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Le TCE, un projet "mort-né", selon Hubert Védrine

Publie le lundi 26 juin 2006 par Open-Publishing

Extrait de l’interview d’Hubert Védrine (Le Monde du 24 juin 2006) :

"Comment faire repartir l’Europe ?

D’abord en analysant bien l’impasse européenne actuelle, fruit paradoxal de l’européisme des élites et de la démagogie anti-européenne. La crise a éclaté à travers les votes français et néerlandais. Ce n’était pas un coup de tonnerre dans un ciel bleu, le système européen était déjà en crise, l’abstention aux élections de 2004 était très élevée. En fait, depuis Maastricht, qui est le point de plus grande homogénéité jamais atteint, les Européens sont restés en désaccord sur quatre points fondamentaux : jusqu’où pousser l’intégration politique ; l’identité de l’Europe et donc de ses frontières ; le choix entre vraie puissance et "soft puissance" ; et le point d’équilibre entre la flexibilité, sans laquelle les entreprises meurent, et la sécurité à laquelle ont droit les individus.

Tout cela sans répondre aux attentes des gens. Les Européens ne remettent pas en question ce qui a été fait depuis des décennies, mais une clarification est nécessaire.

Alors, que peut-on faire sur le plan institutionnel ?
Les traités européens doivent être adoptés à l’unanimité et il n’y aura pas l’unanimité sur le traité constitutionnel. Aucun président en France ne prendra l’initiative de refaire voter les Français sur le même texte, et les Britanniques ne voteront pas non plus. Mme Merkel ne pourra pas même, pendant la présidence allemande, obtenir l’unanimité des Vingt-Cinq. On peut le regretter, mais je ne vois pas ce que l’on gagne à différer ce constat. Il serait donc plus sain de constater la caducité de ce traité constitutionnel, mort-né, et de s’engager sans attendre dans deux processus : premièrement, commencer à explorer s’il y a, parmi les Vingt-Cinq, le début d’un consensus sur les bases d’un autre traité, avant de décider d’une éventuelle nouvelle négociation. Et, deuxièmement, relancer vite quelques grands projets : politique économique de croissance créatrice d’emplois non subventionnés dans la zone euro ; politique commune nouvelle de conversion du système économique agricole, industriel, des transports, et des modes de vie, en un système écologiquement responsable, avec critères et calendrier ; Super Erasmus ; infrastructures, champions industriels ; projets sociaux ; défense européenne, etc."

Fort bien ! mais quelles sont les intentions réelles du PS ? Reportons nous au "Projet socialiste pour la France" que viennent d’adopter ses militants :

"Nous proposerons l’élaboration d’un
Traité strictement institutionnel qui
organisera efficacement les pouvoirs,
avec un Parlement Européen exerçant ses
pleines responsabilités législatives et budgétaires,
un Président de la Commission élu
par le Parlement, un Conseil Européen, avec
à sa tête un Président de l’Europe. Une fois
renégocié un tel traité sera soumis au
peuple par référendum." (Partie IV. I "Relancer l’Europe")

Le lapsus qui lui fait utiliser le participe "renégocié" (donc bel et bien référence à l’actuel projet de TCE !) - alors que le PS vient de nous signaler son intention d’élaborer un nouveau traité - nous laisse songeurs...