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Quelques mots sur la situation en Grèce concernant les immigrés, l’extrême droite et le mouvement
Publie le vendredi 4 mars 2011 par Open-PublishingSoirée de soutien aux 300 immigréEs grévistes de la faim en Grèce, Lyon, 11/03/2011
En ce moment la Grèce avec sa position stratégique entre l’est et l’ouest de l’Europe constitue l’un des passages les plus importants, peut-être le plus important, des immigrés pour arriver en Europe. Les points de passages les plus souvent utilisés sont la frontière avec la Turquie au nord-est du pays (rivière Evros) et les nombreuses îles de la mer Egée, qui sont juste à côté des côtes turques.
Les immigrés souvent vendent toutes leurs propriétés dans leurs pays d’origine pour obtenir de l’argent demandé par les transporteurs.
Ils arrivent aux frontières grecques après des jours de marche, où ils doivent affronter leurs derniers obstacles : les mines installées par l’armée grecque aux différents endroits de la frontière avec la Turquie, et les bateaux vieux et surchargées s’ils traversent la mer Egée…
Lire aussi notre article ‘‘Accueil’ des immigrés’.
Arrivés en Grèce, les immigrés ont souvent la volonté de continuer leur voyage vers l’Europe occidentale.
Ceci n’est pas facile, d’une part à cause du fait que la Grèce n’a pas de frontières continentales avec les pays dits riches de l’Europe, et d’autre part à cause des lois votées par l’Union européenne et de la politique migratoire que suivent plusieurs pays européens.
Plus précisément en ce qui concerne les demandeurs d’asile, la Grèce a le pourcentage le plus bas parmi les pays européens, c’est-à-dire 1%. Les pays qui la suivent sont l’Irlande (4%), l’Espagne (8%) et la France (14%). D’ailleurs la loi de Dublin II dit que les demandeurs d’asile à un pays européen qui n’y ont pas été acceptés, doivent être renvoyées au pays d’entrée dans l’Union (très fréquemment donc en Grèce). Ainsi on peut comprendre qu’un cercle vicieux se reproduit au sein de l’Union Européenne.
L’obtention des papiers est aussi assez difficile en Grèce. S’ils ont la chance d’être acceptés, ils devront attendre beaucoup de mois et payer une somme non négligeable pour leurs cas.
Mais une très grande partie d’entre eux, reste sans papiers, sans assurance médicale et sans droits.
Ceci les rend vulnérables aux exploitations du patronat. Le cas d’un patron embauchant des immigrés sans papiers pour une période courte, et ensuite les dénonçant à la police pour les arrêter et les renvoyer aux frontières, sans les payer bien sûr, n’est pas le scenario d’un mauvais film…
Tout ce mélange de rétention, d’exploitation et de pauvreté pousse souvent une partie des immigrés à la marge de la société, ce qui peut expliquer l’augmentation de la criminalité. Ici, il parait important de souligner que la Grèce n’ait pas développé encore une politique d’intégration sociale des immigrés et que les conditions d’accueil des demandeurs d’asile sont très mauvaises.
Un exemple marquant de cette situation est le quartier d’Aghios Panteleimonas, pas loin du centre d’Athènes.
Des groupes d’extrême droite essaient de profiter de cette situation, avec une présence fréquente dans le quartier, pour le « défendre » (en attaquant les immigrés…).
Pour la première fois le parti politique d’extrême droite (même fasciste-naziste) Xrisi Avgi (Aube en Or) a élu un représentant, Nikolaos Michaloliakos, au conseil municipal d’Athènes aux élections de novembre 2010, surtout par des votes provenant des quartiers défavorisés et notamment d’Aghios Panteleimonas. Des rumeurs parlent des électeurs de ce parti qui ont changés leurs papiers électoraux afin de voter dans ce quartier particulier, avec le but d’élire leur représentant. Finalement, N. Michaloliakos a obtenu 5.3% des votes à Athènes et a été élu au conseil municipal. Son slogan était « Refaire d’Athènes une ville grecque ».
Il ne faut pas confondre ce groupe d’extrême droite avec le parti politique de LAOS de Giorgos Karatzaferis. Le LAOS fait partie du parlement grec depuis 2007 en introduisant une rhétorique d’extrême droite, souvent cachée et en essayant de se montrer centre-droite.
