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Voirin Regrette pour avignon, CGT

Publie le mardi 5 août 2003 par Open-Publishing

"Je regrette" l’annulation du Festival d’Avignon
LE MONDE | 04.08.03 | 13h13
Entretien avec Jean Voirin, secrétaire général de la fédération CGT du
spectacle.

Pour la première fois de son histoire, le festival d’Avignon a été annulé.
aujourd’hui, avec un peu de recul, qu’en pensez-vous ?

On était persuadé qu’il y aurait un mouvement revendicatif, comme il y en
avait eu en 1992 et en 1996. Personne ne pouvait juger de son ampleur.
Aujourd’hui, je regrette -cette annulation-, c’est notre outil de travail.
La question reste entière : était-il raisonnable que le gouvernement accepte
le calendrier fixé par le Medef ? Dans le texte signé le 20 décembre 2002,
il était écrit que les négociations devaient s’ouvrir d’ici au 30 juin 2002,
mais aucune date n’était fixée pour la conclusion de l’accord.

J’ai été surpris par l’ampleur du mouvement. Nous avons appelé à des grèves
et à des manifestations. La mobilisation a été bien supérieure à notre
influence électorale et a dépassé nos rangs. Mais la CGT n’a pas demandé
l’arrêt du festival.

Vous avez pourtant dit : "On va tout faire péter"...

Personne n’imaginait que la grève serait reconduite. Les déclarations de
Bartabas, d’Ariane Mnouchkine ont jeté de l’huile sur le feu.

Si le PC avait été très fort aujourd’hui, pensez-vous que le Festival
d’Avignon aurait été annulé ?

S’il avait fait 23 % des voix, j’aurais appelé à la mobilisation dans les
mêmes termes.

A Aix-en-Provence, pourquoi avez-vous laissé des manifestants saboter La
Traviata ?

La grève était votée à une forte majorité, mais la direction du festival
avait modifié les tableaux de services, ce qui empêchait les gens qui
voulaient faire grève de la faire.

Le même soir, on vous a vu à la télévision assister au concert des Rolling
Stones au Stade de France, ce qui a pu choquer...

C’était une maladresse de ma part. J’avais mon billet bien avant le début du
mouvement des intermittents. Je me suis fait manipuler par France 2. Au
cours du concert des Rolling Stones à Bercy, les grévistes ont refusé de
démonter l’installation. Le producteur, après avoir en vain proposé aux
salariés de mieux les payer, les a "lock-outés". On a porté plainte contre
cette pratique.

Au Stade de France, les forces de police avaient usé de violence contre les
intermittents deux jours avant le concert, mais l’équipe avait voté contre
la grève et le spectacle a eu lieu.

On a entendu dire que la CGT était débordée par la CGT spectacle, elle-même
débordée par les coordinations...

Cela prouve qu’on n’a pas, à la CGT, une conception centralisatrice. Si
Bernard Thibault avait dit : "Il faut que la CGT-Spectacle y aille -se
radicalise dans le conflit-", on le lui aurait reproché. Le texte de
l’accord est imbuvable. On l’a expliqué aux salariés, ils sont descendus
dans la rue. De plus, on a assisté à des tripatouillages entre le
gouvernement, le Medef et l’Unedic, si bien que l’avenant du 8 juillet a été
négocié directement par l’Etat.

Vous défendez aujourd’hui l’accord sur le régime des intermittents de 1997,
que vous n’aviez même pas signé. Pourquoi ?

Il consacrait la dégressivité des allocations, et la CGT s’était battue
contre de telles mesures.

Marc Slipper, un des lieutenants de la CGT spectacle, a tenu des propos
homophobes à l’encontre de Jean-Jacques Aillagon. Est-ce que vous les
condamnez ?

Ce sont des dérapages. Jean-Jacques Aillagon est quelqu’un de plutôt
sympathique, avenant, ce n’est pas un salaud d’extrême droite. Il s’est fait
ficeler par le Medef et par François Fillon, qui l’a envoyé au casse-pipes.

L’influence de la CGT tend à se réduire, notamment dans les théâtres
nationaux. Quelle est votre analyse ?

Quand on perd des élections, c’est qu’on a fait des conneries. Il existe,
c’est vrai, un problème générationnel, de renouvellement des militants.

Propos recueillis par Nicole Vulser