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Quatre Résistants, Un Bunker, Deux procès

Publie le samedi 13 mars 2010 par Open-Publishing

Quatre Résistants, Un Bunker, Deux procès

Le procès des administrateurs de la Fédération anatolienne s’est ouvert ce jeudi devant le Tribunal régional de Düsseldorf (OLG).

Suspectés d’avoir apporté un soutien financier à l’organisation marxiste clandestine DHKP-C (Parti-Front révolutionnaire de libération du peuple), Cengiz Oban, Nurhan Erdem et Ahmet Istanbullu avaient été arrêtés en novembre 2008 et soumis depuis à un régime d’isolement inflexible.

Et comme on pouvait s’y attendre, l’ambiance était plutôt électrique dans l’enceinte de ce tribunal aménagé en forteresse au milieu d’une zone industrielle guère plus accueillante.

En effet, dès les premières minutes des débats, la tension est montée de manière spectaculaire entre les avocats de la défense et l’accusation lorsque le procureur a exprimé son souhait de voir les trois militants condamnés à 10 ans de prison.

Plusieurs fois dans la journée, les policiers déployés dans la salle procèderont à la relève en marchant au pas sous le regard moqueur de près de 90 sympathisants agglutinés derrière des vitres de protection.

Le président du tribunal quant à lui ne cessera de mettre ces spectateurs solidaires en garde et de les menacer d’expulsion de la salle voire d’inculpation pour offense à la Cour en cas d’ovation, de tentative de communication avec les inculpés ou de somnolence.

Et lorsque l’avocate d’Ahmet Istanbullu prendra la parole, le juge ira jusqu’à l’interrompre avec dédain en déclarant : "cela m’est égal que le procès dure cinq ans s’il le faut".

Deux psychologues installés entre les juges et les procureurs ont examiné et pris note de chaque fait et geste des inculpés et de leurs sympathisants comme s’ils n’étaient que de simples cobayes.

Au même moment, dans la salle voisine, se tenait une audience du procès de Faruk Ereren, révolutionnaire turc menacé d’extradition.

Les 90 personnes rassemblées dans le tribunal pour suivre les débats judiciaires et manifester leur soutien aux militants détenus ont ainsi fait la navette entre les deux salles d’audience tout au long de la journée.

Hasard du calendrier ou démonstration de force préméditée, les autorités judiciaires allemandes avaient réservé tout le "tribunal-bunker" de Düsseldorf pour en découdre avec le DHKP-C dans deux affaires différentes.

Au procès d’Ereren, un témoin dénommé Hüseyin Pak accusé d’avoir apporté une aide administrative à l’inculpé pour lui permettre de bénéficier de soins médicaux, a dû subir un véritable interrogatoire de la part du juge, contraint de divulguer ses fréquentations politiques, de dire ce qu’il pensait de la lutte armée et de se souvenir de toutes les déclarations qu’il avait faites en 1996 auprès des services d’aide aux réfugiés jusque dans le moindre détail, sous peine d’être déchu de son droit d’asile.

Agacé par les réponses laconiques du témoin et par le manque d’éléments à charge de l’inculpé après plus de 50 audiences, le juge a ordonné l’audition d’un ancien transfuge du DHKP-C travaillant pour la police allemande depuis plus de 16 ans.

Alors que l’audience du procès Ereren s’est achevée vers 16h30, celui des trois membres de la Fédération anatolienne a duré jusque 19h15.

En quittant les lieux, les militants anatoliens ont une dernière fois salué leurs camarades incarcérés en déployant au beau milieu d’une nuit d’encre, un calicot à leur effigie, reluisant sous un réverbère du tribunal.

Les débats du procès de Cengiz Oban, Nurhan Erdem et Ahmet Istanbullu reprendront le 18 mars tandis que ceux concernant Faruk Ereren, le 25 mars prochain.

Comité des libertés
comitedeslibertes@gmail.com
Le 12 mars 2010