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Les médias se taisent sur le rejet de la plainte déposée par le DNC contre Julian Assange

par Oscar Grenfell

Publie le samedi 3 août 2019 par Oscar Grenfell - Open-Publishing

Mardi dernier, une décision d’une cour fédérale qui rejette une action civile du Comité national démocrate (DNC) contre Julian Assange, « avec préjudice » c’est-à-dire en mettant fin à toute action fondée sur le même argument. Cette décision est une réfutation dévastatrice de la campagne menée par l’élite dirigeante américaine pour détruire le fondateur de WikiLeaks. La théorie du complot « Russiagate » véhiculée par le Parti démocratique, les médias institutionnels et les services secrets durant les trois années précédentes a reçu un coup dur.

La décision, rendue par le juge John Koeltl, du tribunal du district du sud de New York, a rejeté les calomnies selon lesquelles Assange aurait « été en collusion » avec la Russie. Il a confirmé son statut de journaliste et d’éditeur et a rejeté les allégations selon lesquelles la publication par WikiLeaks, en 2016, de courriels du DNC ayant fait l’objet d’une fuite serait « illégale ».

En dépit de l’importance de la décision et de sa valeur médiatique évidente, elle a fait l’objet d’un silence quasi total de la part de l’ensemble des médias aux États-Unis et à l’étranger.

Le silence universel sur la décision de la cour ne peut être décrit que comme une conspiration politique coordonnée. Tous les médias ont occulté cette information, du New York Times (qui a enterré un article de six paragraphes sur la décision en page 25) et du Washington Post, aux médias « alternatifs » comme le site Internet Intercept, et jusqu’aux journaux télévisés du soir et aux publications de la pseudo-gauche.

Le but de cette conspiration est de supprimer toute discussion sur l’exposition par la cour des calomnies utilisées pour diffamer et isoler Assange. Ainsi, ils peuvent continuer les poursuites internationales sans précédent dont il fait l’objet en raison de l’exposition par WikiLeaks des crimes de guerre, des opérations de surveillance et des complots diplomatiques américains.

Le New York Times, le Washington Post et d’autres organes d’information bourgeois ont impitoyablement sali Assange comme un « agent russe ». Ils l’ont décrit comme le pivot d’une conspiration inventée à Moscou pour priver Hillary Clinton, candidate du Parti démocrate, de la présidence aux élections américaines de 2016.

Maintenant que leurs affirmations ont été évaluées par un juge, qui a montré qu’elles ne sont qu’un tissu de mensonges, ils ont adopté le silence radio. Il ne fait aucun doute que si la décision du tribunal avait été en faveur de la DNC, les médias l’auraient accueillie en la criant sur les toits.

Leur réaction montre que ces publications font de la propagande d’État et participent activement à la campagne du Parti démocrate, de l’Administration Trump et de toute l’élite dirigeante pour condamner Assange pour le reste de sa vie à une prison américaine pour le « crime » de publier la vérité.

Les rédacteurs en chef et les journalistes du premier plan de ces médias, comme James Bennett, rédacteur en chef de la page éditoriale du New York Times, sont en contact constant avec la CIA et les autres agences de renseignement. Dans les coulisses, ils élaborent une ligne éditoriale qui fera avancer les intérêts des banques de Wall Street et de l’appareil de renseignement militaire. En même temps, ils décident quelles nouvelles et informations ils cacheront à la population américaine et mondiale.

Les efforts déployés par les principaux organes d’information pour enterrer la décision constituent un exemple clair du genre de manipulation des médias qui a conduit des millions de personnes à chercher d’autres sources d’information sur Internet, dont WikiLeaks est un exemple.

La décision du juge Koeltl a mis en évidence la logique antidémocratique et dictatoriale des poursuites du DNC contre Assange. Koeltl a prévenu : « Si WikiLeaks pouvait être tenu responsable de la publication de documents concernant les stratégies politiques, financières et d’engagement des électeurs du DNC simplement parce que le DNC les qualifie de "secrets" et de secrets commerciaux, alors tout journal ou autre média pourrait être mis en cause ainsi ». Cela, a-t-il déclaré, « annulerait la protection du Premier Amendement » à la liberté de la presse prévue par la Constitution américaine.

La conclusion de Koeltl était une justification absolue des publications d’Assange et de WikiLeaks en 2016. Ces documents exposent les tentatives du DNC de truquer les primaires du Parti démocrate contre Bernie Sanders, qui se définit comme « socialiste démocrate », et en faveur de Hillary Clinton.

