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Publie le samedi 13 septembre 2008 par Open-Publishing

PRÉSIDENCE
DE LA
RÉPUBLIQUE


DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Généralisation du Revenu de Solidarité Active

Changé – Jeudi 28 août 2008

Mesdames et Messieurs,

Cher Martin HIRSCH,
Monsieur le président du Conseil général, cher Jean ARTHUIS
Monsieur le maire de Laval,
Mesdames et Messieurs les députés et sénateurs,
Cher Pierre MEHAIGNERIE,
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les maires et conseillers généraux,
Madame le Préfet, Monsieur le Préfet de région,
Et si vous me le permettez, mes chers amis,

Je suis heureux d’être parmi vous aujourd’hui pour donner le coup d’envoi à la généralisation du Revenu de Solidarité Active, expérimenté depuis quelques mois dans ce beau département de la Mayenne. C’est une réforme pour moi capitale, qui vient vingt années après la création du revenu minimum d’insertion, le RMI. Cette réforme, la création du RSA, revenu de solidarité active, va profondément moderniser les politiques de solidarité en France. Je vais vous dire tout de suite une chose : je ne mettrai pas un centime pour favoriser l’assistanat. J’ai été élu sur une promesse, celle de récompenser le travail. Tout l’argent que nous allons mettre sur le RSA est en faveur du travail. En France, il y a des travailleurs pauvres d’un côté et de l’autre ceux qui depuis vingt ans survivent avec le RMI. On ne survit pas en 2008 en France, il faut vivre et il faut vivre de son travail.

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La solidarité, pour moi, ce n’est pas la charité, ce n’est même pas l’assistance.

La solidarité, c’est la fraternité et c’est le respect. C’est d’être avec ceux qui se lèvent tôt le matin, et avec ceux qui n’ont pas assez pour vivre décemment, pour loger leur famille. Je pense notamment aux travailleurs pauvres. C’est d’être aux côtés de tous ceux qui ont besoin d’être accompagnés pour trouver un logement, un emploi, une activité pour se sentir intégrés.

Force est de reconnaître que de ce point de vue la création du RMI par Michel ROCARD, cela a été un progrès. Mais on a vu les limites de ce progrès. Cela a été un progrès parce que l’on a reconnu qu’il n’y avait pas de honte à être démuni. La seule honte, c’est celle qui consiste à oublier la fraternité.

Mais vingt ans après la création du RMI, 7 millions de personnes vivent encore sous le seuil de pauvreté en France. Un ménage français sur 8 dans notre pays vit avec un revenu insuffisant. C’est cela la réalité. Si le RMI avait résolu le problème cela se saurait.

Depuis plusieurs années la pauvreté a cessé de reculer parce qu’elle a commencé à connaître un nouveau visage, celui des « travailleurs pauvres ». Des gens qui ont le courage de travailler et qui n’ont pas les revenus qui leur permettent de vivre décemment et de faire vivre leur famille. Actuellement pour un million et demi de personnes occuper un emploi ne suffit pas à se prémunir contre la pauvreté. Mais, puisqu’ils occupent un emploi, ils n’ont pas le droit au RMI. On a donc cette situation inouïe : des centaines de milliers de Français au RMI sans aucune chance de s’en sortir et un million et demi de personnes qui occupent un emploi, qui eux n’ont pas le droit au RMI mais qui malgré cet emploi n’arrivent pas à vivre décemment. Voilà les deux publics, entre guillemets, que nous visons. Ceux qui sont condamnés au RMI, qui ne pourront jamais s’en sortir, et ceux qui travaillent et qui malgré leur travail ne peuvent pas s’en sortir parce qu’ils n’ont pas les revenus qui vont avec.

A tous ceux qui travaillent et qui vivent avec au ventre la peur de ne plus pouvoir nourrir, de ne plus pouvoir habiller leurs enfants, je veux dire que j’avais pris des engagements et que je les tiendrai.

Je veux m’adresser, aussi, à tous ceux que le RMI n’a pas réussi à insérer, à ceux qu’il a parfois exclus un peu plus encore alors qu’il était pourtant censé les aider. Vous êtes au RMI, vous avez un certain nombre d’allocations et si vous reprenez un emploi vous n’avez plus vos allocations. Et c’est le comble : on décourage celui qui vent travailler qui gagnera moins que celui qui est assisté. Voilà le scandale auquel, avec Martin HIRSCH, nous voulons mettre un terme. D’ailleurs, on peut dire que le RMI a été un échec, même s’il a constitué un progrès. Mais c’est un échec pourquoi ? Parce que la moitié des bénéficiaires du RMI sont au RMI depuis plus de 3 ans. On va me demander de continuer comme cela ? De faire semblant de dire qu’il n’y a pas de problème. Vous vous rendez compte, avec le RMI on survit. Et la moitié de ceux qui sont au RMI y sont depuis plus de 3 ans. Autant dire que plus le temps passe, plus ils s’éloignent de la possibilité de s’en sortir. Et mieux que cela : une personne qui entre au RMI a 3 fois moins de chance de s’en sortir dans l’année qu’un chômeur qui entre à l’ANPE a une chance de trouver un emploi. 3 fois moins de chance ! Donc, c’est une trappe à exclusion.

