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Comment prôner le chômage partiel et taper sur les 35 h en même temps ?

par Gérard Filoche

Publie le mardi 27 décembre 2011 par Gérard Filoche - Open-Publishing
7 commentaires

À l’UMP, ils prétendaient se moquer du « partage du travail ». Tout était de la faute des 35 h.

Quand il y avait crise, selon eux ( Raymond Barre, Sarkozy ou Bayrou) il fallait « travailler plus » pour s’en sortir. Ils vantaient Alfred Sauvy, « c’est le travail qui crée le travail ». Travailler moins c’était la faute à la gauche et la course à l’abîme. Il fallait, selon eux, des horaires à la carte sur la journée, la semaine, l’année, des retraites à la carte, des heures supplémentaires défiscalisées, non contingentées, moins majorées. Ils ont fait une loi TEPA pour que l’état paie (4,4 milliards par an) ces heures supplémentaires à la place des patrons. Ils ont cassé des conventions collectives comme celle de la restauration afin d’autoriser jusqu’à 360 heures supplémentaires par an. Ils ont déduit les temps de transports professionnels du temps de travail effectif. Ils ont dérégulé le contrôle des durées du travail. Ils ont violé les directives européennes pour permettre, dans certains cas, aux cadres de travailler plus que la durée maxima européenne de 48 h par semaine et les forfaits jours sans respect du repos quotidien européen de 11 h. Ils veulent faire travailler jusqu’à 62 et 67 ans. Ils ont facilité l’annualisation, les modulations. Ils ont multiplié par deux la précarité, les CDD, les « stages », les intérims, les saisonniers, les horaires et contrats atypiques… Il leur fallait 45 h sans gain de salaire ! Et ils y sont presque arrivés car la durée réelle du travail moyenne doit être de 41/42 h aujourd’hui – souvent déclarée et payée 35. Jamais il n’y a eu autant de « flexibilité » en matière de travail et jamais autant de « rigidité » en matière de salaire.

Et ils ont obtenu 4 510 000 chômeurs, record historique absolu ! 29 900 de plus en novembre. + 5,2 % en 2011

Et si le sarkozysme continue (des milliards en plus pour les banques, des milliards en moins pour les salariés), nous aurons au moins 500 000 chômeurs en plus dans l’année 2012.

Auxquels il faut ajouter une estimation d’au moins 500 000 non-inscrits, radiés, RSA forcés…et plus de 3,5 millions de précaires, 3 millions de temps partiels. C’est-à-dire qu’ils ont imposé, en fait, contre tous leurs dires, un PARTAGE du temps de travail mais un partage sauvage, féroce, brutal entre surtravail, sous travail et sans travail.

Et qu’est ce qu’ils proposent encore aujourd’hui ?

Comme en 2008/2009, du temps où ils ont commencé à donner des milliards aux banques plutôt qu’aux salariés : du CHOMAGE PARTIEL FORCE. En 2009 Sarkozy avait déjà fait 600 000 chômeurs partiels forcés et il avait payé 300 millions d’euros pour ça : il faisait déjà « travailler moins pour gagner moins » ! C’est l’état qui payait ! Pendant ce temps-là, les patrons étaient soulagés, ils pouvaient baisser les salaires, écouler leurs stocks, garder leurs profits intacts, et même l’état versait des « primes à la casse » (6,5 milliards) pour que, quand même, leurs automobiles puissent se vendre.

Comment peuvent-ils prôner le chômage partiel et taper sur les 35 h en même temps ? Proposer du chômage partiel contre le chômage, c’est augmenter le nombre de chômeurs. C’est partager le chômage à défaut de partager le travail. Et surtout baisser les salaires.

Il n’y a pire contradiction que d’encourager les heures supplémentaires et organiser le chômage partiel. C’est pousser à ce que certains qui ont un boulot travaillent deux fois plus à la place d’autres qui n’en ont pas ou n’en auront plus. La division inégalitaire de la société s’accroîtra.

Le seul résultat de tout cela est encore de baisser les salaires. De 20 ou de 30 % comme en Grèce. Mais si les salaires baissent encore avec du temps partiel forcé, cela aggravera l’austérité et la récession dans une spirale infernale.

La France n’a jamais été aussi riche de son histoire et ses richesses aussi mal partagées, c’est de là que vient tout le mal. Il ne faut pas baisser les salaires pour garder les profits, il faut AU CONTRAIRE augmenter les salaires et baisser les profits. REDISTRIBUER pour RELANCER !

