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Syndicats/Gouvernement, tensions sociales et faux-semblants

Publie le vendredi 27 janvier 2006 par Open-Publishing
14 commentaires

Syndicats/Gouvernement, tensions sociales et faux-semblants

Depuis septembre, plusieurs conflits sociaux ont fait la une de l’actualité. Au-delà de leurs développements les plus spectaculaires, ils ont mis en lumière les contradictions qui se multiplient entre les équipes syndicales de terrain et les intérêts des appareils bureaucratiques.

On a jamais autant parlé de la CGT. Grèves de 2003, journées d’actions, grèves à la SNCM, à la RTM, à la SNCF, la première organisation syndicale est sur tous les fronts et y joue un rôle moteur au point d’éclipser pratiquement toutes les autres centrales. Les médias confortent cette idée en renvoyant cette idée d’une CGT souhaitant en découdre un peu partout face au Medef et au gouvernement.

Cette focalisation médiatique a du reste pour effet de laisser dans l’ombre la grande discrétion des responsables confédéraux de la CGT qui s’emploient à tenir la confédération CGT à l’écart de ces grèves qui posent la question de l’affrontement de classe avec le Medef et le gouvernement.

C’est si vrai qu’on a pas vu une seul fois Thibault aller à la rencontre des grévistes de la SNCM, de la RTM et de la SNCF (il n’est pas le seul dans ce cas et on peut dire la même chose de Mailly alors que FO est également en pointe dans pratiquement tous ces conflits). En revanche, on l’a vu à deux reprises (SNCM, SNCF) se rendre à toute vitesse chez de Villepin pour essayer de négocier un compromis au rabais à l’abri du regard des grévistes, quitte à désavouer ouvertement les équipes de la CGT (SNCM).

Dans ces conditions, il n’est pas étonnant de voir que la CGT n’ait à aucun moment mis tout son poids pour déclencher un conflit majeur dans la branche des transports urbains en proie aux appétits des compagnies privées.

La stratégie actuelle de la confédération CGT permet de jouer et de gagner pour l’instant sur deux tableaux. Elle apparaît auprès des travailleuses et travailleurs comme l’organisation la plus combative, et se pose auprès du pouvoir comme un interlocuteur incontournable avec lequel il vaut mieux s’entendre.

Deux CGT ?

Le conflit à la SNCF est venu toutefois en partie contrarier cette stratégie.

Pour la première fois la CGT cheminots a pris l’initiative d’une grève reconductible répondant positivement à une proposition de SUD Rail. Alors que tous les autres grands conflits sociaux ont débouché sur des reculs sociaux, la grève à la SNCF a permis de faire reculer le pouvoir, même si cela est temporaire. Le démantèlement de la SNCF est toujours à l’ordre du jour, mais il se fera plus par le développement de la filialisation et de la sous-traitance que par une ouverture de capital comme à EDF-GDF et à France Télécom.

L’autre leçon des conflits qui ont marqué l’actualité sociale depuis septembre, c’est qu’ils dessinent en creux la coexistence de deux CGT, de deux logiques contradictoires : celle qui conduit à affronter les politiques patronale et gouverrnementale dans toute leur violence et celle du pragmatisme, prête à sacrifier les intérêts de ses adhérent(e)s pour éviter le débordements et une logique d’affrontement direct avec la bourgeoisie.

Pour autant, cela ne signifie pas qu’il y ait une orientation alternative à celle de Thibault. D’abord parce qu’il n’est pas dans la culture très légitimiste de la CGT de remettre en cause ses dirigeants (le débat sur la constitution européenne constitue en cela une première) ensuite parce qu’on ne peut que constater le verrouillage du congrès confédéral de mars 2006, qui donnera certainement lieu à des explications vigoureuses mais ne devrait a priori pas déboucher sur de grands bouleversements.

Toujours est-il que la politique de guerre sociale du Medef et de la droite va entraîner d’autres conflits durs dans plusieurs secteurs. Et il n’est pas sûr que l’harmonie règne indéfiniment entre des dirigeants confédéraux favorables à un rapprochement avec la CFDT, et dont certains étaient des partisans du Oui au référendum sur la constitution européenne, et des équipes militantes qui se battent seules sur le terrain sans pouvoir bénéficier de tous les relais qui font la force d’une organisation interprofessionnelle.

La mise en minorité de Thibault sur la position de la CGT face à la constitution avait sonné comme un coup de tonnerre.

L’initiative de la CGT cheminots va assurément donner plus de poids à toutes celles et ceux qui dans la CGT se battent pour une stratégie d’orientation revendicative plus offensive. Parce que cette stratégie a permis de faire reculer le gouvernement et à permis d’obtenir des résultats concrets à la SNCF, elle va également renforcer la crédibilité de Solidaires dont l’existence et la capacité d’action dans certains secteurs deviennent incontournables, non seulement pour la CGT mais aussi pour les autres organisations syndicales.