Michel ROCARD est un homme de qualité. Il avait dit il y a un « I », - le I de insertion- dans le RMI. Mais à l’arrivée la moitié y sont depuis 3 ans. Comme vous êtes au RMI vous avez 3 fois moins de chance de trouver un emploi que celui qui est à l’ANPE. Il faut bien changer cela. On n’en a pas les moyens financiers. Et moralement, on ne peut pas laisser des millions de nos compatriotes dans cette situation.

C’est une situation injuste, c’est une situation absurde. Mais, plutôt que de la corriger, notre système social accentue l’injustice ! Et je mets au défi quiconque de dire que ce que je dis n’est pas profondément conforme à la réalité.

On a fait du RMI un statut au sein duquel sont aménagés des avantages, pour que les gens en vivent le moins mal possible. Quand on offre, par exemple, aux Rmistes la gratuité des transports en commun, on a bonne conscience. Mais on enferme encore un peu plus nos concitoyens dans l’assistance puisque celui qui retrouve un travail est immédiatement récompensé en perdant le bénéfice de la gratuité du transport ! C’est cela le système : on est au RMI on a la gratuité de transport, on trouve un travail on perd la gratuité du transport. Allez retrouver un travail !

C’est cela que je veux changer. Parce que je veux changer cette situation scandaleuse qui veut que dans notre pays l’assistanat paie davantage que le travail. Je n’ai pas été élu pour maintenir cette injustice. Je veux libérer les gens qui sont aujourd’hui prisonniers de l’assistance. Quand l’assistanat paie plus que le travail, on démoralise la France qui travaille.

Aucun modèle social ne peut tenir si on oublie que le travail est le moteur, bien sûr de la création de richesses, mais aussi de la socialisation. On vit dignement quand on vit du revenu de son travail. De son activité et non pas de l’assistanat.

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Martin HIRSCH est un homme pour qui j’ai de l’admiration et de l’amitié. Il m’a fait confiance, pas avant les élections, mais après. C’est un homme courageux parce que vous savez, on ne vient pas de la même sensibilité. Je lui ai dit, écoute, tu as des idées novatrices sur ces questions, maintenant on va voir si tu as du courage : je te demande de mettre en œuvre ces idées novatrices. Ce n’est pas si simple pour le Président d’Emmaüs, le successeur de l’Abbé PIERRE de venir dans le Gouvernement pour passer du rôle de conseiller à celui de réalisateur. Moi j’aime bien les gens courageux. Martin a été courageux, j’ai pris des engagements parce que je crois à ses idées et à leur pertinence. Je vais m’en expliquer.

Au fond, je voudrais la rupture avec ce conformisme intellectuel qui nous oblige à penser que l’économique et le social sont antinomiques. Idée chère à Pierre MEHAIGNERIE qui a toujours voulu que l’on concilie l’économique et le social.

L’alternative n’est pas entre d’un côté un système qui exclurait sans pitié les moins rentables, et de l’autre le partage des ressources, des allocations et du temps de travail qui en divisant la pénurie appauvrit tout le monde. Je ne vais pas vous infliger ce que je pense des 35 heures et tout le travail qu’avec la majorité j’ai fait pour que l’on sorte de ce carcan, de cette erreur économique qu’est le partage du temps de travail.

Je veux dépasser les clivages parce que dans ces clivages ce sont les plus fragiles d’entre nous et les plus modestes qui sont pris en étau.

La question sociale, Monsieur le maire, n’est ni de droite, ni de gauche.

Ce serait une grave erreur de réduire la logique de l’assistanat à la seule opposition partisane entre les uns et les autres. Quel que soit le gouvernement, il se trouvera dans une situation où il y a des Rmistes dont la moitié d’entre eux sont au RMI depuis plus de 3 ans. Il faut bien les en sortir ! Ce n’est pas quelque chose qui se règle dans un congrès dans un parti politique.

Il faut sortir des faux débats, il faut dépasser les anciennes oppositions.

