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Sarkozy étend son influence dans l’économie

Publie le mardi 24 février 2009 par Open-Publishing
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de Sylvain Besson

Le numéro deux de l’administration présidentielle, François Pérol, pourrait prendre la tête de la deuxième banque française. Au risque de provoquer un tollé

Le réseau Sarkozy dans l’économie - agrandir

C’est une première leçon de « capitalisme moralisé », façon Nicolas Sarkozy. Jeudi va naître la deuxième banque française, produit de la fusion entre les groupes Caisse d’épargne et Banque populaire. Son patron, à en croire les indiscrétions de la presse, devrait être François Pérol, secrétaire général adjoint de l’Elysée et conseiller économique du président.

Même en France, où le mélange des genres entre Etat et entreprises est une tradition, l’annonce fait scandale. Le centriste Jean Arthuis, président de la Commission des finances du Sénat, a jugé cette nomination impossible, « parce que les règles déontologiques […] proscrivent aux responsables d’une administration qui ont eu à connaître très directement d’un dossier d’être nommés à la tête de l’entreprise au cœur de ce dossier ». Or, François Pérol, 45 ans, était, jusqu’à ce week-end, chargé de piloter la fusion des deux établissements.

Face à de telles réactions, la prudence règne dans les milieux gouvernementaux. Selon l’Elysée, aucune décision n’a encore été prise sur le dirigeant du futur groupe. La ministre de l’Economie, Christine Lagarde, a simplement indiqué que l’Etat placerait à la tête de la banque un « représentant digne de confiance », et que François Pérol serait un « choix de confiance et de compétence ». Un signe, aussi, que l’Etat français, qui va injecter entre 2,5 et 5 milliards d’euros pour consolider la nouvelle entité, entend exercer une autorité directe sur les banques qu’il renfloue.

Sur ce point, François Pérol semble être l’homme de la situation. Il a géré tous les dossiers économiques sensibles de la présidence Sarkozy – de l’indemnité géante octroyée à Bernard Tapie à la restructuration du nucléaire, en passant par les troubles chez Airbus. Il était dans le petit groupe de responsables qui ont organisé le plan européen de sauvetage des banques, en octobre dernier.

Pâle et discret, il parle peu aux journalistes. L’une de ses rares interventions publiques, devant le parti présidentiel UMP à l’automne 2008, a très vite été retirée d’Internet."

Chez les banquiers et les économistes, le choix de François Pérol fait débat. Certes, l’homme n’est pas un novice, puisqu’il a travaillé chez Rothschild entre 2005 et 2007. Mais il n’est pas un spécialiste de la banque de détail. Le travail ingrat lié à la fusion de ces institutions provinciales que sont Caisse d’épargne et Banque populaire – aller visiter des agences, serrer les mains de notables locaux – risque de lui paraître dépourvu de charme.

La manière dont il a été choisi soulève aussi des questions. « C’est vrai, il est un peu étonnant qu’on n’ait pas cherché au-delà du premier cercle autour du président de la République », commente ­David Thesmar, professeur de finance à HEC.

Le bien-fondé de la fusion, en revanche, fait peu de doutes. La Banque populaire et Caisse d’épargne vont subir des milliards d’euros de pertes liées à leur filiale commune, la banque d’investissement Natixis. Et Caisse d’épargne a investi massivement dans l’immobilier, alors que la bulle atteignait son sommet.
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« Ce mariage fait du sens », analyse un banquier parisien. Reste à savoir si François Pérol dirigera vraiment le nouvel ensemble. Une astuce juridique – il n’est pas vraiment fonctionnaire, mais membre du cabinet présidentiel – pourrait lui permettre de passer outre aux règles en matière de conflit d’intérêts. Selon le financier précité, seul un rejet massif du monde politique et des médias peut encore lui barrer la route.

 http://www.letemps.ch/Page/Uuid/2b9...

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