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Tunisie, Egypte, Yémen, à ceux qui nous parlent d’incertitudes, voici nos certitudes !

Publie le dimanche 30 janvier 2011 par Open-Publishing
5 commentaires

Si certains nous parlent d’incertitudes quant à la situation, pour notre part, , nous avons des certitudes : le monde est en train de se transformer à grande vitesse, les révolutions, les insurrections s’engagent, les peuples se font entendre et se battent parfois au péril de la vie pour porter très haut l’exigence de la liberté et de la démocratie.

Pour notre part cela fait des années que nous expliquions que ce moment qui commence allait advenir. Ce qui est affligeant c’est que lorsqu’on parle de révolution, certains de nos interlocuteurs, la majorité issus des partis politiques de gauche en particulier, soit écoutent poliment mais sont absolument convaincus que nous sommes des extra-terrestres de la pensée, soit ricanent et passent à un autre sujet de conversation.

On a beau exposer des arguments rationnels, on a la sempiternelle réponse : "Mais non les révolutions, vous y croyez encore vous ?" ou bien "Admettons qu’il y ait des révolutions dans les pays du tiers monde parce qu’il y a trop de misère mais en France cela n’arrivera plus, les gens ne sont pas prêts du tout, ils sont tenus par le système, ils ont tous un crédit et puis ils ne sont pas fous, ils ne prendront jamais le risque de perdre le peu qu’ils ont". Cela est dit comme une évidence...et alors le débat est clos. Ceux qui ont cette certitude sont les mêmes qui ont des incertitudes sur ce que le capitalisme leur réserve et pourtant on peut leur dire que ce n’est pas la lutte pour la révolution qui va leur faire perdre le peu qu’ils ont, mais tout simplement le capitalisme comme cela est arrivé pour des millions de gens dans notre pays, en Europe, voire aux Etats-Unis.

Nous sommes en effet des millions à vivre dans notre quotidien depuis plusieurs années des reculs sociaux, des licenciements, des humiliations, une insécurité de plus en plus forte, des comportements violents, des institutions de plus en plus autoritaires, des systèmes de contrôle insupportables et surtout la pression permanente de l’argent. Nous passons énormément de temps soit à penser à l’argent, soit à en parler : le riche se demande comment il va pouvoir devenir plus riche et le pauvre comment il va pouvoir ne pas devenir plus pauvre.

Les révolutions en cours montrent que rien ne peut résister à la force d’un peuple uni et déterminé. Lorsque les rassemblements sont à l’échelle de toute une nation, ni la police, ni l’armée ne peut rien et les tyrans sont renversés. Pourquoi ce qui était vrai dans l’histoire cesserait à notre époque ? Au contraire notre époque accélère l’histoire car les hommes ont une conscience d’eux-mêmes beaucoup plus élevée qu’auparavant du fait d’une massification gigantesque de l’éducation à l’échelle planétaire et d’un développement du travail salarié que jamais l’humanité n’avait connu.

Il faut aussi dire à nos politiciens qu’ils doivent être un peu plus humbles. Car le problème n’est pas qu’ils soient pour ou contre les révolutions, puisque de toute façon elles vont avoir lieu et pour certaines elles sont en cours. Le problème est qu’ils pensent que leurs idées vont empêcher la révolution. Ils sont comme des enfants devant l’orage qui arrive et qui pensent que si ils imaginent le beau temps, la pluie ne tombera pas. Ce sont des gens qui vivant toujours dans la sécurité du système se pensent protégés ad vitam aeternam, ils ont accumulé un peu d’argent à la banque, parfois même beaucoup, ils ont quelques biens et cela les rassure, ils se pensent à l’abri de ce qui pourrait se produire -au cas où, on ne sait jamais-

Mais l’argent ne vaut que ce que lui accordent ceux qui en acceptent la médiation. Dès lors que le contrat est rompu, l’argent s’évapore et adieu l’illusion que la vie continue comme avant. C’est justement l’époque que nous vivons il y a une rupture de contrat entre les exploiteurs et les exploités et cela à l’échelle mondiale. Par son développement impétueux et ce seulement en quelques décennies la capitalisme a réussi à uniformiser et à unir le monde en un vaste espace d’affrontements entre les possédants et le prolétariat salarié en activité ou pas. Le prodigieux essor du capitalisme a rendu des milliards d’êtres humains dépendant du salariat et les a notamment concentré dans des métropoles gigantesques.

Par le développement de la productivité, le bond des sciences et des techniques, la création de technologies qui relient les hommes comme jamais dans l’histoire de l’humanité, des masses immenses d’êtres humains aspirent désormais à maîtriser leur vie, ils deviennent acteurs de leur destin et s’éduquent à l’aune de la socialisation des rapports de production, d’éducation, d’échanges. Des milliards d’êtres humains font ou vont faire l’expérience que la propriété privée des moyens de production est l’obstacle majeur à leur émancipation. Nous sommes à cette croisée des chemins entre humanisme planétaire ou techno-barbarie. Nous avons vécu la phase ascendante du capitalisme, tout reste possible...

