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Rencontre avec Martha Isabel Ruiz Corzo, la femme qui a planté un million d’arbres

Publie le samedi 18 février 2006 par Open-Publishing
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Propos recueillis par Tatyana Artyomova à Saint-Pétersbourg, traduits du russe en anglais par Agatha Haun et de l’anglais en français par Fausto Giudice, tous deux membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique (tlaxcala@tlaxcala.es). Cette traduction est en Copyleft

J’ai fait récemment la connaissance d’une femme étonnante, lors de la septième Conférence annuelle sur le développement global à Saint-Pétersbourg. Étonnante non seulement parce qu’elle sait transformer ses rêves en réalité - et d’ailleurs ce ne sont pas des désirs mineurs et modestes mais des rêves réels et ambitieux - mais aussi parce qu’elle est capable d’actions vraiment inattendues.

Elle est capable par exemple de se mettre à chanter à la tribune d’un important meeting, au milieu d’hommes en nœud papillon. Et quels hommes ! Il y a peu les tambours, sinon les fanfares, résonnaient quand leurs noms étaient annoncés : ex-présidents, ex-Premiers ministres, ex-conseillers présidentiels. Dans l’énorme hall de l’Hôtel Pribaltiiskaya, en pleine session plénière, elle l’a fait ! Elle s’est juste levée et elle s’est mise à chanter.
Ses rêves se mesurent en milliers d’hectares, situés dans la réserve de la Sierra Gorda, qui est née grâce à ses efforts au centre du Mexique. C’est là que, près de sa nouvelle maison récemment acquise, Martha Isabel Ruiz Corzo, avec ses amis, ses enfants, les amis de ses enfants et divers autres adultes, a planté un million d’arbres !

[NDT : Martha Isabel Ruiz Corzo, plus connue sous le nom de Pati Ruiz, dirige le Groupe écologique Sierra Gorda, fondé en 1987 qui est engagé dans la défense de la Réserve de Biosphère de Sierra Gorda, créée en 1977 par le gouvernement mexicain sur 383 000 hectares, dont elle est devenue la directrice, à la tête d’une équipe de 47 personnes. 20 000 habitants de la zone sont engagés activement dans la conservation de la réserve.

Contact : Martha Isabel (Pati) Ruíz Corzo , Grupo Ecológico Sierra Gorda , Arroyo Seco # 306 , Col. Estrella , C.P. 76030 , Querétaro, Qro , Mexico , Tel/Fax (4) 2 12 47 77. Courriel > gesgiap@prodigy.net.mx.

Visitez le site web
http://www.sierragordamexico.org (en anglais et en espagnol).
On peut acheter des terres dans la réserve pour contribuer au financement de son entretien, pour une moyenne de 250 $ l’hectare.
Voir à ce sujet
http://www.changemakers.net/studio/00january/land.cfm

Pour avoir des renseignements sur les possibilités d’écotourisme dans cette magnifique région, écrire à
ecotours@sierragordamexico.org]

 Vous avez eu une carrière étonnante : vous avez commencé comme enseignante de musique et vous voilà directrice d’une réserve de biosphère. C’est une combinaison assez inattendue. Est-ce que vous reçu une formation à la fois de biologiste et de musicienne ?
 De par ma formation, je suis enseignante de musique. Mais tout cela, c’est de la beauté, à la fois la musique et la terre. Je me suis simplement déplacée d’une sphère de beauté vers une autre. Et quand je travaille avec la nature, je sais qu’il s’agit d’amour et de beauté.

 Je sais qu’à une époque de votre vie, vous avez décidé de quitter la ville, de vous installer dans un milieu naturel, dans les montagnes. Pourquoi cela ?
 J’ai grandi dans une ville nommée Querétaro, où j’ai appris la musique et suis devenue enseignante. Mais à l’âge de 30 ans, j’ai décidé que j’en avais assez, que je ne me faisais plus d’illusions sur c mode de vie. Et donc mon mari et moi avons décidé de prendre nos enfants et d’aller vivre dans les montagnes pour apprendre à aimer la vie simple...

 Sans doute chacun rêve-t-il de choses similaires, mais la plupart pensent qu’il est impossible de faire de ce rêve une réalité... Est-ce que vos enfants étaient déjà grands ?
 Ils avaient sept et neuf ans. Ils ont donc arrêté d’aller à l’école. Chaque jours ils étaient avec nous au lieu d’être à l’école. Ils avaient des devoirs à faire à la maison. La culture de l’autoéducation, de connaissance de la nature : : c’est ce que nous avons commencé à étudier. Et la culture de la vie simple.