En ce moment, et après l’éclat de la crise économique, le parti de LAOS est le seul à voter les mesures austères du gouvernement de PASOK (socialiste). Les compliments mutuels sont assez fréquents d’ailleurs…
Tout ce contexte crée une situation très hostile vis-à-vis des immigrés, qui sont constamment accusés par ce qui en Grèce est appelé le front noir, incluant le PASOK, le LAOS, le parti de Chrisi Avgi et bien sûr supporté par les medias dominants. Parmis les accusations on retrouve la criminalité, les maladies, le chômage etc…
Détail que ce front oublie facilement : les grecs se sont retrouvés dans la même situation de réfugiés en 1922 après leur expulsion de Smyrne, et dans celle des immigrés après la deuxième guerre mondiale en partant partout dans le monde (Allemagne, Belgique, Etats Unis, Canada, Australie etc)
En ce qui concerne le mouvement, des initiatives de soutien et de solidarité se sont créées depuis les années 90 après la première vague des immigrés des pays de l’Europe Occidentale (surtout de l’Albanie).
A Athènes le Réseau de Soutien Social des Réfugiés et des Immigrés existe depuis 1995, suite à l’initiative du Réseau pour les Droits Politiques et les Droits Sociaux. En 1997 un lieu autogéré des immigrés a été créé par ce Réseau dans le quartier d’Exarcheia dans le but d’offrir un hébergement ainsi que de créer un lieu social ouvert à des individus et des équipes pour des discussions et des manifestations politiques.
Ce lieu a été attaqué deux fois ces dernières années :
Le 24 février 2009 des inconnus ont jeté une grenade sur la fenêtre du lieu, pendant qu’une manifestation de l’Association des Objecteurs de Conscience (le service militaire étant toujours obligatoire en Grèce) avait lieu (environ 20 personnes)… La grenade a rebondi sur la fenêtre et a explosé sur le trottoir, provoquant des dommages dans la rue Tsamadou, sans aucune blessure.
Le 5 mai 2010 des forces de police motorisées, équipe Delta, ont attaqué le lieu sans raison apparente, blessé des gens qui étaient dedans et provoqué plusieurs dégâts.
Des initiatives pareilles existent dans d’autres villes en Grèce, telles que Thessaloniki, Patras, Chania, Volos et Rethimno.
Assez souvent des associations/ partis/ militants organisent des actions de solidarité avec les immigrés, notamment dans le quartier de Aghios Panteleimonas. Ils ont à faire face aux fascistes qui organisent des contre-manifestations et à une police qui la plupart du temps se montre amicale (le moindre qu’on puisse dire) envers ces derniers.
Un article, en français, est paru sur le site contrainfo.espiv.net concernant une manifestation à la fois antifasciste et solidaire aux immigrés, qui a eu lieu le 8 octobre 2010.
Des photos de cette manif peuvent être trouvées sur Indymedia Athènes ici.
Le 15/01/2011 encore une manifestation était organisée par l’Initiative Unis Contre le Racisme et la Menace Fasciste, et la participation des syndicats, des étudiants et des communautés d’immigres. A peu près 2.500 personnes y ont assisté, avec une présence importante de la part des immigrés.
La manifestation était censée arriver au quartier d’Agios Panteleiomonas et se poursuivre avec un concert de solidarité.
En arrivant au quartier, les manifestants ont rencontré un petit groupe de fascistes, qui faisait une contre-manifestation. Les forces de police n’ont pas laissé les deux groupes se rapprocher, et ont dispersé tout le monde avec des gaz lacrymogènes.
Finalement, la police n’a pas permis le commencement du concert, même si les organisateurs avez le permis de la Préfecture.
Vidéo
Photo ici.
Ces derniers jours, le mouvement de solidarité avec les immigrés est passé dans une phase différente, suite à la grève de la faim de 300 immigrés à Athènes et à Thessalonique. Vous pouvez en lire plus sur le sujet ici :
Appel des immigrés, grévistes de la faim
Personne n’est illegale : Solidarité concrète avec la lutte des 300 immigrants-travailleurs