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"Yalla ! En avant ! la police des frontières, rentrez-leur dedans !"
Publie le vendredi 25 novembre 2005 par Open-Publishing1 commentaire
Ynet (Yediot Aharonot), 14 novembre 2005
www.ynet.co.il/articles/0,7340,L-3168395,00.html
Quand celui qui est tué s’appelle Samir Dari, c’est la manifestation spontanée de ses amis qui retient l’attention. Le coup de feu et les réactions des internautes reflètent un racisme profond. Et merci au Département d’investigation interne de la Police.
A la fin de la semaine, nous avons appris qu’un habitant de Jérusalem avait été tué par des agents de la police des frontières. Il s’agit d’un jeune père de deux petits enfants, abattu - c’est en tout cas ce qui avait été déclaré - alors qu’il tentait d’écraser un des policiers. Suite à sa mort, ses voisins sont descendus dans la rue, ont manifesté, ont mis le feu à des pneus et ont même incendié une voiture. Les réactions des internautes sur le site de Ynet n’ont pas tardé. 160 d’entre elles se sont accumulées en très peu de temps et quasi unanimement sous le même slogan : « Yalla, la police des frontières, occupez-vous d’eux » (signé : un sioniste) ; « Donner un coup, immédiatement » (un israélien qui a un coup de sang) ; « Sans pitié » ; « Calmez-les et reprenons nos habitudes » ; « Larguer quelques missiles sur les émeutiers. C’est pas la France, ici » ; « A tous les Arabes : ici, ce n’est pas l’Europe ».
Il en est ainsi lorsque celui qui est tué s’appelle Samir Rivhi Dari et pas, disons, Haïm Cohen. S’agissant d’un Palestinien, sa mort elle-même ne vaut pas qu’on y réagisse puisque l’événement est perçu comme normal. C’est seulement la manifestation spontanée de ses amis et de ses voisins qui retient l’attention des internautes intervenant sur le site. Des Arabes disent leur colère dans la rue ? Il faut y répondre d’urgence et avec force, et « larguer sur eux quelques missiles ». Aussi bien la mort de Samir que les réactions sur Ynet reflètent quelques-uns des pires maux de la société israélienne. Il s’agit avant tout d’un racisme profond incitant à un comportement violent.
Ce racisme est intimement lié à une inversion des rôles entre victime et agresseur. Il s’agit d’une culture du mensonge automatique et instinctif : on tue un Palestinien et immédiatement, on dit qu’il était violent (voyez le cas des 13 citoyens arabes tués par balles en octobre 2000, ou le jeune Mohammed A-Sa’adi abattu dans sa voiture, à Lod) ; on passe un Palestinien à tabac et on prétend qu’il avait frappé un policier (comme lors des innombrables manifestations qui ont lieu à Bi’lin) ; on l’occupe et on l’opprime, mais ont soutient que c’est lui le coupable. C’est ainsi qu’un agent de la police des frontières a tiré dans le dos de Samir Dari, d’une distance de quelques mètres et tout de suite ce qu’on a prétendu, c’est qu’il avait été abattu alors qu’il tentait d’écraser un policier. Réflexe conditionné.
Mais pour fonctionner efficacement, la culture du mensonge a besoin de l’appui de sa comparse : la culture de la couverture et de la dissimulation. A en juger par l’expérience du passé, le policier qui a tiré sur Samir peut être tranquille. Après tout, le Département d’investigation interne de la police s‘occupe de l’affaire - ce fameux département qui a décidé de ne pas même déposer le moindre acte d’accusation contre ceux qui ont tiré en octobre 2000, de même qu’il n’en a pas déposé contre le policier qui a abattu le jeune homme de Lod, ni contre les policiers qui ont fabriqué en série des témoignages sur Bi’lin. Pour tout ça, il y a le Département d’investigation interne de la police.
La culture du mensonge et de la dissimulation alimente la violence. La leçon apprise - que le Juif est la victime éternelle, peu importe la violence qui est la sienne, et que par conséquent, il est à l’abri de toute investigation et de toute sanction - rend la gachette facile et fait bon marché de la vie des Palestiniens. Si bien que nous en sommes arrivés à une situation où on peut s’attendre encore à la mort de citoyens palestiniens sous les balles des forces de sécurité israéliennes. La seule inconnue, c’est : qui sera la prochaine victime ? Nous ne pouvions pas savoir, par exemple, qu’un agent de la police des frontières tirerait justement sur notre ami Samir.
Samir était un homme de la nuit. Sa journée commençait l’après-midi, et le soir, il était assis derrière son volant et il dirigeait par téléphone sa société de transports avec une patience infinie. En quatre années de travail en commun, parfois sous tension, nous avons connu un homme fin, modeste, plein de ressources, qui était toujours là pour prêter main forte à son prochain dans les moments difficiles.
Samir n’est plus. Nous voudrions pouvoir espérer qu’il se trouvera quelqu’un d’assez courageux pour appliquer la loi dans toute sa rigueur à l’encontre de celui qui lui a tiré dans le dos. Nous aimerions croire que ce cas fissurera les moules du mensonge, de la dissimulation et du racisme qui alimentent le cercle de la violence. Nous aimerions savoir que les enfants de Samir seront les derniers à devenir orphelins par la violence de la Sécurité Générale (Shabak), de la police et de l’armée. Mais non. Nous ne nous faisons pas d’illusions.
Neve Gordon est professeur au département de politique et administration de l’Université Ben Gourion.
Yigal Bronner enseigne, cette année, au département Asie du Sud de l’université de Chicago.
(Traduction de l’hébreu : Michel Ghys)
Messages
1. > "Yalla ! En avant ! la police des frontières, rentrez-leur dedans !", 25 novembre 2005, 16:19
Ca c’est un bon article.
Il y avait une fois, aussi, dans un certain pays, l’histoire de deux jeunes de banlieues qui se sont electrocutés volontairement, évènement qui a provoqué des incendies de pneus autours d’une certaine capitale, mais chut, il ne faut pas jeter de l’huile sur le feu.
Il faut obeir à messieur le policier qui vient pour pacifier la situation.
Une citation du chanteur Renaud : "Le fascime c’est la chienlit, de Santiago jusqu’à Paris".
C’est bien que des articles en Hébreux comme cela soient publiés.
jyd.