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MANIFESTE DE L’ASSOCIATION PORTUGAISE DE REALISATEURS -A.P.R.

Publie le lundi 5 avril 2004 par Open-Publishing

Le Gouvernement Portugais s’apprête à faire voter au milieu du mois d’Avril une nouvelle Loi du
Cinéma, intitulée Loi des Arts Cinématographiques (pourquoi le pluriel ?) et Audiovisuels.

L’Institut du Cinéma, ICAM, (équivalent portugais du C.N.C) disparaît de la loi. Par contre est
créé un "Fonds pour l’Investissement et le Développement des Arts Cinématographiques et de
l’Audiovisuel" à travers lequel le Gouvernement menace de convertir le peu d’argent disponible pour la
production du cinéma portugais en capital pour un commerce louche avec les distributeurs et
exploitants américains et les chaînes privées de télévision, un "Fonds" destiné à financer des projets
supposée attirer le public afin de générer des bénéfices.

De telles manoeuvres arrivent au moment où le cinéma portugais, après avoir renforcé son identité
et ses modes de production, a vu apparaître de jeunes auteurs et a permis le travail de cinéastes
confirmés dont l’oeuvre est reconnue tant au niveau national qu’international.
Ainsi, alors que tous les indicateurs démontrent une consolidation de la cinématographie
portugaise autour d’une production importante et diversifiée, le Gouvernement Portugais prétend maintenant,
par un numéro d’illusionniste, ruiner les fonds de la culture au profit d’un commerce douteux,
étranglant la production, produisant moins de films mais au budget beaucoup plus élevé, excluant du
système des dizaines de créateurs, au nom d’un mirifique "cinéma commercial" qui, au Portugal,
n’est parvenu qu’à engendrer des échecs financiers et des naufrages culturels.

Aucun raisonnement économique ne peut étayer la légitimité de ce cinéma "cher et commercial" : et
le Gouvernement - dans une irresponsable navigation à la dérive - ne s’appuie pour légitimer ce
choix sur aucune étude prospective.

En vérité, plus il est investi d’argent dans un film portugais plus grand est le préjudice qu’il
provoque ; tandis que, au contraire, il a été démontrée la bien meilleure "performance commerciale"
de films beaucoup moins coûteux, beaucoup plus libres et originaux, films qui, eux, circulent dans
le monde entier, mobilisant des spectateurs de générations différentes et de cultures diverses.
Pour le cinéma - comme pour tous les arts et toute la culture - nous exigeons donc un Ministère de
la Culture, avec une politique culturelle et artistique effective, et non un Ministère du
Commerce.

Nous n’acceptons pas les politiques commerciales et industrielles au sein du Ministère de la
Culture (contraires aux accords internationaux du commerce et aux directives communautaires sur le
statut de l’exception culturelle) mais nous voulons de véritables politiques qui protègent et
défendent le cinéma portugais dans un marché abandonné aux intérêts de l’industrie américaine.

Nous exigeons que l’argent du cinéma soit pour le cinéma, qu’il soit attribué à travers des
concours publics avec des règles et des critères transparents qui assurent la liberté et l’indépendance
de la création. Nous voulons que cela soit fait au nom de la souveraineté culturelle du pays et au
nom des liens qui unissent le cinéma à tous les autres arts, et aussi au nom de la préservation de
l’identité culturelle de chaque pays.

Nous exigeons du Ministère de la Culture un Institut du Cinéma, avec des recettes propres et une
autonomie administrative et financière et nous voulons aussi une séparation claire entre l’art du
cinéma et les intérêts de l’audiovisuel, qui, eux, relèvent exclusivement des cahiers des charges
des télévisions et doivent être absolument séparés des fonds qui soutiennent le cinéma.

Nous ne pouvons admettre que le cinéma portugais soit soumis aux intérêts des télévisions privées
et publiques ni que le Gouvernement se serve du statut culturel du cinéma pour financer en douce -
à travers le dit "Fonds d’Investissement" - les déficits des télévisions et leur incapacité
chronique à soutenir la production.

Nous exigeons que la loi respecte les principes énoncés en son préambule : plus de films, plus de
diversité, possibilité pour plus de cinéastes - de toutes les générations- de filmer. Et nous
voulons surtout que l’État en revienne à son rôle de garant de la liberté et de la défense
intransigeante des créateurs et de leurs oeuvres, sans les prétentions populistes qui, depuis longtemps, ont
fait main basse sur l’imaginaire des Portugais au profit des intérêts de l’industrie du cinéma
américain et des sous-produits de la télévision brésilienne.

Sacrifier une cinématographie à de tels desseins est un crime à l’encontre de la démocratie et de
la liberté de tous. Et tout indique que ce ne pourrait être que le début d’un processus mettant
fin à la souveraineté culturelle portugaise, une mort annoncée de son indépendance et de son
originalité au nom d’une politique culturelle menée en faveur d’une "littérature" de best-sellers, d’une
"peinture" et "sculpture" décorative, d’un "théâtre" de boulevard, d’une musique de super-marché,
le retour enfin au cauchemar d’une sous-culture rétrograde, obéissant aux caprices du marché et
aux intérêts des messieurs qui croient le diriger.

Lisbonne, le 26 Mars 2004

A.P.R. Associação Portuguesa de Realizadores.

