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Marx est il encore actuel ?

Publie le samedi 27 décembre 2008 par Open-Publishing
3 commentaires

Suite à mon article « Que faire » du 26 décembre
On me conseille de relire Marx et Engels,
On me dit que le capitalisme qu’ils décrivent dans le manifeste est sociologiquement différent de celui que nous connaissons.

Est-ce si sûr ?

Voici ma réponse , elle est assez générale, et me semble t’il, elle peut faire l’objet d’un article

Je le publie donc au regard de tous.

Ne voyez-vous pas « le grand bon en arrière » que nos sociétés vivent ?
Conseil pour conseil, je vous conseille de lire le livre de Serge Halimi « le grand bon en arrière » ( Edition Fayard) Au moins c’est un livre actuel ! mais peut être le connaissez vous ! auquel cas mon conseil tombe à plat. Et les lignes qui suivent sont inutiles

Mais au cas ou, en voici quelques extraits que je vous ai choisi :

D’avril 1961 (fin de la « récession Eisenhower ») à décembre 1969, les États-Unis enregistrent la période d’expansion la plus longue de leur histoire1. Les lois des cycles économiques paraissant avoir été abolies, Lyndon Johnson se lance : « Je ne crois pas que les récessions soient inévitables. » Créer la richesse devient apparemment aussi simple qu’ouvrir un robinet pour désaltérer à la fois les patrons (dont les produits se vendent), leurs salariés (dont les revenus augmentent), les Noirs (dont il faut favoriser l’intégration), les militaires (qui luttent contre le communisme), le tiers-monde envers qui l’Amérique se montrera généreuse). Aider les pauvres de l’« autre Amérique » ? Bien sûr, et d’autant plus facilement que cela n’impose plus de prendre aux riches.

Une grande famille américaine s’ébroue dans le palais de Dame Tartine. Et le tout est édifié par des cerveaux d’acier vivant à Washington. En janvier 1965, le président Johnson promet de construire « une nation libérée du besoin et un monde libéré de la haine, un inonde de paix et de justice, et de liberté et d’abondance, pour notre temps et pour les temps à venir.
….

Comme presque toute « pensée unique », celle de l’époque ne jure que par son pragmatisme. Interrogé par André Malraux sur ce qu’est la vraie question idéologique du moment, John Kennedy répond : « C’est le management d’une société industrielle, un problème non pas d’idéologie, mais d’administration. » La politique a perdu sa charge dramatique, tout le monde étant devenu centriste ou keynésien - hormis les communistes qui, peut-être, cesseront de l’être avec un peu de prospérité ou, pour les plus irréductibles, quelques B-52 et les opérations spéciales de la CIA et du FBI. La richesse, qui déjà, dit-on, dissout les conflits de classes dans la société américaine, amenuise les éventuels conflits d’intérêts entre alliés du « monde libre ». À tel point que les États-Unis, parrains, via le plan Marshall, de la coopération européenne, ne s’opposent pas au marché commun. Au contraire : une Europe prospère constituera à la fois un marché solvable pour les produits américains et un bouclier contre l’expansion soviétique. Encore une fois, le jeu est gagnant-gagnant. Tout va tellement bien.

« Partout dans le monde, au nom du progrès, des hommes qui se nomment communistes, socialistes, fascistes, nationalistes, progressistes, et même libéraux, sont unanimes à estimer que l’État et ses instruments de coercition doivent, en dictant au peuple sa façon de vivre, diriger la marche de la civilisation et déterminer ce qui va advenir. [...]

Oui durant cette période le capitalisme prenait une tournure bien différente de celle de 1847 !

Mais dès les années 1970 une inversion se produit.

Elle se produit avec la complicité des sociaux démocrates. Et l’écroulement du Communisme accélère de façon vertigineuse cette évolution.

Et contrairement à vous je suis convaincu que cette évolution remet à l’ordre du jour les analyses de Marx et Engels. Certes il n’est pas question pour moi de dire que rien n’est dépassé dans l’œuvre de Marx.
Mais je refuse le dogme de « la pensée unique » qui nous dit qu’il n’y a plus rien à apprendre de cette œuvre.

