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COMORES / FRANCE : LETTRE D’UNE FAUSSE CLANDESTINE AU PRESIDENT OBAMA NOBEL DE LA PAIX 2009

Publie le dimanche 1er novembre 2009 par Open-Publishing

Permettez-moi d’abord Monsieur le président de vous adresser mes sincères félicitations pour votre désignation comme Nobel de la Paix 2009. Ce Nobel récompense Votre engagement en faveur de la paix, des nations opprimées et des droits de l’homme. Comme l’a si bien dit le président français Nicolas Sarkozy : "Il confortera votre détermination à agir pour la justice, pour la paix et pour préserver les grands équilibres de notre planète. »

Monsieur le président, dans quelques jours, le 12 novembre 09, les Comores célébreront le 33ème anniversaire de son admission aux nations unies. En effet l’Assemblée générale, par un vote quasi unanime sur sa résolution 3385 (XXX) avait décidé non seulement d’admettre les Comores aux Nations Unies, mais aussi de réaffirmer la nécessité de respecter l’unité et l’intégrité territoriale de l’archipel des Comores, composé des îles d’Anjouan, de la Grande-Comore, de Mayotte et de Mohéli.

J’ai été émerveillée par l’intervention de M. SHERER (représentant des Etats unis) ce mercredi 12 novembre 1976, lorsqu’il déclare : « Les Etats-unis ont été heureux de voter au conseil de sécurité en faveur de l’admission des Comores à l’Organisation des nations Unies. En ma qualité de représentant du pays hôte, je souhaite au peuple de ces îles, dont la richesse et la diversité culturelle découlent de leur situation géographique au carrefour de l’océan indien, la bienvenue la plus sincère et nos vœux les meilleurs au moment où ce nouveau pays assume pleinement ses devoirs et ses responsabilités en qualité d’Etat Membre de l’O.N.U »

Malgré une vingtaine de résolutions onusiennes demandant à la France le respect des frontières issues de la colonisation, jugeant irrégulier le décompte île par île du référendum du 22 décembre 1974, cette dernière fait la sourde oreille, méprisant ainsi le droit international.
Et pourtant les déclarations des autorités françaises ne laissaient aucun doute quant à l’importance du caractère d’ensemble du référendum pour l’indépendance des Comores :
Le ministre des territoires d’outre-mer de France dans une publication d’Eurafrique déclarait : « Pourquoi un referendum d’ensemble, et non pas une consultation séparée pour chacune des îles ? Parce que la vocation de la France n’est pas de diviser le pays qui accède à l’indépendance. C’est le cas des Comores dont les habitants ont la même langue, la même religion, les mêmes intérêts politiques et économiques. Loin de vouloir briser l’intégrité territoriale, notre rôle est d’aider les efforts du peuple comorien vers un rapprochement »

De son côté Valery Giscard d’Estaing, alors président de la république française déclarait dans sa première réunion de presse le 24 octobre 1974, parlant des Comores : « C’est une population qui est homogène, dans laquelle il n’existe pratiquement pas de peuplement d’origine française, ou un peuplement très limité. Est-il raisonnable d’imaginer qu’une partie de l’archipel devienne indépendante et qu’une île, quelle que soit la sympathie qu’on puisse éprouver pour ses habitants, conserve un statut différent ?
Je crois qu’il faut accepter les réalités contemporaines. Les Comores sont une unité ; il est naturel que leur sort soit commun ».

Le 22 décembre 1974, à la question « Souhaiteriez-vous que le territoire des Comores devienne indépendant ? » Les comoriens ont répondu (globalement comme partout ailleurs) à 94,5% oui, nous souhaitons que le territoire des Comores (composé alors de Mayotte, Anjouan, Mohéli et grande-Comore) devienne indépendant.

A partir de cet instant les ennuis des Comores commencent. La France va troubler le jeu.
Contrairement à la charte de décolonisation des Nations Unies, et aux déclarations ci-dessus, la France procéda à un décompte île par île et non global afin de garder Mayotte qui avait majoritairement voté contre l’indépendance. (8783 mahorais sur une population de 286762 habitants avaient voté non.) Une décision contraire au droit international.
D’ailleurs une note confidentielle rédigée par Louis de Guiringaud, alors ambassadeur de France auprès des Nations Unies, qui l’avait délivrée, sur leur demande aux parlementaires français désireux d’en savoir plus sur la situation entre la France et les Comores, s’y prononce ouvertement contre le fait de conserver Mayotte en raison des graves conséquences qu’il augure pour la France sur le plan international. Et de se demander : « Faut-il pour autant aller au nom de cette différence de la volonté de 8783 sur 17946 Mahorais, jusqu’à compromettre durablement la position internationale de la France ? » ou « Nous devons éviter le ridicule d’être traînés devant le Conseil de sécurité pour une affaire de deux mille voix assez mal déterminées ». Je n’invente rien monsieur le président.