Le chômage d’aujourd’hui provient de ce que les banksters auxquels des centaines de milliards ont été donnés, les ont reçus sans condition, sans contrôle et qu’ils continuent à donner les mêmes ordres, à imposer des ratios, des crédits qui sont conditionnés, orientés, attribués contre l’emploi et les salaires. Les banksters qui continuent de jouer librement à l’économie casino, précipitent l’euro, l’Europe vers le précipice et ils ne sont pas contrés mais encouragés par Sarkozy qui veut en permanence, tous les jours, les « rassurer ».

Ce type-là fait tout pour ses riches amis du Fouquet’s : il décide donc sans vergogne de faire « travailler moins pour gagner moins » après avoir hurlé sur tous les tons qu’il fallait « travailler plus pour gagner plus » et qu’il serait le « président du pouvoir d’achat » !

Il devait faire reculer le chômage, il l’organise. Il refusait le partage du travail, il l’impose férocement et inégalement. Il appelle produire plus, il alimente la récession. Il dit qu’il fallait éviter à la France le sort de la Grèce, et comme prévu, il lui impose le sort de la Grèce.

Au moins les 35 h c’était pour tous et sans perte de salaire ! (il n’y eut en l’an 2000 que 0,3 % des accords qui interprétèrent la loi avec un gel temporaire des salaires). Elles permirent, même mal contrôlées, 400 000 emplois de plus en 2000.

Au moins la retraite à 60 ans et les préretraites à 55 ans pour les salariés usés, cela se défendait quand on souffre de 25 % des jeunes actifs au chômage.

On n’a pas "tout essayé contre le chômage de masse" : il faut une sorte d’échelle mobile des heures de travail.

Au contraire du sarkozysme délirant et dangereux, à 5 millions de chômeurs, Il n’y aura pas de réduction du chômage de masse sans réduction du temps de travail sur la semaine, sur l’année et sur la vie.

il faut rendre les heures supplémentaires plus coûteuses que l’embauche. 50 % dés la 36e heure. 100 % après 40 h.

Il faut baisser les durées maxima du travail de 48 h à 44 h. Il faut rendre les deux jours de repos consécutifs, dont le dimanche à tous les salariés - par la loi.

Il faut imposer un repos quotidien de 13 h pour la santé autant que pour l’emploi.

Le retour à la retraite à 60 ans s’impose quand les salariés ne cotisent en moyenne que 36 annuités et que 2 seniors sur 3 sont au licenciés, au chômage, inaptes ou malades à partir de 55 ans.

La question qui se pose aujourd’hui est même celle de conforter les 35 h hebdomadaires et de préparer les 32 h : elles sont officiellement voulues par la majorité écrasante de la gauche (EELV, FdG, une majeure partie du PS).

Qu’est-ce que l’UMP va y opposer ? Sinon les 32 h mais avec perte de salaire ? Osons le débat alors : il faut les 32 h sans perte de salaire ! Nous avons le taux de productivité horaire le plus élevé au monde ; nous resterons "compétitifs", ce qui se passera c’est qu’il y aura une redistribution entre profits et salaires dans le sens des salaires, on travaillera mieux, moins tous, et on gagnera plus.

C’est le seul but de l’UMP/MEDEF, leur seule obsession en fait : la durée du travail, la flexibilité, c’est la forme, le prétexte, leur seul but, c’est de baisser les salaires bruts et nets. Pour maintenir les profits, la concentration des richesses. C’est ce que ferait le chômage partiel imposé, ce qui affaiblirait encore les caisses de retraite, la sécu, le logement, l’éducation… ce qui creuserait les déficits, alimenterait la dette et la dette, c’est leurs bulletins de vote, c’est leur argument, c’est leur bible, c’est leur moyen de chantage, c’est leur idéal chéri pour rester au pouvoir, quel qu’en soit le coût pour le peuple, en souffrance au travail et en misère sans travail.

Vive les 35 h avec hausse de salaire. Préparons les 32 h sans perte de salaire !

Reconstruisons le code du travail, ses durées légales, maxima, contrôlées, et contrôlables ! Pendant 160 ans, l’histoire du code du travail a été celle de la réduction du temps de travail. Il a fallu 80 ans entre 1840 et 1920 pour passer de la journée de 17 h à celle de 10 h. Il fallut 70 ans entre 1936 et 2002 pour passer de la semaine de 40 h à celle de 35 h. Et en 70 ans, on a prouvé en pratique, dans la vie réelle, que l’on pouvait A LA FOIS faire QUATRE choses : produire plus, avoir plus d’emploi, gagner plus et travailler moins longtemps. Il a fallu que depuis 8 ans des intégristes néolibéraux dangereux veuillent faire tourner la roue de cette histoire à l’envers. Ils échouent à 4 510 000 chômeurs. Restaurons le droit du travail, c’est la civilisation, la dérégulation du droit du travail comme celle des bourses et de la finance, c’est la catastrophe, c’est un crime économique. Le droit DU travail, c’est du droit AU travail.

