Accueil > La Réunion : élus UMP au trou. Sarko va enfin aimer les juges !

La Réunion : élus UMP au trou. Sarko va enfin aimer les juges !

Publie le lundi 25 septembre 2006 par Open-Publishing
2 commentaires

Le maire de Saint-Pierre en garde à vue

Hier matin, deux élus saint-pierrois, un ex-cadre de la Semita et un chef d’entreprise ont été placés en garde à vue par les policiers de la brigade financière de Saint-Denis dans l’affaire des marchés informatiques truqués de la Civis. Michel Fontaine, Willy Caderby, Aslam Mallam Rashed Sajed et Gérard de Roland sont entendus dans le cadre de l’enquête pour délit de favoritisme, prise illégale d’intérêt et corruption confiée au juge Kuentz en avril dernier. Il s’agit pour les enquêteurs de déterminer leur part de responsabilité dans cette affaire politico-financière où des centaines de milliers d’euros ont été englouties.

Un ordinateur central HP 9 000 d’environ 100 000 euros qui dort dans un bureau du CCAS de Saint-Louis et dont la seule utilité est de stocker de vulgaires rouleaux de papier toilette. Le spectacle est affligeant mais l’anecdote illustre à merveille le vaste scandale politico-financier des juteux marchés informatiques truqués de la Civis qui est sur le point d’éclabousser certains élus sudistes, patrons d’entreprises et autres cadres administratifs. L’heure de vérité est même très proche dans cette enquête pour délit de favoritisme, prise illégale d’intérêt et corruption confiée au juge Pierre Kuentz en avril dernier (voir nos éditions des 21 et 27 avril). Car hier matin, Michel Fontaine et Willy Caderby ont été placés en garde à vue à l’hôtel de police de Malartic.

Un système ingénieux

Le président de la Civis et maire de Saint-Pierre et l’ex-Pdg de la Semita, également président la commission d’appel d’offre de la Civis et conseiller général de la Ravine-Blanche, se sont rendus au départ à une convocation des policiers de la brigade financière qui agissent sous commission rogatoire du magistrat saint-pierrois. Ils n’imaginent alors pas ce qui les attend. Michel Fontaine, par exemple, se préoccupe de l’heure à laquelle son chauffeur pourra le récupérer. Les deux élus et amis, dont les relations sont tendues depuis qu’a éclaté l’affaire, ne sont pas les seuls à rejoindre les locaux de la Sûreté urbaine départementale (SUD) dans le courant de la matinée. Deux autres personnes, soupçonnées d’avoir joué un rôle clé dans l’affaire, sont elles aussi soumises au feu roulant des questions des enquêteurs. Il s’agit de Aslam Mallam Rashed Sajed, ex-directeur général délégué de feu la Semita, et de Gérard de Roland, responsable de la Cis (Communication ingénierie et système), une entreprise basée à Sainte-Clotilde et spécialisée dans la fourniture et la maintenance d’ordinateur Hewlett-Packard (HP). L’idée de dégager des fonds occultes à partir des juteux marchés informatiques de la Civis germe dans la tête des principaux protagonistes de l’affaire au début de l’année 2002. Pour ce faire, élus et cadres dirigeants s’ingénient à imposer certains types d’ordinateurs à la fois performants et coûteux pour équiper les communes de la Civis dont le parc est obsolète. L’opération, montée de main de maître, vise à rédiger un cahier des charges taillé sur mesure pour que le marché tombe dans l’escarcelle de la Cis, une puissante société franco-libanaise représentée à La Réunion par Gérard de Roland. La commission d’appel d’offres, placée sous la houlette de Willy Caderby, se conforme à l’avis des experts de la Civis et de Aslam Mallam Rashed Sajed qui vise la conformité des réponses des candidats.

Huit HP 9000 à 738 975 euros

Cet homme d’affaires, lui aussi d’origine franco-libanaise et installé de longue date dans l’île, va jouer un autre rôle déterminant dans ce savant montage. Véritable cheville ouvrière du système, son carnet d’adresses lui permet de négocier directement au siège de la Cis dans les Hauts-de-Seine mais aussi lors de fructueux voyages au Liban. En jouant sur les contraintes techniques, les responsables de la Civis se croient sans doute à l’abri de tout soupçon. D’ailleurs, personne n’y voit à redire quand la Cis remporte un marché de 738 975 euros pour la fourniture de huit HP 9000 (HP-UX RP5430 pour être précis sur le modèle). Les puissants serveurs, sortes de grandes armoires à la pointe de la technologie, équipent bientôt les communes de la Civis, hormis Etang-Salé et Petite-Ile qui travaillent déjà avec IBM.

