Accueil > Six ans de lois sécuritaires
Bonjour,
Octobre 2004
une brève publiée dans un bulletin du réseau titrait
"Incontinence répressive à l’Assemblée" au vu de l’avalanche de lois
sécuritaires de ces dernières années. Depuis l’inspiration répressive ne
s’est pas tarie.
Un feuillet recto-verso A4 intitulé "6 ans de lois sécuritaires"
en propose un condensé. Le voici dans le texte.
Ce document peut être téléchargé, maquetté sous forme de fichier PDF,
depuis le site du réseau :
http://resistons.lautre.net/article.php3?id_article=363
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6 ans de lois sécuritaires
Novembre 2007
Même si Résistons Ensemble est né en 2002, il est difficile de ne pas
faire démarrer ce petit récapitulatif des dernières lois sécuritaires en
novembre 2001, date de la publication de la Loi de Sécurité Quotidienne
(LSQ), votée par un parlement à majorité socialiste. C’est en effet sous
le règne du PS, en exploitant l’hystérie anti-terroriste, qu’a été
amorcée l’offensive législative qui s’est ensuite traduite par les lois
dites Perben I (Loi d’orientation et de programmation pour la justice,
septembre 2002), LSI (Loi sur la Sécurité Intérieure, mars 2003), Perben
II (Loi d’adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité,
mars 2004), loi de prévention de la délinquance (mars 2007) et
dernièrement loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et
des mineurs.
Ces différents textes, qu’ils prétendent cibler Al Qaida ou les vols à
la tire, en passant par le grand banditisme, les réseaux pédophiles et
les troubles de voisinages, présentent des lignes directrices communes.
Ils ont d’abord une fonction idéologique : faire rentrer toutes les
manifestations de problèmes économiques, sociaux, politiques ou
culturels dans le champ de la délinquance ou de la criminalité, en
créant de nouveaux délits et en stigmatisant des populations (jeunes des quartiers populaires, prostituées, SDF, familles immigrées, etc.).
L’insécurité étant un thème politiquement porteur, et bénéficiant de
fréquentes campagnes médiatiques, une stratégie politicienne bien
comprise se doit de l’entretenir autant que de la combattre.
l) Tout le pouvoir aux flics – Les moyens du contrôle
LSQ :
> La fouille des véhicules devient possible (dans le cadre d’enquêtes
liées au terrorisme et aux trafics d’armes ou de stupéfiants), même en
l’absence du propriétaire.
> Obligation en cas de demande de fournir ses clés de cryptage
informatique sous peine de 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende.
> Les bases de données numériques des opérateurs sont accessibles aux
services de renseignements pendant un an.
> Possibilité d’accusation anonyme pour les crimes et délits passibles
de plus de 5 ans de prison.
> Elargissement du domaine du fichier national des empreintes
génétiques (FNAEG), conservées 40 ans, à de nombreuses infractions : vol
par effraction, détention de stupéfiant, etc. Pénalisation du refus : 6
mois de prison et 7500 euros d’amende.
Perben I :
> Remise en cause de la présomption d’innocence : généralisation de la
détention provisoire.
> Témoignage anonyme possible pour presque tous les délits.
> Généralisation des comparutions immédiates.
> Création de 7 000 nouvelles places de prison, doublement des places
en quartier pour mineurs, création de 4 000 postes dans l’administration
pénitentiaire.
> Création de Centres Educatifs Fermés (CEF) pour mineur à partir de 13
ans.
> Création de 3 300 postes de juges de proximités.
> Condamnation pénale possible à partir de 10 ans.
LSI :
> Fichage génétique élargit à presque tous les délits.
> Cadrage législatif du Fichier de Traitement des Infractions
Constatées (STIC, créé en juillet 2001). Les flics peuvent conserver et
utiliser des données personnelles (y compris sur les « victimes »
d’infraction).
> Création d’une réserve civile de la police nationale.
> Pour contrôler l’identité d’une personne, il ne faut plus un « indice
» mais une « raison plausible de soupçonner ».
> Extension de la possibilité de fouille des véhicules aux enquêtes
pour vol et recel, ou s’il y a une « raison plausible de soupçonner »
que le conducteur ou un passager a commis un crime ou un délit
flagrant, ou encore avec l’accord du conducteur ou l’autorisation
spéciale du procureur.
> Possibilité de copie des données informatiques lors d’une
perquisition, y compris des données qui sont stockées ailleurs si elles
sont accessibles depuis le système du lieu perquisitionné (en accord
avec les traités internationaux si elles sont stockées à l’étranger).
> Les flics ne sont plus obligés de mentionner à une personne en garde
à vue qu’elle a « le choix de faire des déclarations, de répondre aux
questions posées ou de se taire ».
