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Quai du bonheur, Canal St-Martin, France
Publie le mardi 9 janvier 2007 par Open-Publishing8 commentaires

de Frédéric Vignale
Lundi 8 janvier 2007. Je me rends quai de Jemmapes en longeant le Canal St-Martin, simplement pour m’imprégner du climat, pour voir, écouter, capter la réalité en regard des images médiatiques vues par la France entière depuis quelques semaines. Il pleut légèrement, le ciel est gris. Nous ne sommes pas dans un film de Marcel Carné, il y a la couleur dans ce décor-là bien palpable.
Les tentes rouges sont là, de chaque côté de la rive et sont plantées jusqu’à l’Hôtel du Nord,e vrai pas celui reconstitué pour la légende en Noir et blanc. Nous ne sommes pas au Cinéma mais dans la vie, en 2007 où le drame se joue, où les gens meurent vraiment et souffrent, pas comme dans les bobines, pas en 24 images par secondes.
Aujourd’hui je ne suis pas de gauche, je ne suis pas de droite, ni du milieu ni d’aucun extrême... je suis un humain qui regarde son siècle en dehors de tout clivage politique, parti-pris idéologique.
Rarement dans ma vie je n’ai saisi dans une foule, dans un groupe, un tel sentiment de convivialité, de simplicité, une telle communion entre les êtres. Journalistes, badauds, clochards, exclus, jeunes, vieux, inclus, logés, mal logés, pas trop bien logés, marginaux pour la première fois depuis longtemps se parlent, s’écoutent, se regardent sans se faire honte, sans s’aggresser.
Nous sommes tous des enfants de Don Quichotte, la précarité exclue de moins en moins de monde, elle accueille en son sein tous les milieux, toutes les races, tous les parcours.
Face à ce microcosme sauvage, délicieusement révolutionnaire dans le meilleur sens de ce terme, face à ce collage improbable de gens de tous les horizons se dégage une étrange poésie positive, un sentiment trop peu ressenti qui faire croire qu’une prise de conscience globale est là.
Sur un des ponts qui traverse le Canal on peut y lire des messages divers, des tags, des dessins comme représentatif du meilleur Art urbain. "Quai du bonheur" sur un barre métallique avec une date, une interpellation polie mais inquiète à Nicolas Sarkozy, des messages d’amour...
Autour de moi les individus discutent avec passion ou calme. Une jolie jeune fille brune est assise à l’entrée d’une des tentes et s’entretient avec un des occupants ; ils rient, leurs yeux se toisent avec fièvre, on peut voir des étincelles dans leurs regards.
Plus loin, un homme à lunettes refait le monde, invective son voisin en disant que le combat continue, que la France a compris le message et que rien ne sera plus comme avant. On a envie de le croire.
Des cagettes, des poubelles amassées sous un pont plutôt que de faire décharge publique ont des allures d’oeuvre d’Art contemporain du meilleur effet. C’est comme si le temps avait été stoppé net et que tous les rôles étaient échangés. Le laid devient beau, le malheur et l’exclusion sont devenus outils de partage et de respect, d’Amour.
A côté de cela les discours de haine des écrivains racistes, des pseudo intellectuels exilés à St-Germain, au Canada, en Suisse ou ailleurs paraissent bien ridicules, les petits ego des moralisateurs aussi.
Il prends au tripes ce quai du bonheur, il fait avancer les choses, il rend notre regard sur le monde meilleur.
Bien sûr il faudra lever le camp demain ou après-demain mais l’endroit mérite de rester un symbole de liberté et d’amour et le quai Jemmapes d’être rebaptisé.
Messages
1. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 9 janvier 2007, 05:54
MERCI POUR CE TEXTE
JE DEMEURE A CANNES MAIS AI TOUJOURS ETE AVEC EUX,
AVEC VOUS, EN ESPRIT
Michèle
2. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 9 janvier 2007, 06:13
raison de plus pour y rester !
cache cache bourriquot autour de chiffres présentés par cete réforme sur le logement social de la promotion villepin, équipe Borlo posant au départ d’arriver à 120000 par an. Hors à l’heure actuelle nous en sommes à 90000 et sont prévus d’y ajouter 27000 places dans l’immédiat et le maintient des 3000... Comptaient-ils les faire disparaître ? Addition faite, nous arrivons donc aux 120000 promis au départ qui ne sont qu’ine simple restitution d’une demande vieille de dix ans au moins et rien n’est encore certifié pour éradiquer les raisons qui poussent les jeunes mais aussi des plus vieux sur les chemins de la précarité, la solitude, l’exclusion...