Pour poser le papier toilette

Personne ne manifeste davantage d’inquiétude lors de la passation d’un deuxième marché de 331 507 euros, portant sur des équipements en micro-ordinateurs. Pourtant, “les financiers” de Malartic ont là encore mis la main sur des documents douteux qui valident l’appel d’offres. Un expert en informatique les alertent aussi sur des surfacturations qui gonflent de façon éhontée le prix des matériels acquis. Mais à l’époque, Michel Fontaine et sa garde rapprochée se frottent encore les mains. L’argent coule à flot. La fine équipe joue désormais sur tous les tableaux. Qui dit ordinateur dit licence d’exploitation, formation du personnel ou encore fourniture de logiciels appropriés. Le ver est dans le fruit. Car la Cis est incontournable. On facture des formations fantômes et on achète des licences à gogo. Mais la cerise sur le gâteau consiste à mettre sur les rails la Société mixte en ingénierie et télécommunications avancées (Semita) pour assurer la maintenance d’un parc informatique surdimensionné, et parfois fictif. Créée en octobre 2002, cette Sem, en liquidation judiciaire depuis le 5 juillet, décroche le faramineux marché d’info-gérance de la Civis de décembre 2002. Le procès verbal de la commission d’appel d’offres, présidée cette fois par Michel Fontaine, laisse perplexes les policiers. Rempli à la hâte deux heures avant la réunion et incomplet, il est indéniablement entaché d’irrégularités. Toujours est-il que la Semita engloutit par ce biais près de 8,3 millions d’euros sur trois ans. Willy Caderby en coiffe la casquette de Pdg tandis que le poste de directeur général délégué revient sans surprise à Aslam Mallam Rashed Rajed. La Semita facture l’entretien des HP 9000 alors que six de ces petits bijoux sont encore dans leurs emballages d’origine. La commune de Cilaos se paie le luxe de renvoyer la marchandise à l’expéditeur et celle de Saint-Louis pour poser son papier hygiénique avec.

Enrichissement personnel ou pompe à finance ?

Sur les conseils avisés de confidents, Michel Fontaine et Willy Caderby décident de passer une convention entre la Civis et la Semita afin de masquer la gabegie. La décision est prise lors d’une délibération intervenue en 2003 et curieusement entérinée deux ans plus tard par une convention signée avec effet rétroactif. Celle-ci prévoit que la Semita louera les six HP 9000 pour la bagatelle de 50 000 euros par mois à la Civis, même si aucun loyer n’est versé au final. Dans un document interne de la Civis, le directeur du département info-gérance suggère que les serveurs à 100 000 euros “pourraient servir de matériel de dépannage dans l’attente de faire réparer les pièces défectueuses auprès d’un prestataire”. On croit rêver. Un technicien du syndicat mixte de coopération du sud, qui se partage la maintenance avec la Semita entre 2003 et 2005, alerte Michel Fontaine dès avril 2003 au moyen d’une étude qui détaille le gâchis. Son rapport reste lettre morte tout comme deux sévères mises en garde du préfet. Le marché de 331 507 euros ne passe d’ailleurs pas le contrôle de légalité sans que cela n’arrête le premier magistrat de Saint-pierre au prétexte que le matériel est déjà livré. Pris dans la toile des policiers, Michel Fontaine renvoie la balle dans le camp du SivomR et de la Civis avant son arrivée à la tête de la mairie. Il explique qu’il n’a fait que perpétuer un système déjà en place. L’argument est un peu court d’autant qu’il n’est pas le seul à être interrogé. Il semblerait que certaines langues se soient déliées au fil des heures. Et ce n’est pas fini puisque les gardes à vue devraient se prolonger jusqu’à demain matin avant que les intéressés soient conduits au palais de justice de Saint-Pierre. D’ici là, ils devraient être rejoints par un cadre administratif de la Civis, convoqué à son tour aujourd’hui par les policiers. En attendant, la question centrale reste celle de la destination des fonds collectés ici et là. Quand bien même certains auraient mené grand train aux frais du contribuable, cela n’explique pas tout. Et il n’est pas impossible, murmure-t-on, que la Civis ait servi de pompe à finance...

Eric Lainé

http://www.clicanoo.com/article.php...

Suite de l’affaire du maire de Saint-Pierre : http://www.clicanoo.com/article.php...


Et le maire de Saint-Philippe aussi : http://www.clicanoo.com/article.php...

Finalement écroué : http://www.clicanoo.com/article.php...

Messages