 Est-ce que vous êtes venus immédiatement ici, là où la réserve se trouve maintenant ?
 Oui. Et nous commencé à nous dire que si nous pouvions réussir à être autosuffisants chez nous, sans dépendre de personne, pourquoi ne pas l’enseigner à d’autres ? Mon mari est originaire de cette région et il y connaît tout le monde. Et quand nous avons commencé ce travail, nous avions déjà des racines définies. Tout d’abord, il y avait des relations familiales. Je suis entrée si facilement dans ce mode de vie parce que j’ai commencé à m’habiller comme eux, à me coiffer comme les gens de la région. Puis, nous avons essayé de faire travailler les gens ensemble.

 Quand vous êtes arrivés, est-ce que Sierra Gorda était simplement une petite ville, un beau coin de campagne et c’est tout ? Ou bien était-ce une réserve dès le début ?
 C’est un territoire vaste. Et ce n’était pas une réserve. On y menait une vie naturelle, quotidienne : on y coupait des arbres dans la forêt, on chassait, on jetait des déchets. Il nous fallait agir. Nous avons commencé à éduquer les gens. Nous avons commencé à planter des arbres. C’est mon mari et moi qui le faisions. Et nous n’avions pas le sou. Nous devions racler les fonds de nos poches. Mais nous avions la bonne volonté ! Aussi bien nous que nos voisins.

 Est-ce que ls enfants vous ont toujours aidés ?
 Les enfants sont tojours avec nous à Sierra Gorda, bien qu’ils aient 29 et 31 ans. lLaîné est une partie de mon esprit, il est ma mémoire. Il a une excellente mémoire pour tout. Il connaît tout : les insectes, les animaux, les arbres. Tout !

 Mais est-ce que vous avez reçu une formation en biologie ? Ou avez-vous simplement appris sur le tas, dans les montagnes et les bois ?
 Je suis tout simplement en amour avec la nature. Et tout ce que sais de la nature, c’est ce que je vois, ce que j’entends, ce que je sens avec mon nez, ce que je goûte. Et ce que je sens dans mon coeur.

 Vous avez donc commencé à planter des arbres et vos voisins vous ont soutenus. Combien étaient-ils : deux, dix ?
 Il y avait un petit groupe de bénévoles. mais nous nous sommes mis à tourner dans les écoles, à colelcter des fonds, afin de planter des arbres et de construire des clôtures, car chaque arbre devait être protégé. Puis nous avons commencé à travailler avec les autorités et à répandre nos idées plus largement.

 Combien d’années vous a-t-il fallu pour les “répandre” ?
 Il a fallu beaucoup de temps pour s’engager dans ce travail, avant que les gens commencent à trier leurs déchets, avant que les enseignants réalisent qu’il était nécessaire d’enseigner tout cela aux enfants. Tout a été progressif, à petits pas. Nous avons vu le résultat. Et cela nous a donné un bon sentiment. c’était donc progressif, un travail lent. il était important que nous puissions donner les bonnes réponses aux questions qui étaient soulevées.

 Et d’où venaient-elles ? Comment une personne de la ville fait-elle pour acquérir ces connaissances ?
 C’est juste du sens commun. C’est si simple : nettoyer la zone, recycler les déchets, planter des arbres.

 Est-ce qu’un tel déplacement de la ville vers les montagnes est coutumier au Mexique ?
 Absolument pas. Tout le monde pensait que j’étais folle !

 Et est-ce que vos relations urbaines et vos amis le pensent toujours ?
 Non, ce n’est plus le cas. Quand je suis partie dans les montagnes, même mes parents ne me parlaient plus ! Ils pensaient que j’avais tout simplement déjanté et ils étaient vraiment bouleversés. Car en ville, vous avez déjà tout prêt à l’emploi, alors que là-bas, c’était une “commucopie”. Mais nous pensons qu’il est nécessaire de vivre une vie intérieure...

 Est-ce que Sierra Gorda a beaucoup changé de votre fait, depuis l’époque où vous y êtes arrivée ?
 je ne suis pas seule. Nous sommes nombreux. Je pense que nous avons la providence avec nous. Et les forces de la nature sont à nos côtés. Il y a vraiment une grande différence entre ce que nous voyions quand nous avons commencé notre travail et l’état actuel.

 Pouvez-me donner des exemples ?
 Oui. prenons par exemple les écoles. Au début, nous parlions du danger de la pollution pour les sources d’eau. Et maintenant, nous célébrons le 14ème festival dédié à la mère Terre. Il y a des festivals dédiés à la nature, à la terre, à l’eau, à tout ce qui est en nous. Maintenant, il y a tellement de partcipants à ces festivals : enseignants, élèves, parents. Ils apportent leurs propres cotributions, ils composent des poèmes, des chansons dédiés à la terre.

 Est-ce que c faistival aun nom ?
 Non. C’es le festival de la terre. Et c’est ce qui fait la différence. Ça a commencé par une conversation sur ce que nous utilisons, sur les ressources naturelles. Et maintenant, nous parlons de la Mère Terre. C’est le principal changement.