Voilà pourquoi, le Revenu de Solidarité Active, qui est le fruit du Grenelle de l’insertion, est pour moi un engagement majeur. Il y a eu une trentaine expérimentations locales sur le terrain, dont celle de la Mayenne. Je veux dire d’ailleurs à Jean ARTHUIS et à tous les conseillers généraux, ma reconnaissance pour le travail qu’ils ont fait. Il y a eu des centaines d’heures de réunion. Vous avez tous mouillé votre chemise. Vous avez eu une attitude constructive, alors qu’il était tellement plus facile d’être critique.

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Grâce à ces expérimentations, je peux aujourd’hui annoncer le résultat qui consiste à considérer les liens entre le travail et les revenus de façon différente.

La prime pour l’emploi, ce fut un replâtrage ajouté dans l’urgence au maquis d’aides sociales. Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet… Au contraire, le RSA va remplacer les deux principaux minima sociaux que sont le RMI et l’API. Il remplacera aussi les aides à l’intéressement qui ne font que retarder de quelques mois la fin des minimas après le retour à l’emploi.

Contrairement au RMI ou à l’API, le RSA ne disparaîtra pas lors de la reprise d’un emploi. C’est capital. La personne qui va reprendre un emploi, gardera le bénéfice d’une partie du RSA, qui complètera les revenus du travail. Cela me permet de prendre un engagement devant les Français : toute personne qui reprend un travail ou qui augmente la durée de son travail verra ses ressources augmenter. C’est un engagement. Chacun sera donc encouragé à travailler davantage. Personne ne perdra 1 centime quand il passera de l’assistanat au travail.

C’est une révolution complète dans la définition de nos politiques sociales. A chaque fois qu’un bénéficiaire du RSA verra, par exemple, ses revenus du travail augmenter de 100 euros, le RSA versé diminuera seulement de 38 euros. Il en conservera 62 euros. Pour faire plus clair, chaque fois qu’un Rmiste prendra un travail, il conservera les deux tiers de son revenu de solidarité. Donc, on va additionner le revenu du travail et la solidarité, jusqu’à un plafond.

Vous voyez le changement de logique. Aujourd’hui, si vous reprenez un emploi, on vous coupe vos aides. Demain, on vous conservera les deux tiers de cette aide pour vous encourager à reprendre cet emploi.

Contrairement à la PPE, le RSA bénéficiera aux foyers dont les revenus sont inférieurs à 1 SMIC et sera donc concentré sur ceux qui en ont le plus besoin. C’est bien le problème de la France. Comme tout le monde exprime son droit à la solidarité, on ne choisit rien. On donne à tout le monde On éparpille tout. Et, finalement, on a un système inefficace.

Là, nous avons voulu avec Martin mettre le paquet sur ceux de nos compatriotes qui en ont besoin.

Il y a trois millions de foyers qui vont percevoir le RSA. Trois millions.
  Il s’agira, d’une part, de personnes sans aucune source de revenu, et notamment sans revenus tirés du travail. Pour eux, le montant du RSA restera fixé au niveau du RMI ou de l’API.
  Et il s’agira, d’autre part, c’est là la nouveauté, du million et demi de travailleurs pauvres, qui seront les grands bénéficiaires de la réforme. Pour eux, le RSA représentera en moyenne 106 euros de plus chaque mois pour subvenir à leurs besoins.

Je parlais avec une dame qui est dans la salle. Je ne veux pas la gêner. Elle est malade, elle travaille vingt heures par mois, elle gagne moins de 600 euros par mois. Elle me dit : monsieur le Président, j’ai travaillé toute ma vie, je n’ai jamais été au RMI, je n’ai jamais été au chômage, vous n’allez pas me faire gagner moins parce que je n’étais pas au RMI ! 600 euros par mois. Cette personne là, travailleur pauvre, va gagner jusqu’à 200 euros de plus. Parce que je veux récompenser les gens qui, malgré la difficulté, travaillent. Parce que je crois aux vertus du travail. Je pense que la seule façon de faire vivre dignement sa famille, c’est de la faire vivre debout du revenu de son travail et non pas de l’assistance.

Pour tenir compte des consultations effectuées au cours de ces derniers mois, cher Pierre MEHAIGNERIE, la prime pour l’emploi sera maintenue parce que j’ai été sensible à ton argument. Il ne s’agissait pas naturellement de faire payer les classes moyennes le prix de la solidarité avec les plus pauvres. Encore que, entre parenthèses, c’est l’intérêt de tout le monde que les millions de gens qui ne travaillent pas ou qui ne s’en sortent pas, soient insérés. C’est l’intérêt de vos enfants et de vous-mêmes pour la stabilité et l’unité de la société, pour le pouvoir d’achat et la croissance. Parce que plus il y a de gens qui travaillent, mieux c’est pour l’économie. Que l’on n’oppose pas ce que je fais pour les plus pauvres et les autres. J’ai décidé que la PPE serait maintenue. Compte tenu de la priorité donnée au RSA comme instrument efficace de soutien des revenus, de manière exceptionnelle, et pour la seule année 2009, nous n’indexerons pas la PPE sur l’inflation. Je préfère que les choses soient très claires entre nous et vous dire les choses de la façon la plus simple : je maintiens la PPE et pour 2009, on ne fera pas d’indexation. A l’avenir, les ménages qui seraient à la fois éligibles au RSA et à la prime pour l’emploi percevront le montant le plus favorable des deux.