Messages

  • Il ne faut pas baisser les salaires pour garder les profits, il faut AU CONTRAIRE augmenter les salaires et baisser les profits. REDISTRIBUER pour RELANCER !

    Relancer quoi ? Repartir pour un tour, réaménager le capitalisme ? Tant qu’on jouera dans leur cour, on continuera à perdre, on ne joue jamais contre celui qui a inventé les règles, ou alors faut aimer ça,perdre !
    Le capitalisme est à genou, de partout autour de nous il craque, quel est notre intérêt de classe à le relever ? Comment, de plus, peut-on parler de diminution du temps de travail quand on est dans un parti qui prône son allongement (par l’éloignement de l’âge de la retraite) ?
    L’important maintenant est dans l’organisation de classe, dans la reprise en main (dans nos mains) de notre futur, dans la re-création du lien local, dans la recherche et l’expérimentation des possibles, dans le refus de coopérer avec l’oppresseur.
    Comme à d’autres moments-charnières de l’histoire moderne, le capitalisme chancèle de s’être trop gavé, trop développé et c’est à ce moment-là qu’il faut appuyer pour le renverser une bonne fois pour toutes.
    Les pseudos solutions proférées ici par Filoche ne seront jamais que l’autre facette de la même pièce, le jeu de gentil et du méchant flic.

    • "... ces syndicats, toujours près à poursuivre d’un siècle la souffrance du prolétariat pour avoir le plaisir de le défendre..."

    • Salut kamarad,

      Relancer quoi ? Repartir pour un tour, réaménager le capitalisme ? Tant qu’on jouera dans leur cour, on continuera à perdre, on ne joue jamais contre celui qui a inventé les règles, ou alors faut aimer ça,perdre !

      Je crois que ce n’est pas incompatible, que c’est une question de terme.
       A court terme il est urgent de prendre sur les profits pour redonner de l’air aux millions de gens qui souffrent, qui rament pour atteindre les fins de mois.
       A moyen terme il faut penser le post-capitalisme, l’écosocialisme, sortir des rails. Mais c’est un projet à mettre au point, à avancer ici et là par des initiatives concrètes. C’est assez facile à imaginer dans les petits paradis ardéchois où nous habitons, toi et moi, mais dans les grosses agglomérations au milieu des barres de béton ça ne pourra se construire que progressivement.

      Finalement, est-ce que la question n’est pas plutôt : comment concevoir cette relance comme non pas une fin en soi mais une étape provisoire qui ne doit en aucun cas ralentir la recherche d’un système alternatif associant la justice sociale et intégrant les contraintes énergétiques et environnementales ?

      Pour moi l’urgence des urgences est de reprendre aux capitalistes ce qu’ils m’ont volé (comme à tous les travailleurs), première étape en direction de leur élimination et de l’organisation d’une société alternative, écosocialiste. Multiplions les expériences, préparons les lendemains, mais en attendant abandonnons le moins possible aux capitalistes.

      A ciao !

      Chico

  • Les arguments de M.Filoche -bien que membre du PS - valent mieux que d’être réfutés en deux phrases au contenu fumeux...

  • J’ai lu un bouquin où il est démontré "arithmétiquement" qu’il est possible de ne travailler qu’une heure par jour... Alors, la semaine de 32 heures...
    Il ne s’agit pas de partager une "pénurie de travail" : les tâches qui se présentent à l’ensemble des travailleurs du monde sont gigantesques !
    Il s’agit de réduire spectaculairement le temps de travail (pas à petites doses progressives) pour que les travailleurs aient le temps et l’énergie de "faire la politique".
    Si cette condition n’est pas remplie, on va se borner à "revendiquer" ("demander") au lieu de "prendre", comme le font tous les réformistes depuis des lustres.
    Une société communiste où subsisterait la semaine de 32 ou même de 28 heures serait une entourloupe.

  • Belle présentation du constat des méfaits du capitalisme.Mais l’ouverture laissée au patronat dans la rédaction de la loi sur les 35h n’est pas évoquée par Filoche.

    Donc,je repose la question : Pourquoi Martine AUBRY et le PS ont refusé d’inscrire dans la loi " le contenu et l’intensité du travail" ? pour ne pas s’attirer les foudres du MEDEF ?

    LR