Si la donne syndicale ne s’en trouve pas bouleversée, ces derniers développements doivent permettre aux préoccupations des syndicalistes révolutionnaires (action directe, grève générale, convergence des luttes, construction d’un véritable front social) de trouver un plus grand écho auprès de celles et ceux qui se battent et souhaitent donner un débouché à leur action par la victoire des luttes.

Laurent Esquerre/alternative libertaire

Messages

  • de la CGT, menée par "Frontunique" et consorts sur Indymédia Paris, Indymédia Lille, Grenoble, Bellaciao va combler d’aise le patronat.

    J’espère que le patronat paie bien ? Et "front unique" a obtenu une CNE ou un CPE ? A moins que ce ne soit qu’un CDD jusqu’aux vacances d’été ?

    Tellement soit-disant "anars" du luppenprolétariat qu’ils ne visent qu’à casser l’outil syndical CGT : du luppenprolétariat

    Patrice BARDET

    Frontunique et ses alias, peut être Loup noir, Riazanov, Camille

  • CHER LAURENT ,

    je ne suis absolument pas d’accord avec vous !
    vous voulez voir dans les actions de la CGT , deux lignes antagonistes , l’une de combat et l’autre de negociation avec le patronat .
    tous les syndicalistes savent et ont toujours su , que ce que vous appelez deux lignes ne sont que deux moments successifs et parfois parralleles du combat syndical .
    Toutes les greves se terminent par des negociations , et parfois les negociations durent pendant la greve , cela heurte peut etre votre conception de la greve qui du point de vue "libertaire" , n’est qu’un element de la lutte politique generale contre le capitalisme , mais sauf à ses origines , il y a bien longtemps que la CGT n’est plus libertaire , au sens politique du terme .
    Que vous le regrettiez est votre probleme , de la a arranger les evenements pour qu’ils entrent dans votre grille de lecture , est un autre probleme .
    claude de toulouse .

  • « Le lumpenprolétariat forme une masse strictement différenciée du prolétariat industriel recruté dans les bas fonds, voleurs et criminels de toutes sortes, vivant en marge de la société, des gens sans travail défini, sans foi ni loi ». (K. MARX – « Les luttes de classes en France – 1848/1850 » page 216 – tome 1 œuvres complètes – édition anglaise).

    MARX intègre le lumpenprolétariat dans la classe ouvrière à l’origine mais par son mode de vie, son niveau d’existence social, cette catégorie qui vise à l’appropriation privée au détriment d’autrui relève de la petite-bourgeoisie.

    Les membres du "lumpen", toujours à court d’argent, sont des proies rêvées pour les partis fascistes et leurs groupes paramilitaires, pour la police (indicateurs et mouchards) pour briser les grèves par la force comme aux États-Unis.

    Patrice

    (désolé pour la faute d’orthographe sur le commentaire précédent)

  • question :
    Laurent vu que vous avez l’air de savoir où va la CGT et d’avoir des affinités
    avec les positions de SUD Rail et SUD en général,
    pouvez vous me dire pourquoi SUD et les mouvements Libertaires
    ne ce sont pas joint à l’appel de la CGT pour faire du 31 Janvier un jour d’action unitaire ?
    Je ne comprends pas bien (trop bien) votre démarche ?

    JC d’Avignon

    • La CGT fait front commun avec la CFDT, FO, l’UNSA ... mais pas Sud pour le 4 octobre. La CGT se fait lâcher par ses potes, syndicats réformistes. La CGT ne tend pas la main aux Sud pour le 31, alors que les Sud l’ont fait pendant longtemps. Aujourd’hui la CGT se plaint d’être seule et vous avez le toupet de mettre la responsabilité sur les Sud !! Lol !

      Sud a toujours revendiqué la grève générale depuis 2003 jusqu’à récemment. Les Sud se posent la question de mouvements d’une journée sans lendemain (vous savez ces fameux temps forts qui amènent crescendo la mobilisation pour mieux la refaire tomber). La CGT si maline et qui milite aujourd’hui pour un syndicalisme rassemblé s’entoure de syndicats réformsistes.

      La CGT n’a qu’à travailler avec la CNT et les Sud pour obtenir un vrai front contre les politiques capitalistes de la droite et des sociaux-démocrates.

      A moins que la CGT ait elle aussi retournée sa veste et se considère comme syndicat réformiste.

