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Simon Bolivar est de retour

Publie le mardi 8 mars 2005 par Open-Publishing

de Richard Labévière

En investissant, mardi, le socialiste Tabaré Vazquez à la présidence du pays, l’Assemblée nationale uruguayenne a mis fin au règne sans partage des deux partis traditionnels, Los Colorados (les rouges-libéraux) et Los Blancos (les blancs-conservateurs) qui se repassent le pouvoir depuis 1825, depuis l’indépendance de l’Uruguay. Le Frente Amplio, la coalition qui a porté le jeune cancérologue à la présidence, est essentiellement composée d’anciens Tupamaros, des membres de la guérilla qui défiaient la dictature dans les années soixante-dix, et de syndicalistes, chef de file du mouvement social uruguayen. Une des première décision a, du reste, été le rétablissement des relations diplomatiques avec Cuba. Symbolique à plus d’un titre, ce changement politique consolide la vague de gauche qui submerge l’Amérique latine. Hormis en Colombie, toutes les élections ont, depuis le début de la décennie, consacré la montée en puissance de ce phénomène.

Cette vague bolivarienne -mixte de fierté national et d’aspirations sociales- s’explique doublement par la défiance envers les recettes de choc d’ajustement structurel du Fond monétaire international et de la Banque mondiale, ainsi que par une désaffection de la relation, toujours très déséquilibrée avec le puissant voisin du nord ; une désaffection qui s’est accrue avec la guerre en Irak, percue comme une résurgence de l’impérialisme américain qui se manifeste traditionnellement en direction des pays du sud. Aussi, la cérémonie d’investiture de Tabaré Vazquez qui a réuni les réprésentants de quelque 130 pays s’est logiquement transformée en sommet latino. Les présidents argentin (Nestor Kirchner) ; brésilien (Lula da Silva) et vénézuélien (Hugo Chavez) ont décidé -hier à Montevideo- de renforcer l’intégration régionale et leurs coopérations multilatérales. Le président vénézuélien en a profité pour proclamer la mort définitive de la grande zone de libre échange que George Bush voulait instaurer de l’Alaska à la Terre-de-Feu. Par ailleurs, en mai prochain, le Brésil organise le premier sommet entre l’Amérique latine et les pays arabes afin de densifier la coopération sud-sud.

Ces initiatives font plus qu’indisposer la Maison-Blanche qui a tout essayé pour déstabiliser le Venezuela. A la tête du cinquième exportateur mondial de pétrole, Hugo Chavez qui veut incarner « les alternatives au néo-libéralisme », a fait l’objet de plusieurs tentatives d’assassinat commanditées par les services secrets américains qui ont aussi essayé, à plusieurs reprises, d’encadrer des commencements de coup d’Etat. Et Washington ne désespère pas d’arriver, un jour, à ses fins par le biais du Plan Colombien, le programme de coopération militaire mis sur pied, conjointement, par Washington et Bogota pour officiellement lutter contre les guérillas et les cartels colombiens. Sous couvert de sécurisation de zones pétrolières à la frontière entre la Colombie et le Venezuela, quelque quatre cents soldats des forces spéciales américaines, appuyés de plusieurs centaines de mercenaires d’agences spécialisées multiplient -depuis plusieurs mois- incursions et opérations clandestines en territoire vénézuélien.

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