Pardon de rentrer dans le détail, mais je veux que les choses soient claires devant les Français sur cette réforme qui sera l’une des plus importantes de mon quinquennat.

Le maintien de la PPE est une question de justice, car la PPE concerne aussi les jeunes de moins de 25 ans et les foyers qui, pour être très au-dessus du seuil de pauvreté, n’en sont pas moins des salariés modestes qui font face aux difficultés économiques que nous traversons. La supprimer serait, là encore, contradictoire avec l’idée de revaloriser le travail. C’est évident.

Et tous les mécanismes doivent jouer dans le même sens.

C’est pourquoi, je vous annonce un nouveau changement : nous allons en finir avec une situation où l’on verse des avantages liés à un « statut » de titulaire de minimum social et où ces avantages disparaissent lors de la reprise d’un emploi. Ces avantages, comme l’exonération automatique de la taxe d’habitation, continueront de bénéficier à ceux qui en ont besoin. Mais ils seront désormais uniquement accordés en fonction des revenus et non pas du statut. La dame, dont je parlais tout à l’heure, parce qu’elle travaille et qu’elle gagne moins de 600 euros, n’a droit à rien. Tandis que parfois les Rmistes ont des droits, alors même que leurs revenus sont supérieurs grâce à l’addition des aides. Donc, ces aides, ces exonérations seront fonction non plus d’un statut mais d’un revenu. C’est un geste de justice, de bon sens et d’intelligence.

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Par ailleurs, cette vaste réforme sera discutée avec le Parlement, dès le 22 septembre, lors de la session extraordinaire que j’ai convoquée.

J’ai en effet souhaité qu’elle puisse être mise en œuvre le plus rapidement possible. Si le Parlement l’approuve, le RSA généralisée entrera en vigueur en juillet prochain Je demande donc au gouvernement que les premiers versements du RSA aient lieu début juillet 2009.

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C’est une ambition sociale très forte qui coûtera chaque année un milliard et demi d’euros de plus que les dispositifs actuels. C’est un effort considérable pour la nation. Mais, je voudrais vous dire une chose. A l’arrivée, si on sort 1,6 million de personnes de l’exclusion pour les remettre au travail, c’est la nation qui fera une économie. J’ai donc décidé que l’on allait investir ce milliard et demi sur ceux de nos compatriotes qui sont exclus, parce que je souhaite que l’on les réintègre. Et, à l’arrivée, cet investissement sera aussi rentable que le milliard et demi d’euros que l’on met dans la recherche et dans les technologies d’avant-garde. Parce que l’investissement dans l’avenir, Mesdames et Messieurs, il n’est pas simplement dans les technologies, il est aussi dans les hommes, dans les êtres humains que l’on ne laisse pas tomber sur le bord de la route.

Ce coût ne sera pas à la charge des départements qui verront en plus de financements nouveaux, les 500 millions d’euros du fonds de mobilisation départemental pour l’insertion reconduits, cher Jean ARTHUIS, dans le projet de loi de finances. Cette réforme, je la ferai loyalement avec les conseils généraux car vous serez au cœur de sa réussite. Et, je demande aux conseils généraux de vérifier l’honnêteté et la loyauté de ceux qui auront le RSA. Ce que j’ai demandé, cher Pierre MEHAIGNERIE pour les chômeurs -que l’on supprime tout ou partie des allocations lorsque l’on refuse deux offres d’emploi valables- ce sera pareil pour le RSA. Il n’y a pas de droit supplémentaire sans devoir. Aujourd’hui, le RMI, on le touche que l’on fasse un effort de formation ou pour trouver un emploi ou que l’on n’en fasse pas. Le RSA -Martin HIRSCH et moi, on est bien d’accord là-dessus on ne le touchera que dans la mesure où l’on fait un effort pour se former et trouver un emploi. Après deux refus d’offres d’emploi ou de formation, je demande que l’on supprime le RSA.