Jean-Paul Legrand
Maire-Adjoint de Creil
élu communiste "Colère et Espoir"
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Messages

  • Tout cela c’est bien beau, mais quand le peuple se trouve face aux chars et aux canons, peut-on parler poliment de rupture de contrat ? La Révolution ce n’est pas qu’une belle fille manifestant sur les épaules de son amoureux, ça c’est au début. On a la théorie, c’est bon et maintenant comment faire quand on fait face aux mitrailleuses ? Beaucoup de sacrifices en vie accompagnent ces révoltes populaires qui ont à affronter tous les pouvoirs du monde ligués contre eux sauf : Cuba , le Vénézuela, la Bolivie, tous ces pays qui ont secoués le joug capitaliste... et la Chine peut-être ?, car les discours de nos maîtres sont inhabituellement mesurés. Quel que soit notre jugement sur ces révolutions que j’espère en marche vers une amélioration spectaculaire des conditions d’existence et de libertés des peuples du Maghreb, il faut arrêter avec ces fadaises bourgeoises du type "révolution de Jasmin" ...

    • Quand je parle de rupture de contrat (je me réfère à ce que dit Marx quand il caractérise la vente de la force de travail au capitaliste : si il n’ y avait pas la liberté pour l’ouvrier de vendre sa force de travail et au capitaliste de l’acheter, si il n’ y avait pas ce contrat, il n’y aurait pas de capitalisme possible. (cf le Capital Tome I -2ème section - Chapitre VI , l’achat et la vente de la force de travail)*

      Lorsque je parle de rupture de contrat c’est donc cette période historique où le salariat prend conscience qu’il peut rompre le contrat avec le capitaliste en s’accaparant les moyens de production, cela signifie que les prolétaires ont décidé de passer à autre chose que le rapport salarié au capitaliste de la vente de leur force de travail. Le capitalisme perdurera tant que les salariés accepteront sa domination. Je parle ici du mouvement général et pas seulement de la Tunisie et de l’Egypte mais aussi de la France...Ce qui ne signifie pas que la bourgeoisie n’utiliserait pas la répression en cas d’insurrection populaire dans l’hexagone mais l’idée est de montrer que la conscience d’appartenance de classe va grandissant et que l’action de millions de gens peut les conduire à décider de ne plus vendre leur force de travail (rupture du contrat) et à s’approprier enfin ce qui leur appartient : les grands moyens de production et d’échanges

      Entièrement d’accord en ce qui concerne l’expression "Révolution de jasmin" cela est une expression fabriquée par les médias.

      Voici le texte de Marx (extrait), évidemment Marx démontre à la suite que si la force de travail est payée au prix du salaire, elle est une marchandise toute particulière car mise en mouvement elle vaut bien plus que le prix (salaire) accordé par le capitaliste, elle crée de la plus value. Mais si il n’ y avait pas eu la révolution bourgeoise afin de libérer le prolétariat des campagnes, il n’ y aurait pas eu les masses ouvrières nécessaires au prodigieux développement de l’industrie. L’affranchissement de ces masses du joug féodal leur a permis de devenir libres de passer un contrat de travail avec les bourgeois devenus libres d’acheter la force de travail du prolétaire ce qui était impossible sous le féodalisme.

      Karl Marx : "La sphère de la circulation des marchandises, où s’accomplissent la vente et l’achat de la force de travail, est en réalité un véritable Eden des droits naturels de l’homme et du citoyen. Ce qui y règne seul, c’est Liberté, Egalité, Propriété et Bentham. Liberté ! car ni l’acheteur ni le vendeur d’une marchandise n’agissent par contrainte ; au contraire ils ne sont déterminés que par leur libre arbitre. Ils passent contrat ensemble en qualité de personnes libres et possédant les mêmes droits. Le contrat est le libre produit dans lequel leurs volontés se donnent une expression juridique commune. Egalité ! car ils n’entrent en rapport l’un avec l’autre qu’à titre de possesseurs de marchandise, et ils échangent équivalent contre équivalent. Propriété ! car chacun ne dispose que de ce qui lui appartient. Bentham ! car pour chacun d’eux il ne s’agit que de lui-même. La seule force qui les mette en présence rapport est celle de leur égoïsme, de leur profit particulier, de leurs intérêts privés. Chacun ne pense qu’à lui, personne ne s’inquiète de l’autre, et c’est précisément pour cela qu’en vertu d’une harmonie préétablie des choses, ou sous les auspices d’une providence tout ingénieuse, travaillant chacun pour soi, chacun chez soi, ils travaillent du même coup à l’utilité générale, à l’intérêt commun."

      Juste une remarque par rapport à votre note : la révolution c’est aussi la fête et heureusement, c’est la joie retrouvée de se désaliéner des dominations, c’est la Liberté,l’exercice de la créativité (cela se passe et s’est passé en Tunisie lors de grands rassemblements avec danse, chants, musque, arts plastiques, etc..., la Révolution permet de devenir conscient des capacités collectives des êtres humains et en ce sens elles ont aussi et surtout leurs moments de bonheur, . Sans cette dimension fondamentale les révolutions peuvent devenir leur contraire et sont dévoyées. Il est cependant évident qu’aucune classe dominante ne se laisse renverser et que les sociétés de classe sont irrémédiablement marquées, imprégnées, fondées sur la violence . Mais rien ne résiste à la force de peuples déterminés et unis : toute l’histoire nous le démontre. Tunisie, Egypte, Yemen, ce sont le début de Révolutions toutes porteuses de l’exigence universelle de démocratie qui va se heurter à la classe dominante dans chacune de ces nations et à l’échelle mondiale : une ère nouvelle s’ouvre car cette exigence rencontre l’incapacité du capitalisme à y répondre.

