Accueil > "On se fait du fric sur le dos des chômeurs !"

"On se fait du fric sur le dos des chômeurs !"

Publie le mercredi 9 novembre 2005 par Open-Publishing

de Pierre Nicolazo, militant à Agir ensemble contre le Chômage !
Communauté Urbaine de Nantes (AC ! CUN)

Afin de résorber le déficit de l’Unedic, le patronat propose de revenir à la dégressivité des allocations chômage. Est-ce une solution satisfaisante ?

 Il y a sans doute d’autre solutions pour résorber ce déficit. Pour les trouver, il faut remonter aux sources du problème. Le déficit actuel de l’Unedic est clairement lié à l’instauration du PARE (ndlr : Plan d’aide au retour à l’emploi), en 2000. Nous étions alors dans une période d’excédent financier. Le PARE a mis en place le système d’"activation des dépenses" : les recettes de l’Unedic ont été redistribuées directement au patronat et à des structures "d’insertion" des chômeurs. En réalité, ces entreprises proposent des stages bidons et autres prestations extrêmement juteuses qui ne permettent pas pour autant un retour à l’emploi.

L’argent de l’Assedic est allé d’abord aux employeurs et à ces structures, mais pas aux chômeurs, qui en ont pourtant le plus besoin.
Aujourd’hui, le gouvernement propose encore de réduire les droits des chômeurs. La révolte des banlieues est en grande partie liée à cette situation catastrophique. On mène une véritable guerre aux pauvres.
Les allocations chômage sont déjà à un niveau très bas.

La dégressivité de ces prestations n’a jamais facilité le retour à l’emploi. Les statistiques de l’Unedic sont là pour le prouver.

Les syndicats proposent de leur côté de taxer les entreprises qui abusent de "l’emploi précaire". Pensez-vous que cette mesure soit réalisable ?

 A mon avis, les syndicats ne réussiront pas à faire passer grand-chose. Cela fait 25 ans que les droits des chômeurs se détériorent. Les négociations syndicats-patronat sont basées sur le principe d’un 50/50. Presque systématiquement, un syndicat se range du côté du patronat : avant, c’était FO, aujourd’hui la CFDT... Au final, le Medef finit toujours par l’emporter. Et on continue pourtant à faire payer la note aux chômeurs. La refonte des minima sociaux et l’amputation de la CMU vont dans le même sens. Toutes ces mesures nourrissent la révolte de demain.
Concernant une éventuelle taxe sur l’emploi précaire, nous y sommes évidemment favorables. Mais aujourd’hui, tous les nouveaux contrats sont précaires, à commencer par le CNE. Le Medef n’acceptera jamais qu’on y touche et encore moins le gouvernement. Ces contrats sont en effet d’excellents moyens pour dissimuler la réalité du chômage...

En tant qu’association de défense des chômeurs, quelles sont les mesures que vous souhaiteriez voir figurer dans la prochaine convention Unedic ?

 Il n’y a qu’une seule solution pour résorber le chômage : supprimer le PARE pour que les chômeurs soient à nouveau indemnisés.
Nous demandons l’abrogation définitive du PARE et l’indemnisation de toutes les formes de chômage à un niveau qui permette de vivre décemment.
Pour le gouvernement et le patronat, les chômeurs représentent un marché extrêmement lucratif. Ils se font du fric sur leur dos, sans aucun scrupule. Il est extraordinaire de dire que les chômeurs sont responsables de leur situation. Ils n’en seraient pas là sans les employeurs, qu’on devrait plutôt appeler "licencieurs" en ce moment. Si l’on continue sur cette pente, on prépare la disparition de l’ANPE !

Au sein de notre collectif, nous privilégions l’action de terrain dans les Assedic, plutôt que les grandes manifestations. Nous n’avons pas beaucoup d’espoir dans les négociations à venir. Les syndicats n’arrivent pas à porter les revendications des chômeurs. Tous les trois ans, les droits des chômeurs continuent à se dégrader.

Il faudrait revoir totalement le système et impliquer les premiers concernés. Mais on ne peut pas négocier sur des bases fausses : les chiffres du chômage ne reflètent pas la réalité et le nombre de précaires ne cesse d’augmenter. Dans ces conditions, le retour à l’emploi est-il possible ? C’est une question qu’on peut légitimement se poser lorsqu’on voit des travailleurs rémunérés moins de 400 euros...

Propos recueillis par Chiara Penzo

http://permanent.nouvelobs.com/social/20051108.OBS4555.html