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Automne 1970 – Mourir de Mai – Ou de la responsabilité politique criminelle des leaders « maos-spontex » post-68

par Lepotier

Publie le samedi 4 janvier 2020 par Lepotier - Open-Publishing
6 commentaires

Après Mai 68, la déchéance de la gauche française a pris rapidement un tour décisif avec l’abandon de l’idée de lutte de classe prolétarienne pour une prétendue lutte éclatée en différents objectifs « sociétaux » dont l’écologie est devenu l’exemple emblématique.

Au regard du renversement du rapport de forces dans la lutte de classe que cela a entraîné durablement, la responsabilité des dirigeants politiques pseudos- « révolutionnaires » de cette époque est écrasante. En diluant complètement les fondamentaux du marxisme-léninisme dans les principes « anti-autoritaires » qu’ils ont voulu formellement généraliser dans leur « nouveau » discours idéologique, et dans les dérives de leurs pratiques, ils ont en réalité entièrement restauré l’idéologie libérale bourgeoise qui avait connu une sérieuse brèche dans l’épreuve des lutte prolétariennes de Mai et Juin 1968.

Fragments d’un débat en 2019, initié sur un site d’inspiration anarcho-situationniste, mais qui n’a pas renoncé à l’expression de la révolte prolétarienne, contrairement notamment au groupe pseudo « M-L » à l’origine du journal « Tout ! », révélateur de cette dérive « libertaire-libérale », en réalité réactionnaire dans ses conséquences politiques essentielles.

Lepotier

PS>>>Les divers docs jointes en annexe permettent de compléter l’histoire en faisant les recoupements qui s’imposent par rapport aux "imprécisions" de Sportès et McGrogan.

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Fragments du débat et docs annexes >>>

__En réponse à « Dominique », un écolo « anti-productiviste »

__Par un internaute anonyme >>>

__« Dominique, En mai 68 on s’en foutait un peu de l’écologie, on voulait une révolution totale.

Après la défaite de la révolution totale, la contestation de mai 68 s’est décomposée. L’écologie est une particule elle-même en décomposition qui s’est détachée de la décomposition de cette contestation. Le féminisme en est une autre. Etc.

Ce sont les petits bourgeois friqués qui s’occupent d’écologie en se foutant totalement des salaires.

Les prolos, eux, ils s’en foutent pas du tout, des salaires !

Je préfère vivre sur une planète sale, en liberté et sans exploitation. Que sur une planète propre, mais avec l’exploitation de l’homme par l’homme et tous les interdits qui vont avec.

On s’occupera de l’écologie surtout après la fin de l’exploitation. Avant, c’est secondaire !

Et tant pis si l’être humain disparait de la Terre avant qu’on ait supprimé l’exploitation. Si tel est le cas, c’est peut-être qu’il ne méritait pas d’exister.
Le combat contre l’exploitation de l’homme par l’homme est infiniment plus important que le combat écologique.

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__Une 1ère réponse par Lucien L. >>>

__ « Bonjour à tous,

…à propos de décomposition de l’extrême-gauche en France après 68, je ne peux également que confirmer >>>

« Après la défaite de la révolution totale, la contestation de mai 68 s’est décomposée. L’écologie est une particule elle-même en décomposition qui s’est détachée de la décomposition de cette contestation. Le féminisme en est une autre. Etc.

Ce sont les petits bourgeois friqués qui s’occupent d’écologie en se foutant totalement des salaires. »

En fait, l’un des creusets, sinon le principal, de cette réelle décomposition fut le groupe VLR de l’époque >>>

https://fr.wikipedia.org/wiki/Vive_la_révolution

Et ce n’était pas un groupe issu seulement de la petite-bourgeoisie, mais aussi et surtout, de la grande… !

Perso, je fut membre de VLR sous sa forme primitive VLC, en fait, via les liens existants entre ce groupe à Nanterre et quelques réseaux ouvriers dans la banlieue environnante.

Élève dans un bahut « technique », puis ouvrier non par vocation « militante » mais par nécessité, j’ai donc bien souvenir de cette très rapide « décomposition ».

