur des manifestants depuis le 1er juillet. Elle le peut depuis le 23 octobre 1935. »

Ce décret-loi du 23 octobre 1935 portant réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de l’ordre public fut en effet voté au lendemain de la crise du 6 février 1934 lorsque des groupes et des ligues d’extrême droite avaient organisé une manifestation antiparlementaire dans les rues de Paris.

Le résultat de cette journée, qui restera dans l’histoire de France ? Seize morts, dont quinze manifestants et un policier, et plus de 1 400 blessés.

Le gouvernement n’en voulait pas

Le décret de cette année, qui semble pour certains avoir été signé en douce par les plus hautes instances de l’Etat, n’est en réalité qu’un simple décret d’application de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale.

Cette loi, qui a fait passer le contrôle de la gendarmerie au ministère de l’Intérieur, aurait pu laisser une trop grande marge d’appréciation aux autorités pour l’emploi de la force et, surtout, de son intensité – en violation de l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Le Sénat préfère alors que les modalités d’engagement de la force soient fixées par décret. L’Assemblée nationale s’y oppose, une commission mixte paritaire donne raison au premier. Le gouvernement, alors qu’il n’en voyait pas la nécessité, prend deux décrets d’application : le 2011-794 et le 2011-795, qui fixe la fameuse liste d’armes pouvant être utilisées.
Un décret « sexy pour des non juristes un peu paranos »

Certains non-juristes trouvent dans ce 2011-795, et notamment dans son article 3, la preuve d’un renforcement de la politique sécuritaire du gouvernement. Qu’en est-il ?

C’est un décret « sexy pour des non juristes un peu paranos », selon Maître Eolas, qui ajoute :

« Le but de la réforme n’est pas d’ouvrir la chasse aux manifestants et de noyer dans le sang la prochaine Gay Pride, mais au contraire de limiter les moyens susceptibles d’être employés et d’assurer la traçabilité des ordres d’usage de la force pour remonter au responsable chaque fois que la force est employée. »

Ce décret n’ajoute rien, au contraire, il retire. L’avocat au barreau de Paris précise :

« Seules les armes figurant au décret 2011-795 et les armes de sixième catégorie (matraques, triques, tonfas et grenades lacrymogènes) peuvent être employées, à l’exclusion de toute autre : pas de FA-MAS (c’est du 5,56 mm), pas d’hélicoptères (la question a été abordée lors des débats), pas de chars. »

De plus, les tirs à balles réelles doivent être précédés de trois sommations non suivies d’effet. Le code pénal stipule que « les représentants de la force publique appelés en vue de dissiper un attroupement peuvent faire directement usage de la force ». Mais à une condition :

« Si des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent. »

Photo : des policiers du Xe arrondissement de Paris montent dans leur fourgonnette en février 2009 (Audrey Cerdan/Rue89)

http://www.rue89.com/hoax/2011/07/18/manifs-non-la-police-ne-peut-pas-nous-tirer-comme-des-lapins-214281

Messages

  • Et bien pardon, mais je ne suis absolument pas d’accord.

    Comme quoi on peut s’appeler "Maître Eolas" (?) être, semble-t-il, un avocat doué, et dire des bêtises.

    Évidemment, quand on fait fi (par exemple) des distinctions qui existent, justement, entre la police judiciaire et la gendarmerie, quand on fait fi des profonds bouleversements, que l’on connaît mal et dont on mesure mal la portée, d’ailleurs, qui ont touché le statut de la gendarmerie nationale, quand on fait fi d’un minimum de recherches, de documentation, on peut en arriver aux conclusions hâtives de "Maître Eolas" ou du journaliste de rue 89 (qui soit dit au passage n’a pas pris la peine, manifestement, de croiser ses renseignements ou de consulter une autre source que "Maître Eolas", comme un professeur de droit par exemple, Geneviève Kouby par exemple (elle a publié sur son site sur le sujet et le moins qu’on puisse dire est que son avis n’est pas exactement celui de "Maître Eolas", mais enfin , puisque nous vivons sous la République des Avocats et qu’aujourd’hui la notoriété d’un" blog" vaut reconnaissance scientifique... j’imagine que c’est normal...).