En voici un exemple :

« Ceux qui détiennent les moyens de production matériels détiennent aussi les moyens de production intellectuels1 », expliquent-ils dans « L’Idéologie allemande » (1848 un an après le manifeste) , avant de périr sous les coups d’un développement qu’elle ne sait plus maîtriser et de forces sociales qu’elle ne peut plus contenir. Ainsi de la bourgeoisie au moment de la révolution industrielle. D’abord, elle transforme de fond en comble les conditions de la production et les rapports sociaux, elle introduit « l’agitation et l’insécurité perpétuelles », elle « envahit le globe entier », « poussée par le besoin de débouchés toujours nouveaux », elle permet que, « à la place des anciens besoins, satisfaits par les produits nationaux, naissent des besoins nouveaux, réclamant pour leur satisfaction les produits des contrées et des climats les plus lointains. À la place de l’ancien isolement des provinces et des nations se suffisant à elles-mêmes, se développent des relations universelles, une interdépendance universelle des nations ». Puis la bourgeoisie se révèle à son tour « incapable de remplir plus longtemps son rôle de classe dirigeante [...] parce qu’elle est incapable d’assurer l’existence de son esclave dans le cadre de son esclavage ». Son destin est alors scellé : « La société ne peut plus vivre sous sa domination »3. Ce texte date de 1848. il précède donc de plus d’un siècle la prétendue découverte de la « mondialisation ».

Avant de dire que Marx n’est plus d’actualité je crois qu’il faut être modeste et y regarder à deux fois.

L’histoire de la période qui s’ouvre devant nous n’est pas encore écrite…
Je pense quelle va être pleine de surprise.

Méfions nous de nos jugements par trop rapides.

Cela dit je termine encore en vous conseillant une lecture ( mais là aussi peut être connaissez vous).

Le livre de « Naomi Klein » Editions Acte Sud et dont le titre est : « La stratégie du choc »

Ce livre est un excellent complément du livre de Serge Halimi.

Enfin pourquoi ne feriez vous pas un petit tour sur le blog politique que je viens de créer ( il a 15 jours d’existence)

En voici le lien : http://avenirdegauche.over-blog.com/

Cordialement

Georges dit Le Gravier

Messages

  • Le livre de Serge Halimi est plus qu’un livre c’est de l’histoire.
    Le libéralisme avance et adapte son rythme en fonction des circonstances il semble parfois immobile ou donne l’impression de reculer mais ce n’est que pour repartir de plus belle c’est pour ça qu’il est si difficile à combattre.

  • Marx est il encore actuel ?

    J’en sais rien, mais je sais qu’il a beaucoup de boulot en ce moment.

    Il est invité partout, même sur les plateaux télés, dés qu’il sort d’interviews il court avec un grand drapeau pour appeler aux occupations d’entreprises des travailleurs grecs, soutient la jeunesse en lutte, appelle à la rébellion, soutient les travailleurs contre les licenciements, les batailles sur les salaires, appelle au pouvoir des travailleurs, ici et là bas ...

    Il nous fait de grandes démonstrations en se tirant la barbe, pour montrer que la capitalisme c’est la crise, c’est sa nature.

    Marx c’est un mec qui bosse...

    Là je viens juste de le voir galoper avec un grand drapeau palestinien pour prendre dans ses bras les enfants massacrés par l’état israelien.

    Marx c’est la plus grosse ONG mondiale, la plus pérenne, la plus viable,

    Marx ou crève, en quelque sorte....

    • Un autre monde est possible sans Staline mais avec Marx et d’autres.

      Ce n’était pas destiné à Marx mais à la trilogie Lénine-Staline-Gramsci... et trop rapidement concocté !