      Dans tous les cas, vu le nombre de critiques, de questions et d’interventions à ce sujet, il ne peut s’agir uniquement de rancoeur face à la CGT. Il y a un constat dont il est interdit de parler sous peine de passer pour un proMEDEF et pour la division syndicale. Sur le site de l’UD CGT du Cher, le webmaster va même plus loin en disant que le seul syndicat légitime est la CGT :

      "Le syndicalisme rassemblé est ce à quoi s’attache la CGT depuis sa fondation en 1895. A cette date, il n’y avait qu’une seule organisation syndicale en France. Depuis, le patronat et les gouvernements à son service n’ont eu eu de cesse de réprimer le syndicalisme et ont tout fait pour le diviser.
      Plutôt que de prendre leur place au sein d’une grande organisation syndicale unique et démocratique des salariés, d’autres ont préféré constituer des organisations syndicales supplémentaires favorisant ainsi l’émiettement du syndicalisme et sa division
      ."

      Si la CGT était restée fidèle à ses valeurs fondatrices nous en serions peut-être pas là. Il est nécessaire d’avoir ce débat, le contraire ne ferait que mettre en exergue les modes de fonctionnement de ce syndicat.

      Il ne s’agit pas de casser la CGT pour le plaisir, certains parlent d’un MEDEF qui doit en rire, que même nous serions payés par le MEDEF (j’ai entendu les mêmes arguments lors de la création d’un Sud dans mon établissement). Que le MEDEF se marre ou pas je m’en tape, ce qui m’importe c’est l’avenir, et je préfère à un moment donner tirer tout cela au clair pour préparer au mieux la lutte, plutôt que continuer à fermer ma gueule pour ne pas affabilir ceux qui ne sont déjà aujourd’hui plus à la hauteur des enjeux de demain.

      _Lolo

    • CNT et SUD cassent du Cégétiste à tour de bras.

      Tendre la main au chien que me bouffe ?

      Il suffit de constater la campagne menée contre la CGT par quelques sous-marins "anars" (?), "syndicalistes" sur Indymédia Paris, Grenoble, Lille, et Bellaciao depuis le 23 janvier

      Que la CGT soit critiquable soit, mais d’abord essayer de créer les conditions de l’union.

      Personnellement, il n’est plus question qu’en réunion syndicale je supporte les insulteurs.

      Et la grève générale : avant de la prêcher à la CGT, il faudrait commencer par la faire au moins 1 jour !

      Alors, pour vous puissiez être unitaire, "solidaire", faudrait peut-être que vous portiez une muselière ?

      Un autre conseil, même si je conçois que ce peut être difficile pour vous, voire contre nature : usez-vous un peu les dents sur les patrons

      Patrice Bardet

    • la campagne menée contre la CGT par quelques sous-marins "anars" (?), "syndicalistes" sur Indymédia Paris, Grenoble, Lille, et Bellaciao

      ouais, c’est pas joli...

      TM
      délégué CGT

    • On en a marre des cet articles et commentaires...

      Solidarité avec Patrice

      Roberto
      ancien responsable syndical dans L’UNION LOCAL CGT 92

    • J’en ai marre de voir Sud s’associer nationalement dans les Comités d’établissement
      de France Télécom avec la CFDT pour contrer la CGT

      voir un representant syndical s’associer avec le patronat au tribunal sous pretexte que c’était
      sa position initiale puis ensuite donner des leçons d’unité

      si c’est ça être révolutionnaire je veux bien avoir une crise d’hémoroides
      si ne pas répondre à ses propres écrits est une preuve de courage
      y’a des nuits je me réveille ma femme me demande d’expliquer mon cauchemard
      puis me répond c’est pas grave tu pourrais êtr à la CFDT comme quoi ça pourrait être pire

      dire que je me bats pour que solidaire puisse s’exprimer lors des réunions publiques ..........

      JC d’Avignon

    • Bien d’accord avec JC et consort :

      marre de voir des représentants syndicaux s’associer au patron, pour briser les luttes.

      Cf par exemple :

      QUELQUES QUESTIONS AUTOUR DE LA GREVE DES SAISONNIERS AGRICOLES DU MAS RIOLS (P.O)

      http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=1197

      C’est sur qu’avec ce genre de pratique il ne faut pas s’étonner ensuite que les syndicats ne mobilisent plus.

      Il faudrait peut être réflechir pourquoi la France est lepays avec le taux de syndicalisation le plus faible d’Europe ...

      Quant à moi, avec le collègue avec qui on bosse en binome quand ona appris que les syndicats avaient accepté 0,5% de "revalorisation" chez les fonctionnaire - montrant ainsi qu’ils sont prête à accepter tout et n’importe quoi sur notre dos - et bien on a déchiré notre carte : les 0,5% couvrant à peine le montant de notre cotisation, au moins comme ça on sera sur de les toucher ...