Perben II :
> Procédure contre la « délinquance et la criminalité organisée » :
création de la notion de « bande organisée », circonstance aggravante
pour un certain nombre d’infractions, et qui justifie de nouveaux
pouvoirs pour les flics : garde à vue prolongée de 48 h à 96 h,
perquisitions de nuit, espionnage au domicile des suspects, infiltration
de la « bande organisée », rémunération des indics, instauration d’un
statut de « repenti »...
De nombreuses infractions tombent sous le coup de cette loi (par exemple
« l’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’un
étranger en France »), mais pas celles de types économiques ou financières…
> Procédure du plaider coupable (« comparution sur reconnaissance
préalable de culpabilité ») : dans le cas des délits encourant jusqu’à
un an de prison, cette procédure permet d’être condamné sans comparaître
devant un tribunal.
Prévention Délinquance :
> Le procureur de la république a désormais un rôle de prévention de la
délinquance, en plus de sa fonction répressive. Cette loi introduit donc
dans le code de procédure pénale la possibilité pour la justice
d’intervenir avant qu’une infraction soit commise…
> Ajout du délit d’escroquerie en bande organisée à la procédure contre
la criminalité et la délinquance organisées (Perben II)
> Création du Service Volontaire Citoyen de la Police Nationale.
> Les flics peuvent désormais, avec l’autorisation du procureur ou d’un
juge d’instruction, acheter ou aider à l’achat de stupéfiant dans le
cadre de leur enquête (mais l’incitation restent interdite).
> Composition pénale possible pour mineurs, tout comme la «
présentation immédiate » devant le juge.
> Possibilité de prendre même peine qu’un adulte pour les plus de 16 ans.
> Enregistrement des communications passées par les prisonniers (sauf
avec leur avocat).
> Les Travaux d’Intérêt Général peuvent être effectués pour le compte
d’une personne morale de droit privé avec mission de service public (et
plus uniquement pour des entités de droit public).
Loi sur la Récidive :
> Instauration de peines plancher (un tiers de la peine encourue si
elle est supérieure ou égale à 3 ans, arrondi à l’année supérieure).
Pour échapper à ces peines plancher, il faut présenter des « garanties
d’insertion ou de réinsertion ». Dans le cas des délits avec violences
ou puni de 10 ans, ainsi qu’en cas de multi-récidive, ces garanties
doivent être « exceptionnelles » pour échapper à la peine plancher.
> Possibilité d’abandon de la diminution de peine acquise aux mineurs,
s’ils ont plus de 16 ans, lorsqu’ils ont commis un crime ou un délit de
violence en récidive, ou « si les circonstances de l’espèces ou la
personnalité du mineur le justifie ». En cas de multi-récidive pour
violence, cette possibilité devient la règle.
> Le « suivi socio-judiciaire » s’accompagne désormais d’une injonction
de soin (sauf exceptions). Le condamné peut refuser le traitement, mais
voit alors tomber son sursis mise à l’épreuve ou ses possibilités de
liberté conditionnelle.
ll) La révolte est bien un crime – Le retour des lois anticasseurs
LSI :
> Création du délit d’outrage au drapeau ou à l’hymne français (jusqu’à
6 mois de prison s’il est commis en réunion).
> Menace à représentants de l’ordre (flics, juges, matons, etc.). 2 ans
d’emprisonnement, 30 000 euros d’amende ; 5 ans, 75 000 euros pour les
menaces de mort ; 10 ans et 150 000 euros si les menaces sont destinées
à obtenir une contrepartie.
Perben II :
Bientôt une jurisprudence pour qualifier les manifs de « bande organisée » ?
Prévention délinquance :
> Création de la circonstance aggravante de guet-apens : les violences
sur agents des forces de l’ordre ou les pompiers commises en bande
organisée ou avec guet-apens (cf. définition embuscade) deviennent un
crime si les victimes ont une ITT de plus de 8 jours : de 15 à 30 ans de
réclusion criminelle. Sinon, 10 ans et 150 000 euros d’amende.
> Création du délit d’embuscade : 5 ans, 75 000 euros ; 7 ans et 100
000 si en réunion.
> Mais attention, si on réussit son embuscade, on passe dans la
catégorie « violence avec guet-apens », cf. ci-dessus...
> Doublement des peines pour rébellion : 1 ans, 15 000 euros (double si
réunion). Pour rébellion armée, on passe de 3 à 5 ans, et de 45 000 à 75
000 euros (double si réunion).
> La provocation à la rébellion (par tout moyen, presse, affiche, cri,
etc.) est désormais passible de prison (2 mois), (plus amende de 7 500
euros). Les mêmes règles que pour les délits de presse s’appliquent pour
déterminer les responsables (le responsable de la publication d’un site
internet peut donc être inquiété).
> 5 ans, 75 000 euros (10 ans, 500 000 euros en bande organisée) pour
détention ou transport de substances ou produits incendiaires ou
explosifs, s’il y a des « preuves » qu’ils sont destinés à la
réalisation d’engins incendiaires/explosifs. S’il n’y a pas de telle
preuve, mais que les personnes mises en cause n’ont pas de « motifs
légitimes » pour la détention : 1 ans et 15 000 euros (y compris pour
autres éléments et substances pouvant être utilisés pour fabrication
d’engin explosif/incendiaire, en cas d’interdiction par arrêté préfectoral).