La « révolution » était pour ces enfants de bourges un moyen de se défouler, de « jeter leur gourme » selon une expression aujourd’hui désuète, mais bien adaptée, en tant que maladie juvénile chez ces poulains de la bourgeoisie…
Effectivement ils ne se souciaient pas vraiment du sort du prolétariat, dès qu’il cessait d’être une masse de manœuvres potentielles pour leurs jeux politiques avortés… !

Le seul ouvrier (dans l’industrie aéronautique) et authentique prolétaire, c’est à dire non pas un fils de bourge « établi » « pour la cause », qui y militait depuis l’origine du groupe, a alors choisi de se suicider, et tous ces gens l’ont laissé faire en parfaite connaissance de cause…

Dans l’esprit de l’époque, cela semble avoir été vu comme une forme « naturelle » d’expression de l’ « existentialisme » ambiant derrière le pseudo « marxisme » de cette sinistre camarilla, qui nous a également légué l’inénarrable et abjecte Stéphane Courtois, initiateur du « Livre noir du communisme » !

Et donc, OUI, faire passer l’écologie avant les rapports économiques et sociaux est bien une vaste fumisterie, une vaste connerie !

Et même criminelle, si consciente. Ce qui est mortifère, pour l’espèce humaine, et aussi pour son interaction avec le reste de la nature, dont elle n’est évidemment qu’une des formes, ce sont bien les rapports sociaux capitalistes.
Si elle n’est pas capable de s’en affranchir, elle n’est pas non plus capable de trouver son équilibre écologique avec le reste de la nature, et elle disparaîtra donc, inexorablement, comme tant d’autres espèces avant-elle, tout simplement.

La différence avec les espèces plus anciennes résidant évidemment dans la conscience.

« Existentiellement » la conscience collective actuelle de l’humanité semble donc être effectivement tout à fait suicidaire.

Idéologiquement, c’est ce schéma suicidaire qui est également véhiculé par les écologistes qui prétendent « sauver la planète » sans remettre en cause, d’abord et avant tout, les rapports sociaux capitalistes !

Il y a certainement un chemin qui va de la révolution prolétarienne à un équilibre économique et écologique incluant donc, nécessairement et par définition, l’humanité.

Il n’y en a aucun qui aille d’un discours prioritairement et prétendument « écologique » à une révolution sociale réelle. Ce discours, actuellement, crée des « zones vertes » pour les riches et relègue les pauvres dans leurs poubelles. Et il en sera ainsi jusqu’à ce que les « zones vertes » des riches soient elles-mêmes submergées par les poubelles, à moins que la masse des pauvres n’ait été anéantie, atomisée ou autrement, avec ses zones poubelles, ce qui ne fait pas un résultat très différent. Sauf pour les riches, évidemment, et encore… !

L. L.

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__Une réponse complémentaire par Lucien L. >>>

Correctif et précisions >>> « Je fus membre de VLR sous sa forme primitive VLC » >>>

https://fr.wikipedia.org/wiki/Vive_le_communisme

Et à propos de la bourgeoisie gauchiste de l’époque post-68 >>>

Larousse >>> « Jeter sa gourme,

en parlant des jeunes chevaux, être affecté de la gourme ; en parlant de jeunes gens, se livrer à leurs premières frasques. »

« Gourme >>> Maladie infectieuse et contagieuse qui affecte principalement les jeunes équidés, caractérisée par une inflammation purulente des voies respiratoires supérieures et des ganglions correspondants. »

Autre approche du sujet >>>

« C’est à partir du milieu du XIVe siècle que le mot désigne une maladie de la bouche ou de la gorge du cheval, affection provoquant, entre autres, la sécrétion d’une morve particulière ayant le même nom (gourme pourrait venir du francique worm qui signifiait « pus »). Il semble que pratiquement tous les poulains soient victimes de cette maladie bénigne, point de passage quasiment obligé. Au XVIe siècle, on disait alors de l’animal qu’il jetait sa gourme, le verbe jeter ayant ici le sens d’ « émettre des sécrétions ».

Parallèlement, mais au figuré, cette fois, jeter sa gourme a pris le sens qu’il a toujours aujourd’hui.