Le juge a estimé que ces publications, ainsi que la publication des discours secrets de Clinton devant les banques de Wall Street – lors desquels elle s’engageait à être leur représentante achetée et payée – étaient « des questions du plus haut intérêt pour le public ». Ils ont « permis à l’électorat américain de regarder derrière les rideaux de l’un des deux principaux partis politiques des États-Unis pendant une élection présidentielle ».

De plus, Koeltl a conclu qu’il n’existait aucune preuve pour justifier l’affirmation du DNC selon laquelle WikiLeaks s’était entendu avec l’État russe pour obtenir les documents. Assange et WikiLeaks ont toujours soutenu que le régime Poutine ne leur avait pas fourni les documents.

Le jugement a démontré l’illégalité flagrante de la vendetta américaine contre Assange. La calomnie selon laquelle il agirait comme « agent russe » pour « interférer » dans la politique américaine a été utilisée par le gouvernement américain et ses agences de renseignement pour faire pression sur le régime équatorien afin qu’il coupe l’accès Internet d’Assange en 2016, et de nouveau en 2018. Il a servi de prétexte central à la fin illégale en avril de son asile politique dans le bâtiment de l’ambassade.

Ce jugement montre également de manière implicite l’illégalité des tentatives de l’Administration Trump, avec le soutien total des Démocrates, d’extrader Assange de Grande-Bretagne. Son arrivé sur le sol américain permettrait qu’il soit poursuivi pour 18 chefs d’accusation américains, dont 17 d’espionnage, avec une peine maximale de 175 ans d’emprisonnement.

Le gouvernement Trump et le ministère de la justice prétendent qu’il était illégal pour WikiLeaks et Assange de publier des journaux de guerre de l’armée américaine en Irak et en Afghanistan, des centaines de milliers de communications diplomatiques et autres documents dévoilant les crimes de guerre et intrigues américains, fournis par Chelsea Manning, la courageuse lanceuse d’alerte.

La décision de Koeltl, cependant, a réaffirmé le principe démocratique fondamental selon lequel WikiLeaks avait le droit de publier les documents de la DNC de 2016, même dans l’hypothèse où ils auraient été obtenus illégalement par le gouvernement russe, ou toute autre entité.

L’implication limpide est que même si la décision de Manning de divulguer des documents militaires et diplomatiques américains était une violation de la loi, la publication par WikiLeaks de ces documents ne l’était pas. La publication des fuites de 2010 et de 2016 était une activité journalistique protégée par la Constitution.

En outre, Koeltl a sapé les affirmations de l’Administration Trump, des Démocrates et des médias selon lesquelles Assange serait un « hacker » qui ne mérite pas les protections du Premier Amendement. Le juge a qualifié à plusieurs reprises Assange de « journaliste » et WikiLeaks d’« éditeur ».

En d’autres termes, la tentative d’extrader Assange vers les États-Unis et de le poursuivre en justice constitue une attaque frontale contre la Constitution américaine et la liberté de la presse. Au mépris du droit national et international, cette tentative ne peut se caractériser que comme une opération de transfert extrajudiciaire (extraordinary rendition), similaire aux enlèvements et aux opérations de torture menées depuis des décennies par la CIA.

La réaction hostile à la décision de Koeltl de la part de l’ensemble de l’establishment politique et médiatique, aux États-Unis et sur la scène internationale, démontre que cette conspiration ne sera pas vaincue par des appels plaintifs aux gouvernements, aux partis politiques et aux entreprises de médias qui ont mené l’attaque contre les droits d’Assange.

Tous se servent de la persécution d’Assange comme d’un test pour imposer des mesures de plus en plus autoritaires. Ils visent à réprimer l’hostilité croissante de la population envers la guerre, les inégalités sociales et les atteintes aux droits démocratiques.

Il faut le développement d’un mouvement de masse par le bas, pour mobiliser l’immense pouvoir social et politique de la classe ouvrière au niveau international. C’est ainsi, que l’on peut garantir la liberté d’Assange et défendre tous les droits démocratiques.

Pour faire avancer cette lutte critique, le WSWS et le Comité international de la Quatrième Internationale ont appelé le mois dernier à la formation d’un Comité mondial de défense pour libérer Assange et la courageuse dénonciatrice Chelsea Manning. Tous les travailleurs, les jeunes et les partisans des droits démocratiques devraient contacter le WSWS dès aujourd’hui pour reprendre la lutte pour libérer Assange et Manning !

https://www.wsws.org/fr/articles/2019/08/03/pers-a03.html