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Tollé après l’annonce du renforcement des contrôles et des sanctions des chômeurs.
Publie le mercredi 21 septembre 2005 par Open-PublishingAu-delà de cette limite, votre chômage n’est plus valable
de Muriel GREMILLET
Qu’est-ce donc qu’un emploi valable ? Cette question est au coeur du nouveau dispositif de contrôle et de sanction des chômeurs mis en place début août par le gouvernement et précisé par une circulaire en début de semaine. Provoquant des réactions outragées chez les syndicats et les mouvements de chômeurs. FO parle de « retour de fait à la dégressivité des allocations ». La CGT « exige l’abrogation » de la circulaire et accuse le gouvernement de « combattre non le chômage mais les chômeurs ». La CFTC dénonce l’auto-intoxication du gouvernement, qui voit des « faux chômeurs » partout.
Gradation. C’est que les nouvelles règles édictées en matière de contrôle et de sanction des chômeurs qui ne rechercheraient pas activement un emploi sont particulièrement durcies. Instaurant une gradation dans les sanctions, allant d’une « réduction de 20 % pendant deux mois de l’allocation versée » à la suppression totale de cette allocation. La circulaire précise ainsi qu’en refusant trois emplois « valables » un chômeur risque de perdre ses indemnités. Le débat se cristallise donc sur les critères d’un emploi valable. Au ministère de l’Emploi on s’indigne de la mauvaise lecture de la circulaire : « Qu’on ne nous fasse pas de procès en sorcellerie. Les critères de définition d’une offre d’emploi ne sont pas modifiés. » De fait, un chômeur pourra toujours « légitimement » refuser d’aller travailler à 200 km de son lieu de résidence dans le BTP, qui manque de bras. Ou à temps partiel sous-payé s’il était avant technicien à plein temps dans l’agroalimentaire.
Seulement, les chômeurs de longue durée vont devoir apprendre à être moins exigeants. Dès l’inscription à l’ANPE, le chômeur définit avec un conseiller un « projet personnalisé d’accès à l’emploi », PPAE. Ce projet définit le boulot recherché en fonction de la formation, des possibilités de déménagement ou du désir de réorientation professionnelle du chômeur. Mais « un demandeur d’emploi depuis plus de six mois, a fortiori de plus de douze mois, doit, précise la circulaire, envisager plus facilement une réorientation s’il apparaît que celle-ci est nécessaire compte tenu des caractéristiques du bassin d’emploi ». La crainte du déclassement sous couvert de lutte tous azimuts contre le chômage tient dans ces quelques lignes. Renforcée par la mise en place d’une prime ou d’un crédit d’impôt à la mobilité... « Quand on dit contrôle des chômeurs, on entend flicage en France, estime-t-on au ministère de l’Emploi. Ce qu’on veut juste montrer, c’est que l’assurance chômage couvre un risque, mais que ce n’est pas un droit de tirage. Si le chômeur ne cherche pas, pour quelque raison que ce soit, il n’a pas à être indemnisé, c’est tout. »
« Atomique ». Difficile pourtant d’imaginer que la sanction, même graduée, devienne une arme antichômage efficace. Jusqu’ici, la radiation des listes et la suspension des allocations étaient déjà utilisées par les services de l’emploi. Selon les chiffres officiels, en 2004, près d’un chômeur sur cinq a été touché par une sanction (pour absence à une convocation, fausse déclaration, refus d’emploi ou doute sur la recherche d’emploi). Mais les services de l’emploi rechignaient à toucher aux allocations, dont la suppression ne pouvait être que totale. Une « arme atomique », selon un agent de l’ANPE. « Demander, et prononcer une telle sanction, c’est très éprouvant, poursuit cet agent. Alors, on ne le fait qu’en cas de fraude énorme. On est là pour aider les gens. Pas pour les enfoncer un peu plus. » « Pour refuser des emplois, il faudrait aussi qu’on en ait à proposer autrement qu’à temps partiel ou dans l’hôtellerie-restauration », note Agnès, agente ANPE dans le Nord. Aujourd’hui, un tiers des chômeurs retrouvent du boulot grâce à leur réseau de connaissances, puis par le biais de candidatures spontanées, enfin grâce à l’intérim à égalité avec l’aide de l’ANPE. Les chômeurs se sentent déjà « coupables »,dit Jean-Pierre Guenanten, du mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP). « Cela va s’accentuer avec la menace de sanctions. »
Enrager. Le débat autour des nouvelles pénalités tombe comme une punition divine pour le gouvernement. Le décret avait été publié le 2 août, au coeur des vacances. Ce qui avait fait enrager certains syndicats, incapables de se faire entendre à l’époque. Mais la publication de la circulaire est venue à point pour rappeler quelle est la politique menée par le gouvernement au nom de la lutte contre le chômage. Quinze jours avant le mouvement syndical prévu le 4 octobre. Et avant les négociations sur l’Unedic qui s’annoncent déjà saignantes.