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Venezuela : combien de temps Hugo Chavez va-t-il encore tenir ?
Publie le lundi 10 mai 2004 par Open-Publishing4 commentaires
Une fois n’est pas coutume, le mur du silence qui entoure la situation sociale et politique du Venezuela a été brisé ce matin par le quotidien Le Monde qui révèle l’arrestation de 56 paramilitaires colombiens dans une propriété de la banlieue de Caracas, dimanche 9 mai 2004.
Le domaine, situé à Sabaneta de Baruta, au sud-est de Caracas, et qui appartient à Robert Alonso, un vénézuélien d’origine cubaine opposant radical à Chavez, hébergeait 130 personnes qui, d’après les premiers interrogatoires de la police vénézuélienne, préparaient un nouveau coup d’Etat contre le régime d’Hugo Chavez. Ils avaient prévu de donner l’assaut contre un fort militaire de Caracas, donnant ainsi le signal de l’invasion du Venezuela à quelques 3000 paramilitaires basés en Colombie.
En parallèle de la stratégie légaliste adoptée par l’opposition depuis quelques mois, après l’échec du coup d’Etat militaire en avril 2002 et la fin infructueuse de la grève générale pilotée par le patronat en février 2003, il semble que certains éléments radicaux n’aient pas écarté la carte de la violence militaire. D’autant plus que la pétition pour le référendum révocatoire réclamé par l’opposition peine à recueillir les quelques 2.5 millions de voix nécessaires, et que sa tenue éventuelle au mois d’août paraît compromise.
Ainsi l’annonce de cette arrestation est à rapprocher de l’annonce par le gouvernement Aznar en février 2004 de la livraison d’ici la fin de l’année de près d’une cinquantaine de chars AMX30 par l’Espagne à la Colombie. Officiellement, il s’agit de doter la Colombie de moyens militaires susceptibles d’assurer le contrôle interne de son territoire et notamment de son réseau routier, face aux attaques de la guérilla active depuis maintenant près de quarante ans. Le Venezuela étant régulièrement accusé par le gouvernement colombien de servir de base arrière aux FARC et à l’ELN - guérillas d’extrême-gauche opposées au gouvernement central de Bogota - , certaines voix s’élèvent pour dénoncer le futur déploiement de ces chars dans la zone frontalière qui sépare les deux pays, et leur utilisation éventuelle contre le Venezuela.
Est-il besoin de rappeler que la Colombie, dans son combat contre les narco-trafiquants, est également totalement inféodée à l’administration américaine qui fournit cadres militaires, armes et même troupes dans le cadre du Plan Colombie, opération militaire qui vise à éradiquer l’économie de la drogue. Et que le gouvernement colombien utilise en sous-main depuis de nombreuses années les milices d’extrême-droite mises en place par les grands propriétaires terriens et certains narco-trafiquants pour combattre les groupes armés d’extrême-gauche, eux-même liés au narco-trafic. Ce sont des membres de ces milices d’extrême-droite qui ont été arrêtés dimanche près de Caracas. Et les liens de Robert Alonso avec les milieux anti-castristes de Miami font une fois de plus soupçonner la présence de la main américaine - ou du moins de certains intérêts américains - derrière cette nouvelle affaire. Soupçons renforcés par les menaces récurrentes de Georges W. Bush contre Hugo Chavez, perçu comme un nouveau Castro par la plupart des personnalités politiques américaines.
Un autre facteur est la vive inquiétude des marchés financiers sur les cours du pétrole, après les attentats de début mai qui ont frappé l’Arabie Saoudite. La flambée du prix du baril fait peser une lourde incertitude sur la reprise économique mondiale. Surtout, l’Arabie Saoudite n’est plus perçue comme un fournisseur fiable et sécurisé, à l’abri du terrorisme. Une fois de plus, le pétrole vénézuélien, à portée de main des Etats-Unis mais jalousement gardé par un président anti-libéral et non-aligné, apparaît comme une solution de rechange tentante.
