Du sujet à l’individu.

Au commencement était le sujet, se mettant sous l’aile de celui qui était le plus fort ou faisant partie du cercle de celui qui détenait le savoir lorsqu’il n’était pas tout simplement acquis, tel un objet, contre argent sonnant et trébuchant par un autre membre de l’espèce humaine dénommé chef, maître ou commandant. Puis, durant de longs siècles, le sujet voyait sa vie réglée sous la coupe du seigneur, de l’empereur ou du roi. Ce dernier étant une incarnation divine voyait son pouvoir appuyé par d’autres sujets de la même espèce mais vêtus d’habits sacerdotaux (et non ça sert d’auto). Lorsque le sujet en eut assez de toutes ces vicissitudes, il renversa le tyran alors d’essence (pas le carburant) divine. Mais trop lâche pour donner immédiatement vie à son rêve, il se met à genoux devant un autre chef, cette fois issu du peuple et sorti d’une urne (non pas funéraire). D’ailleurs, comment ne pas voir dans la disposition de l’urne et des assesseurs dans un bureau de vote une adaptation de La Cène ou tout du moins d’un autel ? Quelle différence effectuer entre un confessionnal et un isoloir ? Et, curieuse analogie, la récolte des suffrages ne se déroule-t-elle pas le dimanche, jour de la Messe catholique ? Fantastique tour de passe-passe, n’est-ce pas ? Toujours est-il que c’est de cette façon qu’est né le citoyen, second étage de l’escabeau. Ou comment passer de l’asservissement à la liberté. Mais croire que l’Histoire est arrivée à son terme et que la démarche de l’espèce humaine culmine à son apogée est faire preuve d’un crasse aveuglement doublé d’une cruelle faiblesse d’esprit. Il reste à gravir à Homo sapiens peut-être la plus grosse marche de son évolution, celle de l’émancipation qui donnera corps à l’individu, émancipé, universel.
Et une fois émancipé et universel, l’individu devra encore perfectionner son processus pour tendre vers l’union intégrale avec ses congénères, frères et sœurs, adhérent pleinement à une même communauté humaine. Quitte à ce qu’il doive perpétuer éternellement ce stratagème face aux forces réactionnaires qui l’empêchent d’avancer.

[Septembre 2011]

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