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Brésil : Le soja avance en Amazonie

Publie le mardi 20 mai 2008 par Open-Publishing
5 commentaires

de Darío Pignotti

Dans des déclarations publiques, la ministre de l’Environnement, Marina Silva, a rendu responsable un baron du soja de son licenciement. Un influent secteur militaire a soutenu ce remaniement, suivant en cela la politique de la dictature militaire.

L’Amazonie a cessé d’être un immense jardin botanique pour l’opinion publique globale il y a 18 ans grâce, en grande partie, au débat installé durant le Sommet Eco ’92, organisé par l’ONU à Río de Janeiro. Mais la maturité politique de l’Amazonie est arrivé en décembre 2002, quand Luiz Inácio Lula da Silva, quelques jours avant de prendre le pouvoir comme président, a décidé de nommer Marina Silva à la tête du Ministère de l’Environnement. Le trouble causé par la démission de Silva mardi dernier a révélé, en même temps autant sa stature internationale que la densité stratégique atteinte par l’Amazonie.

Le départ ou la nomination d’un ministre "vert" n’avaient jamais empêché de dormir aucun mandataire, mais cette fois cela a été différent : "Le président Lula respecte et a de l’affection pour Marina, mais il a réagi avec une certaine irritation à son renoncement", a résumé une source gouvernementale consultée par Pagina/12 au Palais du Planalto.

Réduire la gestion de Marina Silva à une croisade en défense de l’eau et de la chlorophylle serait écologiquement correct mais simpliste.

Hier, dans une interview radiophonique, l’ex-fonctionnaire de Lula, qui quelques instants auparavant avait évité d’appeler de leur nom les responsables de sa chute, a cité Blairo Maggi. Il s’agit d’un des plus grands producteurs de soja du monde, qui, selon ses propres mots, a amassé une fortune en commettant des déprédations à la forêt il y a trois décennies quand il n’y avait pas de lois de défense de l’environnement.

C’est que Maggi est, en même temps, gouverneur de l’Etat de Mato Grosso, où les satellites de l’Institut National de Recherche Spatiale ont détecté les plus grands incendies forestiers dans le dernier semestre. Les Etats de Mato Grosso et du Pará sont en tête du déboisement amazonien qui, dès 2003, a atteint 100.000 km2, un tiers de la province du Buenos Aires.

On peut définir Maggi comme un propriétaire foncier d’un nouveau un type : propriétaire de machines modernes, important exportateur d’aliments à un marché avec une demande en expansion et réceptif à l’arrivée de capitaux internationaux attirés par les étendues prairies brésiliennes, aptes pour les aliments et les biocombustibles. C’est l’archétype de l’entrepreneur de l’ "agro-business" et il aspire à transformer le Brésil en "grenier du monde".

Marina Silva et Blairo Maggi représentent deux modèles de développement pour les presque 4 millions de km2 de l’Amazonie, avec une population qui n’atteint pas les 25 millions d’habitants.

"Il y a des gens qui défendent le développement à n’importe quel prix, il est nécessaire de changer un modèle du siècle dernier par un autre du XXIe siècle", a recommandé hier l’ex-ministre. Elle se rapportait à la politique d’expansion de la frontière verte encouragée par la dictature militaire, consistant à commettre des déprédations et à peupler la forêt. Un concept de modernisation autoritaire toujours en vigueur, constatable non seulement dans l’Etat de Mato Grosso mais aussi dans d’autres comme le Pará, où les meurtres de paysans sans terre sont monnaie courante, ou celui de Roraima, qui fait frontière avec le Venezuela et la Guyane.

Un drapeau brésilien a pris la tête de l’importante caravane qui a recu cette semaine Paulo César Quartiero dans sa ville de Pacaraima, après avoir passé deux semaines en prison pour avoir tiré sur 10 indigènes qui avait occupé sa propriété implantée dans la Réserve Raposa Terra do Sol.

Quartiero est un prospère agriculteur de Roraima qui dans ses années de jeune garçon aurait appartenu au Commando de Chasse des Communistes, l’organisation qui a prêté ses services à la dictature, comme l’a informé à Pagina/12 Paulo Maldós, membre du Conseil Indigéniste Misionario (CIMI). Dans un discours, Quartiero a revendiqué la présence de l’armée dans la Réserve et a défenestré le président Lula da Silva.

La popularité de Quartiero dans la population blanche de Roraima est en ascension, comme celle du général Augusto Heleno, chef du Commando Militaire de l’Amazonie.