Vous voyez bien la logique de tout cela. Nous, on va aider ceux qui veulent s’en sortir. Ceux qui ne veulent pas s’en sortir, personne ne peut les aider. Je ne parle naturellement pas des malades, des gens ayant un handicap très fort... Bref, il peut y avoir des problèmes dans la vie. Mais, je ne veux plus d’aide sociale automatique. Il faut la mériter. Chacun a droit à une chance. Mais chacun, en fonction de ses moyens, doit accepter une formation ou un emploi qui lui correspondent. Je ne parle pas simplement de l’emploi marchand, je parle des contrats aidés, je parle du temps partiel, je parle de la formation qualifiante. Personne ne doit rester chez lui s’il a les moyens d’aller prendre une formation ou un emploi. C’est donnant-donnant, gagnant-gagnant ! Aujourd’hui le RMI, vous le touchez depuis des années, on ne vous demande rien. On vous demande simplement de vous taire, je n’accepte pas cette conception de l’humanité.

L’Etat prendra ses responsabilités. Ce ne sont pas les déficits qui financeront la réforme. Moi, vous savez, les déficits j’en ai trouvé. Je suis Président de la République depuis 15 mois : on ne peut pas dire que les déficits que j’ai trouvé c’est uniquement de ma faute quand même ! Je veux bien prendre la responsabilité de tout le monde. Mais enfin chacun voit bien la situation.

Je financerai ce nouveau RSA en créant une surtaxe d’1,1 point à la contribution de sociale de 2% sur les revenus du patrimoine et des placements. Que les choses soient très claires : ces revenus sont taxés aujourd’hui à 11%, je les taxerai à 12%. J’estime que cela n’est pas anormal après avoir supprimé les droits de succession, pour 95% des Français, après avoir permis la défiscalisation de l’impôt de solidarité sur la fortune – pour près d’un milliard d’euros cette année cher Pierre MEHAIGNERIE – après avoir organisé le bouclier fiscal pour qu’aucun d’entre vous ne se voit prélevé plus de la moitié de ce qu’il a gagné.

Et je suis même prêt, avec les parlementaires, à faire en sorte que le bouclier fiscal soit désormais déclaratif. C’est une discussion que l’on aura avec la Commission des finances. Je crois qu’il faut aller jusqu’au bout de la logique du bouclier fiscal en le rendant déclaratif, c’est-à-dire qu’on n’aura pas besoin de payer puis de se faire rembourser. Je suis d’ailleurs aussi prêt, Martin HIRSCH et moi en parlions dans l’avion en venant, à discuter pour savoir si cette contribution sera dans le bouclier fiscal ou pas. Les parlementaires pourront en discuter. Je suis plutôt favorable à ce qu’elle soit dans le bouclier, mais on en discutera. C’est le débat parlementaire, je ne prétends pas qu’avec Martin HIRSCH on est raison sur tout. Il y a matière à discuter. Mais j’estime qu’il est normal que chacun contribue dans un effort de solidarité à faire sortir 3 millions de nos compatriotes de la pauvreté ou de l’exclusion. D’autant que ce n’est pas une allocation de plus, c’est le travail que l’on récompense. On encourage les gens à reprendre un travail.

Dans un contexte où depuis plusieurs années les salaires progressent beaucoup moins vite que les revenus du capital, beaucoup moins vite. Dans un contexte où l’on explique aux salariés de tant d’entreprises qu’il n’y a pas de quoi augmenter les salaires en bas et qu’au même moment, on augmente la distribution des actions et les dividendes en haut, il n’est pas anormal que les revenus du capital soient mis à contribution pour revaloriser le travail des plus démunis et des plus exclus. S’il y a de l’argent pour le haut, il doit aussi y avoir de l’argent pour le bas, pour soutenir le revenu de ceux qui font l’effort de se lever chaque matin.

J’assume, que les choses soient claires, j’assume le RSA, j’assume l’Afghanistan, j’assume les décisions que je prends. D’ailleurs, j’ai été élu pour assumer, pour prendre mes responsabilités. A ceux qui disent il veut s’occuper de tout, je réponds franchement que je n’ai pas été élu pour ne m’occuper de rien. Honnêtement, ce n’est pas le message que j’ai compris. J’en fais de trop ? J’ai tellement conscience de n’en faire pas assez compte tenu de l’ampleur des défis qui s’accumulent sur la France. Franchement, on ne peut pas élire quelqu’un pour 5 ans afin de jouer au roi fainéant, d’attendre que cela se passe et de commenter les évènements. Si c’est cela, mieux vaut faire autre chose.