      Marre du sabotage syndical !

    • ce que tu ne comprends pas c’est que JC est un délégué syndical
      de la CGT et en plus fier de l’etre et que en plus il a grandi à Leucate village regrade sur une carte où est Elne tu comprendras le rapprochement .
      la grosse difference entre Bellaciao et d’autres forums c’est qu’on peut y donner des arguments et des contres arguments alors que sur d’autres sites tu ne vois que la vérité qui veut être donnée par quelqu’un comme telle sans contestation possible .
      Quand je prends en charge un dossier c’est aprés avoir été saisi par quelqu’un, pas pour faire de la pub dans les médias.
      quand je gueule dans mon syndicat c’est justement parce que je trouve qu’on ne valorise pas assez
      les résultats qu’on a obtenu (ou pas du tout)
      alors lire des trucs puants comme ça ça me fait délirer et j’en arrive à penser qu’il s’agit de hoax
      purement fabriqué pour nuire à quelqu’un (dans ce cas la CGT)
      et que même si certains syndicats CGT sont un peu mous et pas assez energique
      là où la CGT n’est pas bien souvent les salariés souffrent .
      et si cette CGT ne te convient pas et bien fais comme toi encarte toi et fais la changer de l’interieur
      c’est bien beau de baver et de critiquer mais c’est mieux de s’engager et de militer

      JC d’Avignon

      en plus j’aime pas les gens qui signent pas leurs posts

    • JC

      Quelle est la valeur de la "signature" d’un post sur internet. je peux très bien dire que je suis jacques Chirac ou bien Bernard Thibault ...

      Ceci étant dit ce que tu ne sembles pas comprendre en ce qui te concerne c’est que le problème n’est pas "un manque d’énergie" de la CGT (ou de certains de ses secteurs) mais un problème de stratégie de la CGT.

      Si la CGT était vraiment un outil de lutte efficace, il n’y aurait pas que 2% de salariés syndiqués en France ...

      Il faut tout reprendre à zéro.

      ou alors continuer à faire les autruches ...

    • Faire changer la CGT de l’intérieur ! Elle est bonne celle là !
      C’est ce que disent les militants à la CFDT qui n’ont pas eu le courage de partir, elle a changé la CFDT depuis ? Non bien au contraire et malheureusement la CGT prend le même chemin.

      Marius Jacob

  • Selon René MOURIAUX Chercheur :

    La France est le seul pays au monde où le pluralisme syndical est constitutionnel (préambule de la constitution), c’est à dire que tout est fait pour qu’il n’y ait jamais un, mais plusieurs interlocuteurs syndicaux : c’est un cadre qui a été historiquement forgé pour contrer la C.g.t.

    On a ainsi un syndicalisme dont la fragmentation a été élevée au niveau de la Loi, facilitée par une représentation proportionnelle dans toutes les instances de concertation patronat (ou état) / syndicats. En second lieu, on peut signer des accords séparés, et sans que le texte ne le dise, on admet l’idée qu’il y ait des accords minoritaires qui s’imposent. Le cas caricatural, c’est l’accord Unedic sur l’indemnisation du chômage des intermittents, avalisé dans la précipitation par le gouvernement ! Il Y a là une situation qui devient intenable, car relativement inefficace et, lorsqu’elle est bousculée par le réel, comme c’est le cas aujourd’hui également pour les « recalculés., le prix politique à payer est trop lourd ! C’est pourquoi cette question de la représentativité fait aujourd’hui l’objet d’un débat, que la C.g.t. et même la C.f.d.t. sont prêtes à bouger mais que, bien entendu, ça bloque du coté C.g.c. et C.f.t.c..

    Le camp majoritaire aujourd’hui, c’est C.g.t. + U.n.s.a. + F.s.u. : c’est ainsi dans la Fonction publique (où existent l’essentiel des forces syndicales, tout confondu), et dans de nombreux secteurs du privé. Ce qu’il faudrait, c’est un système de représentativité fondé sur une proportionnelle avec des seuils, de manière à empêcher une trop grande dispersion, et des accords fondés sur la majorité des salariés représentés. Il faut élever le débat à ce niveau si on veut sortir des blocages actuels.

    Et il faudrait également formuler des revendications à l’égard de l’information : il n’est pas démocratique que la parole soit plus souvent donnée à la radio et à la télévision à des syndicats minoritaires qu’aux majoritaires ! Il y a là une simple question de démocratie. .

    Les institutions ne règleront pas tous les problèmes, mais c’est un cadre incontournable, en tout cas un lieu de lutte, si on veut que les choses bougent vraiment.