Quant au silence persistant de la presse hexagonale sur la situation du Venezuela depuis trois ans, en dehors de quelques interventions douteuses du Monde et de RSF, on peut y voir une sorte de solidarité de la corporation qui ne veut pas attaquer ses homologues des grands groupes de communication privés du Venezuela qui ont soutenu et orchestré la tentative de putsch patronal de décembre 2002 à février 2003 - Robert Ménard, président de RSF, a ainsi honteusement soutenu les manœuvres des médias privés vénézuéliens -, un manque d’interêt spectaculaire ou encore un contexte jugé trop compliqué pour espérer générer suffisamment d’intérêt chez les consommateurs d’information calibrée. Ironiquement, c’est aujourd’hui le quotidien conservateur Le Figaro qui, par le biais de son envoyée spéciale Lamia Oualalou, dénonce un « mai 68 à l’envers » en cours à Caracas et offre la couverture médiatique la plus fiable et la plus équilibrée sur les troubles au Venezuela ! Le Monde à l’envers en quelque sorte…
D’une manière générale, le silence des grands médias français proches du pouvoir politique au sujet de ces graves évènements s’explique peut-être par la révélation il y a quelques mois des apports actifs de l’armée française aux dictatures sud-américaines de 1973 à 1984. En soutien notamment de l’opération Condor qui visait à éradiquer les guérillas et autres formes de résistances politiques aux régimes militaires installés au Chili, Argentine, Uruguay, Brésil, Paraguay... L’armée française, forte de son expérience lors de la bataille d’Alger, a ainsi formé les cadres sud-américains et étatsuniens aux techniques de lutte anti-subversive expérimentées contre le FLN lors de la guerre d’Algérie, et plus largement dans les conflits coloniaux de la fin des années cinquante et du début des années soixante. La France n’a donc peut-être pas trop intérêt à soulever la marmite du chaudron sud-américain qui pourrait révéler quelques ingrédients peu ragoûtants, et somme toute assez honteux pour le champion mondial auto-proclamé de la haute gastronomie.
On peut cependant espérer que le changement de gouvernement en Espagne et l’affaiblissement de George Bush suite aux révélations des pratiques de torture en Irak suffiront à geler ce qui apparaît comme les préparatifs d’une énième tentative de renversement d’un gouvernement démocratique en Amérique du Sud.
Auteur : Zedrx
Sources :
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3222,36-364176,0.html
http://fr.biz.yahoo.com/040507/202/3sczh.html
http://fr.biz.yahoo.com/040423/17/3rdg3.html
http://www.wsws.org/articles/2003/oct2003/vene-o08.shtml
http://www.asile.org/citoyens/numero15/venezuela/venezuela.htm
http://infos.samizdat.net/blog/page.php?p=651
http://www.unicef.org/infobycountry/venezuela.html
http://www.rsf.org/article.php3?id_article=1232
http://www.acrimed.org/imprimer.php3?id_article=1532
http://www.lefigaro.fr/cgi/edition/genimprime?cle=20040309.FIG0237
http://www.latinreporters.com/colombiepol25022004.html
http://www.assemblee-nat.fr/12/propositions/pion1060.asp
http://www.lemonde.fr/web/recherche_resumedoc/1,13-0,37-820135,0.html?message=redirection_article
Messages
1. > Venezuela : combien de temps Hugo Chavez va-t-il encore tenir ?, 10 mai 2004, 15:23
Il faudrait tout de même que l’armée vienne contrôler ce qui se passe. Déjà un élève, un lycéen, a posé sur le bureau du professeur qui commence à avoir l’habitude ... ce spam-bombe qui devrait ENFIN le déstabiliser :(contrôle fait, il s’agit d’un jeu derôle dela stagiaire d’angl.) :"YOU ARE THE DEVIL:YOU WANT EVERYBODY TO PERISH ON EARTH"
C’est d’un niveau tellement bas.
Quelqu’un a-t-il eu comme moi régulièrement des messages : "MORT PROGRAMMéE DE L’ALLEMAND" de manière répétée et insistante ?