On me posait la question : alors cette rentrée ? Mais, où était la sortie ? On annonce ma rentrée, mais je n’ai pas vu où était ma sortie. D’ailleurs, c’est normal. Quand on dirige un pays comme la France, on le dirige du 1er janvier au 31 décembre … en plus c’est toujours au mois d’août qu’il arrive des catastrophes. J’essaie simplement avec le Gouvernement et le Premier ministre de dérouler un projet qui a été accepté par les Français et de faire cette chose tout à fait invraisemblable : tenir mes engagements. Mais je ne tiens pas mes engagements parce que ce sont des engagements que j’ai pris. Je les tiens parce qu’au moment où je les ai pris, j’y croyais. Je n’ai pas changé d’avis avant et après l’élection. Cela peut consterner les uns, mais aussi rassurer les autres, parce que l’un des problèmes de la France, c’est la confiance cher Jean ARTHUIS. La confiance dans la parole publique, la confiance dans l’engagement des hommes politiques. Est-ce que vous y croyez à ce que vous faites ? Il y a tellement de gens qui parlent. On a l’impression qu’ils n’y croient pas. Eh bien moi j’y crois, même quand c’est difficile.

Alors, on avait dit que le RSA ne verrait jamais le jour, qu’il serait dénaturé.

On a dit que je ferais payer la lutte contre la pauvreté par la redistribution entre les précaires et que l’exclusion serait à la charge des salariés les plus modestes.

On a dit que j’allais supprimer la prime pour l’emploi.

On a dit que j’allais créer un RSA au rabais.

Je laisse les Français seuls juges et je leur demande de juger non pas sur ce que l’on dit mais sur ce que l’on fait. Je dis d’ailleurs au Président de la Commission des Finances et aux parlementaires qui sont ici que je ne verrai que des avantages à ce qu’on évalue le RSA. On en a beaucoup discuté. Tout le monde n’est pas totalement d’accord et je dois tenir compte de cette diversité. Elle ne me gêne pas. Je ne peux pas reprocher aux gens d’avoir des convictions, j’en ai moi-même. Je reprocherais plutôt aux gens de ne pas avoir de convictions. La meilleure façon de trancher le débat, c’est d’évaluer le RSA généralisé. Alors faut-il l’évaluer dans 3 ans, dans 4 ans, dans 2 ans ? Que le débat parlementaire prospère et que chacun prenne ses responsabilités !

Je suis convaincu que l’investissement réalisé pour le RSA est nécessaire parce qu’en soutenant le pouvoir d’achat d’un million et demi de travailleurs pauvres, le RSA permettra de réaliser une grande partie du chemin nécessaire pour réduire la pauvreté d’un tiers en 5 ans. Je m’y étais engagé. C’est d’ailleurs la première fois en France, qu’un gouvernement s’est fixé un tel objectif de réduction de la pauvreté. Je veux être jugé sur les résultats.

La seconde raison est que le Revenu de Solidarité Active renouvelle l’exercice de la solidarité.

Il ne faut pas fermer les yeux quand le nombre de ceux qui dépendent du RMI augmente et que le RMI n’insère personne ou si peu. Notre pays a développé l’assistanat à outrance, le nivellement. On a promis aux gens qu’en travaillant moins, ils gagneraient plus. On a vu le résultat !

Je veux porter une politique pour les travailleurs de notre pays. Je veux faire du travail la voie de sortie de la pauvreté. Je veux faire des revenus du travail le socle des revenus du foyer. Le RSA s’inscrit dans la lignée des réformes que nous menons pour la promotion, la revalorisation et la juste rémunération du travail.

Quand je dis « travailler plus pour gagner plus », cela concerne aussi ceux qui ont le sentiment aujourd’hui que les portes du travail leur sont fermées.

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Je n’ignore pas, cependant, les effets secondaires du RSA que certains, peut-être à juste titre, redoutent.

Première crainte : ne va-t-on pas encourager les employeurs à baisser les salaires ?

L’existence d’un salaire minimum et l’incitation qui sera faite aux entreprises de négocier sur les salaires seront là pour conjurer ce risque.

J’observe que, depuis les 35 heures, on ne parlait plus de salaire dans notre pays. Désormais, pour une entreprise qui ne négociera pas sur la question des salaires, eh bien, je poserai la question de la réduction des allègements de charges. Il faut savoir où l’on va. Il faut que chacun prenne ses responsabilités. Moi je soutiens les chefs d’entreprises de toutes mes forces parce que c’est eux qui créent des richesses. Mais il y a aussi des droits et des devoirs pour tout le monde. La question salariale -dans certains secteurs ce n’est pas possible de les augmenter- mais on doit en discuter. Ce n’est pas un sujet tabou.

Le Parlement examinera un projet de loi sur l’obligation de négocier les salaires, pas forcément aboutir, mais au moins pour en parler en même temps que le texte sur le RSA.

Deuxième crainte : le RSA ne va-t-il pas favoriser à l’excès le travail à temps partiel ?

