Accueil > La psychiatrie va mal, pourquoi faut-il un fait divers pour qu’on en parle ?

La psychiatrie va mal, pourquoi faut-il un fait divers pour qu’on en parle ?

Publie le jeudi 30 décembre 2004 par Open-Publishing
2 commentaires

Réveil par électrochoc

En cinq ans, les crédits publics de la psychiatrie ont diminué D’UN MILLIARD D’EUROS. Selon les syndicats professionnels, entre 700 et 800 postes de psychiatres sont actuellement vacants.

Entre 1989 et 2000, 1742 lits ont été fermés dans la seule région
Ile-de-France. Chaque année, environ 553 000 personnes sont admises
en psychiatrie...

La situation est connue, archiconnue. Elle est dramatique, sans cesse
aggravée depuis 20 ans. Ni les pouvoirs publics ni la société civile ne s’en
indignent vraiment. Cela ne fait pas plus de bruit qu’une lente asphyxie. Ce n’est pas qu’une affaire de moyens matériels. C’est aussi une histoire, autrement plus grave, de représentation sociale. Il faut cacher la folie, la réduire ou la faire taire ou, ce qui revient au même, en faire une question de sécurité publique.

En une dizaine d’année à peine, les hospitalisations sous contrainte, celles
qui sont effectuées à la demande d’un tiers ou du préfet, ont progressé de 86%,
chiffres de l’IGAS.

Les choses en étaient ordinairement là, tristement là, lorsque le 18
décembre, la France entière s’est réveillée avec la gueule de bois.

Sous l’injonction des médias, unanimes et tapageurs, elle venait de
découvrir la réalité de son univers psychiatrique. Une infirmière et une aide-soignante de l’hôpital de Pau avaient été sauvagement assassinées dans la nuit. Y avait-il un rapport clinique entre ces deux meurtres et le délabrement du système psychiatrique ?

Peut-être que non, mais là n’était pas la question. Il fallait s’indigner,
encore une fois compatir, déplorer, ressasser mille peurs. Sous la "tyrannie" du
fait-divers, le moment était venu de s’occuper de psychiatrie. Fallait-il qu’une tête fût coupée pour que nous acceptions de sortir de notre sommeil.

(Il faut lire les lumineux entretiens du psychiatre Jean Oury et de
l’écrivain Marie Depussé, "A quelle heure passe le train...Conversations sur la folie" ed. Calmann-Lévy 318 pages 19,50 €)

Daniel Conrod

Messages