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Il y a 120 ans, le 8 janvier 1893, Jaurès député de Carmaux, passe au socialisme

par C D

Publie le mardi 8 janvier 2013 par C D - Open-Publishing
2 commentaires

Il y a 120 ans, le 8 janvier 1893, Jaurès député de Carmaux, passe au socialisme !

mardi 8 janvier 2013

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article3065

En parcourant le petit livre (1) d’Edmont Hervé, ancien ministre et ancien maire de Rennes, sur Jaurès, on apprend qu’il y a exactement 120 ans, le 8 janvier 1893, Jean Jaurès devenais député de Carmaux. Il venait, durant l’année 1892, de s’engager dans la lutte de classe et d’embrasser dans le même mouvement la cause du socialisme.

Chose rare, ce sont les ouvriers grévistes de Carmaux (en 1892) qui demandent à Jaurès d’être leur candidat à cette élection. C’est que ce dernier n’avait pas ménagé son énergie et sa plume pour défendre la grève de Carmaux. On rapporte (2) même que "Jaurès ne supportait plus cette République qu’il considère comme étant aux mains de députés et ministres capitalistes pour qui la finance et l’industrie priment sur le respect des personnes" Autrement dit Jaurès distinguait la République des capitalistes de celle qu’il souhaitait : la République des socialistes. Une République avec un gouvernement qui écoute les grévistes plus que les patrons et qui ordonne les mesures pour la classe des dépossédés.

Son socialisme n’a - à ce moment là du moins - rien à voir avec sa fade acclimatation contemporaine au capitalisme dominant. Son socialisme n’est pas un solidarisme façon Durkheim ou Léon Bourgeois ou Bouglé. Et la lutte de classe telle qu’il la conçoit n’est pas un chemin qui avance et recule, ni un chemin qui ne mène nulle part.

Il faut ici rappeler qu’une opinion dite "scientifique", surtout celle bien reçue dans les Universités, voudrait que la lutte de classe soit comme une colère qui parfois débouche sur des avancées, parfois sur des reculs. Rien de bien grave pour le système dominant. Et l’idée, issue de Marx (lettre à Weydemeyer) qu’elle puisse mener au socialisme ne serait alors qu’utopie ou pire dogmatisme. Mais qui a dit que le but était garanti "scientifiquement". Le socialisme est une perspective. Une perspective qui ne se comprend que par la lutte de classe. Et Jaurès en a fait l’expérience, on l’a dit, en 1892. Et grâce à cette expérience, il est reconnu par les ouvriers de Carmaux comme étant en capacité de porter au niveau du gouvernement et de l’Etat les exigences nécessaires pour sortir de l’ordre dominant.

C’est aussi, il ne faut pas l’oublier, une perspective qui vient de l’histoire de la lutte des classes. Et si l’histoire contemporaine donne raison au néolibéralisme et à la classe sociale du capitalisme financier. Rien ne dit que cela ne va pas changer. Il importe donc non pas de surveiller ce qui bouge mais de participer, tant que faire se peut, au mouvement qui résiste à l’ordre dominant.

Christian DELARUE

1) La permanence de Jaurès Edmond Hervé B. Leprince , Paris collection L’encyclopédie du socialisme , numéro 15 Parution : octobre 2006

2) Jean Jaurès - Histoire du Monde
http://www.histoiredumonde.net/Jean-Jaures.html

Messages

  • Et Jean Jaurès disparu, assassiné laissa le champ libre à ceux qui se jetèrent dans la guerre, et qui se prétendent encore, sans honte "Socialiste" alors qu’ils sont bien dans le régime capitaliste !
    Et M. Mitterrand eut l’audace de déclarer : " le Socialisme une idée qui fait son chemin !" Il s’était encore trompé de chemin pour autant qu’il eut réellement l’envie un jour de suivre le BON ?

    • Jaurès, l’organisation socialiste et la délégation vers en-bas.

      La démocratie représentative est un type de démocratie réellement installé dans de nombreux pays capitalistes. Elle organise une délégation de pouvoir vers en-haut, vers des élites de partis, élues certes, qui se constituent en oligarchie au-dessus du reste des citoyens.

      Il y a aussi la délégation vers en-bas. C’est la position de Jaurès mais d’un Jaurès qui n’a jamais exercé dans une société socialiste. Il vivait et militait en France dans une société à dominante capitaliste. Cela change beaucoup les choses quand on parle de "déléguer le pouvoir vers en-bas". Cela ne l’empêche pas évidemment de penser l’organisation socialiste de la mine, de l’usine, du groupe et de la Nation devenue in fine socialiste.

      La position de Jaurès ne se résume pas à une sorte de collectivisme d’Etat, à un socialisme d’Etat. Il pense qu’un gouvernement au service de la classe ouvrière est indispensable mais il entend procéder à des délégations vers en-bas, vers les cadres intermédiaires des organisations syndicales et associatives, vers les travailleurs de la base associés. L’appropriation publique au sein de la Nation passe alors à l’appropriation sociale qui devient propriété socialiste lorsque les patrons s’effacent en tant que tels. Car à termes, c’est bien de cela qu’il s’agit. Jaurès ne le dit pas tout le temps. Il parle le plus souvent de "propriété sociale" ou les patrons on moins de pouvoir mais n’ont pas disparu. La classe bourgeoise dominante au plan national est aussi toujours là. Jaurès voulait préparer l’abolition complète du patronat par l’association des travailleurs. En ce sens il était bien socialiste. Mais son discours n’est pas toujours aussi clair et incisif. Il use de terminologie universaliste ou englobante ou le patron et les travailleurs sont ensemble bien que les droits du travail soient plus importants qu’avant. "République industrielle", "propriété sociale", "communisme démocratique universel", etc sont des termes qui ne montrent pas un clivage de classe, qui ne montrent pas nettement à qui il s’adresse, qui est concerné. Ces termes signifient qu’une dispute de classe s’exerce au travers de la "démocratie d’en-bas". Mais ce n’est pas dit ainsi.

      A propos, non pas du gouvernement proprement dit, mais de l’accès ou de l’installation du socialisme, du mouvement pour conquérir le pouvoir, on retrouve deux modalités d’une part la figure du socialisme par "en-bas" et d’autre part celle du socialisme par "en-haut". Mais la distinction est ambigüe. Par en-bas signifie montée des luttes dans la société civile, dans les quartiers et dans les entreprises. Elle est nécessaire pour que l’on ne parle pas de simple coup d’ Etat. Mais il est rare qu’il y ait seulement montée du mouvement social et construction populaire ascendante. A un moment donné ou un autre un saut se fait par prise de pouvoir de certains à la place d’autres qui ne sont plus en poste (car ils sont quitté le pouvoir ). Autrement dit des dirigeants se dégagent du mouvement social par leurs capacités à faire avancer concrètement les orientations du socialisme.

      CD