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République des parrains ou république citoyenne ?

Publie le lundi 5 mars 2007 par Open-Publishing
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de Dominique Taddei, animateur du forum de la gauche citoyenne (*)

Quelles alternatives aux parrainages présidentiels ?

Le système de parrainage a été institué pour limiter le nombre de candidatures à vocation commerciale ou excen- trique. Il est évident que, dans l’actuelle campagne, au-delà de la quarantaine de candi- datures autoproclamées, l’absence de tout filtre en eut entraîné des dizaines, voire des centaines d’autres, au point de dévoyer la campagne élec- torale et de finir d’en obscurcir le sens pour un grand nombre de citoyens. Le principe d’une limitation du nombre de candidatures étant manifestement nécessaire, la modalité aujour- d’hui existante est réactionnaire dans son principe et de plus en plus immorale et antidé- mocratique dans sa pratique.

Réactionnaire, parce que sur le modèle des années 1870, elle est réservée aux seuls maires, conseillers et parlementaires et relève d’un par- rainage « notable », qui enferme les élus dans un huis clos, où jeux tactiques et pressions inad- missibles l’emportent sur un accès équilibré de tous les courants autorisés (si on veut interdire le Front national, il faut le faire ouvertement) aux suffrages de tous les citoyens.

Et pour juger de la pertinence d’une candidature, en quoi le maire rural (c’est l’immense majorité du collège des parrains) devrait-il se prononcer sur une personnalité qu’il ne connaît, comme tous les autres citoyens, que par la télévision et la presse, alors qu’il n’a évidemment pas été élu pour cela ? Immorale et antidémocratique l’usage qu’en font les grands partis, qui obligent leurs élus et font du chantage sur les non-inscrits, afin de modeler l’offre politique en fonction de leurs propres errements tactiques : en 2002, Jospin multipliait les candidatures à gauche ; en 2007, tandis que sa candidate prône la « démocratie participative », Hollande s’efforce de res- treindre la participation au premier tour des autres courants de la gauche, tout en se prépa- rant à réclamer leurs voix au second !

Ainsi, le « milieu politique », de moins en moins représentatif et de plus en plus décrié, a- t-il choisi de s’afficher sous la forme scanda- leuse d’une République des parrains ! Persister dans cette voie aurait évidemment des conséquences catastrophiques, notamment pour la gauche, non seulement au second tour de la présidentielle, mais bien au-delà.

La réponse d’un nombre grandissant de citoyens, parmi les plus défavorisés et parmi les plus jeunes, ne pourrait être que la montée d’un mouvement de désobéissance civile, dont les chefs de parti ne mesurent manifestement pas l’ampleur, ni l’intensité. Dès lors qu’ils auraient montré l’usage privatif qu’ils font des voix obtenues, lors des scrutins précédents, en ex- cluant les représentants de ceux qu’ils avaient pourtant appelé à voter pour eux au second tour, pourquoi faudrait-il que ces derniers votent désormais pour eux ?

Et, plus largement, si on rabaisse de fait le suffrage universel à un suffrage censitaire, quelles voies restera-t-il aux sans-voix ? La liberté de candidatures est un principe démocratique essentiel qui ne peut pas être ainsi cadenassé ! C’est pourquoi, nous avions déjà réclamé il y a plus de cinq ans l’adoption d’une procédure de parrainage ci- toyen. Aujourd’hui, où tout est fait pour enfermer, dès le premier tour, les citoyens dans un choix entre les trois candidats « bien-pensants », nous demandons :

 dans l’immédiat, que les partis et leurs élus fournissent les parrainages nécessaires aux can- didats appartenants à des familles politiques proches et auxquels ils demandent leurs suf- frages au second tour de toutes les élections. Ils en ont l’obligation civique.

 Au-delà de la présente élection, l’engage- ment ferme de tous les candidats à substituer à l’actuel parrainage des notables, dont les dérives s’aggravent, un parrainage citoyen. Celui-ci reposerait soit sur un pourcentage minimum de voix obtenues lors d’un scrutin antérieur, soit sur une pétition d’initiative citoyenne, reposant sur un grand nombre de signatures, à l’instar des référendums locaux, suivant une formule qui existe dans des pays démocratiques aussi diffé- rents que l’Autriche, la Finlande et le Portugal.

Refuser ces deux revendications démocra- tiques élémentaires reviendrait à s’enfermer dans une attitude suicidaire, non seulement pour les intéressés, mais pour l’ensemble de la gauche et pour la démocratie.

(*) Professeur d’université, membre du Conseil économique et social

http://www.humanite.fr/journal/2007-03-03/2007-03-03-847125

Messages

  • La meilleure solution n’est-elle pas d’en finir avec la Ve et d’instaurer une VIe République excluant le principe même de l’election présidentielle ? Ce dernier possèderait des pouvoirs réduits et serait élu par la représentation nationale elle même élue à la proportionnelle intégrale et avec des pouvoirs accrus.

    Il est impératif d’en finir avec cette monarchie présidentielle.

    Jacquou le croquant (J.G.)