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Redistribution Arnaque boursière : un proche des Chirac suspecté

Publie le mercredi 26 décembre 2007 par Open-Publishing

Redistribution
Arnaque boursière : un proche des Chirac suspecté

mercredi 5 décembre 2007 par Xavier Monnier , Laurent Léger

 Une équipe de quatre loustics culottés, un plan simple basé sur une proposition douteuse d’investissements dans une société pétrolière, quelques gogos fortunés pour tomber dans le panneau… et à la fin, la justice s’en mêle.

 Mardi 20 novembre, des gendarmes niçois sont venus respirer le bon air parisien. Et en ont profité pour procéder à une petite vague d’arrestations. Principaux bénéficiaires de la ballade des pandores de la Côte d’Azur, une fine équipe de loustics, comme l’a révélé Bakchich : Lofti Belhadj, Philippe Hababou-Solomon, Carl-Eric Hénin et Christophe Giovanetti.

 Ce dernier n’est autre que l’organisateur des Noëls de l’Elysée, période Chirac, et surtout celui qui a conçu le design des Pièces jaunes chères à Bernadette, l’ex-Première dame. Les limiers ont trouvé ces quatre garçons tellement sympathiques qu’ils les ont ramenés avec eux sur la Côte. Pas pour prendre le soleil. En cabane, où ils croupissent toujours, soupçonné « d’escroquerie en bande organisée » autour de la société pétrolière ATI pétroleum. Une enquête menée par le parquet de la bucolique ville de Grasse.

« Bah, ils ont monté un plan tout ce qu’il y a de classique. En promettant monts et merveilles avec un investissement minimum », précise un indiscret. En l’occurrence, la combine a consisté à vendre des actions de la société ATI, en phase d’introduction sur le marché libre d’Euronext, à un prix plus élevé que sa valeur réelle. Introduite à 0,18 euros en juillet, l’action était vendu « selon la tête du client, à 3, 4, 5 euros, voire plus ». Une jolie bascule : 88 000 titres ont été placés… Soit à la louche, quelques millions d’euros levés en Europe, en Asie, au Moyen-Orient et aussitôt envolés !

 L’arnaque présumée commençait par un coup de fil à des investisseurs potentiels. L’un d’entre eux a eu du nez, d’autres moins. « Carl-Eric Hénin m’appelle un jour en m’expliquant qu’un Chinois montait des concessions pétrolières en Asie. Il me vante l’investissement sur le thème : en placement amical, on propose les titres à 1 dollar. J’ai trouvé ça curieux et j’ai botté en touche ».

 Le même Hénin le recontacte quelques temps après, pressant. « On me passe un nouveau coup de fil pour me dire que la boite était créée et cotée entre 4 et 8 dollars l’action, en me proposant à nouveau d’acheter à 1 dollar. “On a besoin de liquidités”, m’explique-t-on. Je lui demande ce qui me vaut une telle faveur et lui assure que je serais intéressé s’il me fournit un certificat validant les actifs de la sociétés… » Là, l’investisseur-pigeon sent son interlocuteur se raidir. « Oh c’est trop compliqué, on est pressés… », bredouille-t-il au téléphone. L’affaire sentait en effet le roussi à plein nez. Le gogo qui a sauvé ses fonds résume l’affaire à Bakchich : « Non seulement les actifs de la société étaient bidons, mais en plus les titres n’étaient pas vendables, donc les acheteurs ont été grugés deux fois ». En moyenne, les heureux investisseurs d’ATI ont misé de 10 000 à 500 000 euros. Bref, point de majorité de petits actionnaires grugés mais bel et bien de respectables personnages à la surface financière étendue, tous répertoriés dans les ordinateurs et les disques durs, saisis lors des arrestations. Et qui n’ont pas encore livrés tous leurs secrets.
ATIP et le marché libre

 Étonnamment, ces quatre garçons pleins d’avenir risquent de ne pas tomber seul. Mauvaise fille, la société ATIP et son grand patron, le vietnamo-américain docteur Huu, se sont fendus d’un communiqué, sitôt l’affaire relayée par la presse. « Ces individus ne représentent pas la société et n’en sont pas actionnaires. Leur activité n’a pas été autorisée par ATIP ». Les écoutes judiciaires qui ont jalonné l’enquête, tout comme nombre de mails interceptés par la justice pourraient apporter la preuve du contraire. « S’il avait été à Paris en même temps que la bande des quatre, sûre qu’il aurait reçu, lui aussi une ‘“invitation” », assure un proche du dossier à Bakchich…

 Autre société qui pourrait boire la tasse : Europe Finance et Industries, qui a introduit ATIP sur le marché libre. Dans un communiqué, EFI a précisé que l’introduction avait été réalisée « de manière habituelle » et en « respectant les dispositions réglementaires ». Jointe par Bakchich, la société – qui a notamment introduit l’Olympique Lyonnais en bourse – n’a pas souhaité répondre à nos questions. Si les préventions des enquêteurs devaient s’avérer fondées, il faudrait donc en conclure que n’importe qui, à l’appui d’un simple dossier de presse, peut introduire une société fictive sur le marché libre.
 Créé en 1996, c’est un marché non règlementé où les critères exigés pour introduire une société sont infiniment plus souples que sur les autres marchés. C’est l’opportunité pour des PME ou des start up de lever des fonds sans avoir – faute d’ancienneté – l’obligation de publier des comptes détaillés.

 Sur ce point au moins l’avocat Pascal Dewynter, conseil de Hénin, s’accorde avec Bakchich. « C’est drôle d’entendre parler de petits actionnaires, quand mon client n’a fait investir dans cette société que des grands banquiers, dont certains spécialisés dans la fusion acquisition ». Pas des perdreaux de l’année donc. « Évidemment, puisque mon client n’a rien d’un escroc, et cette société n’a rien de fictive ».

 Certes. Sauf que les avocats des prévenus ne sont pas parvenus à convaincre le juge des détentions et des libertés, devant lequel ils ont plaidé la libération de leur client en début de semaine. Une deuxième chance leur a été accordée mardi 4 décembre, devant la chambre de l’instruction du tribunal d’Aix-en-Provence…

- http://www.bakchich.info/article207...