Les deux coïncident sur le fait que la souveraineté dans la région est menacée et considèrent les indigènes comme des agents involontaires de l’ "avarice du pouvoir international" camouflé dans les ONG.

Le général Heleno, il y a un mois et le chef du Bataillon d’Infanterie de la Forêt, le général Eliezer Monteiro, la semaine dernière, ont attaqué Lula et sa politique amazonienne, dont Marina Silva était la principale responsable. Heleno a été cité par le gouvernement pour présumée insubordination, mais il a été confirmé à sa charge.

La chute de Marina Silva et la permanence à son poste du général sont des indices de la direction que prend l’Amazonie.

Brasilia, Darío Pignotti,

Pagina12, 18 mai 2008 .

Messages

  • Qu’ils la pillent donc ces sales capitalistes.

    Ils auront de bonnes récoltes pendant 5 ans. Et après plus rien. Niet. NITCHIVO.

    L’armée à la solde des grands capitalistes !!! Du beau travail !!!!!!!!!!!!!

    Ils n’ont rien dans le crane ces mecs-là. Ce sont des connards. Il faut les faire enfermer. Ils hypothèquent l’avenir de la planète !!!!!!!

    Seule parade : arrêter de manger de la viande aux Etats-unis et en Europe. grève générale de la consommation de viande et du soja.

    • Avec les terres qu’ils ont déjà défriché, ils pourraient produire 10 fois plus de nourriture, s’ils pratiquaient la permaculture traditionnelle. CF le magasine "The Ecologist" Ensuite, nul n’est besoin de manger autant de viande. C’est ridicule.

      Ensuite, si on défriche trop de terres, le climat finit par se dérégler. Les pluies deviennent moins abondantes et les sols deviennent stériles. Le fleuve Amazone disparaît.
      Impossible de replanter une forêt. Les maladies de toutes sortes s’installent. et cela devient un combat sans fin.

      Il faut préserver les forêts dans leur intégralité. Elles sont une immense richesse pour le futur.

    • Pour la viande pas la peine de se faire du souci : Le soja en question va faire du beau carburant agricole pour Standart Oil ou Amoco. Pas de la nourriture pour le bétail et les hommes. Ca vaut d’ailleurs mieux car il est en totalité transgénique.

      Et les populations crèvent déja de faim vu l’augmentation du prix des matières végétales.

      Mais y en a qui doivent être contents : Ils l’ont enfin leur "bio" carburant. Ca fait des années qu’ils le réclament. A 125 dollars le baril de Brent c’est plus facile d’exploiter le peuple brésilien que d’aller chercher le pétrole irakien sous les bombes.

      Y en a même qui nomment ça le "développement durable", et même des "soi-disant "écologistes" que ça fait bander.

      Qui célèbre ce concept eugénique de "Sustainable development" inventé par le Prince Bernhart des Pays-Bas, ex-Colonel Waffen SS, fondateur du Groupe de Bilderberg, et actionnaire majeur de la Shell.

      Comme d’habitude c’est grâce aux "bons sentiments" et l’ignorance crasse que les Peuples se font plumer en douceur par le Capital.

      G.L.

  • Et pendant ce temps làààà... La Colombie, armée par les USA, viole les territoires Equatoriens et Vénézueliens... Les USA accumulent des armes autour du Venezuela, de la Bolivie, de l’Equateur... Tentent de monter les révoltes contre ces gouvernements en attisant les mécontentements ici et là, de diviser les pays (Bolivie récemment). L’Argentine et le Bresil, les plus pourris d’OGM, manifestent leur solidarité avec les pays précédents.

    En Avril 2007, Rafael Correa a expulsé le Président de la Banque Mondiale : " parce que nous n’accepterons de chantage de personne"

    La Bolivie, le Venezuela et l’Argentine se sont affranchies de la Banque Mondiale et du Fond Monétaire International.
    La Banque du Sud (Banco del Sur) a été créée début 2008 et commencera à fonctionner au courant de l’année avec un capital de 7 000 millions de dollars (http://www.aporrea.org/imprime/n113...) Elle concerne l’Argentine, le Venezuela, le Paraguay, l’Urugay, le Brésil et la Bolivie.

    Ca fait mal au porte-monnaie des banquiers néocons.

    Un conseil de Défense est en train de se constituer en Amérique Latine.

    Et on dirait que c’est pas du luxe.