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Gênes : Le procureur général Porcelli consacre son rapport à la contestation du G8

Publie le mardi 20 janvier 2004 par Open-Publishing

Gênes : Le procureur général Porcelli consacre son rapport à la
contestation du G8


Réquisitoire anti-mouvement
Gênes, l’année judiciaire s’ouvre "en condamnant" les manifestants de juillet

Les manifestations de juillet 2001 avaient des "objectifs déstabilisants" et
leur prélude fut le paquet bombe remis quelques jours avant le G8 à une caserne
de carabiniers. Les black bloc agirent sous "la couverture des multitudes (comme
l’aurait démontré l’enquête de Cosenza)" et les "manifestants pacifiques n’isolèrent
pas les violents, ne démontrèrent vis-à-vis d’eux aucune réaction de rejet, mais
au contraire - en les accueillant à plusieurs reprises dans leurs rangs - donnèrent
l’impression d’adhérer moralement à leurs agissements, en apparaissant complices
par leurs comportements". Pendant deux jours il fut impossible de "distinguer
les manifestants pacifiques des violents". Domenico Porcelli, qui dirige depuis
quelques mois le palais de justice génois, s’attaque à toutes les enquêtes de
sa procure, et profite de la cérémonie d’inauguration de l’année judiciaire pour
annoncer que la criminalisation du mouvement des mouvements se poursuivra.

Les journées génoises, quand au moins trois cent mille manifestants arrivèrent
en ville, horrifiés par la globalisation libérale et par la zone rouge qui protégeait
les huit "grands" chefs d’état, se transforment dans sa lecture en une kyrielle
d’attaques à des moyens, à des hommes et à des casernes des forces de l’ordre, à la
suite desquelles "se vérifia l’explosion de coups d’arme à feu qui touchèrent,
en le tuant, Carlo Giuliani, qui à ce moment-là brandissait - paraît-il - un
extincteur". Le passage rhétorique sur l’homicide du jeune homme de 23 ans après
trois heures d’affrontements provoqués par une charge à froid des carabiniers
contre un cortège autorisé, semble le prélude à l’annonciation du classement
de l’affaire. M. Porcelli, convaincu que les dernières bombes de la Préfecture
de police ont elles aussi la même matrice, semble n’avoir vu que quelques images
parmi les milliers d’heures de vidéos tournées entre le 20 et le 22 juillet 2001 : "Les
prises de vue d’une femme sans défense écrasée et sauvagement battue par la foule
sont affreuses", dira-t-il ensuite en stigmatisant les communications cryptées
entre les no global et les écrans en plastique en tête du cortège des désobéissants.

"Révolution et démocratie sont incompatibles", prévient-il en donnant "acte publiquement
aux forces de l’ordre du succès" dans la défense de la zone rouge : "Si d’aventure
les manifestants avaient enfreint ces barrières, on aurait bien difficilement
pu éviter l’effusion de sang par les services secrets étrangers aguerris". "007
prêts à tirer ?!", s’exclame Vittorio Agnoletto, qui fut le porte parole du Genoa
Social Forum, "voilà ce que voulait dire M. Scaiola (ministre de l’Intérieur
de l’époque : NdT) quand il parla de la licence de tuer ! M. Pisanu (actuel ministre
de l’Intérieur : NdT) devrait en référer au parlement sur ce qui apparaît comme
une renonciation à la souveraineté".

A l’échec des forces de l’ordre dans la sauvegarde de la sécurité des manifestants,
de l’état de droit et de la ville, M. Porcelli consacre à peine une vingtaine
de lignes, sur les trois pages dédiées au G8, dans lesquelles, parmi beaucoup
de conditionnels, il rappelle les traitements inhumains, les tabassages sans
pitié par la police qui se sont produits à l’école Diaz et à la caserne de Bolzaneto.
Il jure à la fin qu’il n’y aura pas de remises pour personne, provoquant la colère
du défenseur de M. Canterini (fonctionnaire de police : NdT), maître Romanelli,
qui estimera le rapport du procureur "une attaque à la police". Plus content
Alfredo Biondi, défenseur de M. Troiani, l’un des agents concernés par l’affaire
des bouteilles Molotov : "Il (le procureur : NdT) a eu le courage de dire les choses
que tout le monde pense, en critiquant les violences de la rue et le fait que
la masse n’a pas rejeté les violents". Le problème des forces de l’ordre ? "Du
manque d’expérience, du manque d’organisation et d’une direction appropriée".

"C’est la première fois qu’on renonce à la division entre les bons et les mauvais
au nom d’une interprétation globale qui criminalise intégralement le mouvement - reprend
M. Agnoletto - c’est un rapport totalement politique, gravissime, qui contraste
nettement avec la vérité. De plus, on absout les sommets de la police, en glissant
sur les vidéos qui montrent les violences, en réduisant les excès à des faits
individuels". L’attaque est politique et politique sera la réponse du mouvement : "Qui
veut dialoguer avec les mouvements doit assumer aussi ses propres responsabilités",
conclut M. Agnoletto, intercepté à Milan par le quotidien Liberazione.

Même l’Association nationale des magistrats, qui a pourtant agité la Constitution,
dans une critique convenable et tiède au ministre de la Justice M. Castelli, "conteste
l’existence des théorèmes, les enquêtes - a expliqué à "Liberazione" le président
ligure de l’Association, Andrea Beconi, - doivent être lues sans préjudices".

Il est surprenant qu’il ait oublié des images affreuses, même celles qui montrent
des agents et des militaires qui rouent à terre et à sang, à 10, à 20, le même
manifestant sans défense - commente à chaud Dario Rossi, juriste démocratique
du Genoa legal forum - surprenante aussi la façon dont il lit des épisodes qui
font l’objet de l’attention d’organismes comme Amnesty International, le parlement
européen, la commission pour la prévention des tortures des Nations Unies et
qui sont au centre de plusieurs demandes de commission parlementaire. Une commission
demandée même par M. Canterini (accusé par ses supérieurs mêmes d’être le principal
responsable du massacre de l’école Diaz, NdR). "C’est un rapport très dangereux
pour le syndicat", dit aussi Raffaella Multedo, qui défend les deux représentants
des Cobas (syndicats de base : NdT) "recherchés" par la Procure par une inédite
petite annonce payante en style western. Aucune trace du "girotondo" annoncé pour
soutenir la magistrature.

La ville démocratique a commenté le rapport de M. Porcelli dans la manifestation
contre la guerre qui a eu lieu à Piazza Matteotti, devant le Palazzo Ducale. "Est-il
possible qu’avec autant de témoignages et de vidéos il existe encore des personnes
qui continuent à ne pas vouloir voir, préférant l’image d’une foule violente - disent
Haidi et Giuliano Giuliani, les parents de Carlo, qui viennent de lire les extraits
du rapport - il n’y avait absolument aucune contiguïté entre des prétendus violents
(où il y avait des infiltrés de tout bord) et un mouvement pacifique qui ne pouvait
avoir aussi parmi ses tâches celle de maintenir l’ordre public. Il y a pour cela
les forces de l’ordre qui auraient dû agir en cohérence totale avec les prescriptions
de la Constitution. Pourquoi ne l’ont-elles pas fait ? Encore une fois, une vraie
commission parlementaire d’enquête s’avère de plus en plus nécessaire et urgente".

par Checchino Antonini (traduction de Mc et G.R.)

Publié par "Liberazione"

19.01.2004
Collectif Bellaciao