    Par souci de rigueur et de précision, je cite ici la source de l’article de Mme le Professeur Kouby, sur les décrets 2011-794 et 795 (consultables in extenso sur Légifrance)

    Par ailleurs, il faut trouver où le décret-loi de 1935 en question (pris par LAVAL et toujours en vigueur - comme quoi, elle est belle la République...) comporte une quelconque autorisation de tirer sur la foule à balles réelles (exactement au fusil à répétition de calibre 7,62x51mm cf D n° 2011-795), comme le dit "Maître Eolas" ?

    Il est consultable dans sa version en vigueur ici

    Ce, alors même que le Décret n° 2011-794 est semble-t-il très clair : il AJOUTE bien des pouvoirs aux "forces de l’ordre"

    D’autant que l’article L1321-1 du code de la défense est très clair :

    Article L1321-1
    Modifié par LOI n°2009-971 du 3 août 2009 - art. 4

    Aucune force armée ne peut agir sur le territoire de la République pour les besoins de la défense et de la sécurité civiles sans une réquisition légale.

    Le premier alinéa n’est pas applicable à la gendarmerie nationale. Toutefois, lorsque le maintien de l’ordre public nécessite le recours à des moyens militaires spécifiques, leur utilisation est soumise à autorisation dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat.

    Les conditions d’usage des armes à feu pour le maintien de l’ordre public sont définies à l’article 431-3 du code pénal.

    C’est bien l’articulation de ces décrets avec les dispositions du code pénal qui fait "problème" ici.

    Enfin l ’article D1321-5 du code de la défense, désormais abrogé, est issu, non pas d’un décret-loi de 1935, mais d’un décret n° 95-573 de 1995.

    Ce qui autorise Madame le Professeur Kouby (Université Paris VIII, je crois, auteure de nombreux travaux en droit public et droit des libertés fondamentales) à poser cette question à la fin de son analyse :

    "La lecture de ces décrets dans le contexte s’impose-t-elle ?... Y repérer une parenté avec les révoltes qui parcourent le monde depuis le début de l’année 2011 serait-il exagérer ?"

    On y perd donc un peu son latin à suivre "Maître Eolas" qui nous avait habitués à mieux (en tout cas, pour sa partie), et qui, pour une fois, et c’est regrettable, semble fonctionner par approximations et opinion, se contentant de se draper dans sa robe d’avocat pour énoncer que c’est un "décret sexy pour non juriste un peu paranos".
    (G. Kouby appréciera, et d’autres également.... ;) )

    D’autant qu’il nous sert cela :

    Ce décret n’ajoute rien, au contraire, il retire. L’avocat au barreau de Paris précise :

    « Seules les armes figurant au décret 2011-795 et les armes de sixième catégorie (matraques, triques, tonfas et grenades lacrymogènes) peuvent être employées, à l’exclusion de toute autre : pas de FA-MAS (c’est du 5,56 mm), pas d’hélicoptères (la question a été abordée lors des débats), pas de chars. »

    Waow. Merci ! quelle drôle de présentation des choses, cher Maître Eolas ...Le décret eut retiré, en bon français, si les armes que vous mentionnez avaient été autorisées à l’emploi préalablement, or, ce n’est pas le cas. Leur simple évocation dans un débat parlementaire ne suffit donc pas à dire que ces décrets "retirent" ! A moins que là encore, le journaliste de rue 89 ait fait dire à cet avocat des choses qu’il n’a pas dites ( ce qui est toujours fâcheux). Maître Eolas rectifiera sans doute sur son blog, alors.