La raison de la naissance de cette métaphore est assez simple : si le poulain passera obligatoirement par la maladie, le jeune humain passera tout aussi inévitablement par un moment où il commettra ses premières frasques, passage considéré ici, comme pour le poulain avec sa morve, comme une maladie de jeunesse incontournable (puisqu’il faut que jeunesse se passe). »

http://www.expressio.fr/expressions/jeter-sa-gourme.php

Concernant la formation de VLC à partir de l’éclatement de l’UJC(m-l), et sa mutation rapide en VLR et sa dégénérescence-auto-dissolution en « Tout ! » je viens de trouver ce doc étonnant, une thèse britannique d’un certain Magnus McGrogan, et récente, 2010…

McGrogan- Thesis- DE VLC A VLR ET TOUT

https://nousnesommesriensoyonstout.files.wordpress.com/2020/01/mcgrogan-thesis-de-vlc-a-vlr-et-tout.pdf

…et qui semble donc être aussi la base d’un bouquin du même auteur, encore plus récent, traduit en français en 2018 >>>

https://www.decitre.fr/livres/tout-gauchisme-contre-culture-et-presse-alternative-dans-l-apres-mai-68-9782373090383.html#resume

« Après sa thèse de doctorat sur Tout ! et la presse alternative en France après 1968, Manus McGrogan est devenu historien indépendant, spécialiste des mouvements radicaux des années 1960 et 1970. »

https://www.lechappee.org/auteurs/manus-mc-grogan

Promu chez les anars ??? >>>

https://www.infolibertaire.net/presentation-du-livre-tout-de-manus-mcgrogan/

http://www.millebabords.org/spip.php?article32118

Etc…

Ce McGrogan a donc réussi une enquête assez exhaustive, et en fait, nécessairement, assez complaisante à l’égard des acteurs de cette époque et de leurs dérives diverses.

Thèse « exhaustive », mais dans certaines limites, en fait, et ce n’est donc guère surprenant, il n’évoque nullement cette histoire particulière du suicide de ce camarade ouvrier, ni d’autres, qui ont néanmoins été une des conséquences de ces dérives et du retournement de tout ce petit monde gauchiste dans le giron douillet de sa classe d’origine.

Ce camarade y est pourtant mentionné, une seule fois, dans une note de bas de page, à propos d’une tentative qu’il avait fait de convertir les trotskystes de LO au ML !

Une autre mention se trouve dans ce bouquin de Morgan Sportès, >>>

https://www.grasset.fr/livres/ils-ont-tue-pierre-overney-9782246712015

…mais qui, là aussi, ignorance ou complaisance, relate ce suicide comme ayant été effectué indépendamment de ses proches, alors que ce n’était pas du tout le cas.

Personnellement, alors à peine sorti de mon adolescence et de mon bahut, j’ai donc été informé de son projet suicidaire par ses proches et intimes dans l’organisation, lui-même étant encore présent et bien en vie.

N’étant pas moi-même de ce cercle intime, et surtout, à peine adulte, et du reste, pas encore au regard des lois de l’époque (la majorité à 18 ans, c’est quatre ans plus tard…), dans le contexte « idéologique » de l’époque, il eut paru tout à fait hors de propos d’intervenir.

Évidemment, aujourd’hui je vois les choses tout à fait autrement, mais la machine à remonter le temps n’existe toujours pas…

La plupart des personnes concernées sont encore de ce monde, et certaines, en très bonnes places… Quoi qu’il en soit, non-assistance à personne en danger, ou autre motivation juridique, il y a prescription.

Le monde continue de tourner, le Capital, de capitaliser, et la bourgeoisie, de traiter les bolcheviques de criminels… !

Des fois que…

Ceci-dit, en Russie, au moins, ce renversement des rôles ne tient plus guère… !

L. L.

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ANNEXES >>>

Extrait d’une « fiction » de Morgan Sportès >>>

https://www.grasset.fr/livres/ils-ont-tue-pierre-overney-9782246712015

Une note N°61 en bas de page 82 de la thèse de McGrogan, qui en compte 301 >>>

« 61 . Vive La Révolution no.7, July 1970, p. 7. VLR, especially those around the BO, considered that LO had achieved some fine, consistent work in the working class (indeed LO had workers as members). The VLR approach was part of several attempts to engage in formal alliances with the revolutionary left beyond the united front of the Secours Rouge or other campaigns. Lutte Ouvrière(no.96, 30 June-6 July 1970, p. 9) covered the VLR intervention, reporting delegates‟ amusement at VLR member Serge Marteau‟s call for the audience to cast off their „dusty Trotskyism‟. Little came of the visit. »

https://researchportal.port.ac.uk/portal/files/5948488/Total_final_thesis.pdf

AUTRES ANNEXES >>>

http://irenelaksine.free.fr/site/mon_histoire.html

« TOUT ! » n°1, en Septembre 1970, soit le tournant décisif vers la décomposition complète et inexorable de la gauche française…

