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Barghouti, infatigable activiste de l’unité nationale
Publie le mardi 4 mars 2008 par Open-Publishingde Lina Sankari
Le leader du Fatah emprisonné continue de prôner le dialogue entre les différentes factions.
De sa cellule humide de 2 m², allumée 23 heures par jour, où il est emmuré depuis bientôt six ans, Marwan Barghouti poursuit son combat. Le chef du Fatah en Cisjordanie, condamné à cinq peines à perpétuité assorties de quarante ans de sûreté, reste le symbole de la lutte contre l’occupation mais aussi du dialogue et de la paix. Son épouse, Fadwa, a pu lui rendre visite il y a une semaine. Avec un timide sourire aux lèvres, cette avocate décrit un homme qui passe de longues heures à lire, à perfectionner sa maîtrise de l’anglais, de l’hébreu et du français. Le leader du Fatah partage son apprentissage des langues avec les détenus qui n’ont aucun bagage scolaire tout en les aidant à obtenir des diplômes ou à compléter leur cursus universitaire. De l’éducation comme projet d’émancipation.
Malgré les divisions qui rongent la société palestinienne et l’espace politique, « Marwan reste optimiste et garde espoir », précise Fadwa. En prison, il travaille « obstinément » à l’unité des prisonniers issus de toutes les factions. Il avait déjà participé en 2006 à la rédaction du document des prisonniers, signé par le Fatah, le FPLP, le Djihad islamique et le Hamas qui réaffirmait notamment l’impérieux besoin d’unité. Ce document avait à l’époque réussi le tour de force de rapprocher les mouvances islamistes du programme de l’OLP à travers la recherche de valeurs et de principes communs. Selon Fadwa, si ce document avait été appliqué, la bande de Gaza aurait pu « éviter le chaos » dans lequel elle est aujourd’hui plongée. « Marwan pense qu’il sera très difficile d’unifier le peuple palestinien. Trop de sang a coulé des mains des Palestiniens eux-mêmes contre leurs propres frères. Difficile ne signifie pas pour autant impossible. Un texte politique doit être rédigé par toutes les factions et des élections anticipées doivent être organisées afin de créer un nouveau climat. » Les prochaines échéances étant prévues en 2009. Marwan Barghouti espère que le dialogue qui continue de vivre entre les leaders incarcérés saura trouver un écho hors des murs de cette prison du désert du Néguev. Fin février, un ministre travailliste israélien proposait sa libération pour avancer vers un processus de paix avec lequel les Palestiniens tomberaient d’accord compte tenu de son crédit populaire.
À travers Marwan Barghouti, c’est évidemment la question de l’ensemble des prisonniers politiques détenus par Israël qui est posée. Depuis 1967, plus de 700 000 Palestiniens ont été incarcérés dans les geôles israéliennes. Soit au moins un membre par famille. Actuellement, leur nombre s’élève à 11 000 dont 355 mineurs âgés de treize à dix-sept ans. Dans le cadre de récentes mesures sécuritaires, la torture a désormais été légalisée au mépris des accords de Genève ; les prisonniers malades n’ont pas accès aux soins. Vendredi dernier, l’un d’entre eux, diabétique, est encore décédé faute de prise en charge. Depuis la mise en place du boycott économique des territoires palestiniens, la situation des détenus s’est encore dégradée puisqu’ils ne perçoivent plus l’aide leur permettant de payer leurs repas. À l’humiliation, qui alimente le ressentiment, s’ajoute donc l’isolation totale pour l’ensemble des détenus originaires de la bande de Gaza, qui ne peuvent plus recevoir de visites depuis plus de huit mois.