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Des bonnes pratiques de la CGT Veolia + Fédération CGT Commerce &Service

Publie le mardi 30 novembre 2004 par Open-Publishing

Veolia : la CGT se dévoile devant la justice

Le syndicat attaque l’auteur d’un livre affirmant que la direction achète la paix sociale.

Par Renaud LECADRE

après des décennies de pudeur, la CGT a opté pour le grand déballage devant un tribunal. La question est fâcheuse : Vivendi Environnement (aujourd’hui Veolia) a-t-il arrosé ses syndicats maison pour acheter la paix sociale ? En décembre 2003, Jean-Luc Touly, électron libre de la CGT, a détaillé dans un livre (l’Eau de Vivendi, les vérités inavouables, éd. Alias) leurs petits et grands avantages, peu compatibles à ses yeux avec un syndicalisme de combat. Sa propre organisation (CGT-Veolia et Fédération des services) n’a pas apprécié la dénonciation et a porté plainte en diffamation. L’audience, vendredi à Paris, n’a pas vraiment été à la gloire des syndicats. Jean-Luc Touly détaille, fiches de paie à l’appui, les divers bonus dont bénéficient certains permanents : primes d’astreinte, primes de logement, forfaits d’heures sup... De quoi parfois doubler un salaire.

Rétorsion. Pour Franck Leroux, responsable national de la CGT-Veolia et plaignant du jour, tout ceci ne serait que maintient d’avantages antérieurs à la fonction syndicale : « Si on diminue le pouvoir d’achat des délégués, plus personne ne voudra le devenir. » Problème : quand est signé, en 2001, un accord sur les 35 heures supprimant le paiement des heures supplémentaires pour les 14 000 salariés de l’ancienne Compagnie générale des eaux, les permanents syndicaux conservent, eux, leur quota fictif d’heures sup. C’est cela qui énerve Christophe Mongermont, délégué FO, seul syndicat franchement contestataire (en rétorsion, Veolia a engagé une procédure de licenciement contre cinq de ses élus pourtant protégés). Appelé à témoigner à la barre, il affirme que la direction lui a un jour « proposé de lever le pied syndicalement avec pour contrepartie de la publicité dans [leurs] journaux ». Et raconte que, lors des réunions de négociations, les frais journaliers des élus étaient remboursés en liquide (1 560 francs, cinq ou six fois par mois). Autre témoin : Daniel Guerrier, pourtant délégué CGT, enfonce le clou : « Les responsables syndicaux disposent de tout, mais c’est sous le manteau. La direction a la main sur eux pour cette raison. Moi, j’étais le seul à retourner travailler après les réunions. »

La CFDT, elle, n’a pas porté plainte. C’est pourtant sur elle que Jean-Luc Touly a le plus de biscuits. Une facture prouvant que l’avocat de ce syndicat est parfois payé par la direction ; une lettre où la CFDT quémande la promotion d’un de ses élus avec cet étonnant argument : « Il serait dommage qu’une fonction sociale constructive [sic] ne soit pas valorisée. » La CGT, relativement épargnée dans le livre de Touly, souhaite une mise au point sur cette histoire de page de publicité de Vivendi achetée (120 000 euros) dans son journal la Vie ouvrière. Ce coup de pouce se serait, selon l’organisation, passé au niveau national, sans que le CGT maison soit au courant et perde en ardeur syndicale. Touly produit pourtant un compte rendu de réunion de la CGT-Veolia d’octobre 2001 avec cette citation du trésorier : « La trésorerie se porte bien en raison du versement effectué par la direction. » Une syndiquée : « Nous allons [forcément, ndlr] être timorés dans nos actions. »

« Dégoûté ». Me Antoine Comte, avocat de l’auteur du livre, s’interroge : « Je n’ai pas bien compris pour qui plaide la partie civile. Normalement pour la CGT, mais en fait vous défendez le système Vivendi. » Puis il explose en rappelant que Touly est en cours de licenciement et que ce procès ne risque pas d’arranger sa situation : « On nous traite de vieux éléphants, mais pourquoi ce syndicat-là n’a-t-il aucune procédure de licenciement contre lui ? Ces méthodes me dégoûtent ! » Le parquet, bienveillant, estime que tout cela « relève plus de la polémique syndicale que d’un procès pénal » et lave l’auteur de tout élément de diffamation. Jugement le 14 janvier.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=257636