    On est d’autant plus perplexe que l’article se conclut ainsi :

    De plus, les tirs à balles réelles doivent être précédés de trois sommations non suivies d’effet. Le code pénal stipule que « les représentants de la force publique appelés en vue de dissiper un attroupement peuvent faire directement usage de la force ». Mais à une condition :

    « Si des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent. »

    Alors, le moins qu’on puisse dire est que le travail effectué par Rue 89 semble manquer un tantinet de fond , voire, de sérieux, et qu’à tout le moins, on ne voit pas du tout ce qui autorise le journal à titrer aussi joyeusement "Manifs : non, la police ne peut pas nous tirer comme des lapins (Hoax)", en définissant carrément l’info comme un "HOAX", c’est à dire, comme un "canular" (c’est ce que signifie le terme "hoax").

    Un minimum de questions donc, et quelques précautions à prendre, manifestement, sur ce genre de sujets...(sauf à ce que cela ressemble à une opération de propagande plus qu’à du journalisme).

    Nous restons donc , en toute objectivité, sur notre faim, et attendons la suite sur ce brûlant sujet....

    Bien cordialement à tout le monde,

    "Maître Oh-Hélas"

    On espère que ce n’est pas l’entrée au capital de rue 89 de Claude Perdriel qui nous vaut un article d’une qualité aussi médiocre sur un sujet aussi important....

  • citation de la conclusion du billet de maitre Eolas

    En conclusion, vous pouvez aller manifester en paix le 1er mai prochain, le JO vous protège. Et n’oubliez pas mes recommandations : rentrez chez vous dès la 1e sommation d’obéissance à la loi que vous entendez (ou à la première fusée rouge que vous voyez tirée par les forces de l’ordre) ; ne lancez ni pierre ni pavé ni cocktail molotov sur les forces de l’ordre ; ne tentez pas de forcer le passage, surtout si c’est vers l’Élysée, un ministère ou une Assemblée parlementaire, et n’ouvrez pas le feu sur les forces de l’ordre. En suivant ces conseils avisés, vous devriez pouvoir passer une bonne journée insurrectionnelle et être rentrés chez vous à temps pour Question pour un Champion. Sinon, selon votre situation, Jaddo ou moi-même nous ferons un devoir de mettre notre art à votre service.

    Ce n’est pas très rassurant si on sort des manifs traine-savates !!!!

    Et encore !!

    Faut-il rappeler le 14 juillet 1953 ? Maurice Rajsfus, 1953, un 14 juillet sanglant, Agnès Viénot éditions, 239 pages

    " Le 14 juillet 1953, comme chaque année depuis 1936, le Parti communiste et la CGT organisent une grande manifestation de rue pour célébrer les valeurs de la République et les idéaux de la Résistance. Mais ce mardi-là, un important cortège de travailleurs algériens s’est formé, encadré par le MTLD de Messali Hadj, qui scande "Non au colonialisme" et - pour la première fois - "Nous voulons l’indépendance !" Place de la Nation, les forces de l’ordre chargent violemment. Les Algériens résistent, des policiers tirent alors dans le tas, tuant six jeunes ouvriers algériens et un métallurgiste français, syndicaliste CGT. Et de cet épisode, pas de trace dans la mémoire officielle de la Préfecture de Police…"

    http://orta.dynalias.org/i​nprecor/article-inprecor?i​d=678

    le massacre du 17 octobre 1961 ??? 10.000 algériens interpellés, internés, plus de 200 morts

    le 8 février 1962 ???? les morts

    Jean-Pierre Bernard, 30 ans, dessinateur

    Fanny Dewerpe25, 31 ans, secrétaire

    Daniel Féry, 16 ans, apprenti

    Anne-Claude Godeau, 24 ans, employée PTT

    Édouard Lemarchand, 41 ans, menuisier

    Suzanne Martorell, 36 ans, employée à l’Humanité

    Hippolyte Pina, 58 ans, maçon

    Raymond Wintgens, 44 ans, typographe

    Maurice Pochard (décédé à l’hôpital), 48 ans

    et des centaines de blessés

    S’il fallait faire de décompte de toutes les "bavures" policières, il serait intéressant de connaitre le nombre de policiers inculpés ! Zéro ?

    Alors, le "droit"....