Pour que la fraude ne reste pas impunie, sa sanction, et notamment en cas de fausses déclarations, va être très fortement durcie.

Mais n’oublions pas que pour de nombreux Rmistes, le chemin vers l’emploi passe par le temps partiel.

Pour autant le RSA ne saurait redevenir un nouveau statut dont on resterait durablement prisonnier.

Il y aura donc un véritable droit à l’accompagnement attaché au Revenu de Solidarité Active. Chaque bénéficiaire sera suivi par un référent, avec lequel il nouera une relation continue. Sur ce sujet là, aussi, l’expérimentation et l’évaluation, cher Pierre, nous donneront une réponse. Martin HIRSCH, comme moi et comme le Premier ministre, François FILLON, on sera prêts à s’adapter.

Le retour à l’emploi peut s’accompagner de frais importants. Ce n’est plus admissible que, faute d’accès à un moyen de transport, certaines personnes soient assignées à rester dans leur village où elles ne trouvent pas d’emploi.

Comme dans les Job Center au Royaume-Uni, que j’ai visités, une enveloppe budgétaire spécifique et nouvelle de 150 millions d’euros permettra donc désormais de couvrir les dépenses des bénéficiaires du RSA qui peuvent être un obstacle à l’emploi, pour s’habiller, pour passer un permis de conduire ou pour suivre une formation. Je veux tout faire pour que tous les Français reprennent un travail. Je ne veux pas les payer pour qu’ils restent à la maison, je veux investir pour qu’ils prennent un travail.

Pour l’accompagnement professionnel, les départements pourront mobiliser le service public de l’emploi et d’autres opérateurs spécialisés, ce que nombre d’entre vous notamment ici, Jean ARTHUIS, vous avez déjà fait. On verra également les conséquences de la fusion ANPE/UNEDIC. Je tiens beaucoup à ce que l’on soit très allant là-dessus. Je ne veux pas que l’on gère le stock des chômeurs. Je veux qu’on le fasse diminuer et que les gens prennent des emplois.

Le projet de loi sur le RSA prévoit également une réforme en profondeur des contrats aidés.

Depuis trop longtemps, on utilise ces contrats pour améliorer artificiellement les statistiques avant de renvoyer, à la fin du contrat, les personnes en insertion, à la case départ, le RMI ou le chômage. On commence par le RMI, on vous fait un contrat aidé …. et au bout de ce contrat aidé, on retrouve le RMI et la galère qui continue.

Je veux inverser la logique pour que les contrats aidés renouent avec les deux objectifs qu’ils n’auraient jamais du perdre de vue.

Le premier objectif est de mettre le « pied à l’étrier » à ceux qui ont besoin d’une transition vers l’emploi classique. Le second objectif est de faire bénéficier de la solidarité ceux qui ont des difficultés prolongées, mais qu’on ne peut pas condamner à être exclus de tout sous prétexte que leur travail ne serait pas assez « rentable ».

Nous allons créer un « contrat unique d’insertion » qui devra prévoir les actions d’accompagnement et de formation nécessaires pour retrouver le chemin de l’insertion. Je précise contrat unique, ne veut pas dire contrat uniforme. Je le dis aux deux décentralisateurs qui sont devant moi. On veut un contrat unique pour simplifier le maquis de toutes les aides. Mais il faudra bien prévoir avec le législateur une possibilité d’adaptation de ce contrat à la spécificité de certains bassins d’emploi et à la diversité des difficultés d’insertion des bénéficiaires.

Je prends un exemple : les contrats d’avenir ont sauf exception une durée hebdomadaire de 26 heures. Pourquoi pas 25 et pourquoi pas 27 ? Un jour j’ai posé la question : « pourquoi 26 ? ». On me répond : « Parce que l’on pensait que c’était bien ». Parce que 25 ce ne serait pas bien ?

Il faut laisser un peut de souplesse. On ne peut pas avoir la même durée pour un travailleur de 26 ans que l’on doit absolument sortir de là et pour une femme qui a 58 ans, qui est en bout de course. J’ai rencontré une femme de 58 ans à qui l’on avait dit : vous bénéficiez de 24 mois de durée obligatoire. Elle m’a dit : mais si on me met dehors parce que j’ai fait mes 24 mois en contrat aidé, je vais retourner au RMI. Je ne vois pas pourquoi cette femme, ou un homme de 58 ans, on ne leur permettrait pas de continuer en contrat aidé.

La maladie de la France c’est la maladie statutaire de vouloir traiter tout le monde dans les mêmes conditions pour ne pas tenir compte de la spécificité de certains problèmes et de certains publics. On ne va pas ruiner l’État parce que l’on fera un contrat aidé qui pourra aller au-delà de 24 mois pour certains publics. Pour cela il faut faire confiance à qui ? Aux directeurs des organismes d’insertion. C’est à eux d’apprécier l’honnêteté, la loyauté de la personne qu’ils ont en face.