De plus, au rythme où s’effectuent les licenciements et les politiques d’expulsion, la demande ira s’accroissant, rajoutez-y la pauvreté conséquente à la baisse du pouvoir d’achat dû à une augmentation du coût de la vie appuyée par une augmentation des salaires toujours à la traîne, nous en sommes en droit d’exiger le doublement de ces propositions ! ! !
De plus seront toujours prioritaires les chômeurs encore indemnisés (donc, toujours interdiction de refuser une offre ANPE, mesures expéditives de radiation en vigueur à l’exigence), les travailleurs pauvres, individus en rupture de contrat temporaire ou de plus longue durée ; bref, des individus toujours encore attaché au monde du travail, pour les vrais SDF, les gens à la rue, l’espoir reste mince de se voir attribuer rapidement une cage à clefs... Avec la pauvreté gallopante, m’étonnerait que ce qui était prévu depuis dix ans au moins et qui sera réalisé au plus sera une avancée réelle et suffisante pour répondre à la demande de prise en charge sociale une fois passée la sélection pour y accéder et les critères pour y avoir droit respectés ! ?
ce jeu de chiffres fictif rappelle la même langue de bois pratiquée par Villepin au début de la crise du CPE où les avancées promises et prévues consistaient à faire reculer les revendications et la volonté de ne pas tenir compte du plus bas de l’échelle. Rien de tel pour briser la mobilisation que d’avancer des chiffres (tiens, encore des quotas) qui ne seront pas respectés puisqu’ils ne tiennent pas compte du secret des licenciements à venir... Même en ce qui concerne "l’expérience d’hébergement" avec chiens tenus en laisse cela ne suffira pas puisque maintenant ceux qui s’en privaient jusque là pour avoir droit à un hébergement voudront et pourront maintenant posséder un animal de compagnie... chats, chiens, canaris, cochons d’indes, lapins domestiques, hamsters, arraignées et rats de compagnie pourront désormais cohabiter dans les centrales d’accueil ! ! !
1. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 9 janvier 2007, 13:09
Le texte est simple et joliement écrit. Merci,
l’intervention ou performance des Don Quichotes ne doit pas s’arreter ainsi comme ce joli texte d’ailleurs.
Je me souviens d’un étudiant en école d’art qui avait présenté ce projet : des poches plastiques de la taille de gros champignons representant de petits monts qui proliféraient partout dans l’école. C’était en 1997, au havre.
Visonnaire ou perception d’une logique évidente. je ne sais pas.
Si la perception du beau et de la pauvreté peut changé au regard des gens alors les don quichottes auront gagné eux aussi leur paris.
courrage et bravo, continuez !
2. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 9 janvier 2007, 18:11
D’après certains témoignages des gens sans papiers qui ont planté leur campement au côté des autres, ont été éconduits assez séchement par les organisateurs.
Il n’y a donc rien de spontané dans ce mouvement et demandons-nous pourquoi en si peu de temps on a tant parlé d’eux ? Quelle idée de se commettre à la télévision. Quels soutiens sont les leurs ?
3. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 9 janvier 2007, 19:10
leur succès dérange . Ils ont su mettre en scène la misère. Ce n’est pas encore gagné. Alors il vaut mieux ne pas leur tirer dessus. Peu de gens ont réussi pareille mise en lumière de la misère. Si le resf avait eu plus d’imagination, il y aurait eu moind d’expulsions.
Il est difficile de gérer des gens en telle difficulté. Augustin et son frère et les autres, pascal and co, font tout leur possible.
Il faut y être et moins critiquer !
4. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 9 janvier 2007, 19:12
pascal et les autres : il n’y a pas qu’augustin font ce qu’ils peuvent pour maintenir le calme. Allez y ! aidez les ! et critiquez moins !
Il fait froid sur le canal !
5. Quai du bonheur, Canal St-Martin, France, 10 janvier 2007, 21:47
A-t-on besoin de mettre en scène la misère qu’on croise chaque jour et qu’on n’a pas toujours le courage de regarder en face ? Cette opération est réussie ? Tant mieux cela empêchera la France de voter pour les extrêmes comme le déclarait Monsieur A. Legrand sur un journal de 13 H sur France 2, à Madame Laborde qui déplorait dédaigneusement la venue d’une "faune" autour des tentes. C’est vrai que la misère qui s’agglutine n’a rien d’esthétique ,si on ne la "travaille" pas pourle public. Le conte de Noël est terminé : Droite et gauche renvoyées dos à dos, je m’en vais boire un coup avec mon patron qui prépare un plan "social", on va parler de Don Quichotte et du sosie de l’Abbé Pierrre qui ravissait la journaliste du Figaro...
JdesP