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Formidable G-Monde !

Publie le lundi 28 avril 2003 par Open-Publishing

Chronique obstinée - Stéphane Lhomme, Réseau « Sortir du nucléaire »
Vendredi 25, samedi 26, dimanche 27 avril 2003

Formidable G-Monde !

Le G8, c’est nul : les chefs d’Etat des huit pays les plus puissants du
monde se réunissent pour décider de leurs prochains méfaits. Ce sera à
Evian, début juin. En avant première, la France accueille un « G8
environnement » : les ministres de l’environnement des huit mêmes pays,
rassemblés pour jurer que la planète n’a rien à craindre. Prévu à Angers, ce
mini-sommet a été déplacé à Paris… mais Bachelot et ses vis-à- vis européens
viendront quand même en Anjou pour une promenade en bateau !

En face, on trouve le G-Monde : un regroupement d’associations, syndicats,
partis, citoyens mobilisés pour faire entendre une autre voix. Les militants
locaux ont dépensés depuis des mois des trésors d’imagination et d’énergie
pour mettre au point un programme alléchant de débats, manifestations,
animations.

La commune de Mûrs-Erigné, située à une dizaine de kilomètres au sud d’
Angers, accueille un village de tentes : stands tenus par les organisations,
restaurant bio, buvette, etc…De vastes salles municipales permettent la
tenue des débats.

Le G-Monde commence vendredi après-midi par un débat au cours duquel
plusieurs personnes mettent en avant un « appel à la constitution d’une
Organisation mondiale de l’environnement ». Hélas, il pose d’importants
problèmes sur lesquels nous reviendrons bientôt. Notez néanmoins déjà que
plusieurs des premiers signataires sont des promoteurs de l’atome, ce qui
discrédite complètement la démarche. Je signale ce « petit problème » à la
nombreuse assistance avant de changer de salle pour assister à un formidable
débat sur la question de l’eau : sont mises à jour les pratiques mafieuses
qui permettent à quelques multinationales de voler les citoyens et de
corrompre des politiciens… bien consentants. Suivez bien les actions de l’
Acme (Association pour le contrat mondial de l’eau : www.acme-eau.com ) et
de Jean-Luc Touly qui se démène pour faire connaître la vérité et élaborer
des stratégies de résistance à l’usage des citoyens et des peuples. Action
salutaire et courageuse : le lobby de l’eau n’est pas plus tendre que celui
du nucléaire…

Le soir, nous participons à une réunion antinucléaire organisée en marge du
G-Monde par des groupes libertaires (voir chronique suivante).

Samedi 26 avril, c’est le jour anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl.
J’interviens dans le forum sur l’énergie, qui est suivi par plusieurs
centaines de personnes. Après trois intervenants, dont l’excellent Thierry
Salomon qui démontre la nécessite et la faisabilité de très importantes
économies d’énergie, un ingénieur du CEA développe une position très
favorable au nucléaire. C’est alors mon tour et je commence par rappeler -
personne ne l’a encore fait à ce moment là ! - qu’on est le 26 avril, date
anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl. La salle réagit très
favorablement : il est tellement évident que personne ne « sauvera » la
planète avec des centrales nucléaires !

L’après-midi, à Angers, la manifestation rassemble plusieurs milliers de
personnes dont une bonne part se retrouve dans le cortège du Réseau « Sortir
du nucléaire », très animé et coloré.

A l’arrivée, dans une salle proche, un forum permet aux partis politiques de
s’exprimer. Après les interventions « officielles », la parole est à la
salle et j’interviens immédiatement, tout en délicatesse : le PS et le PC,
qui ont si joliment parlé d’environnement et de mouvement social, se
situent-ils toujours du coté des compagnies de CRS qui répriment depuis
trente ans les manifestations antinucléaires ? La représentante du PC
répond, sous les huées générales, que le nucléaire est « incontournable ».
José Bové enfonce le clou en citant des exemples - les OGM et… le
nucléaire - qui montrent à quel point les gouvernements successifs imposent
leurs vues aux populations. La journée s’achève par un grand concert
gratuit. Les débats reprennent le lendemain avec un excellent atelier sur
les déchets nucléaires, avec notre amie Nadine, de Bure, mais aussi Didier
Anger et Bruno Barillot qui révèlent respectivement des situations
scandaleuses concernant le centre de la Hague et les déchets nucléaires
militaires.

Le G-Monde s’achève par un forum très suivi - le succès de notre allié José
Bové ne fléchit pas - et un appel aux prochaines actions : Evian en juin, le
Larzac en août, etc… Le Réseau « Sortir du nucléaire » y sera et vous donne
rendez-vous dans ses cortèges !