Pour certains, le retour à une vie « normale » de bourgeois intégrés au système d’une manière ou d’une autre, y compris par la pseudo-« contestation » ainsi décomposée, à plus d’un titre, évoquée dans le premier post repris dans ce fragment du débat sur le site actuel. [Essentiellement anarcho-situationniste, mais non sectaire, et réellement ouvert à l’expression de la révolte prolétarienne.]

Pour d’autres, la fin déjà actée d’un monde qui avait failli de naître avec la révolte de Mai 68, et avec cette fin d’un monde, le suicide.

Avec la parution de ce « nouveau journal », en Septembre 1970, c’est en fait l’auto-dissolution de VLR, en tant qu’organisation militante essentiellement tournée vers la classe ouvrière, qui était déjà actée, avec toute ses conséquences, résumées ci-dessus, bien que Wikipédia ne la situe « officiellement » qu’en Avril 1971. Et Roland Castro, en Mai 1971, dans ses divers épanchements « mémoriels » médiatiques, en rapport avec son rendez-vous chez Lacan…

La décomposition du mouvement en fractions à visées « sociétales » diverses, c’était en pratique un renoncement à l’engagement prolétarien dans la lutte des classes, et en fait de « radicalité » un passage radical dans le camp de la bourgeoisie, dont l’essentiel des « cadres » du mouvement VLR était issu. Une pirouette « idéologique » pour signaler à grand bruit ce retour dans le giron du système, et quasiment une appel d’offre pour les suites de carrières de ces ex- « échappés » qui finissaient donc ainsi de jeter leur gourme purulente…

Dans cet « éclatement sociétal », si une branche « ouvrière » du mouvement était prévue, en paroles, elle n’a évidemment jamais réellement vu le jour !

Pourtant, même si Mai 68, qui n’a donc pas encore deux ans, en fait, est déjà presque entré dans l’Histoire, on ne peut pas dire que le reflux de la lutte était tel qu’il justifia, et en aucune manière, une telle stratégie de renoncement.

Eut-ce été le cas, une attitude prolétarienne marxiste-léniniste consistait au contraire à organiser le noyau de la résistance, et non à le dissoudre. A l’automne 1970, l’évolution « militariste » de la Gauche Prolétarienne n’avait pas encore connu les dérives discutables qui ont parfois été les siennes par la suite et ce prétexte ne peut non plus être invoqué, ni même en Mai 1971, comme le fait parfois Roland Castro, sauf à vouloir précisément renouveler son serment d’allégeance au système capitaliste, la seule chose dont on ne saurait douter dans cette pitoyable histoire !

Mais le « marxisme-léninisme » des dirigeants de VLR n’était, de toutes façons, qu’une dégénérescence déjà avancée du maoïsme, lui-même forme déjà ancienne de révisionnisme, même si d’apparence « nouvelle » en France, et dont la critique radicale nécessaire restait encore à faire !

Lucien L.

https://nousnesommesriensoyonstout.wordpress.com/2020/01/02/automne-1970-mourir-de-mai-ou-de-la-responsabilite-politique-criminelle-des-leaders-maos-spontex-post-68/

L’usine Hispano-Suiza à Bois-Colombes, où le camarade Serge Marteau a travaillé jusqu’à sa mort. Ici lors d’une lutte pour le maintien du site, au tournant des années 70, précisément !

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En plein Mai 1968 – Hispano-Suiza (Pas encore SNECMA…) en manif !

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L’usine finalement abandonnée en fin du XXème siècle

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Aujourd’hui l’ancienne usine et devenue une école (L’entrée est aussi celle de l’ancienne soufflerie)
 

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La sortie de l’ancienne soufflerie donne désormais sur des aires de jeux et des espaces verts
 
 
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En fond, la sortie de soufflerie illuminée lors d’un concert dans le parc avoisinant l’école

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Mais pour avancer vers un autre monde, le combat continue !

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