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Sans-papiers : enfermés jusqu’à dix-huit mois ?

Publie le mercredi 16 janvier 2008 par Open-Publishing

Sans-papiers : enfermés jusqu’à dix-huit mois ?
Par Louise Fessard (Etudiante) 12H54 16/01/2008

Déjà passée de 12 à 32 jours, la période de rétention pourrait être encore étendue suite à une directive européenne.
Clandestins arrêtés à Tarifa, en 2003 (Pascal Aimar/TF)

Branle-bas de combat dans les ONG européennes de défense des étrangers : un projet de directive qui doit être voté au parlement européen en mai prévoit que la durée de rétention des étrangers en situation irrégulière pourra être étendue à dix-huit mois.

En France, cette durée est déjà passée de 12 à 32 jours en 2003. Thierry Mariani, vice-président de la délégation pour l’UE à l’Assemblée nationale, se souvient que le gouvernement avait été quelque peu chahuté à l’époque :

"L’allongement avait provoqué un tollé, alors que ça reste la durée la plus courte en Europe. Les questions d’immigration passent plus facilement au niveau européen et la France a intérêt à éloigner la prise de décision pour éviter les campagnes de presse."

A voir : une pétition de la Cimade (Conseil oecuménique d’entraide), lancée avec 13 organisations, a déjà recueilli près de 25000 signatures et, le samedi 19 janvier, une journée de mobilisation contre la détention des étrangers sans-papiers est organisée.

En France, seuls les étrangers sous le coup d’un arrêté préfectoral de placement en rétention et d’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière sont enfermés. Un "séjour" en centre de rétention administrative d’une durée moyenne de dix jours, le temps nécessaire pour organiser leur "éloignement" et obtenir l’accord du pays de réadmission. Dans ce contexte, à quoi servirait une durée de rétention de dix-huit mois ?

Pour Damien Nantes, responsable de la défense des étrangers "reconduits" à la Cimade, certains pays européens utilisent en fait la rétention comme un "moyen de gestion de l’immigration", ce qui explique des durées de rétention très longues, voire illimitées :

Le Royaume-Uni fait partie des huit Etats membres qui n’ont pas fixé de durée maximum de rétention. Un demandeur d’asile peut y être détenu durant toute sa procédure de demande. Mais la détention illimitée reste exceptionnelle, selon Michael Cashman, eurodéputé britannique et membre du Groupe socialiste :

En 2006, selon les chiffres du Home office, sur 2010 étrangers en situation illégale détenus (dont 1455 demandeurs d’asile), 190 l’étaient depuis plus de six mois. Pour autant, Michael Cashman est favorable à une limitation de la durée de rétention :

"Si nous ne sommes pas capables de traiter une demande d’asile en dix-huit mois, alors nous devrions réexaminer ce processus légal de demande d’asile."

Au Parlement européen, le groupe des Verts se bat pour une réduction, voire une abolition, de la période de rétention. Pour Daniel Cohn-Bendit, eurodéputé Vert allemand), les pays comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou le Royaume-Uni utilisent leurs périodes de rétention très longues comme "une forme de punition pour faire baisser les bras aux sans-papiers" :

Dans son principe même, la rétention est de plus, selon lui, inefficace et injuste :

Faute d’accord au Conseil et au Parlement européens, le vote de la directive sur le retour des étrangers en situation illégale a déjà été reporté plusieurs fois. L’eurodéputée néerlandaise Verte, Kathalijne Buitenweg est confiante sur les chances de réduire cette période maximale de rétention à six mois :

"Les Verts n’accepteront jamais une période de dix-huit mois et j’ai bon espoir que le groupe socialiste nous suive. Grâce à la procédure de codécision, qui associe le Parlement à la prise de décision, le projet de directive ne passera pas si la durée de rétention maximum n’est pas diminuée."

Toutefois, pour un pays comme le sien, les Pays- Bas, où la durée de rétention est potentiellement illimitée, le projet de directive n’est pas sans avantages :

-http://www.rue89.com/2008/01/16/san...