      Jean-Paul Legrand

    • Entièrement d’accord en ce qui concerne l’expression "Révolution de jasmin" cela est une expression fabriquée par les médias.

      expression reprise par les médias, mais pas inventée par les médias...

      L’invention de l’invention de l’expression par les médias est une invention comme on en croise beaucoup...

      Comme celle de dire que le régime a été renversé en Tunisie par l’armée...

      Alors que c’est d’abord la poussée du mouvement populaire qui l’a fait et a fragmenté politiquement le camp du pouvoir et de l’appareil d’état...

      Sans poussée du mouvement populaire pas d’armée qui renverse Ben Ali.

      Il faut faire attention aux réécritures de l’histoire

      Si demain l’armée egyptienne bascule on va également nous dire que c’est l’armée qui, que , quoi, ....

      Révolution du Jasmin, le mot n’est pas nouveau et avait d’abord été utilisé dans le soulèvement précédent bien avant, et a couru ce coup-ci alors que les médias faisaient encore la sieste.

      Touta ça c’est toujours assez intéressant comment l’irruption de médias dominants fait qu’on finit par penser que c’est eux qui font.

      Maintenant c’est d’abord la révolution en cours du peuple tunisien. Là on ne se trompera pas

    • C’est pire que ça puisque l’expression "révolution du jasmin" a été inventée par ...Ben Ali ! :(

      Je recommande le très bon dossier de "Rouge Midi" sur la situation insurrectionnelle ou "révolution en cours" en Tunisie

      http://www.rougemidi.org/spip.php?article5614

      et cet article
      http://www.rougemidi.org/spip.php?article5618

      LL

  • On a beau exposer des arguments rationnels, on a la sempiternelle réponse : "Mais non les révolutions, vous y croyez encore vous ?" ou bien "Admettons qu’il y ait des révolutions dans les pays du tiers monde parce qu’il y a trop de misère mais en France cela n’arrivera plus, les gens ne sont pas prêts du tout, ils sont tenus par le système, ils ont tous un crédit et puis ils ne sont pas fous, ils ne prendront jamais le risque de perdre le peu qu’ils ont". Cela est dit comme une évidence...et alors le débat est clos. Ceux qui ont cette certitude sont les mêmes qui ont des incertitudes sur ce que le capitalisme leur réserve et pourtant on peut leur dire que ce n’est pas la lutte pour la révolution qui va leur faire perdre le peu qu’ils ont, mais tout simplement le capitalisme comme cela est arrivé pour des millions de gens dans notre pays, en Europe, voire aux Etats-Unis.

    effectivement ces raisonnements fatigués existent puissamment dans la gauche.

    il sont également hautement révélateur du regard porté sur les sociétés des pays qui étaient dans le tiers-monde avant.

    ce regard portent des lunettes du passé aux verres déformants qui sont complètement out de la réalité des sociétés qui se soulèvent dans des pays en "développement".

    Le regard porté est celui condescendant s’imaginant que ce qui ne ressort ni de l’Europe ni des USA ressemble toujours fondamentalement de paysans faméliques poussant des socs de charrue en bois dans un sol poussiéreux.

    Ce regard passe à côtés des gigantesques masses urbaines prolétarisées des "restes du monde", précaires mais souvent éduquées jusqu’à un niveau secondaire à minima, qui peuplent un nombre essentiel d’états anciennement du tiers monde

    ce regard est fondamentalement un regard arriéré local construit sur l’ignorance.

    Seulement les yeux ouverts nous apportent des enseignements bien distincts et utiles pour des sociétés révoltées qui finalement nous ressemblent bien plus que nos ignorants arrogants n’imaginent.

    Ce regard arriéré part également d’un vieil imaginaire qui part du principe que la misère produit de la révolte.

    Ce n’est pas exactement cela, c’est l’articulation entre des phases de poussées des conditions objectives de vie du prolétariat urbain moderne et les chocs, reculs de crise, d’agressions du capitalisme, qui font les épisodes explosifs et non la misère brute.

    Autrement dit ce sont les articulations, la dynamique des évènements qui créent qu’une austérité est insupportable ou pas, et pas son niveau brut.

    la grammaire et la conjugaison des poussées et des reculs, des accumulations et des appauvrissements déterminent une révolte ou un abattement face à des attaques du capital.

    C’est valable aussi bien en Europe que dans les autres régions du monde.

    C’est bien parce que d’énormes accumulations numériques de la classe exploitée urbaine se sont faites que des conditions objectives existent de l’instabilité du capitalisme.

    Ca ne signifie en soi aucun processus déterministe mais change les conditions des batailles, presque partout.