PS : mille et une astuces pour truquer le Congrès du Mans

de Lucky Douillard

Si l’on croit le volumineux dossier paru cette semaine dans l’hebdomadaire "Politis" (3 au 9 nov. pages 4 à 7), le congrès du Mans (18 au 20 novembre prochain) est bizarrement parti.

L’électorat PS ayant voté NON, il reste les "militants". Mais leur vote sera-t-il respecté, si l’on en croit une impressionnante liste de "trucs" maison ?

Les adhérents PS devraient voter sur les différentes motions la semaine prochaine, dans leurs sections. Mais la sincérité du scrutin et les nombreuses irrégularités à prévoir réclameraient peut-être la venue d’urgence d’une escouade d’observateurs de l’ONU, et à tous le moins un record mondial de constats d’huissiers.

Détail non négligeable : Ce ne sera pas le congrès de la "clarification" politique annoncée (renvoyée à plus tard), mais en revanche, les votes serviront à établir les rapports de force numériques dans chaque section et départements, et donc les précieuses investitures futures.

Liste de méthodes pour truquer un congrès PS, établie d’après "Politis".

I - Epurer les listes d’adhérents PS

I-A Ecarter les adhésions non contrôlées
– Ne pas transmettre à Paris les demandes d’adhésion reçues
– Les faire traîner pour que les adhésions tombent après la date de 6 mois avant le congrès, seuil probatoire d’adhésion préalable pour pouvoir voter
– Déclarer que la demande d’adhésion s’est « perdue »
– Augmenter unilatéralement le période probatoire à un an (non statutaire !, mais cela s’est vu localement)
– Refuser carrément des adhésions (le temps de passer la commission arbitrale, ça peut en dégoûter plus d’un de la politique)

I-B - Favoriser les adhésions amies
– Organiser des adhésions groupées de « militants » inconnus (ou « fausses cartes » ?)
– Faire adhérer les employés des mairies, des collectivités locales, des organismes para-publics et subventionnés
– Gonfler les effectifs d’une fédération départementale (elle sera mieux représentée au congrès)
– Gonfler le taux de participation au vote (cela permet de favoriser la motion arrivée en tête dans un département, au détriment des autres, et peut s’additionner utilement aux chiffres des autres départements, pour asseoir le résultat national)

II - Interdire à l’opposition la connaissance du parti
– Ne pas publier les résultats des questionnaires adressés aux militants
– Entraver les études sur le PS de chercheurs indépendant (et oui !)
– Ne pas laisser accéder l’opposition à la liste des adhérents (classique, mais efficace)

III - Acheter les votes

III-A Acheter les votes en détail
– Promettre individuellement des postes, des avancements, des subventions.

III-B Acheter les votes en bloc
– Le cas des grosses fédérations.

On avait été étonné dernièrement par la Fédération des Bouches-du-Rhône (BdC), numériquement très forte, et traditionnellement faiseuse de roi au PS, avec le Nord-Pas-de-Calais. Elle vient de s’aligner « unanimement » sur la motion Hollande après des velléités d’indépendance. Selon Politis, citant le journal Le Pli, ce ralliement aurait été acheté discrètement, dans le dos des militants par trois offres parisiennes : garantie de représentation de la direction BdC de 5% à Paris (le congrès effectué même avant le vote !), réfection d’un local marseillais aux frais de Paris (c’est beau la politique), « autonomie totale » pour les investitures (gare à la violation des statuts). A 6500 cartes revendiquées en BdC, la motion Hollande serait donc sauvée. A quoi tenait le destin de la France !

IV - Empêcher le débat interne
– Changer au dernier moment la date d’une réunion de section prévue pour les débats préparatoires, afin d’empêcher la venue d’un représentant d’une motion indésirable (et annoncer ensuite faussement qu’ils se sont dégonflés !)
– Organiser cette réunion dans une salle excentrée, à l’autre bout du département, et si possible à une heure inhabituelle
– Annoncer cette réunion la veille seulement, ou le lendemain, ou pas du tout !

V - Fixer les résultats avant le congrès
– Négocier préventivement le résultat naturel de chaque motion dans une région donnée, avant le vote, y compris avec « ajustement » amiable ( !)
– Ne pas respecter la consigne nationale de voter tous le même jour et la même heure, afin de dissuader les contrôles
– Faire voter les militants PS dans le bureau personnel d’un élu local, sous son oil intimidant (ça s’est vu l’an dernier !)
– Faire annoncer sur France Info un résultat partiel local avant même la clôture du vote des adhérents PS (ça s’est vu aussi l’an dernier !)

La plupart de ces hauts faits sont détaillés par Politis, avec des témoignages, des références récentes et des localisations précises. Non, la France n’est pas qu’une république bananière ! Jaurès réveille-toi !

Petit rappel (1) :

Ils seraient 127 000 adhérents PS invités à voter les motions pour le congrès du Mans. 127 000 avec une moyenne d’âge de 55 ans, 40% de retraités, 3% seulement de chômeurs, et selon F. Hollande moins de 5% d’ouvriers et moins de 5% de jeunes.

Ils ont la responsabilité écrasante de décider des investitures électorales à tous les niveaux, investitures que leur électorat n’aura plus qu’à ratifier (ni primaire, ni possibilité de vote préférentiel sur la liste présentée, comme dans d’autres pays).

Le PS est faiblement implanté dans les milieux populaires, mais en revanche, il est riche d’un tiers des adhérents qui sont élus ou anciens élus, et d’un très grand nombre de. futurs élus. Selon un chercheur à Sciences Po, on assiste à un « enfermement du PS autour de personnes qui ont des positions électorales ou qui sont des fonctionnaires territoriaux dépendant matériellement de ces élus. » (On comprend mieux désormais pourquoi certains veulent décentraliser encore plus les services publics, et même peut-être l’Education nationale, ça créerait des clientèles captives et des postes à offrir aux méritants.)

Rappel (2) :

Après tout, François Hollande a bien soucis, avec tous ces satanés adhérents tentés de mal se conduire, voire de suivre l’électorat. Quand on pense aux militants UMP qui eux n’ont jamais de mauvaises tentations, n’ayant jamais que le choix éternel entre Sarko et Sarkozy !

Rappel (3)

Récemment le petit Parti Radical de Gauche avait été condamné par la justice à refaire une élection interne, sur plainte d’un adhérent suite à non-respect des statuts. On voit mal, sauf paresse ou négligence, la gauche du PS ne pas utiliser les voix de Droit pour faire respecter le vote des adhérents.