L’ A.P.R., la plus importante association de réalisateurs au Portugal, réunit 56 réalisateurs de
longs et courts-métrages de fiction, documentaire et animation :

Sandro Aguilar, Manuel João Aguas, Luis Alvarães, Catarina Alves Costa, Luis Alves de Matos, Nuno
Amorim, Jorge António, Leonor Areal, Rita Azevedo Gomes, Carlos Braga, Daniel Blaufuks, Margarida
Cardoso, José Pedro Cavalheiro, João Botelho, João Canijo, José Filipe Costa, Pedro Caldas,
Eduardo Condorcet, Pedro Costa, António Escudeiro, Edgar Feldman, Luciana Fina, Luis Fonseca, Raquel
Freire, Teresa Garcia, João Mário Grilo, Margarida Gil, Miguel Gomes, Pierre-Marie Goulet, Regina
Guimarães, António Loja Neves, Fernando Lopes, Fernando Matos Silva, João Matos Silva, Inês de
Medeiros, Madalena Miranda, José Álvaro Morais, Catarina Mourão, Manuel Mozos, José Nascimento, Solveig
Nordlund, Joaquim Pinto, João Ribeiro, Paulo Rocha, João Pedro Rodrigues, Monique Rutler,
Saguenail, Renata Sancho, Alberto Seixas Santos, Pedro Sena Nunes, Jorge Silva Melo, Serge Tréfaut,
Fernando Vendrell, Francisco Villa-Lobos, Teresa Villaverde, Jeanne Waltz.

ce sont déjà associés à ce manifeste les personnalités suivantes (4.04.2004)

Rui Zink, écrivain, Lisbonne, Portugal
Carlos Zingaro, musicien, compositeur
Manuel da Costa Cabral, Directeur du Service des Beaux-Arts de la Fondation Gulbenkian, Portugal
Luís Castro, Acteur, Metteur en Scène, Portugal
Maria Luísa Garcia Fernandes, Museologue, Porto, Portugal
António Roma Torres - critique de cinema, Porto, Portugal
Daniel del Negro - cinéaste, Portugal
Fernando Barbosa, Industriel, Porto, Portugal
Ilda Castro, cinéaste, Portugal
Octávio Espirito Santo, directeur de la photographie
Isabel Aboim, cinéaste, Lisbonne, Portugal
Filipe Carneiro. architecte, Portugal
Inês Barbosa, étudiante, Porto
Eurico Ferreira, producteur de film, Portugal
Ivo Ferreira, cinéaste, Lisbonne, Portugal
Manuela Penafria, Universitaire, Covilha, Portugal
Anabela Moutinho, Ciné Club de Faro, Portugal
Paulo Martins - Operateur TV,Portugal
Cláudia Tomaz - réalisatrice, Lisbonne, Portugal
André Godinho - cinéaste, Lisbonne, Portugal
Fernando Mateus - Journaliste, Algueirão,Portugal
Nathalie Mansoux, Portugal
Mónica Calle - Directora da Casa Conveniente. Lisbonne, Portugal
Rosa Freitas, Lisbonne, Portugal
Inês Oliveira - Réalisatrice, Portugal
Luís Pereira - Cineclube da Horta, Portugal
Manfredo Caldas - Cinéaste, Brasilia, Brésil
Débora Peters, producteur, Brésil
Marcelo Laffitte, Cineasta, President Nacional de l’ ABD, Rio de Janeiro, , Brésil
Geraldo Veloso, Diretor Associação Mineira de Cineastas, Coordenador Geral do 6o. Festival
Internacional de Curtas de Belo Horizonte, Coordenador de Produção do Programa de Televisão, "Cine
Magazine", Produtor e Diretor de Cinema e Televisão, , Brésil
Bernardo Vorobow, programmateur de cinéma, São Paulo, Brésil
Carlos Adriano, réalisateur, São Paulo, Brésil
Rosângela Rocha, Brésil
Carlos Manta associado à ACCV - Associação Cearense de Cinema e Vídeo
João Batista de Andrade - Cineasta Pirenópolis-GO, Brésil
Associação Mineira de Cineastas, Brésil
ABD/SE - Associação Brasileira de Documentaristas/Sergipe, Brésil
Associação Brasileira de Documentaristas e Curtas-Metragistas, Brésil
Associação Baiana de Cinema e Vídeo - ABCV, BAHIA, Brésil
Gerald Collas, Producteur, Paris, France
Ginette Lavigne, Réalisatrice, Paris, France
Richard Dumas, photographe, Rennes, France
Jean-Louis Comolli, cinéaste, Paris, France.
Gisèle Breteau Skira, rédactrice en chef de Zeuxis Magazine, Paris, France
Nicolas Schmerkin, Directeur du magazine Repérages, réalisateur, producteur, programmateur, France
Jean-Claude Bonfanti directeur artistique Bruxelles Belgique
Marie-Claude Loiselle, rédactrice en chef, revue 24 images, Montréal, Québec.
Annik Leroy, Réalisatrice, Bruxelles, Belgique
Elizabeth Riollet ( enseignante cinéma ), France
Claire Simon, Cinéaste. Paris France
Jean-Loup Baly, conteur-musicien, France
Danielle Jaeggi, cinéaste, Paris.
Gérard Grugeau, Critique de cinéma, Montréal, Québec
Fanny Guiard, documentariste.France
Erika Bauer -Cineasta/Brasilia, Brésil
Jacques Kermabon, journaliste, rédacteur en chef de Bref, Paris, France
Frédérique Devillez, Cinéaste, Paris, France
Patrice Chagnard, cinéaste, France
Claudine Bories, cinéaste, France
Erik Bullot, cinéaste, Paris, France
Maria Luiza Aboim, Cineasta Documentarista, Rio de Janeiro, Brasil
Ivo Branco, cineasta, São Paulo - Brasil
Olivier Smolders, Cinéaste et Producteur de films, Liège, Belgique