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"Pourquoi j’ai signé la tribune contre la diplomatie de Sarkozy"

Publie le mercredi 23 février 2011 par Open-Publishing
3 commentaires

Hier "Le Monde" a publié une tribune très critique sur la politique étrangère de Nicolas Sarkozy dont il est beaucoup question aujourd’hui. Elle était rédigée par un groupe de diplomates actifs et à la retraite qui s’est surnommé « Marly ». J’ai interrogé l’un des rédacteurs du texte - qui souhaite rester anonyme. Voici son témoignage.

 

« Nous nous sommes retrouvés le 9 février dans le musée du Louvre, au café Marly (d’où le nom de notre groupe). Nous étions une demi-douzaine. Nous avons rédigé un premier texte, puis nous l’avons fait discrètement circuler. Au total, une trentaine de personnes (dont une vingtaine de diplomates toujours en activité) ont apporté leur touche à cette tribune.

 

Pourquoi maintenant ? Il y a eu plusieurs éléments déclencheurs. D’abord bien sûr le sentiment d’un vide sidéral après la révolution égyptienne. Alors qu’Obama s’exprimait tous les jours, l’Elysée était muet, ne savait que dire, si ce n’est critiquer son ambassadeur sur place.

Les diplomates ont été très choqués par les fuites organisées par l’Elysée contre l’ambassadeur en Tunisie, Pierre Ménat. On n’a montré aux journalistes qu’une partie de son télégramme sur la révolte. Malgré ce que l’on a écrit, Ménat parlait bien de l’hypothèse d’« un départ précipité » de Ben Ali. Il a servi de bouc émissaire d’une politique désastreuse. De telles fuites émanant de l’Elysée pour viser l’un de ses collaborateurs, c’est inédit !

 

Puis il y a eu la nomination de Boris Boillon à Tunis. Nous avions appris que Michèle Alliot-Marie avait proposé le nom d’un diplomate aguerri, l’actuel ambassadeur à Tripoli, François Gouyette. Mais l’Elysée a préféré envoyer ce jeune homme impulsif et incompétent. Malgré ce qui a été dit, nous savions qu’il a été un très mauvais ambassadeur à Bagdad. Encore une nomination incohérente après celle de Rama Yade à l’Unesco qui considère son poste comme une base alimentaire pour poursuivre sa carrière politique. Toujours le mépris du président de la République pour les diplomates - mépris dont il ne se cache même pas ! D’où la prise en main des dossiers sensibles de la diplomatie par le secrétaire général de l’Elysée, le préfet Claude Guéant.

 

Enfin et surtout il y a le style désordonné de la diplomatie sarkoziste, obsédée par les coups. Il n’y a aucune vision à long terme. L’affaire Cassez est symbolique de cet état d’esprit : on est prêt à rompre avec Mexico pour une affaire de droit commun ! Les diplomates signataires - de droite comme de gauche, énarques ou pas - considèrent que le président de la République a renoncé à une politique étrangère originale, singulière, visible qui était la marque de fabrique du gaullisme, qui a été reprise par François Mitterrand et Jacques Chirac. 

 

Que faire ? A court terme, il faut tirer d’urgence les leçons de la Tunisie. On doit entretenir des relations avec des dictatures mais il ne faut plus être complaisant comme Nicolas Sarkozy l’a été. Dans ces pays, il faut autoriser les diplomates à rencontrer les représentants de l’opposition. C’est ce qu’a fait le Département d’Etat. En Tunisie et en Egypte, les Américains avaient des contacts avec les opposants. Lorsque leurs homologues français souhaitaient faire de même, Paris leur tapait sur les doigts. Il ne fallait pas froisser l’autocrate en place. Cela doit cesser."

http://globe.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/02/23/pourquoi-j-ai-signe-la-tribune-contre-la-diplomatie-de-sark.html

Messages

  • Pas mal..Ils ont attendu longtemps et beaucoup de bévues avant de s’exprimer .
    On peut dire qu’avec ce Sarkosy, la voix de la France s’est définitivement éteinte dans les pays Arabes et on les comprend .

  • A la lumière des procédés de Staline pour son accès au pouvoir absolu, alors qu’il n’était encore que sous-secrétaire du ComitBureau, Sarko place ses petits pions partout, à tous les niveaux de l’État et principalement comme "état d’esprit", comme manière de penser comment faire fonctionner un État et comme il **doit** fonctionner. Et cet "état d’esprit" déteint partout, à tous les niveaux des rouages de l’État : police surtout, droit, répartition des richesses produites, avilissement de la pauvreté, etc.

    Ce qui fait que quelque soient les critiques émanant des outils de l’État qui ont été installés comme instrument de son pouvoir, du fait qu’il ne corrobore **plus** cet "état d’esprit", elles sont rejetées comme critique "politique" — ce qui est VRAI, véritable — de Sarkozi. Autrement dit, comme toutes ces tentatives de la bande à Sarko d’instaurer un "état d’esprit" uniquement favorables à leur manière de comprendre la fonction de l’État, défaille et ne correspond pas du tout à ce qu’on pourrait attendre d’un État de Droit, elles sont suspectées de déstabilisation de l’État, ce qui est totalement faux, bien au contraire.

    Que ces critiques proviennent des Palmés de l’Académie, d’une Assemblée de diplomates, ou de quoi ou qu’est-ce, alors que ces critiques sont des critiques d’un État arrivé à un état d’esprit critique vis-à-vis de lui-même, l’aveuglement de l’état d’esprit parlé plus haut, va refuser d’y voir les prémices de sa chute et, au contraire de l’homme qui va lâcher sa proie pour gagner la liberté, même le ventre vide, va au contraire s’enferrer dans son propre piège gagné par l’âpreté du gain prévu et escompté.

    À la fois, toutes ces démissions ne peuvent être prises par cet État au sérieux, car cela voudrait dire qu’il a tord. Donc, que ce soit ici ou là, il est foutu !... malgré tous ses efforts d’instaurer un état d’esprit pourri, délétère et mortifère en France