 Qu’en est-il des changements visibles à l’oeil nu ?
 Je pourrais vous montrer une photo prise par satellite. On voit de manière évidente comment les forêts ont été restaurées ici. Et maintenant, nous avons de nouveau des daims ici. Il y a plein de vie ici ! Plus persone ne chasse. Plus personne n’abat d’arbres illégalement.

 Et quelle est l’attitude des gens face à cela ?
 La chasse et l’abattage des arbres étaient déjà interdits auparavant. La différence c’est qu’avant, les lois étaient violées et que maintenant, elles ne le sont plus.

 Ça a l’air absolument fantastique. On se croirait au royaume des rêves impossibles...
 Au Mexique, vous pouvez voir la différence à l’oeil nu. Le Mexique est un pays pollué. Si vous venez chez nous, vous pouvez voir que tout est propre. Sierra Gorda est une île verte. Une île pour laquelle nous somems engagés à fond, de tout notre coeur, et c’est notre énergie qui a créé ce nouveau monde.

 Martha, aujourd’hui en Amérique latine, en Europe, en Scandinavie, des femmes deviennent des dirigeantes gouvernementales. Qu’en pensez-vous ?
 Je pense que c’est une bonne chose pour le monde. Les hommes ont en quelque sorte tourné le monde dans leur direction. Et en l’occurrence, on dirait que le monde se tient sur une seule jambe, non ? Nous aimons rire, nous savons comment aimer, nous aimons travailler ! Et de plus, nous essayons toujours de tout connecter, de coudre les choses ensemble, de nous rassembler, au lieu de détruire ! Les hommes quittent en permanece Sierra Gorda pour aller aux USA et les femmes doivent se battre toute seules. Et c’est très intéressant d’observer comment ça se passe, parce qu’elles...y arrivent ! D’ailleurs, les femmes sont en train de changer leur mode de vie, elles arrêtent de se dédier coprs et âme aux tâches ménagères. Elles ne passent plus six heures à faire des tortillas, Elles vont simplement au magasin pour les acheter toutes prêtes. Elles n’ont peut-être pas le même goût, mais par ailleurs...

 Mais pensez-vous qu’un homme constitué seulement de femmes serait meilleur ?
 Non, je pense que les hommes sont merveilleux. Pour nous, ce serait dur sans eux.

 Je suis entièrement d’accord.
 Une telle attitude utilitaire à l’égard de la terre a aussi à voir avec le sexe, de fait...

 Vous avez commencé à chanter durant la présentation de votre intervention à la conférence. Quelle sorte de chant était-ce ?
 Nous avons baucoup de belles chansons.

 Nous aussi. nous aimons aussi beauoup chanter.
 C’est pourquooi j’aime tellement votre pays...Mes idéaux musicaux vienent tous d’ici, de Russie.

 Ça fait palasir à entendre. Nous aussi, nous aimons notre pays, sa musique, ses chansons.
 Nous avions une collection de musique russe quand nous vivions dans les bois avec les enfants.

 Qu’est-ce qu vous chantiez ?
 Non, c’était des pièces musicales pour flûte...Et pour moi, c’était une grande joie d’être ici. La Russie a toujours été un mystère pour moi. Quelque chose de mythique...

 Mais vous pouvez la voir de près maintenant. Après tout, un temps froid comme celui-ci aiguise le regard, comme l’alcali.
 Il fait froid, mais ça ne fait rien. Même s’il fait froid, j’ai décidé de voir le pays. Et c’est ce que je fais.

Voici ce que Martha chantait à la tribune. sans accompagnement, à voix basse :

Prière sans fin
Pour la lente agonie de la mer

Prie avec moi pour ces terres assoiffées
Prie sous le soleil
Pour les animaux qui s’éteignent
Chante avec moi
Pour calmer Caïn

En dette et en amour
Nous avons tous une mission
Rendre la santé
À cette vieille planète bleue.

Messages

  • bonsoir honorable madame,
    c’est un plaisir de vous répondre et comment ne pas le faire c’est un privilege de le faire ,vous etes parmie les uniques ,ce que vous venez de réaliser avec vos collaboratrices et collaborateurs est un privilege pour notre belle terre .
    en temps qu’humain vivant dans ce monde de guerres gratuites ,vous venez de nous donner espoir que les vrais humains existent encors. la tête est pleine de bonnes choses pour m’exprimer sur cette réalisation et je n’en fini pas d’écrire .....
    tout ce que je peut vous dire chere madame c’est un grand grand merci pour notre mere la terre vous etes vraiment tomber au bon moment là ou les humains s’entretuent et se déchirent.
    accepter madame toute ma gratitude en temps qu’humain

    accepter mon amitié et je suis solidaire

    le citoyen algerien brahim