Chronique obstinée - Stéphane Lhomme, Réseau « Sortir du nucléaire »
Jeudi 24 avril 2003

Débat bidon à Bordeaux

Après la séance d’ouverture le 18 mars à Paris, puis les assises de
Strasbourg et Nice, le « débat bidon » sur l’énergie, organisé par le
gouvernement, fait étape ce jeudi à Bordeaux.

Débat bidon parce que la décision de continuer le nucléaire est déjà prise.
Parce que les assises de ce débat se tiennent pendant que la « France d’en
bas » est au travail.

On me rétorquera que tout le monde ne travaille pas et que les chômeurs,
précaires, exclus, voire les SDF peuvent prendre une journée pour participer
au débat de société sur l’énergie.

Hypothèse improbable : quand on est dans la précarité, on a des
préoccupations autrement plus immédiates que d’étudier les scénarios
énergétiques pour les décennies à venir. C’est peut-être dommage, mais c’est
bien compréhensible.

D’ailleurs, la plupart des citoyens ne sont même pas au courant de la tenue
de ces assises. Et, parmi ceux qui en ont entendu parler, bien peut ont
réellement les moyens de s’inscrire : à peine 10% de la population a accès à
Internet. Il y a bien un numéro de téléphone, mais qui le connaît ?

Pourtant, le gouvernement a quand même envisagé l’hypothèse que le peuple,
la « France d’en bas », vienne perturber le cours déjà tout tracé de son
débat bidon.
Alors, à Bordeaux, le lieu du débat a été déplacé : d’abord prévu à la « 
Cité mondiale », en pleine ville, il a été déplacé au Casino : complètement
au nord, hors de la cité, dans un quartier regroupant des administrations,
le palais des congrès, le parc des expositions et, donc, le casino. Non, pas
le magasin, le vrai casino, celui où le groupe Accord vole l’argent des
riches et de certains pauvres.*

Déjà, il faut avoir l’envie - et la possibilité matérielle - de venir dans
ce quartier perdu et sordide. Ensuite, il faut vaincre la barrière
socio-culturelle. Même à la Cité Mondiale, cela aurait été le cas : c’est un
grand centre de congrès où l’on ne croise que des gens « importants »,
attaché-case ou ordinateurs portables en main. Alors vous pensez bien, au
Casino !

L’objectif du gouvernement est donc bel et bien atteint pour ce débat bidon
de Bordeaux : la salle ne comprend quasiment que des représentants d’
entreprises, de collectivités locales, d’administrations. Du beau linge,
trié sur le volet.

Vers midi, le Réseau « Sortir du nucléaire » installe dans la rue ses
bidons, qui symbolisent autant les fûts de déchets nucléaire que le
bidonnage démocratique que constitue ce débat. La « Compagnie Mohein » sort
ses accordéons, violons, guitares et ses mélodies d’inspirations Tsigane, et
anime musicalement notre action de protestation.

Quelque médias arrivent…
ainsi que des élus et des représentants associatifs : bien que n’ayant en
rien aidé à la mobilisation, ils tentent d’en récupérer les bénéfices en se
faisant interviewer. Certains participent d’ailleurs au débat bidon, jouant
ainsi le rôle de caution dont a besoin le gouvernement.

D’ailleurs, la chargée de mission du ministère de l’industrie, responsable
des débats bidon, vient me voir pour proposer au Réseau de venir à l’
intérieur. Le lendemain, elle me téléphonera - mon numéro de portable est
sur les tracts - pour renouveler sa demande : le prochain débat bidon,
organisé le 6 mai à Rennes, traitera en particulier du nucléaire.

Je lui confirme que nous seront présents, mais dans la rue, avec nos
banderoles et nos bidons. Je la « rassure » néanmoins : elle devrait trouver
assez facilement des organisations ou des « personnalités » toutes disposées
à jouer le rôle de caution. Je pourrais d’ailleurs lui donner quelques noms,
mais ils se signaleront bien eux-mêmes…

Notre action se termine. Avec mon collègue André, une fois les bidons rangés
dans le vieil utilitaire qui lui sert de véhicule, nous partons directement
vers Angers pour le G-Monde, contre sommet organisé pour dénoncer le « G8
environnement ». « On the road again, again… »
Stéphane

* Car, avec les machines à sous, il y a des pauvres qui viennent vider leurs
poches dans les Casinos. On leur fait miroiter le jackpot. Ils rêvent... le
groupe Accord encaisse !