      1 - Diamat stalinien contre dialectique (extrait de Bensaïd)

      Le marxisme orthodoxe, érigé en raison d’Etat dès les années 30 par la bureaucratie stalinienne triomphante, n’eut aucun mal à profiter de cet état de choses, pour établir l’emprise de son " diamat " dogmatisé et canonisé. Ce fut une sorte de seconde mise à mort de la dialectique. Une sorte de Thermidor dans la théorie, dont les prémisses sont évidentes dès la condamnation de la psychanalyse et du surréalisme lors du sinistre congrès de Kharkov, et dont l’immortelle brochure du " choryphée de la science ", Matérialisme historique et matérialisme dialectique, fixe la doctrine. La dialectique devient alors une méta-logique formelle, une sophistique d’Etat bonne à tout, et notamment à briser les hommes, en attendant de casser les briques. La dialectique de la conscience critique (Lukacs, Korsch) recule alors devant l’autorité de la Raison d’Etat.

      2 - Un peu de Trosky pas tout.

      Contre le "mal développement" ou le « développement inégal et combiné » du capitalisme :

      "Tous les pays ne se sont pas développés au même rythme, et ne sont pas devenus capitalistes en même temps. Les premiers pays capitalistes (Angleterre, France) ont développé un besoin vital d’expansion : besoin d’envahir de nouveaux pays, pour y introduire le capitalisme, profiter des matières premières et de la main d’œuvre, et pour y écouler leurs marchandises. C’est le stade impérialiste du capitalisme.

      Mais ce que Trotsky a découvert, c’est que les pays « retardataires » ne suivent pas, en accéléré, le même chemin que les premiers pays capitalistes : développement de l’économie de marché, de la démocratie bourgeoise...(comme l’argumentaient les courants social-démocrate et stalinien). Comme le développement capitaliste de ces pays s’effectue sous pression étrangère, cela perturbe profondément les structures économiques, sociales et politiques du pays. Et le résultat est une combinaison (instable et explosive) entre les maux de la vieille société et l’exploitation capitaliste".

      Le « cauchemar de Darwin » comme exemple local :

      "Dans la Tanzanie actuelle décrite par Le cauchemar de Darwin, l’introduction d’une industrie de filets de poissons a complètement détruit l’ancien commerce et l’ancienne société, sans les remplacer par une société bourgeoise démocratique. Cela a créé une classe ouvrière surexploitée dans des usines de conditionnement de poisson, à côté des couches sociales issues de la société traditionnelle (pécheurs, marchands...)"

      2 - Un peu de Lénine, pas tout

      Extait de Octobre 2008 : Quel crise ?
      http://www.legrandsoir.info/spip.php?article7277

      Sur l’Etat, sur le capital fincancier tout n’est pas à jeter. Tout n’est pas à conserver tel quel.

      Sur la crise révolutionnaire : La formule de Lénine

      "La loi fondamentale de la révolution (...), la voici : pour que la révolution ait lieu, il ne suffit pas que les masses exploitées et opprimées prennent conscience de l’impossibilité de vivre comme autrefois et réclament des changements. Pour que la révolution ait lieu, il faut que les exploiteurs ne puissent pas vivre et gouverner comme autrefois. C’est seulement lorsque ceux d’en bas ne veulent plus et que ceux d’en haut ne peuvent plus continuer de vivre à l’ancienne manière, c’est alors seulement que la révolution peut triompher. Cette vérité s’exprime autrement en ces termes : la révolution est impossible sans une crise nationale (affectant exploités et exploiteurs)." Extrait de Lénine, "La maladie infantile du communisme", 1920

      3 - L’apport de Gramsci

      Dans les formations sociales développées, ls marxistes ont "complété" Lénine, qui portait trop son regard sur l’Etat (pas seulement), par Gramsci qui intègre beaucoup plus les contradictions dans la société civile et le nécessaire long combat au sein de la société civile clivée par les rapports sociaux de classes . Il y a vingt ans environ toute une riche réflexion théorique en ce sens s’était engagée au sein de la LCR. Elle avait débouchée en pratique sur un engagement des communistes révolutionnaires dans les associations de lutte les plus critiques dans leur secteur et par un rappel à l’investissement dans les syndicats ouvriers.