Ma soeur a un cancer ; elle a des hémorragies ; ça , c’est IMPORTANT pour moi. Je dois manquer jeudi pour l’accompagner à l’hôpital, que Chavez le veuille ou non.
J’ai déposé une demande pour que l’armée vienne contrôler et une demande pour sortie hip lundi. Sans autorisation de sortie, pas de sortie.
Pour contrôler si la demande de contrôle est transmise, la demande a été montrée à une collègue, donnée à la sous-chèfe ... après avoir été photocopiée et adressée à un Evêque directement par MES soins : je suis curieuse de voir si le courrier (mon courrier) est transmis.
Je divague... C’est la drogue. Ciao, plus loin.
2. > Venezuela : combien de temps Hugo Chavez va-t-il encore tenir ?, 11 mai 2004, 09:20
Attention au raisonnement les ennemis de mes ennemis sont mes amis. Que les américains s’opposent à Chavez c’est un fait. Qu’une immense majorité des vénézuéliens hurle son rejet de chavez depuis deux ans et demie, c’est un fait. Que Chavez ne l’entende pas et tienne un discours altermondialiste à l’extérieur de son pays et se fasse passer pour un chef d’Etat qui redonne au peuple ses droit et ses richesse, c’est malheureusement un fait également.Le pire c’est que, grâce à l’enveloppe altermondialiste de son discours, la France gobe tout sur sa politique intérieur. Mais vous ne ferez croire à aucun vénézuélien que Chavez le respecte ou qu’il ai tchangé qqch au problème de la misère. Je ne suis pas drogué, moi, lol, j’ai juste vécu qqs années au Venezuela et suis rentré fin août 2003.
1. > Venezuela : combien de temps Hugo Chavez va-t-il encore tenir ?, 11 mai 2004, 09:59
Justement, aurais-tu des infos sur les réalisations ou non-réalisations de Chavez dans son pays ?
Parce que c’est un fait que Chavez est un populiste, et que son discours anti-américain lui apporte de nombreuses sympathies internationales.
Mais c’est également un fait que l’opposition vénézuélienne utilise des méthodes illégales, dont la violence paramilitaire, pour faire tomber un gouvernement démocratique. C’est ce qui me paraît grave.
Qu’on ne soit pas d’accord avec la politique et le discours plus ou moins gauchistes de Chavez, tout à fait d’accord - mais les chiffres sont là pour rappeler qu’il a tout de même amélioré la situation des plus pauvres, notament par le biais de la réforme agraire.
Question innocente : tu as vécu plusieurs années au Venezuela, mais où ? Dans quel cadre et dans quelles conditions ? Quelle couche de la population as-tu cotoyée ?
3. > Venezuela : combien de temps Hugo Chavez va-t-il encore tenir ?, 1er juin 2004, 18:14
Chavez n’a jamais été à la hauteur de son programme social, il s’oppose au referendum par tous les moyens , y compris une invasion colombienne imaginaire. En attendant, sous son régime, les pauvres sont encore plus pauvres (plusieurs dizaines de milliers de personnes toujours non relogées après le glissement de terrain du littoral de Caracas en 1999). Les riches (en particulier les quelques familles de l’oligarchie, Boulton, Mendoza, Cisneros et consorts qui comptent des soutiens dans l’entourage du président) ne sont pas moins riches. Une classe de militaires chavistes, elle, s’est nettement enrichie. Les Etats-Unis n’ont pas à se plaindre de leurs conditions d’exploitation pétrolière au Venezuela. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils n’ont pas réellement soutenu le putsch antichaviste.
Chavez est une vitrine catastophique et corrompue de la gauche en Amérique latine.
Je n’ai pour étayer mes propos que des séjours de plusieurs mois par an au Venezuela, relayés par de nombreux contacts, y compris chavistes. Le pays est au bord de la guerre civile, et c’est tout ce qu’il y a à dire.
Philippe Garnier