> La perturbation du trafic ferroviaire par tout moyen, et notamment
telle qu’elle a été pratiquée pendant la lutte dite « anti-CPE », est
passible de 6 mois de prison.
lll) Guerre totale contre la Délinquance – Des flics et des voyous dans
chaque sphère de la société
LSQ :
> Des vigiles, personnels de sécurités ou de transport de fond, agréés
par le préfet et le procureur, peuvent fouiller les bagages et les
personnes sans la présence d’un officier de police.
> Consultation des fichiers informatiques de données personnelles à
caractère judiciaire rendue possible dans le cadre d’enquête administrative.
> Les rassemblements musicaux doivent être soumis à déclaration
préalable à la préfecture.
> Création du délit de fraude par habitude : 6 mois et 7 500 euros pour
10 contraventions sur une période de 12 mois.
> Possibilité pour les propriétaires ou exploitant d’immeubles de faire
appel à la police en cas d’occupation des parties commune.
LSI :
> L’occupation de hall d’immeuble devient passible de 2 mois de prison
et 3 750 euros d’amende.
> Création du délit de mendicité agressive. 6 mois et 3 750 euros.
> Possibilité de faire fermer par arrêté préfectoral les bars et
sandwicheries qui causent un trouble à l’ordre public.
> Création du délit de racolage passif. 2 mois et 3 750 euros.
> Création du délit d’installation sur un terrain privé. 6 mois
d’emprisonnement, suspension du permis, confiscation des véhicules
non-destinés à l’habitation).
> 1 an et 15 000 euros pour les parloirs sauvages.
Le chapitre le plus important de la LSI est consacré au cadrage
législatif des activités des entreprises privées de sécurités...
Prévention Délinquance :
> Le maire est chargé de coordonner la politique de prévention de la
délinquance impulsée par le préfet. Il peut mobiliser les services du
conseil général (travailleurs sociaux), notamment au sein des conseils
locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.
> Les autorités régissant les transports en commun sont mobilisées.
> Les travailleurs sociaux doivent « partager » le secret
professionnel, entre eux et avec le maire et le président du conseil
général.
> Création du Conseil pour les droits et devoirs des familles, sous
l’autorité du maire, chargé de « l’accompagnement parental » des
familles dont les enfants sont susceptibles de devenir délinquants.
> Les parents de mineurs délinquants peuvent être condamnés à des
stages de responsabilités parentales pour de nombreuses infractions.
> Création de fichier automatisé des absences dans l’éducation
nationale, sur la base duquel le maire peut prononcer des sanctions.
> Urbanisme sécuritaire : obligation d’une étude de sécurité publique,
dont l’avis est déterminant, pour certain type de construction. Cette
étude n’est pas communicable aux « citoyens ».
> Un bail peut désormais être résilié par le bailleur si « le preneur
n’use pas de la chose louée en bon père de famille » (sic). Dans la
qualification des nuisances au voisinage, le « bruit » devient les «
troubles », sans plus de précision, et les propriétaires peuvent et
doivent faire cesser les fauteurs de troubles.
> Expropriation des locaux commerciaux « délabrés » si pas de
rénovation du propriétaire (disposition en appui aux politiques de
destruction des commerces de quartier, souvent appelés « communautaires », au profit de centre commerciaux aseptisés).
> l’occupation de hall d’immeuble quand elle est accompagnée de voies
de fait ou de menaces est désormais passible de 6 mois de prison et 7
500 E d’amende.
> Renforcement de la législation sur les chiens d’attaques et de
défense (6 mois de prison).
> Renforcement du contrôle des gens du voyage.
> Les hébergeurs de sites internet et fournisseurs d’accès doivent
participer à la lutte contre la diffusion d’incitation à la violence
(disposition visant directement les blogs d’adolescents diffusant des
appels à affronter les flics).
> Le fait de filmer des violences est un acte de complicité, qui fait
encourir la même peine que l’auteur de l’infraction (sauf si on est
journaliste ou que l’enregistrement est destiné à servir de preuve en
justice). La diffusion de ces images est passible de 5 ans et 75 000 euros.
> Pour consommation de stupéfiants (et incitation à la consommation) on
peut désormais être tenu de suivre un « stage de sensibilisation ».
L’incitation est passible de 7 ans, 100 000 euros si elle s’effectue à
proximité d’un établissement d’enseignement.
> Les stages de sensibilisation et injonctions thérapeutiques liés aux
stupéfiants sont rendus possibles en composition pénale.
> La procédure judiciaire simplifiée est applicable pour la
consommation de stupéfiant.
ZPAJOL liste sur les mouvements de sans papiers