Pour avoir la conscience tranquille, la France n’hésite pas à parler de la volonté des mahorais à rester français, comme si on peut distinguer la volonté de la Pennsylvanie ou de la Floride lors d’une consultation américaine. En tout cas je ne veux pas m’étendre sur ce point, étant donné que les Nations Unies n’accepterons jamais la thèse que les difficultés constitutionnelles ou les contraintes nationales d’un genre ou de l’autre de l’un des Etats membres puissent avoir pour effet de renverser les décisions des Nations Unies, sinon l’Iran ne serait jamais condamné pour ses activités nucléaires. Il suffirait qu’il brandisse la volonté du peuple iranien à posséder la bombe atomique.
La communauté internationale ne peut être l’otage des problèmes intérieurs d’un Etat. La France doit respecter les résolutions onusiennes c’est tout. La question des Comores a déjà été discutée dans divers organes des Nations Unies au cours des années. Chaque fois, et dans tous les organes en question, les Nations unies ont réaffirmé l’intégrité territoriale des quatre îles.

Malgré une vingtaine de résolutions onusiennes demandant à la France le respect des frontières issues de la colonisation, jugeant irrégulier le décompte île par île du référendum de 1974, cette dernière fait la sourde oreille, méprisant ainsi le droit international.
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Le 29 mars 2009, le président Sarkozy a décidé de consulter illégalement les électeurs de Mayotte y compris donc les fonctionnaires et militaires métropolitains temporairement affectés à Mayotte pour départementaliser Mayotte. Là aussi les résolutions onusiennes sont claires et ne souffrent d’aucune ambiguité : « Les résolutions onusiennes condamnent les référendums du 8 février et du 11 avril 1976 organisés dans l’île comorienne de Mayotte par le Gouvernement français et les considèrent comme nuls et non avenus, et rejettent toute autre forme de référendums ou consultations qui pourraient être organisés ultérieurement en territoire comorien de Mayotte par la France. ». Certains médias français se demandent pourquoi le prix Nobel de la paix n’est pas plutôt attribué au président français Nicolas Sarkozy.

Monsieur le président, la France a instauré à Mayotte en 1994, contre le droit international, le tristement célèbre « visa Balladur » qui a provoqué plus de 7000 morts sur 7000 000 habitants dans le bras de mer Mayotte-Anjouan. Proportionnellement à la population américaine cela correspond à plus de 3 millions de morts américains, sous le silence complice de la communauté internationale. Le déséquilibre économique artificiellement crée, la départementalisation internationalement illégale de Mayotte, le renforcement des moyens militaires (hélicoptère, drones) vont sûrement exploser ce chiffre macabre. On prendra des risques suicidaires, comme s’embarquer dans une coque d’arachide pour traverser la mer dans l’espoir d’une vie meilleure.

Monsieur le président, je ne me sens pas étrangère à Mayotte. Je suis chez moi et le droit me donne raison. Je suis une fausse clandestine qui ne coûte pas chère à l’Etat français et facilement déportable. Mes attaches familiales sont à Mayotte. Malgré les risques encourus je reviendrai à chaque que je serais expulsée. Cette année je suis au quatrième voyage. Et à chaque fois la même question : arriverai-je ?

Je reste en outre convaincue que la présence de la France à Mayotte est un frein au développement économique des Comores. Les Comores sont déstabilisées et appauvries à partir de Mayotte. La France se sachant illégale à Mayotte, veut montrer à l’opinion internationale l’incapacité des Comores à se gérer. Vous savez monsieur le président pour rester à Mayotte en toute tranquillité il suffit de commettre un crime dans les trois autres îles. Ma conscience ne me permet d’aller jusqu’à là. Je préfère laisser ma vie dans ce grand cimetière marin du monde comme ma voisine qui a perdu sa vie suite à la collision entre une vedette de la police française et un kwassa (embarcation de fortune) dans la nuit 3 au 4 décembre 2007.
Croyez-moi monsieur le président si le financier Bernard Madoff était comorien il aurait échappé à la prison en se rendant illégalement à Mayotte. Le « viol » des Comores correspond à un titre de séjour à Mayotte.

Monsieur le président si je fais appel à vous, c’est parce que les dirigeants comoriens ne se préoccupent pas du sort des comoriens de Mayotte. Ils jouent plutôt le jeu de la France. Et pourtant il suffit de refuser d’accueillir les comoriens expulsés injustement de Mayotte pour amener la France à des négociations sereines avec les Comores, comme le demande les résolutions onusiennes.

La gravité de la situation à Mayotte appelle rapidement une intervention de votre part pour faire respecter le droit du peuple comorien et arrêter cette hécatombe.

Espérant sincèrement que vous entendrez ce cri, je vous assure, Monsieur le Président, de mes plus respectueuses salutations

BARAKA INZOUDDINE (membre de l’équipe wongo)
http://wongo.skyrock.com/