      Depuis, le mouvement altermondialiste a tendu, sous l’influence des thèses de T Négri, à tordre le bâton dans l’autre sens : le combat dans la société civile est devenu l’alpha et l’oméga et la conquête du pouvoir d’Etat quasiment inutile. Pour le dire abruptement, Gramsci a évacué Lénine au plan stratégique. Ce n’est pas sans raison : Il faut retenir que l’on importe pas plus la révolution que la démocratie. Le combat idéologique se mène durablement dans la société civile. Ainsi le socialisme doit devenir "national populaire" pour reprendre Gramsci (via D Losurdo).

      Néanmoins, il faut "tenir les deux bouts" et ne pas abandonner l’un pour l’autre. Pour reprendre le propos de Pierre Zarka il faut aussi éviter la coupure entre les deux secteurs d’activité en réduisant le plus possible la démarche délégataire. C’est un autre problème.*

       Les ambiguités de la notion de société civile.

      Le sens commun distingue la société civile de l’Etat ce qui ne dit rien des conceptions en présence de la dite société civile. François Houtart (1998) a posé une triple distinction fort pédagogique, reprise dans l’altermondialisme, par Thierry Brugvin notamment (1) qui n’est pas pleinement satisfaisante.

      * La conception non analytique (angélique) de la société civile est véhiculée par beaucoup d’ONG humanitaire. Elle ne prend pas en compte les rapports sociaux basé sur l’exploitation de la force de travail et les autres rapports de dominations à l’oeuvre dans la société civile. Dans cette conception, la société civile est un secteur opposé à l’Etat comme contre pouvoir. Elle se base sur la simple dénonciation des abus du capitalisme.

      * La conception préanalytique (néolibérale ou sociale libérale) voit bien l’existence de rapports sociaux mais elle les pose comme relevant d’une loi de la nature, comme imposé par le marché, lui même étant conçu comme naturel. Ici la société civile signifie surtout monde de l’entreprise ; Les associations citoyennes ou les syndicats ont un rôle à jouer comme partenaire dans le cadre de la gouvernance globale ou de la gouvernance d’entreprise. Ces acteurs secondaires peuvent pallier les insuffisances du système, notamment quand l’Etat libéral libéralise le secteur social. Le communautarisme religieux peut offrir aussi une solution correspondant à cette vision libérale de la société civile.

      *La conception analytique populaire issue de Gramsci : "La société civile se situe bien au carrefour du marché et de l’Etat, distincte mais en relation dialectique. (...) Elle se compose de l’ensemble des actions collective, fruits des ONG et des syndicats stratifiés en groupes et structurés en classes"

      En fait, la conception néo-gramscienne de François Houtart de la société civile ne fait que considérer une frange de la société civile. Il procède comme les libéraux mais en prenant d’autres acteurs que les entreprises et les capitaliste. Pour Thierry Brugvin cela nuit à une lecture claire des enjeux politiques (p59) . "A noter que Houtard ne fournit pas une définition précise de cette frange de la société civile qui lutte notamment pour la défense des classes populaires." Dans un texte de 2005 ( ) François Houtard parle de "société civile d’en-bas" mais sans dire qui est la société civile d’en-haut. Face à ces difficultés il semble préférable de parler du mouvement social anti-systémique national et international voire mondial avec ses différentes composantes. Parallèlement, l’idée de peuple-classe est à développer (Delarue-2008 *).

       Richesse du mouvement global anti-systémique

      Le mouvement social anti-systèmique n’est pas seulement contre toutes les formes de domination il se veut porteur d’alternatives constitutives d’un autre monde réellement post-capitaliste, ou la logique, les structures et les rapports sociaux du capitalisme seront en place réduite dans la société. Pour certains altermondialistes cet autre monde se nomme néo-socialisme. un monde à expliciter pour le faire vivre dans le peuple.

      Christian Delarue

      NB : Le texte qui suit celui-ci est
      2 : En finir avec ce capitalisme, ouvrir des perspectives vers le socialisme.

      http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article434

      1- Thierry Brugvin : LES MOUVEMENTS SOCIAUX FACE AU COMMERCE ETHIQUE

      http://thierry.brugvin.over-blog.com/article-7316471.html

      http://www.legrandsoir.info/spip.php?article7277