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Les espoirs de trouver un médicament contre le chikungunya viennent de s’envoler.
Publie le mercredi 21 mars 2007 par Open-PublishingLa nouvelle est tombée comme un couperet hier lors d’une conférence de presse tenue par la cellule nationale de coordination de recherche sur le chikungunya et la dengue. “La chloroquine ne marche pas contre le chikungunya”, a déclaré le président de la cellule, Antoine Flahault, anéantissant un peu plus les milliers de malades qui souffrent encore du chikungunya aujourd’hui.
Ex-vivo, la chloroquine était apparue comme la molécule la plus efficace contre le virus. Une raison qui avait conduit les chercheurs à mener des essais cliniques à la Réunion en 2006 sur des patients volontaires. L’objectif était de confirmer les effets préventifs et curatifs de la chloroquine.
L’épidémie piquant du nez, un nombre insuffisant de malades avaient pu être inclus dans ces essais thérapeutiques. L’étude s’est donc arrêtée à un résultat intermédiaire de 75 patients. Dans ce contexte, Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, avait exprimé sa volonté de se rapprocher de l’Inde et de Madagascar, où sévissait le chikungunya, pour poursuivre les recherches.
Chose qui n’a jamais été suivie dans les faits tellement la demande paraissait farfelue aux scientifiques. Sans le rendre public, les scientifiques ont donc mené depuis le mois de septembre des essais sur 96 macaques sauvages recueillis à Maurice pour être observés au commissariat à l’énergie atomique (CEA), dans les Hauts-de-Seine. Une étude qui a coûté 300 000 euros. “Aucun des projets de l’Agence nationale de la recherche (ANR) n’a dépassé cette somme”, précise Gilles Aumont, chef de département santé animale à l’Inra.
LE MACAQUE PLUS FIABLE QUE L’HOMME ?
Trois groupes de six macaques (cynomolgus fascicularis) se sont vus administrer de la chloroquine - la moitié avait un placebo - avant qu’on leur inocule le virus du chikungunya. “Les résultats viennent de tomber, apprend le Pr Flahault. Le singe développe une infection virale que ce soit avec un placebo ou avec la chloroquine.” Autrement dit, la chloroquine n’a eu aucun effet préventif, ni curatif sur le chikungunya chez le macaque.
La montée virale a été constatée chez tous les groupes. Les scientifiques en concluent alors que la molécule est inefficace contre le chik chez l’être humain dans la mesure où ce singe présente les caractéristiques et les symptômes les plus proches de l’homme. Reste qu’on peut se demander si le modèle animal peut se transposer entièrement à l’être humain. Aussi, on peut s’interroger sur la valeur de cette recherche puisque les scientifiques ont refusé de donner des conclusions sur les essais menés sur 75 personnes, jugeant ce nombre d’inclusion trop faible, tandis qu’une poignée de macaques suffit à rendre des résultats définitifs. “Il n’y avait pas d’efficacité flamboyante chez les 75 patients mais c’est vrai que c’est un débat scientifique intéressant, esquive Antoine Flahault.
Nous, on pense qu’il vaut mieux aller voir d’autres molécules.” Les virologues marseillais vont donc continuer le criblage des 150 molécules les plus connues - à partir desquelles on avait tiré le numéro chloroquine - en espérant trouver un nouveau candidat.
LA PISTE DES ANTICORPS
Une nouvelle piste est également envisagée du côté des anticorps. À partir du plasma recueilli auprès de Réunionnais infectés par le virus, les médecins vont effectuer des filtres et concentrer les immunoglobulines (anticorps) afin de le réinjecter à des malades du chik. Ce principe, utilisé dans des maladies telles que le tétanos ou la rage, consiste en résumé à donner les défenses nécessaires aux malades plutôt que de leur administrer un médicament.
Ceci permettra aux chikungunuyés de se débarrasser plus vite du virus. Ils auront moins de fièvre et de conséquences car elles sont liées à l’inflammation. Mais la solution n’est pas miracle, les effets secondaires existent, il faut disposer de beaucoup de plasma pour que cela fonctionne et cela coûte cher. La production est actuellement en cours. On espère que ces nouvelles pistes de recherche ne feront pas pschittt, à l’instar de la promesse de X. Bertrand sur la mise à disposition d’un médicament pour Noël...
En attendant, les malades auront une certitude : ils ne sont pas prêts d’être soulagés car nous sommes revenus au point zéro de la recherche.
Marie Payrard
J I R .