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Guéant n’est pas un nazi. Mais...

par Laurent Binet

Publie le jeudi 8 mars 2012 par Laurent Binet - Open-Publishing
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HHhH
Laurent Binet
Lgf, 7,13 €
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Dans l’affaire Guéant sur les civilisations, on retrouve la technique habituelle de la droite sarkozyste qui consiste à faire du lepénisme pour ensuite se scandaliser d’être traitée comme tel.

Il est difficilement niable qu’évoquer une hiérarchie des civilisations, comme l’a fait Claude Guéant, avait pour sous-entendu évident que la civilisation supérieure à toutes les autres, c’est la nôtre. Dès lors, en quoi le fait d’établir un parallèle avec le nazisme, qui a fait de cette idée le fondement de sa doctrine, ne serait-il pas pertinent ?

D’une manière générale, une tendance lourde de ce quinquennat aura été la recherche de boucs émissaires (sans-papiers, roms, fonctionnaires, chômeurs, musulmans, étudiants étrangers...) Il se trouve que la recherche de boucs émissaires en période de crise, pour qui s’intéresse un tout petit peu à l’Histoire, ne peut pas ne pas évoquer l’Allemagne des années 30. Il n’y a donc aucune infamie à faire remarquer que le discours de Guéant en « rappelle » un autre. On le fait à longueur d’années avec le FN et ça ne choque personne, à juste titre : il est bon, en effet, d’invoquer l’Histoire comme un rappel salutaire des erreurs d’analyse commises dans le passé qui ont mené à de grands désastres. Or, la croyance en une supériorité intrinsèque de certains peuples sur d’autres (supériorité culturelle, mais on sait que de la « Kultur » allemande à la race allemande, le glissement en son temps s’est opéré naturellement) fut sans conteste l’une des plus lourdes.

Cette affaire m’en rappelle une autre : la droite s’était scandalisée qu’on emploie le mot « rafle » pour désigner sa politique de traque des étrangers sans papiers. Mais lorsque des policiers viennent sonner chez vous au petit matin pour vous arrêter, au milieu de votre famille, et vous emmener dans des « centres de rétention », au seul motif que vous êtes étranger et que vos papiers ne sont pas en règle, et lorsque cette opération se répète jour après jour, de façon systématique, parce qu’elle s’inscrit dans une politique d’Etat, n’est-ce pas précisément la définition d’une rafle, et justement d’une rafle telle qu’on l’entend depuis la dernière guerre ? C’est le procédé qui est infâme, pas le mot.

Naturellement, il ne s’agit pas de dire que Guéant est un nazi. Mais je ne vois pas en quoi il serait interdit ou même simplement déplacé de dire que son discours en rappelle un autre, surtout quand il vise aussi ostensiblement à draguer les électeurs d’une femme dont les accointances viennoises récemment avérées tendent à confirmer que, décidément, le parallèle n’est pas complètement hors de propos.


Laurent Binet est l’auteur de "HHhH" (Grasset), roman sur le SS Reinhard Heydrich, éminence grise de Himmler. Après avoir tenu un blog sur BibliObs, il suit actuellement la campagne de François Hollande, dont il compte évoquer les coulisses dans un livre.

http://bibliobs.nouvelobs.com/tranches-de-campagne/20120209.OBS0971/gueant-n-est-pas-un-nazi-mais.html

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Messages

  • Il est l’image la plus repoussante qu’on pourrait se faire d’un policier dans un état du même nom. On voit d’après ses déclarations sales et hypocrites, l’exécuteur des basses oeuvres du régime.Celui qui n’a pas peur de fouiller au milieu des odeurs pestilentielles des poubelles de la République et d’en apporter les épluchures à son maître quel qu’il soit.
    Attention, car nous n’en sommes qu’au stade des paroles, lui et ses pareils peuvent être redoutables pour nos libertés et pour notre sécurité de citoyens.
    Attention, car nous avons vu comment en Espagne, Aznar, un copain espagnol de Sarkozy a tenté en vain d’utiliser pour des élections qui furent perdues, le mystérieux (pas pour tout le monde) et sanglant attentat "islamiste" de la gare d’Antiocha près de madrid, qu’il avait d’abord sans succès attribué à ETA.