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Comment Israël confisque Jérusalem-Est (Extrait)

Publie le dimanche 11 février 2007 par Open-Publishing

A l’ombre du mur

Comment Israël confisque Jérusalem-Est
Par Philippe Rekacewicz et Dominique Vidal

Arrivée à la mi-janvier en Israël et en Palestine « sans proposition ni plan », la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice s’est contentée, à l’issue de ses entretiens, d’annoncer pour février un sommet avec MM. Ehoud Olmert et Mahmoud Abbas. En attendant, sur le terrain, la colonisation israélienne des territoires palestiniens s’accélère, en premier lieu à Jérusalem-Est, littéralement confisquée.

De Tel-Aviv, la route principale file à peu près droit, puis, passé l’aéroport Ben-Gourion, elle commence à onduler en grimpant vers Jérusalem, entre des collines dont la conquête par les forces juives, en 1948, fit couler tant de sang. A 700 mètres d’altitude, elle pénètre dans la ville sainte par l’ouest. Les Israéliens comme les étrangers n’ont en fait que l’embarras du choix : ils peuvent atteindre le centre-ville par bien d’autres routes, au nord comme au sud.

Pour les Palestiniens de Cisjordanie, gagner la ville trois fois sainte est une autre histoire. S’ils ont franchi les checkpoints intérieurs, ils buteront sur le plus brutal des obstacles jamais inventés pour contrôler et limiter les déplacements dans les territoires occupés : un mur d’une dizaine de mètres de hauteur, qui enveloppera bientôt entièrement la partie orientale de la cité, effaçant le paysage et interdisant les accès traditionnels. Il coupe même net les deux grands axes historiques – Jérusalem-Amman (route 417) et Jénine-Hébron (route 60). Le monstrueux serpent ne s’interrompt plus – pour les Cisjordaniens – qu’en quatre points : Qalandiya au nord, Shuafat au nord-est, Ras Abou Sbeitan à l’est et Gilo au sud. Encore devront-ils, pour y parvenir, se livrer à maints détours, laisser leur voiture et traverser à pied, les véhicules palestiniens (à plaques vertes) étant strictement interdits à Jérusalem...

Longtemps chargé par le ministère israélien de la défense de concevoir, tracer et construire la « barrière de sécurité » (selon la terminologie officielle), le colonel Danny Tirza, colon de Kfar Adoumim, est surnommé « seconde Nakba » par les Palestiniens. Au terme de son projet grandiose, il promet à Jérusalem 11 checkpoints semblables à des « terminaux d’aéroport ». Ce n’est pas l’impression que laisse un passage, même bref, par celui de Gilo. Partout les panneaux sermonnent : « Entrez un par un », « Attendez patiemment votre tour », « Laissez cet endroit propre », « Retirez votre manteau », « Obéissez aux instructions ». Quant aux couloirs (...)

dans Le Monde diplomatique Février 2007.