C’est pareil pour le travail le dimanche. On interdit à tout le monde de travailler le dimanche aux Champs-Élysées -il se trouve que j’habite à côté. Fantastique : vous avez un trottoir placé en zone touristique où le travail est autorisé le dimanche, et le trottoir d’en face qui n’est pas une zone touristique et où le travail le dimanche n’est pas autorisé. Le côté ensoleillé est touristique, mais pas le côté à l’ombre…seulement en fonction de l’heure de la journée, ce n’est pas le même. Je le dis au Maire d’ailleurs. Cela ne me gêne pas et je ne veux obliger personne. Mais il y a certaines villes où les gens veulent faire leurs courses le dimanche. Si les salariés sont volontaires pour travailler, pourquoi les en empêcher ? Mais, je ne veux pas que l’on passe d’un excès d’interdiction à un excès d’autorisation. Ce n’est pas parce que c’est possible qu’il faut que cela soit obligatoire pour tout le monde. J’avais parlé avec une jeune fille qui était vendeuse dans un des magasins du bon côté du trottoir sur les Champs-Élysées. Je lui avais demandé si ce n’était pas trop dur de travailler le dimanche. Elle m’a répondu : « le dimanche ce n’est pas plus long que le lundi, mais on gagne deux fois plus ! ». Ceux qui en ont l’envie, pourquoi les en empêcher ? Pourquoi toujours vouloir choisir à la place des gens. S’il y a des salariés qui sont volontaires pour travailler le dimanche parce qu’ils veulent gagner davantage, laissons les faire ! S’il y a des maires qui souhaitent que dans certains quartiers de leur ville les commerces soient ouverts le dimanche, laissons les faire. C’est leur décision. Rendez-vous compte : il y a des salariés qui font des procès aujourd’hui à certains syndicats pour avoir le droit de travailler le dimanche ! … alors que l’on a tant besoin de croissance. Dans le même temps, je comprends parfaitement bien qu’un certain nombre d’entre vous préfèrent être en famille. Respectons la différence des gens. Ce qui me gênait avec les 35 heures, c’est le fait invraisemblable d’obliger les gens. Il était interdit de travailler plus !

Je voudrais terminer enfin en vous disant que le droit à l’insertion des bénéficiaires du RSA sera désormais inséparable d’une obligation d’insertion. C’est que je disais tout à l’heure : lorsque les droits sont renforcés, il doit en être de même pour les devoirs. Sauf exception, le droit au RSA sera donc assorti du devoir de rechercher activement un emploi.

L’allocataire du RSA devra respecter les termes de son contrat d’insertion. Celui qui ne respectera pas ses devoirs, se verra appliquer des sanctions. Ces sanctions pourront être graduées mais les sanctions devront être appliquées. C’est d’une grande banalité. En Allemagne les sanctions pour les bénéficiaires de l’équivalent de nos minimas sociaux sont plus importantes que pour les chômeurs indemnisés : l’allocation est réduite de 10% à chaque fois que l’allocataire ne se présente pas à un entretien. Je trouve que cela est juste. Je ne dis pas qu’on le fera. Mais je trouve que si la société donne des droits, la société est en droit d’exiger le respect d’un certains nombres de devoirs.

Voilà Mesdames et Messieurs, j’espère que vous avez compris que pour moi venir ici était important.

C’est une réforme capitale parce qu’on ne doit plus accepter que tant de nos compatriotes soient condamnés à rester chez eux, à survivre parce qu’ils ont le RMI. On ne peut pas accepter 1 600 000 de nos compatriotes, qui travaillent dur, n’aient pas de quoi faire vivre leur famille. J’ai vu qu’ici où là il y avait quelques protestations. Cela me rassure sur la vivacité de la démocratie française. Si je ne faisais rien, il y aurait quand même des protestations. J’ai donc décidé de faire des choses. Et il n’y a pas plus de protestations, il y en a plutôt moins. J’ai été élu pour résoudre les problèmes de la France. Je propose aux parlementaires de voter ce texte, de l’évaluer. Je suis tout à fait ouvert à la discussion sur les modalités. Vous avez tous votre propre expérience et c’est très bien de l’enrichir. Mais ce que je souhaite c’est que la logique soit celle du travail qui paie. Je souhaite que l’on tourne le dos à l’assistanat pour rentrer dans la société qui respecte et qui valorise le travail.

Mesdames et Messieurs, je vous remercie de votre patience et si vous le voulez bien de votre soutien.

la peure est etrange à la vie ..